• Aucun résultat trouvé

4.1 Principe de fonctionnement

Les supercapacités ou supercondensateurs sont des condensateurs basés sur le principe de la double couche électrochimique et constitués d'électrodes poreuses, généralement identiques, immergées dans un électrolyte. Les deux électrodes sont classiquement constituées en charbon actif et baignent dans un électrolyte aqueux ou organique. Elles sont séparées par une membrane poreuse et isolante dont le rôle est d'assurer une isolation électronique entre les électrodes tout en laissant passer facilement les ions de l'électrolyte (Figure 4.1a).

a) b)

Figure 4.1: Composition (a) et fonctionnement (b) des supercapacités [Schneuwly, 2006 et Viarouge, 2008]

La particularité des supercapacités par rapport aux condensateurs classiques repose sur la formation d’une double couche électrochimique à l’interface entre l’électrolyte et chaque électrode. Pendant la charge, on applique une différence de potentiel aux bornes du condensateur qui crée un champ électrique. Ce champ électrique pousse les ions de l'électrolyte à se déplacer en direction de l'électrode de signe opposé. Quand le condensateur est complètement chargé, les anions et les cations de l'électrolyte sont localisés à proximité des électrodes de façon à équilibrer les charges en excès présentes sur le charbon actif (voir Figure 4.1b). Deux couches de charges excédentaires de polarité opposée sont ainsi constituées à l'interface électrode/électrolyte et forment la double couche électrochimique.

La capacité de stockage d'énergie est directement proportionnelle à la surface (A) de contact entre les électrodes et l'électrolyte et est inversement proportionnelle à la distance (d) entre les charges opposées dans chaque couche (formule 4.1). L'énergie stockable est quant à elle proportionnelle à la capacité de stockage et au carré de la tension appliquée aux bornes du condensateur (formule 4.2).

rA C d

=ε (4.1)

1 2

E=2CV (4.2)

Les supercapacités constituent une évolution importante des condensateurs classiques. Car elles peuvent stocker des quantités d'énergies bien plus grandes par rapport aux condensateurs. En effet, les électrodes poreuses en charbon actif possèdent une très grande surface de contact avec l'électrolyte (environ 3000 m2/g) et la distance entre les charges opposées dans chaque couche est très courte (de l’ordre de 0.3 à 0.5 nanomètres contre 10 à 100 dans un condensateur électrolytique classique). Cependant, la quantité d'énergie stockable reste limitée par rapport aux batteries par le fait que la tension d'utilisation des supercapacités est très basse, limitée par la tension de dissociation de l’électrolyte.

4.2 Performances des supercapacités

Les supercapacités stockent dix fois moins d'énergie que les batteries. En effet, suite à la présence de l'électrolyte, les tensions d'utilisation des supercapacités sont très faibles. Elles varient entre 1V pour les électrolytes aqueux et 2,5V pour les électrolytes organiques. Les constructeurs tentent de résoudre ce problème et fabriquent des modules de supercapacités dont la tension nominale d'utilisation peut atteindre une centaine de volts en assemblant plusieurs éléments en série. Mais la répartition de la tension entre les éléments, dont la tension d'utilisation élémentaire est de 2,5V par exemple, nécessite des systèmes d'équilibrage utilisant des résistances qui dégradent le rendement ou des convertisseurs d'électronique de puissance qui sont très chers (Figure 4.2).

Figure 4.2: Assemblage des éléments en série [Maxwell Technologies, 2007]

Concernant toujours le stockage de l’énergie, l'avantage des supercapacités par rapport aux batteries est qu'ils peuvent stocker et restituer leur charge avec une grande efficacité et pendant un très grand nombre de cycles de charge/décharge sans se dégrader. Malgré que les résistances internes du charbon actif et de l'électrolyte, le rendement des supercapacités reste plus élevé par rapport à celui des batteries et est de l'ordre de 95 à 98%. De plus, les supercapacités peuvent être déchargées complètement sans craindre une quelconque dégradation contrairement aux batteries dont la profondeur de décharge ne peut pas dépasser un certain seuil. Les supercapacités peuvent fournir des puissances élevées en de très courtes périodes. Le diagramme de Ragone (Figure 4.2) compare la puissance massique et l’énergie massique et place les supercapacités entre les capacités classiques et les batteries.

Figure 4.2: Energie et puissance massique des batteries, supercapacités et condensateurs classiques [Viarouge, 2008]

L’autre point important concerne la température de fonctionnement. Les supercapacités supportent les températures froides jusqu’à -40°C alors que les certaines batteries ne peuvent plus fonctionner en dessous de -10°C. La température tout comme le nombre de

charges/décharges influence beaucoup la durée de vie des supercapacités. Concernant la charge décharge, les supercapacités supportent très bien la charge rapide. Le principe des supercapacités est basé sur l'effet électrostatique qui est un phénomène purement physique et très réversible. La charge et la décharge consistent en un simple mouvement d'ions dans l'électrolyte. Ce mode de stockage contraste avec toutes les technologies de batteries qui sont basées sur une formation et une dissolution des composés chimiques sur les électrodes (réactions chimiques d'oxydoréduction). Le calcul de l'état de charge d'une supercapacité est fonction de la tension et de la capacité uniquement. La capacité d'une supercapacité peut être calculée en temps réel en mesurant le courant et la variation de tension en fonction du temps.

Au contraire, la détermination de l'état de charge exacte d'une batterie implique des calculs dynamiques multiples et la capacité de la batterie est souvent mise en cause et difficile à déterminer en temps réel. En comparaison, les supercapacités n'exigent pas un certain niveau de charge alors que la tension de sortie des batteries n'indique pas avec précision l'état de charge et est difficile à contrôler.

Figure 4.3: Courbes de charge/décharge pour les batteries et les Supercapacités

4.3 Technologies et matériaux

La différence entre les diverses technologies des supercondensateurs est basée sur la nature de l’électrolyte et celle des matériaux utilisés pour fabriquer les électrodes. Le matériau le plus prisé pour la fabrication des électrodes est le charbon actif. Il permet d'avoir une grande capacité de stockage grâce à sa neutralité chimique et sa grande conductibilité électrique et parce qu'il offre la possibilité d'avoir une grande surface de contact spécifique. La technique des poudres permet d’augmenter la surface spécifique et consiste à entasser les poudres de carbone sur les collecteurs de courant. Un séparateur en papier, en membrane polymère ou en fibre de verre est imprégné dans un électrolyte organique à haute conductivité ionique pour

établir le mouvement des ions pendant la charge/décharge. Un électrolyte aqueux possède une grande conductivité ionique et son impact environnemental est moindre. Mais, il limite la tension d'utilisation à environ 1V. Le dépassement de cette tension d'utilisation provoque l'électrolyse de l'électrolyte et l'apparition des gaz. Les électrolytes à base de solvants organiques sont couramment utilisés avec des tensions d'utilisation estimées à 2,5V. Les électrolytes organiques sont les meilleurs et permettent d'espérer des tensions pouvant atteindre 3V. Ils ont par contre une conductivité ionique moins élevée et nécessité une isolation solide contre les moisissures atmosphériques. Tous les autres matériaux sont sélectionnés selon qu'ils sont compatibles avec l'électrolyte et qu'ils sont électrochimiquement neutres aux tensions appliquées. Les collecteurs de courant sont en feuilles métalliques d’acier mais l'alliage d’aluminium est de plus en plus utilisé. Tous les composants sont mis dans un boîtier métallique dont la seule partie plastique se trouve sur les terminaux pour les isoler électriquement.

Les technologies des supercapacités peuvent être classées en trois principaux groupes: les supercapacités électrostatiques, les supercapacités électrochimiques et les supercapacités hybrides.

Pour les premiers, le stockage des charges dans les interfaces électrochimiques entre les électrodes et l’électrolyte est réalisé de façon analogue aux condensateurs classiques. Ils ont souvent des électrodes en charbon actif et selon les fabricants, un électrolyte aqueux (ESMA, Elit, Evan, Skeleton Technologies, Tavrima) ou un électrolyte organique (Maxwell Technologies, Panasonic, EPCOS, Ness Capacitors, Asahi Glass).

Les seconds combinent la technique des supercapacités électrostatiques et celle des batteries.

Les électrodes sont en oxyde de métal ou en polymère conducteur et l’électrolyte est constitué par l’acide sulfurique ou un sel dissous dans un solvant. Dans ces conditions, des réactions chimiques réversibles au niveau des électrodes sont possibles en plus de la double couche électrochimique.

Les derniers utilisent la technique des condensateurs classiques et celle des supercapacités.

C’est-à-dire qu’une des électrodes est une anode de condensateur électrolytique alors que l’autre est une cathode de supercondensateur et l’électrolyte est une solution aqueuse d’acide sulfurique. Ce système tiret profit des avantages d’un supercondensateur (puissance massique élevée) et de ceux d’un condensateur classique (énergie massique élevée).

4.4 Applications des

supercondensateurs

Les supercapacités sont applicables lorsqu'une demande de puissance additionnelle intervient subitement et que la source principale n'est pas capable de la fournir (Figure 4.4a) ou lorsqu'on a besoin de récupérer une grande puissance en très peu de temps (Figure 4.4b).

a) b)

Figure 4.4: Demande(a) et récupération(b) instantanée de puissance

Ils peuvent être utilisés seuls pour des systèmes qui demandent des pics de puissance ou en combinaison avec des batteries pour des systèmes qui nécessitent à la fois une basse puissance pour un fonctionnement continue et des pics de puissances pour des charges temporaires. La Table 4.1 résume les différentes applications des Supercapacités parmi lesquelles se trouve la traction électrique et hybride.

Market domain Application

Automotive Hybrid drives, board net stabilization, distributed power Trains, trams Regenerative braking, voltage stabilization

Buses Regenerative braking

Aerospace Electric actuators, or latches

Pitch systems Emergency power for windmill blades

Robotics Peak and back-up power

Telecom Back-up power

Material handling Peak power for fork lifts, cranes and straddle

Elevators Peak and emergency power

UPS/power quality Back-up power AMR (Automated Meter Reading) Power supply

Consumer electronics Power supply, burst, peak and back-up power Table 4.1: Divers marchés des supercapacités

Concernant les véhicules électriques et hybrides, le cahier des charges dépend de la taille du véhicule (lourd, léger, utilitaire, etc.), de la configuration (hybride parallèle, série, ...), du degré d’hybridation (hybride doux, hybride complet) et de l’usage du véhicule (cycle de conduite). On constate qu’aucun système de stockage ou d’alimentation en énergie n’est capable de répondre à tout le cahier des charges des véhicules électriques et hybrides: garantir

une autonomie suffisante sans augmenter la masse totale, assurer des accélérations nécessaires et récupérer le plus possible d'énergie au freinage, supporter les nombreuses sollicitations de charges décharges et garantir donc une durée de vie élevée. Les supercapacités constituent une parfaite complémentarité des batteries car ils possèdent toutes les caractéristiques qui manquent aux batteries pour améliorer les performances du véhicule hybride. L’idéal serait donc un système qui combinerait les batteries et les supercapacités afin de profiter des atouts de l’un et de l’autre. Dans ce cas, les batteries délivrent la puissance moyenne pour la traction électrique (ou tout électrique) pendant que les supercapacités assurent, avec une grande efficacité, le démarrage, les accélérations et les freinages récuparatifs qui demandent des échanges de puissances instantanés importants.

En usage séparé, chaque système est adapté à une situation donnée. Par exemple, dans le domaine des véhicules hybrides électriques, les supercapacités dont la capacité de stockage d’énergie est assez faible ne conviennent que pour l'assistance au moteur thermique. Ils seraient donc mieux exploités pour des véhicules soumis à des arrêts et à des accélérations fréquents notamment les véhicules urbains tels que les autobus ou des véhicules de livraisons (livreur, camion de ramassage). De plus ils conviennent mieux à la configuration hybride parallèle dans laquelle la propulsion du véhicule est assurée en permanence par la source principale (moteur thermique), le moteur électrique n’intervenant que pendant les phases d’accélération, de démarrage ou de freinage.