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Chez l’homme on distingue cinq classes d’immunoglobulines ou Ig : les Ig A, D, E, G et M. C’est la structure de la molécule d’immunoglobuline de classe G (IgG), d’un poids moléculaire de 150 kDa, qui a été le mieux étudiée (Baty & Chames, 2006). Précisons également que c’est la classe d’immunoglobulines qui nous intéresse plus particulièrement car tous les anticorps recombinants thérapeutiques utilisés à l’heure actuelle en font partie et c’est pourquoi la majeure partie des paragraphes suivants y sont consacrés.

Les IgG constituent les anticorps « conventionnels » protecteurs circulant dans le sérum. Ils se répartissent en quatre sous-classes IgG1, IgG2, IgG3 et IgG4 comportant respectivement des chaînes lourdes γ1, γ2, γ3 et γ4 et dont les taux sériques sont différents (Jefferis, 2009). Les différences structurales entre ces sous-classes incluent le nombre et la position des ponts disulfure dans la région hinge (zone charnière entre les domaines VH-CH1 et CH2-CH3, cf. figure 7) et la position des ponts disulfure qui relient les chaînes lourdes et légères.

Il est important de noter que chacune de ces sous-classes possède des fonctions effectrices qui lui sont propres. Quelle que soit la sous-classe d’IgG, les chaînes légères sont de type kappa ou de type lambda (Cκ à 60% ou Cλ à 40% chez l’homme). La reconnaissance de l’antigène se fait par une interaction directe entre le site de combinaison de l’anticorps et une très petite portion de l’antigène natif que l’on appelle épitope.

Les IgG sont les immunoglobulines majoritaires (75 à 80% des anticorps circulants) et sont constituées de deux chaînes lourdes identiques (HC pour Heavy Chain) d’environ 50 kDa et de deux chaînes légères identiques (LC pour Light Chain) d’environ 25 kDa. Chacune des chaînes est organisée en domaines d’environ 110 acides aminés, deux pour les chaînes légères (appelés VL et CL) et quatre pour les chaînes lourdes (VH, CH1, CH2 et CH3) (cf. figure 7).

Figure 7: Représentation schématique de la structure d’un anticorps; source inconnue.

Les parties variables sont représentées sur fond bleu, les parties constantes sur fond brun. VH=partie variable de la chaîne lourde; VL=partie variable de la chaîne légère; CH=partie constante de la chaîne lourde; CL=partie

constante de la chaîne légère.

Les domaines VL et VH sont appelés domaines variables, ce sont ceux qui lient l’antigène. Chaque domaine variable possède trois boucles hypervariables appelées CDR (Complementarity Determining Region) qui se caractérisent par une très grande variabilité en acides aminés d’un anticorps à l’autre (5 à 10 acides aminés par CDR). Ces régions constituant le site de combinaison antigénique représentent 5% de la partie variable et sont adjacentes à des zones présentant moins de variabilité et constituant l’armature (charpente ou framework = FR) du segment variable. Les domaines CL, CH1, CH2 et CH3 sont appelés domaines constants.

Chacune des chaînes lourde et légère consiste donc en une série de domaines alignés en tandem qui se replient de façon indépendante l’une de l’autre en deux feuillets β stabilisés par un pont disulfure intra-chaîne constituant une structure sphérique dont la partie interne est hydrophobe. La chaîne légère est reliée à la chaîne lourde par un pont disulfure localisé aux extrémités C-terminales des domaines CL et CH1. Les chaînes lourdes sont reliées entre elles par deux ponts disulfure localisés au niveau des acides aminés 226 et 229 situés entre les domaines CH1 et CH2 dans la région charnière (appelée hinge).

Cette zone, qui est plus ou moins longue selon le sous-type d’IgG, est riche en résidus proline et cystéine formant une région flexible dans les deux plans de l’espace.

La structure quaternaire mature d’un anticorps (HC2LC2) est formée par l’assemblage

de deux chaînes lourdes identiques attachées à deux chaînes légères identiques par un pont disulfure inter-chaine. Cet assemblage a lieu lors du transit dans la lumière du réticulum endoplasmique (RE) et est suivi du passage de l’anticorps natif à travers l’appareil de Golgi pour aboutir ensuite à l’obtention de sa structure tridimensionnelle finale et sa sécrétion dans le milieu.

On peut cliver une IgG par la papaïne et obtenir trois fragments d’environ 50kDa, dont deux sont identiques et comportent chacun un site de liaison pour l’antigène ; ce sont les fragments Fab pour « antigen binding » ; le troisième fragment possédant les fonctions dites effectrices comme la fixation au complément ou aux récepteurs Fc ; c’est le fragment Fc pour « cristallisable ». La pepsine coupe, quant à elle, la molécule d’IgG à la base des régions charnières, permettant ainsi d’obtenir le fragment F(ab’)2, le fragment Fc étant dégradé (cf.

figure 8).

Figure 8: Formats d’anticorps utilisés pour les applications thérapeutiques, d’après Peterson et al., 2006.

Chaque ovale représente un domaine particulier de l’immunoglobuline. Les ponts disulfures sont représentés en rouge et le polypeptide de liaison du scFVest représenté en bleu. F(ab’)2 = dimeric antigen binding fragment,

La conformation de l’anticorps, la structure des sucres qui y sont attachés et son oligomérisation sont nécessaires pour ses fonctions effectrices (cf. paragraphe II-D) mais aussi son transport intracellulaire. Dans les lymphocytes B immatures, les deux chaînes entrent dans le réticulum endoplasmique sous forme de polypeptides non repliés, qui sont ensuite modifiés et assemblés en une molécule complète dans sa conformation finale prête à être exportée. Hormis chez certains patients atteints de maladies dites « maladies des chaînes lourdes » (Wahner-Roedler et Kyle, 2005), les chaînes lourdes libres ne sont normalement pas exportées tant qu’elles ne sont pas assemblées aux chaînes légères, dont la synthèse commence plus tard, pour former des molécules complètes d’anticorps de structure quaternaire (Leitzgen et al., 1997). En revanche, la plupart des chaînes légères peuvent être exportées sous forme de monomères ou d’homodimères libres (Dul et al., 1996). Dans les lymphocytes B, les chaînes légères sont synthétisées 15 à 25% plus rapidement que les chaînes lourdes (Bergman et al., 1981) et l’isotype de la chaîne légère peut influencer la cinétique d’assemblage intracellulaire des IgG (Montano & Morrison, 2002).

Plusieurs protéines résidentes du réticulum endoplasmique sont impliquées dans le repliement et l’assemblage des anticorps. Parmi elles on trouve la protéine chaperonne BiP (immunoglobulin Binding Protein) et PDI (Protein Disulfide Isomerase) qui ont été largement étudiées et dont il a été montré qu’elles agissent de façon synergique sur le repliement et l’assemblage des protéines recombinantes lors de leur production par les cellules eucaryotes.

BiP se fixe de façon non covalente aux domaines hydrophobes des polypeptides partiellement ou pas repliés et assiste leur repliement en inhibant l’agrégation intra- ou intermoléculaire tant que les protéines n’ont pas atteint leur conformation correcte (Hendershot et al., 1987; Schlatter et al., 2005).

PDI, en association avec BiP favorise la formation de structures tridimensionnelles correctes en catalysant le réarrangement et la formation de ponts disulfure inter- et intra- chaînes. On considère généralement que le repliement des chaînes et leur assemblage sont des processus simultanés puisque les sous-unités non repliées sont plus « compétentes » pour l’assemblage que les structures complètement repliées (Kaloff & Haas, 1995; Lee et al., 1999; Vanhove et al., 2001; Gonzalez et al., 2002). Les molécules d’anticorps qui sont assemblées de façon incomplète ou incorrecte restent fixées à BiP et sont potentiellement dirigées vers des voies de dégradation.