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Le choix, la concentration et la qualité de l’aliment protéique dans la ration auront donc un impact majeur sur les apports et sur l’utilisation des métabolites azotés par les tissus splanchniques et la glande mammaire et ultimement sur la production de protéines laitières. Le tourteau de soya (TS) est généralement préféré au tourteau de canola (TC) chez les producteurs laitiers canadiens et américains. Les estimations du NRC (2001) pour ces deux suppléments protéiques sont en partie responsables de cette tendance, notamment par des estimations avec de plus grandes concentrations en PND de la PB pour le TS que pour le TC (42,6 et 35,7 % respectivement). De plus, l’Agricultural and Food Research Council (AFRC, 1993) affirment que le contenu en PND de la PB est 370 g et 280 g PND /kg PB pour le TS et le TC respectivement. Cependant, des études récentes montrent que l’apport en PND plus élevé chez la PB du TS que pour le TC ne serait pas supporté pour des rations à base d’ensilage d’herbe (Shingfield et al., 2003) ou d’ensilage de maïs avec de l’ensilage de luzerne (Brito et Broderick, 2007).

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1.4.1 Utilisation du tourteau de canola chez les vaches laitières

La garantie minimale en PB pour le TC est de 36,0 % au Canada (base humide avec un taux d’humidité de 8,5 %), bien que la teneur en PB se situe en moyenne entre 36 et 39 %. Cet aliment est apprécié notamment pour sa teneur en PM relativement élevée et son bon profil en AAE. Son goût est apprécié, et il possède une teneur faible en facteurs antinutritionnels (Bell, 1984; Newkirk, 2009) comparativement au colza. Les sélections génétiques ont permis d’augmenter son utilisation au Canada au cours des dernières années. Ce supplément, lorsque l’huile est extraite par solvant ou mécaniquement, possède une teneur faible en gras, avec un contenu en huile n'affectant pas la flore ruminale. Quant au taux d’inclusion dans les rations, il n’y a pas de quantité recommandée, mais la moyenne se situe aux alentours de 4 kg TC/jour par vache (Canola Council of Canada, 2016).

1.4.1.1 Utilisation du tourteau de canola en substitution du tourteau de soya

La production mondiale de TS représentait jusqu’à 67 % des semences d’oléagineuses en 2009, tandis que le TC représentait environ 14 %, ce qui le classe au deuxième rang des aliments protéiques les plus utilisés (Economic Research Centre, 2010; Huhtanen et al., 2011). La plupart des modèles de formulation de ration mentionnent que la PM apportée par le TS (sur une base de % PB) est supérieure au TC. La dégradabilité de la PB du TS est notamment plus faible et la PND serait plus digestible que le TC (Huhtanen et al., 2011). Selon le AFRC (1993), la dégradabilité ruminale de la PB estimée en utilisant un taux de passage des aliments de 0,05/heure est de 63 % et 72 % pour le TS et TC, respectivement (Huhtanen et al., 2011). La forte dégradabilité de la PB dans le rumen du TC pourrait causer un gaspillage de l’azote dans le rumen. Cela dit, il a été démontré que le TC protégé de la dégradation ruminale suite à un traitement à la chaleur peut diminuer l’excrétion azotée dans l’urine et améliorer la synthèse protéique et la production laitière (Wright et al., 2005) en comparaison avec du TC non protégé (Galindo, 2015). L’urée plasmatique et dans le lait serait d’ailleurs plus faible chez les vaches alimentées au TC que le TS (Maxin et al., 2013; Martineau et al., 2014).

1.4.1.2 Teneur en protéines et acides aminés du tourteau de canola

Des méta-analyses récentes comme celles de Huhtanen et al. (2011) et Martineau et al. (2013) ont démontré que le NRC (2001) sous-estime l’apport en PM du TC. En effet, les changements positifs des rendements en protéines dans le lait sont associés avec des changements négatifs dans l’approvisionnement en PM (Martineau et al., 2013). Cette sous-estimation peut être le

43 résultat de sous-estimation de la synthèse de PMic ou de la PND. Par exemple, Brito et Broderick (2007) ont rapporté que la synthèse de la PMic était sous-estimée de 14 % en utilisant le modèle du NRC (2001). De plus la digestibilité intestinale de la fraction PND du TC est relativement faible (75 %) avec le modèle du NRC (2001) comparativement à 93 % pour le TS. Ceci pourrait avoir une influence sur les estimations de PM. Par exemple, en augmentant la digestibilité de la fraction PND de 75 à 85 % pour le TC, l’apport en PM du TC augmenterait de 60 g PM/vache/jour (Brito et Broderick, 2007; Martineau et al., 2013).

Le TC possède un apport adéquat en PDR, ce qui stimulerait davantage la synthèse de la PMic dans le rumen (Martineau et al., 2013). Le profil en AAE de la PMic est similaire aux besoins pour la production du lait et de la protéine (NRC, 2001), ce qui la rend favorable. De plus, la fraction PDR apporte la quantité adéquate en ammoniac pour la croissance des microorganismes dans le milieu ruminal (Martineau et al., 2013). Même si la proportion en PND digestible dans le duodénum est légèrement plus faible pour le TC, elle contiendrait de bonnes teneurs en Met, Lys et His (Martineau et al., 2013). Ces AAE de la fraction PND digestible complémenteraient l’apport en PMic arrivant au duodénum (NRC, 2001). Brito et Broderick (2007) concluent que le profil en AA de la fraction de PND est complémentaire aux protéines microbiennes suite à l’ingestion de TC, améliorant également la production laitière. Plus particulièrement, la Met est également présente en plus grande quantité dans le TC que le TS (sur une base de PB), ce qui indique que la PB peut être réduite sans affecter la production ni la synthèse de protéines puisque cet AAE est limitant (Broderick, 2003; Broderick et al., 2015). Si la PM provenant du TC contribue à une absorption plus importante en Met que le TS, il est alors fort probable que le TC soit plus efficacement utilisé dans les rations faibles en PB (Broderick et al., 2015). Maxin et al. (2013) ont de plus noté une augmentation du taux d’apparition de la Met, mesuré avec des isotopes stables, quand le TC substituait le TS sur une base iso-protéique.

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Tableau 1.3. Comparaison du contenu en acides aminés essentiels (AAE) du lait, des protéines microbiennes, du tourteau de canola et du tourteau de soya (% des AAE).

AAE Lait Protéine

microbienne

Tourteau de

canola Tourteau de soya

His 5,5 4,0 6,6 6,1 Ile 11,4 11,5 9,0 10,1 Leu 19,5 16,3 15,9 17,2 Lys 16,0 15,8 13,2 13,9 Met 5,5 5,2 4,4 3,2 Thr 8,9 11,7 10,4 8,7 Val 13,0 12,5 11,1 10,2

Les AAE en gras sont limitant propre à chaque source. Tiré du NRC 2001.

Concentration plasmatique en acides aminés

Le lien entre l’effet positif du TC sur la protéine du lait et la concentration plasmatique en AAE a été étudié dans la méta-analyse de Martineau et al. (2014). Les résultats suggèrent que l’inclusion de TC augmente les concentrations plasmatiques en AA totaux, AAE totaux, AACR et en AAE individuels. L’effet de l’inclusion du TC dans la ration sur les réponses de concentrations plasmatiques en AAE est représenté à la Figure 1.12. L’augmentation de la concentration plasmatique des AA aurait un impact positif sur la synthèse de la protéine du lait, en plus d’améliorer l’efficacité apparente d’utilisation de l’azote (Martineau et al., 2014). Ceci étant dit, la proportion en AAE échappant à la dégradation ruminale améliore les performances des vaches. L’apport post-ruminal en protéines et AA digestible du TC ont aussi un lien avec les concentrations plasmatiques élevées en AA et les effets positifs sur la production de lait et de la protéine du lait (Martineau et al., 2014).

Figure 1.12. Relation positive entre les réponses de la concentration plasmatique en AAE totaux (µmol/L) lors de la substitution de d’autres sources protéiques par du TC (100 g/kg MS).

Tiré de Martineau et al., 2014. TC (100 g/kg MS) EAA (mm o l/ L )

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1.4.1.3 Effet du tourteau de canola sur les performances laitières

L’inclusion du TC dans les rations laitières influence positivement beaucoup de paramètres, notamment l’ingestion de matière sèche (Huhtanen et al., 2011; Martienau et al., 2013; Broderick et al., 2015), la concentration plasmatique en AAE (Martineau et al., 2014), la production laitière (Huhtanen et al., 2011; Martineau et al., 2013; Broderick et al., 2015), la protéine vraie du lait (Brito et Broderick, 2007; Broderick et al., 2015) et réduit également la teneur en urée plasmatique, MUN et l’azote excrété dans l’urine (Martineau et al., 2014; Broderick et al., 2015). Ces nombreux résultats confirment l’amélioration de l’efficacité d’utilisation de l’azote lors d’inclusion du TC dans les rations laitières (c’est-à-dire le ratio N lait : N ingéré). Cette amélioration de l’efficacité serait le résultat du profil en AAE de qualité arrivant au duodénum (Martineau et al., 2013). La méta-analyse de Martineau et al. (2013) présente des réponses positives suite à la substitution du TS par du TC sur la production et protéine du lait, soit une augmentation moyenne de 0,73 kg/vache/jour et 28,7 g protéine/vache/jour. De plus, Martineau et al. (2013) rapportent une augmentation plus forte du % en protéine du lait lorsque le TC substitue d’autres sources protéiques dans des rations à base d’ensilage d’herbe/légumineuses vs ensilage de céréales. De même, les auteurs d’une étude récente (Galindo et al., 2017) ont rapporté une production de lait supérieure lorsque le TC était inclus à une ration à base d’ensilage d’herbe, comparativement à un ensilage de maïs. Il en est de même pour la méta-analyse de Huhtanen et al. (2011), où l’inclusion de 1 kg supplémentaire de protéine apportée en TC peut augmenter la production laitière de 3,4 kg/jour, comparativement au TS qui augmente de 2,4 kg/jour. Le TC aurait un avantage de 1 kg de plus suite aux résultats de cette dernière méta-analyse.

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