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Chapitre II. Le microenvironnement tumoral de la Leucémie Lymphoïde Chronique

II.4. Le microenvironnement de la leucémie lymphoïde chronique

II.4.2. Support de la survie et de la prolifération des LB-LLC

Les cellules mésenchymateuses dérivées du stroma médullaire (CSM) peuvent entrer en contact direct avec les LB-LLC, stimulant l’expression de facteurs de survie et de prolifération tels que ZAP-70 et CD38 (Purroy et al., 2015). Elles permettent l’augmentation, dans les LB-LLC, de la glycolyse et de la synthèse de glutathion, favorisant la survie et la résistance aux traitements (Jitschin et al., 2015). Cet effet des CSM sur les LB-LLC requiert

un contact étroit (un phénomène appelé pseudoempéripolèse) qui a été démontré in vitro. Ainsi, les LB-LLC migrent spontanément et viennent se loger sous la couche de CSM (Burger et al., 1999). Mais le dialogue entre ces cellules est réciproque, les CSM sont activées par les

LB-LLC, par une augmentation de la signalisation PI3K et NF-kB, et par une activation de

leur récepteur au PDGF par le PDGF sécrété par les LB, augmentant la sécrétion de VEGF (Ding et al., 2010; Lutzny et al., 2013). Les exosomes issus des cellules leucémiques contiennent également des protéines et des miRNA induisant un phénotype inflammatoire des CSM et ainsi leur prolifération, migration et sécrétion de cytokines inflammatoires, et pourraient ainsi promouvoir la croissance tumorale (Paggetti et al., 2015).

Les LT de LLC montrent une forte production d’IFN-g, TNF-a et une production

normale d’IL-12, qui pourrait protéger les LB-LLC de l’apoptose (Riches et al., 2013). Les lymphocytes T au contact des LB-CLL délivrent des signaux pro-tumoraux par l’activation de

CD40L, la sécrétion d’IFN-g et d’IL-4 qui augmentent l’expression des protéines

anti-apoptotiques de la famille de Bcl-2 (Os et al., 2013). Ainsi, des LTh1 spécifiques des LB-LLC augmentent leur survie et prolifération.

De façon complémentaire à son rôle dans le chimiotactisme, CXCL12 a démontré sa fonction dans la survie des LB-LLC. En effet, l’activation de CXCR4, un RCPG, par la fixation de CXCL12, entraine une activation des voies de signalisation pro-survie ERK et AKT (Nishio et al., 2005). En parallèle de l’action de CXCL12, deux autres facteurs solubles

ont une importance majeure dans la stimulation de la survie des LB-LLC, BAFF (B-cell

activating factor) et APRIL (A proliferation inducing ligand).

BAFF et APRIL sont des protéines transmembranaires de type II, membres de la famille du TNF. BAFF peut initier ses effets soit sous sa forme liée à la membrane, soit sous sa forme soluble, et l’interaction avec son récepteur BAFF-R, est connue pour promouvoir la survie et/ou la différenciation des lymphocytes B matures. En plus de BAFF et du récepteur

BAFF-R, les LB-LLC expriment également deux autres récepteurs de BAFF, BCMA (B-cell

maturation antigen) et TACI (transmembrane interactor and calcium modulator and cyclophilin ligand interactor), suggérant une action pro-survie autocrine de BAFF dans la LLC. APRIL est majoritairement observé sous forme soluble mais a également été observé lié à la membrane des LB-LLC. APRIL, se fixant sur les récepteurs BCMA et TACI, serait donc également un facteur de survie autocrine dans la LLC (He et al., 2004; Kern et al., 2004; López-Fraga et al., 2001; Mackay and Schneider, 2009; Novak et al., 2002). Au sein du microenvironnement, les NLCs produisent BAFF et APRIL, leur expression étant dépendante

de l’interaction des NLCs avec la MEC (Croci et al., 2013). BAFF et APRIL induisent une

activation de la voie canonique de NF-kB et une expression de la protéine anti-apoptotique

Mcl-1. La signalisation étant différente de celle activée par CXCL12, l’effet induit par ces trois facteurs sur la survie des LB-LLC est additif. Ainsi, l’addition de ces trois facteurs

solubles in vitro permet la survie de la majorité des LB-LLC mais ne recréé pas l’effet total

obtenu en présence des NLCs (Nishio et al., 2005).

D’autres mécanismes sont donc mis en jeu par les NLCs pour stimuler la survie des LB-LLC. Les NLCs et les LB-LLC produisent du HGF et expriment son récepteur c-met, stimulant à la fois le maintien de la polarisation M2 des NLCs et la survie des LB-LLC (Giannoni et al., 2014). De même, les NLCs expriment le CD31, qui peut interagir avec le CD38 des LB-LLC, induisant une surexpression de CD100 (ou sémaphorine 4D) à la surface des LB-LLC. CD100 interagit avec une haute affinité avec la Plexine-B1 exprimée par les NLCs, cette interaction induit un signal pro-survie dans les LB-LLC (Deaglio et al., 2005; Poggi et al., 2010). Des arguments indirects semblent impliquer les NLCs dans l’activation de la voie de signalisation du BCR. En effet, en présence de NLCs, les LB-LLC produisent plus de CCL3 et CCL4, production dépendante de la voie du BCR, mais le mécanisme d’activation du BCR par les NLCs est encore inconnu (Burger et al., 2009).

Une étude a récemment montré que l’effet protecteur des facteurs solubles BAFF, APRIL et CXCL12, nécessitait une interaction physique entre les LB-LLC et les NLCs. Les LB-LLC surexpriment la protéine LFA-3 qui, par interaction avec le CD2, permet la formation d’une synapse immunitaire. Dans le cas des LB normaux, cette synapse est formée par interaction avec le CD2 exprimé par les lymphocytes T, mais dans le cas de la LLC, l’interaction LB-LLC/LT est détériorée, et la synapse se formerait donc avec les NLCs qui expriment aussi le CD2. Une hypothèse a par ailleurs été émise selon laquelle ce contact entrainerait la production des facteurs solubles de survie et était nécessaire à leur effet protecteur (Boissard et al., 2016).

Bien que de façon moins importante, d’autres cellules agissent également sur la survie

des LB-LLC. Les cellules endothéliales sont en contact direct avec les LB-LLC via les

intégrines b1 et b2 (Maffei et al., 2012), mais également via BAFF et APRIL ancrés à leur

surface (Cols et al., 2012), ou encore par l’interaction de l’endothéline 1 des LB-LLC avec le sous-type A du récepteur à l’endothéline (Maffei et al., 2014). Cette adhérence des LB-LLC sur les cellules endothéliales entraine leur activation et leur survie.

La fonction des cellules folliculaires dendritiques intervient également dans la LLC. Ces cellules sécrétant CXCL13 facilitent la migration des LB-LLC exprimant le CXCR5 dans les follicules lymphoïdes (Heinig et al., 2014). De plus, l’adhérence des cellules folliculaires

aux LB-CLL via le CD44 des LB induit l’expression de la protéine anti-apoptotique Mcl-1

(Pedersen et al., 2002) et protège les LB-LLC de l’apoptose par l’interaction également de CD100/PlexinB1 de la même manière que les NLCs (Granziero et al., 2003).