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Analyses et implémentations

3.5 Structures syllabiques

L'analyse des structures syllabiques se fera dans le cadre de la phonologie mul-tilinéaire (Kahn, 1976 ; Liberman et Prince, 1977 ; Kaye et Lowenstamm, 1984). La représentation phonologique est vue comme un ensemble de niveaux distincts et autonomes appelés palier (niveau autosegmental). Dans ce modèle, la syllabe se compose de deux constituants : l'attaque (A) et la rime (R). La rime à son tour se compose d'un noyau (N) et d'une coda (C). Le noyau représente le sommet de sono-rité de la syllabe, c'est-à-dire l'élément le plus sonore tandis que la coda et l'attaque constituent ses marges.

Figure 3.2 Schéma de base de la syllabe (Kahn, 1976)

σ

R C N A

L'attaque et la coda peuvent contenir plus d'un segment, chacun associé à sa propre unité temps, notée X. On dit qu'ils peuvent brancher. Dans les constituants syllabiques

La représentation de la syllabe au schéma (3.3) permet de représenter un grand nombre de types syllabiques :

Figure 3.3 Représentation de diérents types syllabiques Creissels (1994 : 30)

σ R C X N X A X σ R C X N X σ R N X σ R N X A X

L'ikota se range dans les langues à syllabes ouvertes. On rencontre les types V et CV. Comme il n'existe pas de coda en ikota, le schéma de base de la syllabe est représentée de la manière suivante :

Figure 3.4 Schéma de base de la syllabe en ikota

σ

N A

3.5.0.1 Syllabes de type V

Seules les voyelles [o], [i] et [e] et la nasale syllabique [n6] sont attestées en position initiale absolue.

(5) a. ò|bO "bras" b. ì|púbà "bain" c. è|tàbà "mouton" d. n|kánì "le sage/le chef"

6. Dans la représentation syllabique, la nasale syllabique est considérée comme un noyau à attaque vide.

Les gures (3.5) et (3.6) montrent respectivement des représentations de syllabes de type V.

Figure 3.5 Représentation de la syllabe ò dans ò|bO bras

σ

N X ò

Figure 3.6 Représentation de la syllabe n dans n|kándà vêtement

σ

N X n

Dans les gures (3.5) et (3.6), l'attaque est vide, elle n'est donc pas représentée. Les syllabes de type V ne sont pas répandues en ikota.

3.5.0.2 Syllabes de type CV

La gure (3.7) montre la représentation d'une syllabe de type CV.

Figure 3.7 Représentation de la syllabe kú propriétaire

σ N X ú A X k

Une distinction entre représentation syllabique et découpage morphologique doit être établie. Heine et Nurse (2004) notent que les frontières syllabiques ne s'accordent pas dans la majorité des cas avec les frontières morphologiques. Le même principe est observé en ikota. Le verbe bòkónákà enterrer a une structure syllabique de type CV-CV-CV tandis que son découpage morphologique est de type CV-CVC-VC-V. La distinction entre ces deux niveaux d'analyse provient du fait que le découpage morphologique a une portée sémantique contrairement à la représentation syllabique. Le découpage morphologique de bòkónákà donne ce qui suit :

- bò (CV) marque l'indice de classe ; - kón (CVC) marque le stem ;

- ák (VC) marque le suxe verbal qui représente l'aspect ;

- à (V) marque le suxe verbal qui représente la voyelle thématique.

Une telle interprétation est impossible lorsqu'il est question de représentation syl-labique.

3.6 Morphophonologie

Dans cette partie, je relèverai les phénomènes récurrents (élision et assimilation vocaliques) et je proposerai des règles permettant de les représenter.

Tous les phénomènes rencontrés en ikota ne seront pas traités dans ce travail. Le but, ici, est de présenter certaines règles permettant au lecteur une meilleure compré-hension du fonctionnement de la langue. La plupart des phénomènes observés sont de type vocalique. En général, des règles tonales s'appliquent simultanément aux règles segmentales qui vont être énumérées. Les phénomènes de contact vocalique sont très répandus en ikota. Il est important de les étudier car ils inuent sur la morphologie (voire la syntaxe). L'harmonie vocalique, phénomène par lequel une voyelle va trans-mettre ses traits aux voyelles qui lui sont adjacentes, est très répandue dans le système verbal de l'ikota. Ce phénomène sera abordé au chapitre (5).

3.6.1 Semi-vocalisation

La semi-vocalisation peut être dénie comme un phénomène par lequel une voyelle fermée (en incluant les mi-fermées) devient semi-voyelle (encore appelée semi-consonne ou glide) au contact d'une autre voyelle (semblable ou diérente d'elle). Lorsqu'elle devient semi-voyelle, elle sert de consonne d'appui.

Je présente ci-dessous les contextes de semi-vocalisation relevés en ikota puis je propose des règles permettant de les représenter.

- La voyelle [o] se semi-vocalise lorsqu'elle est directement suivie par une voyelle diérente d'elle. La semi-vocalisation dans ce cas a lieu à la frontière morphologique représentée par un tiret (-).

Bien que le stem verbal n'apparaisse jamais en isolation, j'admets que la voyelle [o7] se semi-vocalise lorsqu'elle est précédée d'une voyelle diérente d'elle, aussi bien dans le nom que dans le verbe. La semi-vocalisation dans ce cas a lieu à la frontière morphologique.

(8) a. bò-lò-ák-à −→[bòlwákà] "partir"

b. bò-làmbò-ák-à−→ [bòlàmbwákà] "tirer" c. bò-bàbò-ák-à −→ [bòbàbwákà] "éviter" d. bò-pò-ák-à −→ [bòpwákà] "sortir" e. bò-kàtò-EÙ-E −→[bòkàtwEÙE]"décoller" f. bò-búkò-EÙ-E −→ [bòbúkwEÙE] "espérer" La règle suivante peut être établie :

Figure 3.8 Règle de semi-vocalisation de [o] o−→ [w] / _V

- La voyelle [e] se semi-vocalise lorsqu'elle est suivie d'une voyelle semblable ou diérente d'elle. La semi-vocalisation dans ce cas aussi a lieu à la frontière morphologique. (9) a. mè-ésì −→ [mjésì] "étoile"

b. mè-óyì −→[mjójì] "voix"

c. mè-Ondò −→ [mjOndò] "bracelets"

Bien que la racine verbale n'apparaisse jamais en isolation, j'ai choisi de consi-dérer que la voyelle [e8] se semi-vocalise lorsqu'elle est suivie d'une voyelle semblable ou diérente d'elle, aussi bien dans le nom que dans le verbe. La semi-vocalisation de [e] dans la racine verbale ne tient pas compte de la frontière morphologique.

7. Considérer la voyelle [o] comme celle à l'origine de la semi-vocalisatioin dans le verbe est arbi-traire car [u] peut également jouer ce rôle.

(10) a. bò-dèáz-ákà −→ [bòdjázákà] "travailler" b. bò-pèOk-OkO −→[bòpjOkOkO] "sucer" La règle suivante peut être établie :

Figure 3.9 Règle de semi-vocalisation de [e] e−→ [j] / _V

Une règle générale peut être déduite des règles précédemment énoncées : Figure 3.10 Règle générale de semi-vocalisation

o et e−→ [- continu] / _V

3.6.2 Élision vocalique

L'élision vocalique peut être dénie comme un phénomène par lequel une voyelle s'eace au contact d'une autre voyelle. L'eacement de la voyelle entraîne l'eacement de son ton. L'élision vocalique a lieu à la frontière morphologique.

En ikota, la voyelle [a] s'eace lorsqu'elle entre en contact avec une autre voyelle diérente ou semblable à elle.

Figure 3.11 Règle d'élision de [a] a−→ Ø/ _V

3.6.3 Exceptions aux règles de contact vocalique

Il existe des cas particuliers qui ne respectent pas les règles de contact vocalique. Observons l'exemple ci-dessous.

(12) a. ò-à-Ãá −→ [òÃá ] "tu manges" b. ò-é-Ãá −→ [óÃá] "tu as mangé"

Dans cet exemple, on s'attendrait à avoir une semi-voyelle en raison du contact de la voyelle [o] avec les voyelles [a] et/ou [e]. Ce qui apparaît, c'est un phénomène d'élision vocalique de V2. Actuellement, je ne sais pas expliquer ce phénomène ; je l'identie comme une exception aux règles précédemment énoncées. Un déplacement tonal peut aussi être observé dans l'exemple (12-b). En eet, lors de l'élision, le ton de la voyelle qui s'eace se retrouve sur la voyelle à l'origine de l'élision.

3.7 Récapitulatif

Dans ce chapitre, j'ai tout d'abord identié les unités distinctives. J'ai ainsi pro-cédé à l'inventaire des phonèmes (consonantiques et vocalique) et des tons à l'aide de l'opération de commutation.

Ensuite, j'ai abordé la syllabe. En me servant du niveau autosegmental de la pho-nologie multilinéaire, j'ai représenté les types syllabiques existants en ikota. Il ressort que l'ikota est une langue à syllabe ouverte : V, CV et que la nasale syllabique n est considérée dans cette langue comme un noyau à attaque vide car, comme les voyelles, elle porte un ton.

permet-tant de représenter certains phénomènes morphophonologiques. Ces derniers inuent sur la morphologie car ils interviennent dans le processus de formation des mots. Dans le chapitre (4), nous verrons que bon nombre d'exposants de classes nominales subissent ces phénomènes de contact vocalique.

Chapitre 4

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