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Chapitre 1 : Synthèse et étude du fonctionnement d’un [2]caténane auto-immolable pour la

A. Stratégie de synthèse :

Le premier caténane 47 étudié a été synthétisé selon le schéma rétrosynthétique 28. Cette stratégie conduit à la formation des deux énantiomères (Rmt)-47 et (Smt)-47 de caténane. La

chiralité mécanique topologique des caténane, noté (Rmt) ou (Smt), est attribuée en utilisant les règles expliquées par le groupe de Goldup en 201883 : sur un des macrocycles du [2]caténane, établir l’atome de plus haute priorité grâce aux règles de Cahn-Ingold-Prelog (CIP) et lui attribuer la lettre A (Schéma 27). En partant de A, déterminer l’atome de plus haute priorité avec les règles CIP et lui attribuer la lettre B. Répéter cette opération sur le deuxième macrocycle en utilisant les lettres C et D. Maintenant, observer le deuxième macrocycle selon le vecteur 𝐴𝐵⃗⃗⃗⃗⃗ de façon à ce que ce dernier passe à l’intérieur du deuxième macrocycle. Si le vecteur 𝐶𝐷⃗⃗⃗⃗⃗ tourne le long du macrocycle dans le sens horaire, la chiralité topologique est notée (Rmt). Si le vecteur CD tourne dans le sens anti-horaire, la chiralité topologique est notée (Smt). Par soucis de clarté des schémas, seul l’énantiomères (Rmt)-47 sera représenté par la

suite, mais toutes les réactions et analyses ont été réalisées sur le mélange racémique.

Schéma 27. Méthode d'attribution des stéréodescripteurs mécaniques (Rmt) et (Smt)

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Les deux énantiomères du caténane 47 seront obtenus par la méthode de reconnaissance passive par un métal entre le complexe de bis-phénantroline-cuivre (I) 39 et le bis-carbonate

90. Le complexe 39 sera obtenu par double complexation de la phénantroline 91 autour d’un

ion cuivre (I). Ainsi le caténane 47 est issu d’une stratégie convergente entre les deux intermédiaires clés 39 et 90 dont les synthèses seront détaillées.

Schéma 28. Stratégie de synthèse du [2]caténane 47

B. Synthèse des synthons intermédiaires

1. Synthèse du complexe bis-phénantroline 39 :

La formation du complexe 39 nécessite tout d’abord la synthèse de la phénantroline 91. Celle-ci a été réalisée en six étapes à partir de la 2,9-diméthylphénantroline 92 et du 4-aminophénol

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Schéma 29. Synthèse de la phénantroline 91

Les étapes de synthèse conduisant au composé 95 sont tirées de la littérature84. Une première étape de di-oxydation des méthyles de la phénantroline 92 en présence de dioxyde de sélenium au reflux du 1,4-dioxane conduit à l’obtention du di-aldéhyde 93 avec un rendement de 82 %. La réduction des deux fonctions aldéhydes par du borohydrure de sodium dans l’éthanol permet la formation des deux alcools benzyliques du composé 94 avec un rendement de 67 %. Les deux alcools sont ensuite activés par une réaction de double tosylation en présence de soude et de chlorure de tosyle, conduisant à la formation du produit 95 avec un rendement de 77 %.

En parallèle, l’aniline du 4-aminophénol 96 est protégé sous la forme du carbamate de tert-butyle 97 en présence de dicarbonate de di-tert-tert-butyle avec un rendement de 96 %. La substitution des fonction tosyles du composé 95 par le phénol 97 en présence de carbonate de potassium conduit à la formation du composé 98 dont la structure est confirmée par l’analyse du spectre RMN 1H avec la présence des deux doublets (3J = 8,3 Hz) à 8,30 et 7,84

ppm caractéristiques des protons aromatiques B et C de la phénantroline ainsi qu’au singulet à 1,50 ppm caractéristique du groupement tert-butyle. Enfin, les deux anilines sont déprotégées par action de l’acide trifluoroacétique afin d’obtenir la phénantroline 91 avec un

84 Chandler, C. J.; Deady, L. W.; Reiss, J. A. J. Heterocycl. Chem. 1981, 18 (3), 599–601 ; Higashi, T.; Inami, K.; Mochizuki, M. J. Heterocycl. Chem. 2008, 45 (6), 1889–1892 ; Wang, K.; Yee, C.-C.; Au-Yeung, H. Y. Chem. Sci.

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rendement de 81 % sur deux étapes. La disparition du signal RMN 1H des tert-butyles et l’apparition d’un singulet large à 4,68 ppm confirme la présence des anilines libre du produit

91. La synthèse de la phénantroline 91 a été réalisée en six étapes avec un rendement global

de 33 %.

La formation du complexe 39 a ensuite été étudiée en mettant en présence 2,05 équivalents de phénantroline 91 avec un équivalent du complexe [Cu(MeCN)4PF6] comme source de cuivre (I) dans l’acétonitrile (Schéma 30). L’obtention d’une solution rouge foncée lors de l’ajout du cuivre est caractéristique de la formation immédiate du complexe bis-phénantroline-cuivre (I).

Schéma 30. Formation du complexe 39

L’analyse RMN 1H de la poudre obtenue après évaporation du brut montre des différences de déplacements chimiques significatives entre la phénantroline 91 et le complexe 39 confirmant la formation de ce dernier (Figure 20). La chélation du cuivre (I) par les atomes d’azote des motifs phénantrolines entraîne un déblindage des signaux des protons aromatiques A, B et C avec des variations de déplacements chimiques de respectivement 0,29, 0,23 et 0,21 ppm. A l’inverse, les protons aromatiques en ortho et méta de chaque aniline sont situés dans le cône de blindage du groupement phénantroline de l’autre ligand, entraînant un blindage important de leurs signaux (Δδ = 0.78 et 0.61 ppm). Cette observation est en adéquation avec la littérature où il a été montré que, dans des complexes similaires de phénantrolines, les groupements aromatiques des ligands s’orientaient parallèlement entre eux85. Une analyse RMN 19F montre également la présence de deux signaux à -69,31 et -70,82 ppm, correspondant au doublet du couplage F-P, caractéristiques de la présence du contre ion PF6

-.

85 Price, J. R.; Clegg, J. K.; Fenton, R. R.; Lindoy, L. F.; McMurtrie, J. C.; Meehan, G. V.; Parkin, A.; Perkins, D.; Turner, P. Aust. J. Chem. 2009, 62 (9), 1014-1019 ; Yee, C.-C.; Ng, A. W. H.; Au-Yeung, H. Y. Chem. Commun.

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Figure 20. Spectre RMN 1H comparatif des composés 39 et 91 (500 MHz, DMSO-d6, 20°C)

La formation du complexe de phénantroline 39 à partir du composé 91 par reconnaissance passive du cuivre (I) est donc quasi immédiate et quantitative.

2. Synthèse du bis-carbonate 90 :

La synthèse du bis-carbonate 90 fait appel à un précurseur 102 commun à toutes les synthèses de macrocycle du laboratoire (Schéma 31). Ce dernier est obtenu en trois étapes à partir du 1,3-diméthanolbenzène 99 commercial selon la méthode développée par le groupe de Shabat86. Dans un premier temps, les alcools benzyliques sont protégés sous forme d’éther silylé 100 en présence de chlorure de tert-butyl-diméthyl silane et d’imidazole avec un rendement de 97 %. Une réaction de nitration du composé 100 par de l’acide nitrique 66 % dans l’anhydride acétique conduit au composé 101. La séparation des composés 100 et 101 étant difficile, le produit nitré est directement engagé dans une étape d’hydrogénation catalytique en présence de palladium black et de formiate d’ammonium permettant la formation de l’aniline 102 avec un rendement de 61 % sur deux étapes.

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Schéma 31. Synthèse de l'aniline 102

Cette aniline 102 est une plateforme pour la synthèse de tous les bis-carbonates nécessaires à la synthèse des macrocycles utilisés par le laboratoire. En effet, le groupement amine offre un point d’ancrage polyvalent vis-à-vis de nombreuses fonctionnalités selon le macrocycle envisagé. Ainsi, pour le caténane 47, l’aniline 102 est protégée sous la forme du carbamate d’allyle 103 en présence de chloroformiate d’allyle et de pyridine avec un rendement de 94 % (Schéma 32). La déprotection des alcools benzyliques par l’acide paratoluènesulfonique (APTS) conduit à la formation du diol 104 qui est directement activé sous la forme du bis-carbonate 90 en présence du chloroformiate de para-nitrophényle et de pyridine avec un rendement de 68 % sur deux étapes. L’apparition en RMN 1H des deux doublets (3J = 9,3 Hz,

4H) à 8,23 ppm correspondant aux protons en ortho des fonctions NO2 et du multiplet (intégrant pour 1H) à 5,97 ppm caractéristique du CH du groupement allyle confirme la formation du bis-carbonate 90.

Schéma 32. Synthèse du bis-carbonate 90

Le bis-carbonate 90 a donc été synthétisé en 6 étapes avec un rendement global de 38 %.

3. Synthèse du macrocycle 106 :

Avant de synthétiser le [2]caténane 47, nous avons d’abord préparé le macrocycle 106 afin de pouvoir comparer les RMN 1H du macrocycle simple et du caténane (Schéma 33). La dianiline

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91 et le bis-carbonate 90 sont placés en réaction en présence de 1-hydroxybenzotriazole

(HOBt) dans le DMF à une concentration de 1.10-3 M afin d’éviter des réactions de polymérisation trop importantes. Des travaux antérieurs effectués au laboratoire ont montré que la première réaction d’addition-élimination s’effectue sur le carbonate en position para de l’azote du composé 90, conduisant à l’intermédiaire 10587. Une deuxième réaction d’addition sur le deuxième carbonate permet d’obtenir le macrocycle 106 avec un rendement de 32 %.

Schéma 33. Synthèse du macrocycle 106

La formation du macrocycle 106 est confirmée par HRMS-ESI+ avec un ratio m/z de 712,2398 correspondant à l’adduit [106 + H]+ pour un m/z calculé de 712,2402. L’analyse RMN 1H montre également des signaux caractéristiques avec les deux doublets (3J = 8,3 Hz, 4H) à 8,50

et 7,88 ppm correspondant aux protons B, B’ et C, C’ respectivement du motif phénantroline et le multiplet à 5,96 ppm correspondant au CH du groupement allyle.

C. Synthèse et étude du caténane 47 :

1. Synthèse du caténane 47 :

Le [2]caténane 47 a été synthétisé par la méthode de reconnaissance passive par un métal à partir de la phénantroline 91 et du bis-carbonate 90 (Schéma 34). Le complexe 39 est préalablement formé en mettant deux équivalents de la di-aniline 91 en présence d’un équivalent de cuivre (I). Après une heure d’agitation, le mélange est dilué et le bis-carbonate

90 est ajouté. La réaction est suivie par HPLC. Après 4 jours, une purification sur colonne

87 Grinda, M.; Clarhaut, J.; Tranoy-Opalinski, I.; Renoux, B.; Monvoisin, A.; Cronier, L.; Papot, S. ChemMedChem

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chromatogaphique en phase inverse permet de récupérer le caténane 47 avec un rendement de 45 %.

Schéma 34. Synthèse du [2]caténane 47

Le caténane 47 a été caractérisé par HRMS-ESI+ avec un ratio m/z 1485,3944 correspondant à l’ion chargé [47-PF6]+ pour un m/z calculé de 1485,3949, confirmant ainsi la présence de cuivre (I) à l’intérieur du caténane. Une analyse comparative des spectres RMN 1H du caténane 47 et du macrocycle 106 a été réalisée afin de mettre en évidence l’entrelacement du caténane (Figure 21).

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Figure 21. Comparaison RMN 1H du caténane 47 et du macrocycle 106 (500 MHz, DMSO-d6, 20°C)

Les protons A et A’ des motifs phénantrolines sont situés à l’intérieur des cavités de chaque macrocycle, ce qui entraîne un fort blindage de leur signal (Δδ = 0,85 ppm). Cet effet est également observé pour les protons E, E’, F et F’ (Δδ = 0,97 et 1,51 ppm) qui, malgré leur position à l’extérieur de la cavité des macrocycles, sont placés dans le cône de blindage des motifs phénantrolines du macrocycle opposé. Cela concorde avec l’observation précédente sur le complexe de phénantroline 39. Le déblindage des protons H, I et J (Δδ = 0,29 et 0,45 ppm) situés au pied des macrocycles confirme également l’entrelacement de la structure. Les protons des gâchettes carbamates d’allyles, situées à l’extérieur des macrocycles, ne subissent que très peu l’effet de l’entrelacement.

2. Etude du fonctionnement du caténane 47 :

Avant de tester directement le fonctionnement du caténane 47, nous avons voulu vérifier le phénomène d’activation du catalyseur par ouverture du caténane. Selon notre hypothèse, lorsque l’atome de cuivre(I) est piégé dans le caténane, il perd son activité catalytique en raison de la liaison mécanique qui réduit considérablement son accessibilité. A l’inverse, dans

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le complexe 39, le cuivre(I) peut servir de catalyseur. Afin de vérifier cela, nous avons étudié la réactivité de l’atome de cuivre(I) vis-à-vis d’une réaction de cycloaddition [3+2] alcyne-azoture (Schéma 35). Dans un premier temps, une réaction témoin est réalisée en mettant le complexe [Cu(MeCN)4PF6] en présence de la coumarine 107 portant une fonction alcyne et d’azoture de benzyle. La même réaction est effectuée en utilisant cette fois le complexe de cuivre(I) 39. Enfin, une troisième réaction est réalisée en utilisant le caténane 47. Les trois réactions sont effectuées dans un mélange DMSO/MeOH 1/1 à 60 °C et sont suivies en parallèle par HPLC.

Schéma 35. Comparaison de réactivité du complexe 39 et du caténane 47 vis-à-vis de la formation du triazole

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Au bout de 24 heures, la formation du triazole 108 est observée de manière quasi quantitative pour les réactions utilisant le Cu(MeCN)4PF6 (Figure 22a) et le complexe de phénantroline 39 (Figure 22b). En revanche, aucun produit de réaction ou de dégradation n’est observé en présence du caténane 47 (Figure 22c). Une analyse HPLC au bout de cinq jours ne montre toujours aucun signe de la formation du triazole 108. Ces premières expériences permettent de confirmer l’effet de la liaison mécanique sur l’activité du catalyseur. Ainsi, notre hypothèse de fonctionnement du caténane 47 est vérifiée : lorsque celui-ci est « fermé », le catalyseur n’est pas actif, et lorsqu’il est « ouvert », le catalyseur est activé.

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Figure 22. Suivi HPLC de la formation du triazole 108 en fonction du catalyseur utilisé : a) Cu(MeCN)4PF6 ;

b) complexe 39 ; c) caténane 47

Après avoir validé cette première hypothèse, la deuxième étape de cette étude consiste à tester l’ouverture du caténane en présence d’un déclencheur. Le mécanisme théorique d’ouverture du caténane 47 est présenté sur le Schéma 36.

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Schéma 36. Mécanisme théorique d'ouverture du caténane 47 en présence d'un déclencheur

En présence de palladium(0) et d’un nucléophile, la double réaction de Tsuji-Trost sur les deux gâchettes carbamate d’allyle du caténane 47 permet de libérer la di-aniline 46. Une première réaction d’élimination 1,6 conduit à l’ouverture d’un premier bras de chaque macrocycle pour former le composé 109. Les azaquinones formées peuvent être piégées par des nucléophiles du milieu afin de régénérer les anilines 110, qui peuvent effectuer une deuxième réaction d’élimination 1,4 conduisant à la libération finale du complexe 39. Les nouvelles azaquinones formées sont à nouveau piégées pour former le composé 111.

Cette ouverture a été testée en mettant le caténane 47 en présence de tétrakis(triphénylphosphine)palladium (0) et d’aniline dans un mélange DMSO/MeOH 50% à 60°C (Schéma 37). La réaction est suivie par HPLC (Figure 23).

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Schéma 37. Ouverture du caténane 47 en présence de Pd(PPh3)4 et d'aniline

Figure 23. Suivi HPLC de l'ouverture du caténane 47 en présence de Pd(PPh3)4 et d’aniline

Au bout de 2 heures, le signal initial correspondant au caténane 47 (rouge) a disparu au profit d’un nouveau pic plus polaire. Une analyse de suivi LC-MS permet d’attribuer à ce signal un ratio m/z de 1318,3538, correspondant au caténane 46 (bleu) dont les anilines ont été libérées. L’activation des deux gâchettes carbamates d’allyle est donc rapide. Après 24 heures de réaction, une disparition du signal du caténane 46 est observée et l’allure du chromatogramme témoigne d’un brut complexe avec de nombreux produits plus polaires. Ceci peut s’expliquer par la présence dans le milieu de plusieurs produits possibles issus du piégeage des azaquinones libérées. Cela montre également que les réactions d’éliminations conduisant au complexe 39 sont les étapes lentes de l’ouverture du caténane. Néanmoins,

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l’apparition du signal du complexe de phénantroline 39 (vert) permet de confirmer l’ouverture du caténane 47.

Après avoir vérifié nos deux hypothèses sur le fonctionnement du caténane 47 (activation du catalyseur et ouverture du caténane), nous avons effectué un test sur le fonctionnement global de celui-ci. Pour cela, le caténane 47 a été mis en présence de la coumarine 107, d’azoture benzylique, de 0,1 équivalent du complexe [Pd(PPh3)4] et d’aniline dans les conditions décrites précédemment et la réaction a été suivie par HPLC (Schéma 38).

Schéma 38. Mise en fonctionnement du caténane 47 en présence de la coumarine 101 et d'azoture benzylique

Au bout de 2 heures, le signal correspondant au caténane 47 a disparu au profit du signal correspondant au caténane déprotégé 46. Après 24 heures de réaction, l’ouverture du caténane est confirmée avec l’apparition du signal correspondant au complexe bis-phénantroline-cuivre (I) 39. En revanche, au bout de 3 jours de réaction et malgré la diminution progressive du pic de la coumarine 107, aucun produit correspondant au triazole

108 n’apparaît et un nouveau produit plus apolaire se forme. Après purification et analyse

RMN 1H, ce nouveau produit s’avère correspondre au produit de couplage alcyne-alcyne 112 (Schéma 39).

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Schéma 39. Produit de couplage 112 obtenu lors de la mise en fonctionnement du caténane 47

Un deuxième essai est réalisé de manière séquentielle : le caténane 47 est d’abord ouvert en présence de [Pd(PPh3)4] et d’aniline puis, au bout de 24 heures, la coumarine 107 et l’azoture benzylique sont ajoutés. Néanmoins, ce deuxième essai conduit au même résultat.

Plusieurs conditions opératoires ont ensuite été testées en faisant varier le solvant, la température, la source de palladium, la concentration ou encore la nature de l’alcyne et de l’azoture. Malgré les nombreux essais réalisés, aucun n’a permis de favoriser la formation du triazole 108. Au vu des résultats précédemment obtenu avec le complexe 39, cette différence de réactivité semble être liée à l’ajout de palladium dans le milieu réactionnel. Une analyse RMN 1H des produits plus apolaires formés lors de chaque essai a permis de définir ceux-ci comme étant des produits d’homo-couplage alcyne-alcyne. Pour expliquer la formation de ces produits, nous proposons le mécanisme réactionnel décrit sur le schéma 40.

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Schéma 40. Mécanisme réactionnel proposé pour la formation des di-ynes obtenus lors du fonctionnement du

caténane 47 en présence de Pd(PPh3)4

Le cycle catalytique est initié par l’oxydation du palladium (0) du milieu en palladium (II) par l’oxygène de l’air conduisant à la formation de l’oxyde 113. Ce phénomène d’oxydation a été décrit dans une revue du groupe de Stahl88. Le palladium (II) du milieu peut ensuite réaliser une double réaction de transmétallation avec l’acétylénure de cuivre (I) 114 afin de former le composé 115. Une élimination réductrice conduit alors à la formation du diyne 116 et à la régénération du palladium (0) du milieu, qui peut alors recommencer le cycle catalytique89. Un dernier test nous a permis de vérifier l’activité du complexe de cuivre (I) en présence ou non de Pd(PPh3)4. Ainsi, lorsque le palladium est présent dans le milieu, la formation du triazole 108 catalysée par le complexe 39 est inhibée au profit de la formation du diyne 112 (Figure 24).

88 Wang, D.; Weinstein, A. B.; White, P. B.; Stahl, S. S. Chem. Rev. 2018, 118 (5), 2636–2679.

89 Chinchilla, R.; Nájera, C. Chem. Rev. 2014, 114 (3), 1783–1826 ; Stefani, H. A.; Guarezemini, A. S.; Cella, R.

Tetrahedron 2010, 66, 7871–7918 ; Siemsen, P.; Livingston, R. C.; Diederich, F. Angew. Chem. Int. Ed. 2000, 39,

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Figure 24. Activité catalytique du complexe 39 a) sans palladium ; b) en présence de Pd(PPh3)4

L’utilisation de cette première gâchette carbamate d’allyle qui nécessite une activation par du palladium ne semble donc pas adaptée au fonctionnement de notre caténane. En effet, la présence de palladium dans le milieu réactionnel perturbe l’activité catalytique de l’ion cuivre (I). Nous avons donc synthétisé un autre caténane portant une gâchette sensible à une autre méthode d’activation.

III. Synthèse et étude du [2]caténane 51 :

A. Stratégie de synthèse :

A l’instar du caténane 47, la synthèse du second caténane 51, portant des gâchettes Fmoc, a été envisagée via la méthode de reconnaissance passive par un métal selon le schéma rétrosynthétique 41. Ainsi, les deux énantiomères du [2]caténane 51 seront obtenus par une double réaction de macrocyclisation à partir du complexe de bis-phénantroline-cuivre (I) 39 et du bis-carbonate 117.

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Schéma 41. Stratégie de synthèse du [2]caténane 51

B. Synthèse des synthons intermédiaires

1. Synthèse du bis-carbonate 117 :

Le bis-carbonate 117 est obtenu à partir de l’aniline 102 (Schéma 42). Celle-ci est protégée sous forme de carbamate de Fmoc en présence de chloroformiate de Fmoc et de pyridine avec un rendement de 92 %. Les deux éthers silylés benzyliques du composé 118 sont déprotégés en présence d’APTS, puis le diol 119 est directement activé sous forme de carbonate de para-nitrophényle en présence du chloroformiate correspondant avec un rendement de 48 % sur deux étapes. Le bis-carbonate 117 est ainsi obtenu en trois étapes à partir de l’aniline 102 avec un rendement global de 30 %. L’apparition en RMN 1H du doublet (3J = 9,2 Hz, 4H) à 8,26

ppm correspondant aux protons en ortho des fonctions NO2, du doublet (3J = 6,9 Hz, 2H) à

4,52 ppm et du triplet (3J = 6,9 Hz, 1H) à 4,30 ppm, caractéristiques respectivement du CH2 et du CH du groupement Fmoc, confirme la formation du bis-carbonate 117.

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Schéma 42. Synthèse du composé 117 à partir de l'aniline 102

2. Synthèse du macrocycle 120 :

Le macrocycle 120 est synthétisé en amont du caténane 51 afin de pouvoir comparer les spectres RMN 1H des deux composés (Schéma 43). Il est obtenu par réaction de double addition de la di-aniline 91 sur le bis-carbonate 117 en présence de HOBt à une concentration de 1.10-3 M dans le DMF. Le macrocycle est isolé avec un rendement de 41 %.

Schéma 43. Synthèse du macrocycle 120

La formation du macrocycle 120 est confirmée par HRMS-ESI+ avec un ratio m/z de 850,2875 correspondant à l’adduit [120 + H]+ pour un m/z calculé de 850,2871. L’analyse du spectre

82

RMN 1H montre également des signaux caractéristiques avec les deux doublets (3J = 8,3 Hz) à

8,50 et 7,90 ppm correspondant aux protons B, B’ et C, C’ respectivement du motif phénantroline et le triplet (3J = 6,8 Hz, 1H) à 4,28 ppm correspondant au CH du groupement

Fmoc.

C. Synthèse et étude du [2]caténane 51 :

1. Synthèse du [2]caténane 51 :

Le [2]caténane 51 a également été synthétisé par la méthode de reconnaissance passive par un métal à partir de la phénantroline 91 et du bis-carbonate 117 (Schéma 44). Le complexe 39 est préalablement formé en mettant deux équivalents de di-aniline 91 en présence d’un équivalent de cuivre (I). Après une heure d’agitation, le mélange est dilué et le bis-carbonate

117 est ajouté. La réaction est suivie par HPLC. Après 4 jours, une purification sur colonne

chromatographique en phase inverse permet d’isoler le caténane 51 avec un rendement de 29 %.

Schéma 44. Synthèse du caténane 51

Le caténane 51 a été caractérisé par HRMS-ESI+ avec un ratio m/z de 1761,4890 correspondant à l’ion chargé [51-PF6]+ pour un m/z calculé de 1761.4888. Une analyse comparative des

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