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7.1. Pathophysiologie des neuropathies diabétiques

7.1.4. Stress oxydatif (ROS)

Une cellule ou organisme est en situation de stress oxydatif lorsque le niveau de production d’espèces oxydantes excède leur capacités anti-oxydantes. De manière générale et physiologique, la respiration aérobique, dépendante de l’oxygène, génère des radicaux libres tels que l’anion superoxyde (O2-) (Klatt et al., 2000). En effet, la

mitochondrie, par le biais de la respiration cellulaire et de la chaîne d’électrons, est la principale source de radicaux libres cellulaires. Outre la chaine de respiration électronique, certaines enzymes intracellulaires sont impliquées dans la génération d’espèces réactives oxygénés. Les plus connues sont la NADPH oxydase et la xanthine oxydase (XAO) (Harrison, 2002).

Brièvement, la NADPH oxydase est une enzyme membranaire ubiquitaire formée de 6 sous-unités, soit Rac (1 ou 2), et 5 sous-unités phox (gp91, p22, p40, p47 et p67). Le rôle primaire de la NADPH oxydase est de participer au processus de défense immunitaire en produisant des ROS, soit l’anion superoxyde. La NADPH oxydase génère l’anion superoxyde (O2.-) via le transfert d’un électron du complexe NADPH à

molécule d’hydrogène libre, soit : NADPH + 2O2 ↔ NADP+ + 2O2°- + H+. Notez que

la majeure partie de l’anion superoxyde générée par la NADPH oxydase l’est dans les phagosomes des neutrophiles et est utilisée pour détruire les microorganismes (bactéries) phagocytés par ces cellules. Par ailleurs, il est prouvé que l’anion superoxyde inhibe certains processus clés des bactéries et initierait la peroxydation lipidique de leurs membranes cellulaires causant leur mort. En outre, il existe deux inhibiteurs majeurs de la NADPH oxydase, soit l’apocynine et le diphenyleneiodinium (DPI) (Park et al., 2009). Ceux-ci sont surtout utilisés dans le traitement de l’athérosclérose (Curtiss, 2009). En somme, l’apocynine prévient l’assemblage des sous-unités de la NADPH oxydase, tandis que le DPI agit comme un inhibiteur irréversible de la NADPH oxydase en se liant de façon covalente à la sous-unité p47 phox du complexe, empêchant ainsi son fonctionnement (Tew, 1993).

La XAO est une enzyme membranaire ubiquitaire qui catalyse l’oxydation de l’hypoxanthine en xanthine, puis la transformation de la xanthine en acide urique (Harrison, 2002). La XAO génère majoritairement du peroxyde d’hydrogène, bien que dans certaines circonstances elle soit impliquée dans la génération d’anions superoxydes (Harrison, 2002). En terminant, il existe plusieurs inhibiteurs de la XAO, soit l’allupurinol (Pacher et al., 2006), l’oxypurinol (Spector, 1988) (traitement de la goutte) et l’acide phytique (antioxydant dans le traitement du cancer du colon) (Vucenik et al., 2003).

Les radicaux libres ayant pour base l’oxygène sont nommés espèces réactives oxygénées (ROS) et sont caractérisés par leur très haute réactivité due à la présence d’un de leurs électrons de valence qui est non apparié. De manière générale, les ROS peuvent endommager et modifier la fonction de l’acide ribonucléique (ARN), de l’ADN ainsi que des protéines, et sont impliquées dans le processus normal de vieillissement des organismes. En outre, les radicaux libres ainsi générés ne produisent pas nécessairement une situation de stress oxydant, puisque le corps possède plusieurs mécanismes de défense contre les radicaux libres. En effet, ils peuvent être détruits par plusieurs enzymes telles que la superoxyde dismutase, la catalase et la glutathione peroxydase, ainsi que par les vitamines A, C (acide ascorbique) et E (tocophérol) (Figueroa-Romero et al., 2008).

L’hyperglycémie chronique observée dans le diabète insulino- et non insulino- dépendant, entraîne la génération de ROS dans la cellule par plusieurs mécanismes. Tel qu’observé sur la figure 10, le glucose peut entraîner la génération d’AGE qui peuvent être oxydants (Baynes et al., 1999). Aussi, l’hyperglycémie entraîne une suractivation de la voie des polyols qui contribue à diminuer les ratios NADPH/NADP+, ce qui a pour conséquence de réduire les défenses antioxydantes de la cellule (Baynes et al., 1999).

Figure 10 : Les différentes voies biochimiques impliquées dans l’augmentation du

stress oxydatif sous l’effet de l’hyperglycémie chronique.

L’hyperglycémie observée chez les diabétiques entraîne une augmentation de l’activité de la nicotinamide adénine dinucléotide phosphate (NADPH) oxydase, de l’oxydation et de la glycation protéique et des enzymes antioxydantes (réduit leur activité). De plus, l’insuffisance rénale chez les diabétiques provoque des cas de cétose métabolique. Toutes ces voies ont pour effet d’augmenter les niveaux d’espèces réactives oxygénées. Celles-ci peuvent ensuite induire des dommages cellulaires. Adapté de Jain (Jain, 2006)

Les travaux de Xia (Xia et al., 1994) et King (King et al., 1996) démontrent que l’hyperglycémie entraîne la suractivation de la PKC, soit via la synthèse de DAG, par l’activation de la PLC ou par l’inhibition de la DAG kinase. Ainsi, la PKC induit une surproduction de ROS en activant la NADPH oxydase mitochondriale (Inoguchi et al., 2000). Ainsi, les anions superoxydes mitochondriaux inhibent l’activité de la glycéraldéhyde-3-phosphate déshydrogénase (GAPDH) qui, en fonction de plusieurs mécanismes, est impliquée dans le maintien de la balance antioxydante cellulaire.

La génération excessive de ROS induite par l’hyperglycémie ainsi que l’inhabilité des neurones à détruire ces radicaux libres causent la perte progressive des organelles et le mauvais fonctionnement de la membrane et du noyau cellulaire (Nishikawa et al., 2000). La longueur des axones rend ces derniers particulièrement sensibles aux neuropathies. En outre, elles sont directement en contact avec les vaisseaux sanguins et possèdent une large population de mitochondries (responsables de la production de la plus grande partie des ROS cellulaires). L’exposition des mitochondries aux ROS réduit progressivement leur activité et cause un déficit énergétique qui précipite la dégénération axonale présente dans la neuropathie diabétique. Les mitochondries sont également un centre névralgique de la régulation de la survie et de l’apoptose cellulaire. Ainsi, les atteintes aux mitochondries provoquent l’apoptose des axones neuronaux, par un processus impliquant l’activation des caspases (Palau et al., 2009; Qi et al., 2003). Préalablement, les mitochondries endommagées entrent dans un processus d’autodestruction appelé mitoptose. Ce processus est régulé en fonction des cycles de fusion et de fission des mitochondries. La fission des mitochondries est,

entre autres, régulée par la protéine reliée à la dynamine 1 (Drp1) qui se déplace du cytosol cellulaire à la mitochondrie en situation de stress (Twig et al., 2008). Notez que les niveaux de Drp1 sont élevés dans des modèles in vivo et in vitro de polyneuropathies diabétiques. Celle-ci participe à la dysfonction mitochondriale en réduisant la production d’ATP, provoquant ainsi la dégénérescence axonale (Leinninger et al., 2006).

Certaines études ont montré que le blocage du stress oxydatif via une modification de l’apport alimentaire en antioxydant avait permis de réduire les niveaux de ROS cellulaires chez des animaux diabétiques. En effet, l’administration d’acide alpha- lipoïque, de N-acétyl-L-cystéine (NAC), de vitamines A, C (acide ascorbique) et E (tocophérol), ou de resvératrol (vin rouge), a même permis de faire reculer les neuropathies affectant ces animaux. Par contre, plusieurs études menées chez l’humain avec certains de ces antioxydants présentent des résultats contradictoires qui ne permettent pas, pour le moment, de conclure à un réel bénéfice de la prise d’antioxydants pour traiter les neuropathies diabétiques (Pop-Busui et al., 2006).

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