1.4 Bilan
2.1.1 Décroissance β + de noyaux radioactifs
2.1.1.2 Les supernovae de type Ia
M
44=
4456Ca
Fe
!
⊙× (R
SN IaY
56SN Ia+ R
CCSNY
56CCSN) M⊙siècle
−1, (2.6)
où Y
CCSN 56et Y
SN Ia56
représentent respectivement le rendement en
56Ni par supernova à
effon-drement de coeur (≃0.075 M⊙, obtenu à partir de la courbe de lumière de SN1987A ; voir par
exempleArnett et Fu 1989) et par supernova de type Ia (valeur typique de≃0.6 M
⊙;Branch et
Khokhlov 1995) ; R
SN Ia(≃ 0.42 siècle
−1) et R
CCSN(≃ 2 siècle
−1) représentent respectivement
les fréquences des supernovae de type Ia et des supernovae à effondrement de coeur dans le disque
Galactique (Mannucciet al. 2005). On obtient ˙M
44≃5.2×10
−6M
⊙an
−1, valeur qui semble en
accord avec celle de ˙M
44≃ 5.5×10
−6M⊙ obtenue par The et al. (2006) à l’aide d’un modèle
d’évolution chimique de la Galaxie. Cette valeur se convertit en un taux de production d’atomes
de
44Ti de ˙N
44∼ 4.2×10
42s
−1. Sachant que la décroissance β
+correspond à un rapport de
branchement f
β44+≃ 94%, on peut donc déduire le taux de production Galactique des positrons
produits par le
44Ti comme étant égale à ˙N
44e+= f
β44+×N˙
44≃ 4 ×10
42e
+s
−1. Cette valeur
semble aussi grosso modo en accord avec la valeur de ˙N
44e+≃3×10
42e
+s
−1obtenue parLeising
et Share (1994) et The et al. (2006) à partir d’un modèle d’évolution chimique de la Galaxie.
Avec toutes les incertitudes précédemment citées, nous considérerons par la suite une valeur de
˙
N
44e+≃3.5×10
42e
+s
−1avec une incertitude de±50%.
Contribution des étoiles massives à l’émission Galactique à 511 keV La
distribu-tion spatiale des étoiles massives ne reflète clairement pas la distribudistribu-tion totale de l’émission
Galactique à 511 keV puisque les étoiles massives sont principalement concentrées dans le disque
Galactique et plus particulièrement dans les bras spiraux. Cependant, le rendement en positrons
de l’
26Al et du
44Ti pourraient expliquer en totalité l’émission du disque Galactique à 511 keV
(Knödlseder et al. 2005). En effet, les modèles d’ajustement de Weidenspointner et al. (2008a),
déjà évoqués dans la section1.2.1, impliquent des taux d’annihilation de positrons pour le disque
de ≃(8.1±1.5)×10
42e
+s
−1et ≃ (5.2±1.1)×10
42e
+s
−1(correspondant respectivement aux
modèles de gauche et de droite de la Figure 1.5). Ces deux valeurs peuvent donc s’expliquer
en combinant les taux de production en positrons calculés pour l’
26Al et le
44Ti. De plus, ces
positrons sont produits avec des énergies de l’ordre du MeV. Ils vérifient donc la contrainte
énergétique discutée dans la section 1.3.
2.1.1.2 Les supernovae de type Ia
Les supernovae de type Ia (SNe Ia) sont des événements qui sont généralement associés à des
explosions thermonucléaires de naines blanches, composées de carbone et d’oxygène, de masse
initiale ≃1 M⊙ (Hoyle et Fowler 1960). Ces explosions sont issues d’une combustion nucléaire
explosive provoquée par l’accrétion continue de matière, par la naine blanche, d’une étoile
com-pagnon de la séquence principale ou d’une géante rouge
3(Whelan et Iben 1973, Nomoto et
Sugimoto 1977, Nomoto 1982). Lorsque la masse de la naine blanche atteint la masse limite
de Chandrasekhar (∼1.4 M⊙), la fusion du coeur de carbone se déclenche et s’emballe jusqu’à
3. Un autre scénario possible à l’origine des SNe Ia est la fusion de deux naines blanches constituant un système
binaire (voir p. ex.Webbink 1984). Cependant, ce scénario semble défavorisé au vu des observations mais ne semble
pas totalement exclu pour certains événements (voir la discussion dansHillebrandt et Niemeyer 2000).
30 2.1. Sources des positrons
ce que l’énergie libérée dépasse l’énergie de liaison gravitationnelle de la naine blanche. A cet
instant, celle-ci explose et disparaît totalement en éjectant toute sa matière dans le MIS à des
vitesses pouvant atteindre 20 000 km s
−1(pour plus d’explications, voir par exemple la revue de
Hillebrandt et Niemeyer 2000).
Le mécanisme d’explosion des SNe Ia est à l’heure actuelle encore débattu. La combustion
nucléaire pourrait se propager en principe par détonation ou par déflagration. Cependant, la
déto-nation a été exclue par le fait qu’elle ne produit quasiment pas d’éléments de masse intermédiaire
(éléments entre le carbone et le nickel) dont la présence est observée dans les spectres des SNe Ia
(Arnett 1969a,Nomoto et Sugimoto 1977). La déflagration produit du
56Ni ainsi que des éléments
de masse intermédiaire mais a besoin d’être accélérée pour pouvoir exploser l’étoile. Ceci peut
être fait par interaction avec la turbulence comme présenté par Nomoto et al. (1984) avec son
célèbre modèle W7, modèle qui permet de reproduire une bonne quantité d’observables des SNe
Ia. Un autre modèle tout aussi triomphant est le modèle de transition déflagration-détonation
(DDT), aussi appelé modèle à détonation retardé, proposé la première fois parKhokhlov(1991).
Ce modèle permet de reproduire tout aussi bien les observables associées aux explosions de SNIa
dont les courbes de lumière (voir par exemple Hoeflich et Khokhlov 1996, Gamezo et al. 2004,
Mazzaliet al. 2007). Cependant, le mécanisme expliquant cette DDT reste encore inconnu.
56Ni Un élément certain concernant les SNe Ia est que la courbe de lumière bolométrique
de celle-ci est alimentée par la décroissance radioactive du
56Ni suivi de celle plus longue du
56Co (Truran et al. 1967, Colgate et McKee 1969, Kuchner et al. 1994). Les produits de ces
décroissances, photons et positrons, sont piégés dans l’éjecta de la supernova et vont le chauffer
et l’ioniser. Cette énergie pouvant ensuite être réémise sous forme de photons UV ou optique
(Axelrod 1980). Le
56Co est produit par la décroissance par capture électronique du
56Ni qui est
produit en grande quantité dans les SNe Ia. D’après les observations, les SNe Ia produisent une
valeur typique de 0.6 M
⊙(Branch et Khokhlov 1995). Ensuite, le
56Co fraîchement synthétisé
va décroître en
56Fe par capture électronique dans ≃80.5% des cas et par décroissance β
+dans
≃19.5% (=f
β56+) des cas, avec un temps de vie moyen deτ
56≃111 jours. La chaîne de décroissance
émettriceβ
+peut donc s’écrire :
56
Ni−−−−−→
8.8 days 56Co
∗+ ν
e,
56Co
∗ 1 ns−−→
56Co + γ
811.9keV+ γ
158.4keV,
56
Co −−−−−−→
111.3 days 56Fe
∗+ e
++ν
e,
56Fe
∗ ∼100 fs−−−−→
56Fe + γ
1.238MeV+ γ
847keV, (2.7)
où seulement les raies γ principales émises sont indiquées. Il est important de faire remarquer
que jusqu’à présent, on n’a jamais pu observer l’une de ces raiesγ dans la direction d’une SNIa
4excepté pour SN1991T où une détection à seulement 2–3σ a peut-être été réalisée (Morris et al.
1997).
Par son rendement élevé en
56Ni, une SNIa devrait donc produire a fortiori une quantité
importante de positrons de l’ordre deY
56SN Ia×f
β56+∼10
54e
+, soit une quantité environ 10 000
fois supérieure à celle produite par une CCSN en positrons produits par l’
26Al. Cependant, on
ne sait pas exactement quelle quantité de positrons arrive à s’échapper vers le MIS à cause du
temps de vie très court du
56Ni et du
56Co. Ce temps de vie fait que les positrons sont injectés
dans un éjecta de la SNIa encore très dense. Ils y perdent donc probablement très rapidement
de l’énergie et s’y annihilent sans avoir pu atteindre le MIS. Mais cela dépend de nombreuses
4. Pendant la rédaction de cette thèse, les raies de décroissance du
56Co ont été détectées par SPI/INTEGRAL
et IBIS/ISGRI/INTEGRAL en provenance de SN2014J (voir ATels #5992 et #6099) qui a été découverte en
janvier 2014 dans la galaxie M82.
inconnues telles que le profil de densité de l’éjecta, le transport des positrons au sein de l’éjecta et
donc a fortiori de la configuration du champ magnétique de l’éjecta ou encore de la distribution
spatiale initiale des radio-isotopes parents. Dans le but d’estimer la contribution des positrons
issus de la radioactivité β
+à l’émission d’annihilation Galactique, Chan et Lingenfelter (1993)
ont essayé d’estimer les fractions d’échappement des positrons du
56Ni,
44Ti et
26Al des éjectas
de supernovae en prenant en compte les diverses inconnues précédemment citées et pour
diffé-rents mécanismes d’explosions (modèles de détonation, déflagration, DDT ; voir plus haut). Ils
ont montré que, indépendamment du modèle d’explosion et des cas extrêmes utilisés pour les
paramètres inconnues de l’éjecta, entre 0.1% et 15% des positrons du
56Ni s’échappent de l’éjecta
des SNe Ia
5. En utilisant les fractions d’échappement calculées pour les autres radio-isotopes ainsi
que les fréquences associées à chaque type de SN,Chan et Lingenfeltermontrent que les positrons
produit par le
56Ni, l’
26Al et le
44Ti peuvent expliquer quantitativement la totalité de l’émission
Galactique à 511 keV, avec un taux de production de l’ordre de 10
43e
+s
−1. Ils soulignent que
les SNe Ia seraient les contributeurs principaux à la production de positrons avec une fraction
comprise entre 70% et 85%. Plus récemment, Martin et al. (2010) ont repris le formalisme de
Chan et Lingenfelterpour essayer de contraindre (a) le transport des positrons au sein de l’éjecta
et (b) la fraction d’échappement des positrons, à l’aide de données obtenues par SPI/INTEGRAL
pour six supernovae (4 CCSNe et 2 SNe Ia). Martinet al. ont montré que rien ne pouvait être
déduit concernant le transport des positrons dans les éjectas mais ils ont pu mettre des limites
supérieures sur les fractions d’échappement :≃12-13% pour Cas A et Tycho. Ces valeurs sont en
accord avec celles déduites parChan et Lingenfelter(1993) et parMilneet al.(1999). Ces derniers
utilisèrent une autre méthode pour essayer de contraindre cette fraction d’échappement. Cette
méthode consiste à modéliser les courbes de lumière bolométrique des SNe Ia, pour différents
modèles d’explosion et différentes hypothèses concernant les paramètres inconnus précédemment
cités, et de les comparer aux courbes de lumière observées d’une dizaine de SNe Ia. Puisque ces
courbes, à des époques tardives après l’explosion (≥200 jours), sont supposées être alimentées
par l’énergie déposée par les positrons dans l’éjecta, on peut donc essayer de voir quel ensemble
de paramètres s’ajuste le mieux aux observations.Milne et al. ont montré qu’entre 0% et∼11%
des positrons s’échappent de l’éjecta, peu importe le modèle d’explosion supposé. Ils montrèrent
cela pour une configuration radiale du champ magnétique dans l’éjecta, qui semble être favorisée
par la comparaison des modèles aux observations. Cependant, toutes ces études sont loin d’être
complètes. De nombreux effets qui n’ont pas été pris en compte pourraient avoir une influence
importante sur l’échappement des positrons (effets 3D de l’explosion, autres mécanismes de dépôt
d’énergie dans l’éjecta, etc. ; voir la discussion dePrantzos et al.2011).
Le taux de production de positrons par le
56Ni peut se déduire par la relation suivante :
˙
N
56e+=f
β56+×Y
SN Ia 56
m
56×f
esc56×R
SN Ia≃ 1.6×10
43e
+s
−1, (2.8)
avec f
esc56la fraction d’échappement des positrons du
56Ni prise ici à 5% et m
56la masse d’un
atome de
56Ni (≃55.94 uma).
Contribution des SNe Ia à l’émission Galactique à 511 keV Si seulement quelques %
des positrons s’échappent des éjectas des SNe Ia, celles-ci pourraient expliquer quantitativement
5. Ces auteurs montrent aussi que∼100% des positrons du
44Ti s’échappent de l’éjecta des SNe Ia. Cependant,
le rendement en
44Ti par une SNIa est environ 10 000 à 100 000 fois plus faible que le rendement en
56Ni. Le
56Ni
est donc le contributeur majoritaire de positrons pour les SNe Ia. Ils montrent aussi que≃0% des positrons du
32 2.1. Sources des positrons
le taux d’annihilation Galactique observé qui est de l’ordre de (2–3)×10
43e
+s
−1(voir section1.4).
Concernant la morphologie de l’émission, les SNe Ia ont longtemps été associées à des populations
d’étoiles vieilles et seraient donc concentrées dans les régions internes de la Galaxie et dans le
bulbe. Cependant, une fraction des SNe Ia pourrait être associée à une population d’étoiles
jeunes (Mannucciet al. 2005, Scannapieco et Bildsten 2005,Sullivan et al.2006). En supposant
des profils de densité appropriés pour ces composantes, Prantzos et al. (2011, section IV.D.3)
montrent que les SNe Ia ne peuvent expliquer quantitativement que la moitié des positrons qui
s’annihilent dans le bulbe de la Galaxie. De plus, ces travaux (voir chapitre 4) montrent que,
dans tous les cas, même avec propagation des positrons, la morphologie de l’émission observée
du bulbe n’est pas retrouvée pour les positrons produits par les SNe Ia.
Dans le document
Origine et physique d'annihilation des positrons dans la Galaxie
(Page 38-41)