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Vers la conception de réseaux moléculaires basés sur la combinaison d'architectures entrelacées

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Academic year: 2021

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Submitted on 2 Jul 2021

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Vers la conception de réseaux moléculaires basés sur la

combinaison d’architectures entrelacées

Adrien Bessaguet

To cite this version:

(2)

THESE

Pour l’obtention du Grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE POITIERS

(Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées)

Diplôme National - Arrêté du 25 Mai 2016)

Ecole Doctorale : Chimie Ecologie Géosciences Agrosciences « Théodore Monod » Secteur de Recherche : Chimie Organique, Minérale, Industrielle

Présentée par :

Adrien BESSAGUET

∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞

VERS LA CONCEPTION DE RÉSEAUX MOLÉCULAIRES BASÉS SUR

LA COMBINAISON D’ARCHITECTURES ENTRELACÉES

∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞ Directeur de Thèse :

Pr Sébastien PAPOT, Professeur, Université de Poitiers Co-Directrice de Thèse :

Dr. Isabelle OPALINSKI, Chargée de Recherche CNRS, Université de Poitiers ∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞

Soutenue le 15 Décembre 2020 devant la Commission d’Examen ∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞

JURY

Pr. E. POUPON Professeur, Université de Paris-Saclay Rapporteur

Dr. F. COUTROT Maître de Conférences, Université de Montpellier 2 Rapporteur Dr. L. FISCHER Chargée de Recherche CNRS, Université de Bordeaux Examinateur

Pr. Y. BLERIOT Professeur, Université de Poitiers Examinateur

Pr. S. PAPOT Professeur, Université de Poitiers Examinateur

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Remerciements

Ce travail de recherche a été effectué au sein de l’équipe E5 : Synthèse Organique de l’Institut de Chimie des Milieux et Matériaux de Poitiers, UMR CNRS 7285, avec le soutien financier du Ministère de la Recherche.

Je souhaite tout d’abord remercier Monsieur le Professeur Yannick Pouilloux (Directeur de l’Institut de Chimie des Milieux et Matériaux de Poitiers) pour m’avoir accueilli au sein de l’Institut et m’avoir permis d’y effectuer mes travaux de recherche.

Je tiens à remercier très sincèrement Monsieur Sébastien Papot (Professeur à l’Université de Poitiers) pour m’avoir proposé un projet de recherche innovant et extrêmement passionnant. C’était un plaisir de travailler avec toi. Merci d’avoir pris du temps pour me conseiller et m’écouter. Merci de m’avoir laissé autant d’autonomie sur ce projet, j’espère avoir été à la hauteur. Merci pour ta pédagogie, pour ta bonne humeur et ton optimisme permanent, pour tes blagues, parfois douteuses, mais toujours bienvenues. Merci pour tes discours philosophiques, toujours à même de me faire réfléchir sur le pourquoi de la vie l’espace de cinq secondes. Je sors grandie de ces trois années de recherche et tu y es pour beaucoup. J’espère de tout cœur pouvoir retravailler avec toi d’ici quelques années. Encore une fois, merci.

J’adresse également un très, TRES grand merci à Madame Isabelle Opalinski (Chargée de Recherche CNRS à l’Université de Poitiers) pour avoir accepté de m’encadrer pendant ces trois ans sur ce projet de recherche. Je vais essayer de ne pas faire trop long, mais saches que tout ce qui suit vient du fond du cœur et que je pourrais m’éterniser un moment. Merci beaucoup d’avoir pris du temps chaque jour pour suivre l’avancement du projet. Merci d’avoir été présente à la paillasse avec moi. Merci pour ta playlist exceptionnelle, je dois l’écouter au moins trois fois par jour, si ce n’est plus. Merci d’avoir répondue présente à n’importe quel moment et de toujours m’avoir soutenu dans les choix que j’ai entrepris. Tu es quelqu’un que j’apprécie énormément et j’espère pouvoir garder contact une fois ce projet terminé.

A vous deux, je dis encore une fois un grand merci, je pense que je ne pouvais pas espérer de meilleurs encadrants de thèse.

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Un grand merci également à Madame Lucile Fischer (Chargée de Recherche CNRS à l’Université de Bordeaux) et Monsieur Yves Blériot (Professeur à l’Université de Poitiers) qui ont accepté d’examiner ces travaux de thèse.

Je remercie également l’ensemble de l’équipe E5 : Synthèse Organique, plus particulièrement Monsieur Sébastien Thibaudeau, co-responsable de l’équipe, pour m’avoir accueilli au sein du laboratoire.

Je remercie plus particulièrement l’ensemble de l’équipe Systèmes Moléculaires Programmés au sein de laquelle j’ai effectué ces trois années de recherche.

Un grand merci à l’ensemble du groupe de doctorants et post-doctorants, ceux toujours présents et ceux qui sont partis, qui ont participé à cette incroyable ambiance au laboratoire. C’était un plaisir de tous vous connaître. Un merci bien arrosé aux membres de ce que j’appellerais la dream-team, qui ont largement contribués au bon déroulement de ces trois années. Merci à Maxime pour tous ses enseignements et toutes ses histoires incroyables. Tu as enrichi mon vocabulaire de bon nombre d’expressions, toutes plus incroyables les unes que les autres. Merci à Paul pour toutes ces discussions NBA et ce Garen incroyable. On en entendra encore parler dans vingt ans. Merci à Thomas pour toutes ces parties de palet, peu importe le lieu. On doit toujours prendre notre revanche d’ailleurs. RENCONTRE ! Merci à Rémi pour tous ces fous rires et pour toutes ces années passées ensemble. Tu vois cheun finalement on aura été au bout du bout… Merci à Chad et ses flash grabs de l’enfer. Tu m’as beaucoup fait rire. Dorénavant tu seras « la terreur des minions ». Merci à Yvain pour toutes ces discussions sur tout et rien, c’est toujours un plaisir de parler avec toi. Merci aussi pour ta relecture, je n’en reviens toujours pas de ce scanner à détails que tu as dans les yeux… C’est un peu à cause de toi si j’écris ces remerciements à 5 h 48 du matin ! Merci à Ludivine d’avoir été la seule fille pour supporter notre groupe. T’as eu beaucoup de courage, il y a de sacrés loustiques dans le lot ! Merci à Poussin pour avoir bouché mon lavabo. Merci aussi de n’avoir jamais dit non à une bière. Je suis un peu déçu de t’avoir vu boire de l’eau mais tant pis, après tout nous ne sommes que des hommes. Merci à Anthony et à ta petite famille. Je vous souhaite plein de belles choses à Vienne. Merci à Benoît pour tous ces repas chez toi. C’était Byzance à chaque fois. Un délice. Et enfin merci à Hugo du haut de sa tour du Mordor. Merci d’avoir scruté de ton grand œil notre bâtiment pour nous prévenir de tout danger.

J’ai passé d’excellents moments avec vous tous. De collègues, vous êtes devenu des amis.

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de ma famille et de mes amis, Valentin, Audrey, Thomas et également ceux que j’oubli. C’est grâce à vous tous si j’en suis là aujourd’hui.

Merci également à Quentin Blancart Remaury d’avoir pris du temps pour effectuer les suivis LC-HRMS des dernières manips. Ça a pris du temps, mais ça en valait la peine.

(9)
(10)

1

Table des matières

Table des matières ... 1

Abréviations ... 5

Introduction générale ... 7

I. Généralités : ... 9

II. Les molécules entrelacées : ... 10

A. Les nœuds moléculaires : ... 11

B. Les rotaxanes : ... 14

III. Les machines moléculaires : ... 18

A. Les machines moléculaires entrelacées du vivant : ... 18

1. L’ATP synthase : ... 18

2. Le ribosome : ... 19

3. La protéine RecA :... 20

4. La λ-exonucléase : ... 21

B. Les machines moléculaires entrelacées synthétiques : ... 22

1. Les catalyseurs ON/OFF : ... 26

2. Les moteurs à carburant chimique : ... 29

3. Les pompes moléculaires : ... 30

4. Les machines à effet de surface : ... 31

5. Les machines moléculaires à activité biologique : ... 32

a. Les boucliers moléculaires : ... 32

b. Les nanovalves : ... 34

IV. Présentation du sujet : ... 36

Chapitre 1 : Synthèse et étude du fonctionnement d’un [2]caténane auto-immolable pour la détection et l’auto-amplification de signal ... 41

I. Introduction : ... 43

A. Objectif du projet : ... 43

B. Rappels bibliographiques : ... 46

1. Les systèmes d’amplifications : ... 46

a. Amplification du signal par catalyse simple : ... 50

b. Amplification du signal bi-catalytique : ... 51

c. Amplification du signal auto-induite : ... 52

d. Amplification du signal autocatalytique : ... 55

(11)

2

a. Synthèse de [2]caténane par interactions π-π : ... 57

b. Synthèse de [2]caténane par stabilisation radical-radical : ... 58

c. Synthèse de [2]caténane par pré-assemblage anionique : ... 59

d. Synthèse de [2]caténane par « active metal-template » : ... 60

e. Synthèse de [2]caténane par « passive metal-template » : ... 61

II. Synthèse et étude du [2]caténane 47 : ... 63

A. Stratégie de synthèse : ... 63

B. Synthèse des synthons intermédiaires ... 64

1. Synthèse du complexe bis-phénantroline 39 : ... 64

2. Synthèse du bis-carbonate 90 : ... 67

3. Synthèse du macrocycle 106 : ... 68

C. Synthèse et étude du caténane 47 : ... 69

1. Synthèse du caténane 47 : ... 69

2. Etude du fonctionnement du caténane 47 : ... 71

III. Synthèse et étude du [2]caténane 51 : ... 79

A. Stratégie de synthèse : ... 79

B. Synthèse des synthons intermédiaires ... 80

1. Synthèse du bis-carbonate 117 : ... 80

2. Synthèse du macrocycle 120 : ... 81

C. Synthèse et étude du [2]caténane 51 : ... 82

1. Synthèse du [2]caténane 51 : ... 82

2. Etude du fonctionnement du caténane 51 : ... 83

IV. Conclusion : ... 93

Chapitre 2 : Synthèse et étude du fonctionnement d’une polymérase artificielle basée sur une architecture moléculaire entrelacée ... 95

I. Introduction ... 97

A. Objectif du projet : ... 97

B. Rappels bibliographiques : ... 99

1. Les machines moléculaires entrelacées synthétiques itératives : ... 99

a. L’epoxydase de Nolte : ... 99

b. La polymérase synthétique d’Harada : ... 102

c. Le ribosome synthétique de Leigh : ... 104

2. Les stratégies de synthèse des [1]rotaxanes : ... 108

a. Substitution d’un bis-macrocycle (méthode directe) : ... 109

b. Synthèse de [1]rotaxane par changement topologique [2]-[1]rotaxane : ... 110

(12)

3

d. Synthèse de [1]rotaxane par auto-entrelacement du macrocycle : ... 112

e. Synthèse de [1]rotaxane par la méthode de reconnaissance active par un métal : ... 113

II. Synthèse et étude du [1]rotaxane 185 : ... 119

A. Stratégie de synthèse : ... 119

B. Synthèse des synthons intermédiaires : ... 121

1. Synthèse de la di-aniline 188 : ... 121

2. Synthèse du bis-carbonate 190 : ... 122

3. Macrocyclisation :... 122

4. Synthèse du stoppeur azoture 177 : ... 124

5. Synthèse du stoppeur amine 183 : ... 125

6. Synthèse du macrocycle 186 : ... 126

C. Synthèse et étude du [1]rotaxane 185 : ... 127

1. Synthèse du composé linéaire 211 : ... 127

2. Synthèse du [1]rotaxane 185 : ... 128

3. Etude du fonctionnement du [1]rotaxane 185 vis-à-vis d’une commutation topologique [1]-[2]rotaxane : ... 131

III. Synthèse et étude du [1]rotaxane 213 : ... 132

A. Stratégie de synthèse : ... 132

B. Synthèse du macrocycle 214 : ... 133

C. Synthèse et étude du [1]rotaxane 213 : ... 134

1. Synthèse du composé non entrelacé 217 : ... 134

2. Synthèse du [1]rotaxane 213 : ... 136

3. Etude du fonctionnement du [1]rotaxane 213 vis-à-vis d’un changement topologique [1]-[2]rotaxane : ... 138

IV. Synthèse et étude des groupements protecteurs benzoate 225 et nitrobenzoate 226 : ... 142

A. Synthèse des synthons intermédiaires : ... 143

1. Synthèse des macrocycles thiobenzoate 229 et thio-nitrobenzoate 231 : ... 143

2. Synthèse du stoppeur 224 : ... 144

3. Synthèse du fil 232 : ... 144

B. Etude de la réactivité des fonctions thioester 229 et 231 et de l’ester temporaire 232 : ... 145

1. Réactivité des groupements protecteurs 229 et 231 : ... 145

2. Réactivité de l’ester de 2,6-diphénylparanitrophénol : ... 147

C. Synthèse et étude du [2]rotaxane 226 : ... 149

1. Synthèse du [2]rotaxane 226 : ... 149

2. Fonctionnement du [2]rotaxane 226 : ... 151

(13)

4

A. Synthèse des synthons intermédiaires : ... 153

1. Synthèse de l’éther silylé 239 : ... 153

2. Synthèse du macrocycle 240 : ... 154

B. Etude de la déprotection du macrocycle 240 : ... 154

C. Synthèse et étude du [2]rotaxane 227 : ... 156

1. Synthèse du [2]rotaxane 227 : ... 156 2. Fonctionnement du [2]rotaxane 227 : ... 159 VI. Conclusion : ... 161 Conclusion générale ... 163 Partie expérimentale ... 167 I. Chemistry Section ... 169

A. Products and solvent: ... 169

B. Reaction analysis and purification: ... 169

C. Product analysis:... 169

D. HPLC method: ... 170

E. LC-HRMS method: ... 170

II. Experimental procedures ... 171

(14)

5

Abréviations

A

Å : angström

AcOEt : acétate d’éthyle

ADN : acide désoxyribonucléique ADP : adénosine diphosphate Alloc : allyloxycarbamate AMT : active metal template

(reconnaissance active par un métal) APTS : acide para-toluènesulfonique ARNm : acide ribonucléique messager ARNr : acide ribonucléique ribosomique ARNt : acide ribosomique transmetteur ATP : adénosine triphosphate

B Boc : tert-butoxycarbonyle BOP : hexafluorophosphate de (benzotriazol-1-yloxy)tris(diméthylamino)phosphonium C CBPQT4+ : cyclobisparaquat-(para-phénylène) CD : cyclodextrine Cys : cysteine D DCE : dichloroéthane DCM : dichlorométhane DIPEA : N,N-diisopropyléthylamine DMAP : 4-diméthylaminopyridine DMEDA : N,N-diméthyléthylènediamine DMF : diméthylformamide DMSO : diméthylsulfoxide DNP : dioxynaphtalène dpp : 2,9-diphényl-1,10-phénantroline DPpNP : 2,6-diphényl-para-nitrophényle E EDC : 1-éthyl-3-(3-diméthylaminopropyl)carbodiimide EP : éther de pétrole équiv. : équivalent

ESI+ : ionisation positive par électrospray et coll. : et collaborateurs

F

Fmoc : fluorénylméthoxycarbonyle FRET : transfert d’énergie par résonnance de type Förster

G

Gly : glycine

H

(15)

6

HPLC : high pressure liquid

chromatography (chromatographie liquid à haute pression)

HRMS : high resolution mass spectrometry (spéctrométrie de masse à haute

résolution) Hz : Hertz

I

IUPAC : international union of pure and applied chemistry M M : masse molaire N Nu : nucleophile P

PBS : tampon phosphate salin Pf : point de fusion

pH : potential hydrogène Ph : phényle

Pi : phosphate inorganique PMT : passiv metal template

(reconnaissance passive par un métal) ppm : partie par million

Py2+ : 2,6-diméthylpyridinium

R

RCM : ring closing metathesis (métathèse croisée à fermeture de cycle)

Rf : rapport frontal

RMN : résonance magnétique nucléaire

T

TA : température ambiante

TBAF : fluorure de tetrabutylammonium TBDMS : tert-butyldiméthylsilyle

tbpy : 4-tert-butylpyridine TFA : acide trifluoroacétique THF : tétrahydrofurane Ts : tosyle TTF : tétrathiafulvalène V V2+ : viologène dicationique Symboles δ : déplacement chimique Δ : chauffage à reflux

(16)

7

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(18)

9

I. Généralités :

L’essentiel de ce manuscrit se consacrant à la synthèse et à l’étude de machines moléculaires, il semble nécessaire dans un premier temps de définir ce terme. D’après le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, une machine peut être définie comme un objet fabriqué

complexe capable de transformer une forme d’énergie en une autre et/ou d’utiliser cette transformation pour produire un effet donné, pour agir directement sur l’objet de travail afin de le modifier selon un but fixé1.

Une « machine moléculaire » peut donc être considérée comme un ensemble d’éléments moléculaires capables, en réponse à un stimulus, de modifier leur état initial afin de produire un travail. Ce stimulus peut être de différentes natures : chimique, physique, biologique, etc2.

La synthèse de ces machines moléculaires et l’étude du contrôle de leur mouvement a notamment valu à J-P. Sauvage, Sir J. Fraser-Stoddart et B. Feringa le prix Nobel de chimie en 2016.

Malgré la grande diversité qui existe au sein des machines moléculaires, elles peuvent être classées en deux grandes familles : les moteurs et les interrupteurs3. Les moteurs permettent

la production d’un travail de façon cyclique : celui-ci est produit lors du passage de l’état initial à l’état secondaire mais également lors du retour à l’état initial comme un moteur thermique. Ainsi au bout d’un cycle de fonctionnement, le moteur revient à son état de base mais permet la production d’un travail mécanique comme par exemple la rotation d’une roue moléculaire4

(Schéma 1a).

En revanche, les interrupteurs ne produisent un travail que lors du passage à l’état secondaire, le retour à l’état initial fournissant le travail opposé. Pour simplifier, le principe de fonctionnement revient à celui de l’interrupteur marche/arrêt d’une ampoule : en position OFF, l’état initial, aucune lumière n’est produite, à l’inverse de la position ON, l’état secondaire, pour laquelle l’ampoule est allumée (Schéma 1b).

1 MACHINE : Définition de MACHINE https://www.cnrtl.fr/definition/machine (accessed Aug 4, 2020). 2 Balzani, V.; Credi, A.; Venturi, M. Molecular devices and machines: concepts and perspectives for the

nanoworld, 2. ed.; Wiley-VCH: Weinheim, 2008.

3 Kay, E. R.; Leigh, D. A.; Zerbetto, F. Angew. Chem. Int. Ed. 2007, 46 (1–2), 72–191.

4 Kudernac, T.; Ruangsupapichat, N.; Parschau, M.; Maciá, B.; Katsonis, N.; Harutyunyan, S. R.; Ernst, K.-H.;

(19)

10

Schéma 1. Principe simplifié de fonctionnement a) d'un moteur moléculaire b) d'un interrupteur moléculaire

A l’échelle macroscopique, les machines sont dépendantes de leur masse et fonctionnent principalement selon les lois de la gravité et de l’inertie. A l’échelle moléculaire, la diminution du système permet d’atténuer fortement ces forces au profit de la viscosité et du mouvement Brownien5.

La suite de cette introduction sera donc dédiée à la présentation d’une liste non exhaustive de machines moléculaires naturelles et synthétiques et de leurs applications. Les travaux de ce manuscrit se consacrant uniquement à la synthèse et l’étude de machines moléculaires « entrelacées », il est donc primordial dans un premier temps de décrire ce type de structure.

II. Les molécules entrelacées :

Parmi les nombreuses machines moléculaires synthétiques qui existent, un grand nombre repose sur des structures dites entrelacées. Par définition, deux éléments sont dits entrelacés s’ils sont liés par une liaison mécanique, ce qui les différencie des édifices supramoléculaires (Figure 1). Sir J. Fraser-Stoddart définit la liaison mécanique comme étant une « liaison avec laquelle au moins deux composants deviennent entrelacés mécaniquement l’un à l’autre, de quelque manière que ce soit »6. Ainsi, pour séparer les éléments du système, il est nécessaire

(20)

11

de rompre une liaison covalente. Les molécules entrelacées sont généralement classées selon deux catégories : les nœuds moléculaires et les rotaxanes.

Figure 1. a) Exemple de molécule entrelacée (Leigh et coll.)7 ; b) Exemple d'assemblage supramoléculaire (Beer

et coll.)8

A. Les nœuds moléculaires :

Les nœuds moléculaires sont des molécules constituées d’une ou plusieurs unités macrocycliques qui, lorsqu’elles sont représentées dans un plan, possèdent au minimum un point de croisement9. Les différents types de nœuds possibles sont répertoriés dans la table

ci-dessous (Figure 2).

7 Danon, J. J.; Krüger, A.; Leigh, D. A.; Lemonnier, J.-F.; Stephens, A. J.; Vitorica-Yrezabal, I. J.; Woltering, S. L.

Science 2017, 355 (6321), 159–162.

8 Langton, M. J.; Beer, P. D. Acc. Chem. Res. 2014, 47 (7), 1935–1949.

9 Adams, C. The knot book: an elementary introduction to the mathematical theory of knots; W.H. Freeman:

New York, 1994.

(21)

12

Figure 2. Table des nœuds

Selon la nomenclature d’Alexander-Briggs, il est possible de noter un nœud xzy : x représentant

le nombre de croisements, y le nombre d’éléments composants le nœuds et z le classement du nœud parmi les autres nœuds de mêmes valeurs x et y10.

Il existe de nombreux nœuds décrits dans la littérature, le plus simple étant le nœud 212

également appelé caténane. La nomenclature traditionnelle étant un peu complexe, les caténanes sont généralement notés avec le nombre de constituants placé entre crochets de la façon suivante : [2]caténane. Synthétisé pour la première fois en 1960 par Wasserman11, il

représente la première molécule entrelacée synthétique isolée (Figure 3).

(22)

13

Figure 3. Représentation schématique d'un [2]caténane

C’est cependant à partir de 1983 avec les travaux de J-P. Sauvage sur la synthèse d’un [2]caténane utilisant un gabarit (template) de cuivre (I)12 que la synthèse de nœuds

synthétiques va se démocratiser (Figure 4).

Figure 4. Premier [2]caténane synthétisé par Sauvage

Ainsi, des synthèses de caténanes de plus en plus complexes ont été développées, conduisant à la formation de structures avec de nombreux macrocycles entrelacés et de nombreux points de croisements (Figure 5). Les différentes méthodes de synthèse des caténanes seront traitées en introduction du premier chapitre de ce manuscrit.

(23)

14

Figure 5. a) Exemple de [4]caténane (Langton et coll.)13 ; b) Exemple de [2]caténane à 6 points de croisement

(Leigh et coll.)14

B. Les rotaxanes :

La deuxième famille de molécules entrelacées est celle des rotaxanes. La nomenclature IUPAC en donne la définition suivante : « arrangement moléculaire comprenant au moins une molécule dotée d’une section linéaire traversant au moins une partie macrocyclique d’une autre, ou de la même molécule, et possédant des groupements terminaux suffisamment volumineux pour empêcher son désenfilement »15. Plus simplement, ils sont constitués d’une

ou plusieurs unités macrocycliques (appelés « macrocycles ») dans lesquels passent une ou plusieurs structures linéaires (communément appelés « fils »). A chaque extrémité du fil, des

13 Langton, M. J.; Matichak, J. D.; Thompson, A. L.; Anderson, H. L. Chem. Sci. 2011, 2 (10), 1897–1901. 14 Danon, J. J.; Leigh, D. A.; Pisano, S.; Valero, A.; Vitorica‐Yrezabal, I. J. Angew. Chem. Int. Ed. 2018, 57 (42),

13833–13837.

(24)

15

groupements volumineux (communément appelé « bouchons » ou « stoppeurs ») empêchent le désentrelacement du macrocycle et assurent la stabilité de la structure (Figure 6). On parle d’hémi/pseudo-rotaxane lorsque la structure est dépourvue d’un ou des deux stoppeurs.

Figure 6. Représentation schématique d'un [1]rotaxane et d'un [2]rotaxane

(25)

16

Figure 7. Exemples de rotaxanes synthétiques : a) [2]rotaxane (Coutrot et coll.)16 ; b) [3]rotaxane (Mao et coll.)17

c) [n]rotaxane (Goldup et coll.)18

La toute première synthèse de [2]rotaxane a été effectuée par Harrison et Harrison en 1967 par une méthode statistique19. Le macrocyle 1 est greffé sur une résine puis mis en réaction

avec du décan-1,10-diol 2 et du chlorure de trityle (Schéma 2). Etant donné l’absence d’interaction stabilisante entre le macrocycle et le fil, le rendement en rotaxane 4 est extrêmement faible : après 70 cycles réactionnels et clivage de la résine, celui-ci est isolé avec un rendement de seulement 6 %. Bien que cette méthode fonctionne, elle n’est pas suffisamment efficace. Les chimistes ont donc dû mettre au point d’autres méthodes de synthèse. Les principales stratégies de synthèse de [1]rotaxane seront détaillées en introduction du chapitre 2 de ce manuscrit.

16 Legigan, T.; Riss-Yaw, B.; Clavel, C.; Coutrot, F. Chem. - Eur. J. 2016, 22 (26), 8835–8847. 17 Liu, G.; Zhu, J.; Zhou, Y.; Dong, Z.; Xu, X.; Mao, P. Org. Lett. 2018, 20 (18), 5626–5630.

(26)

17

Schéma 2. Première synthèse d'un [2]rotaxane par méthode statistique (Harrison et Harrison)

L’entrelacement des éléments confère certaines propriétés uniques à ce type de structure. D’abord, la liaison mécanique permet d’assurer la stabilité du système tout en conservant un degré de liberté au sein de celui-ci. Ensuite, comme les différents éléments interagissent entre eux, il est possible de moduler ces interactions grâce à un stimulus extérieur. Enfin, l’enchevêtrement des éléments entre eux permet d’augmenter la probabilité de rencontre de ceux-ci, facilitant ainsi leurs réactions20. Cet ensemble de propriété sera discuté et précisé

dans la suite de ce manuscrit.

Dans certains cas, la liaison mécanique permet de générer à elle seule de la chiralité sans que les différents constituants ne possèdent d’éléments de chiralité. Il est donc possible, selon l’orientation de l’entrelacement, d’obtenir des énantiomères et des diastéréoisomères (Figure

8). Cette propriété sera discutée plus en détail dans le chapitre 2 de ce manuscrit.

20 van Dongen, S. F. M.; Elemans, J. A. A. W.; Rowan, A. E.; Nolte, R. J. M. Angew. Chem. Int. Ed. 2014, 53 (43),

(27)

18

Figure 8. Représentation schématique de deux énantiomères de rotaxane

Après avoir décrit les structures entrelacées, la suite de cette introduction est consacrée à une présentation non exhaustive de quelques machines moléculaires naturelles et synthétiques entrelacées ainsi que leurs applications.

III. Les machines moléculaires :

L’inspiration des chimistes pour créer des machines moléculaires prend source dans l’étude des processus physiologiques et cellulaires nécessaires au bon fonctionnement des organismes vivants. En effet, ces organismes fonctionnent selon des mécanismes très complexes dont beaucoup reposent sur l’utilisation de machines moléculaires dont voici quelques exemples.

A. Les machines moléculaires entrelacées du vivant :

1. L’ATP synthase :

L’adénosine triphosphate (ATP), carburant naturel des processus biologiques, est produit en grande quantité dans l’organisme par l’ATP synthase à partir d’adénosine diphosphate (ADP) et de phosphate inorganique (Pi)21. L’ATP synthase est une enzyme se présentant comme un

pseudo-rotaxane et fonctionnant comme un moteur rotatif. Elle est composée de deux parties : un stator, comparable à un macrocycle statique, constitué des sous-unités a, b, α, β et δ, dans lequel passe un rotor, constitué des sous-unités c, γ et ε (Figure 9a)22.

21 Schliwa, M. Molecular Motors; Wiley-VCH: Weinheim, 2006.

(28)

19

Figure 9. a) Principe de fonctionnement de l'ATP synthase23 ; b) Mécanisme de rotation de l'ATP synthase selon

l'axe γ

Le fonctionnement de l’ATP synthase est induit par un gradient de concentration de proton entre les milieux extra et intracellulaire. Celui-ci entraîne la rotation du rotor et de l’axe γ au sein de la cavité du stator. Les cavités α/β de celui-ci vont alors se déformer selon trois états possibles pour chaque rotation de 120° du rotor (Figure 9b)24. Le premier état va permettre la

fixation d’ADP et de Pi dans la cavité. Pour le deuxième état, la déformation de la cavité va abaisser l’énergie d’activation pour la réaction de transformation de l’ADP en ATP. Enfin, le troisième état va libérer l’ATP dans le milieu intracellulaire. Ainsi, un cycle complet de fonctionnement du moteur permet la production de trois molécules d’ATP. Le fonctionnement de ce moteur est réversible : lorsque la concentration en ATP est trop élevée, l’enzyme est capable d’hydrolyser l’ATP (en ADP et Pi) afin de reconstituer le gradient de pH de la cellule.

2. Le ribosome :

Le ribosome est un complexe ribonucléoprotéique capable de décoder l’ARN messager (ARNm) afin de synthétiser des protéines nécessaires au bon fonctionnement de tout être vivant. Il est constitué de deux sous unités, une grande (L) constituée de trois molécules d’ARN ribosomique (ARNr) et une petite (S) constituée d’une seule molécule d’ARNr. Le passage d’un brin d’ARNm au travers de ces deux sous-unités va permettre la traduction puis la

23 Boyer, P. D. Nature 1999, 402 (6759), 247–249.

(29)

20

transcription de ce brin. La sous-unité S traduit l’information selon des triplets de nucléotides, appelés codons, qui correspondent chacun à un acide aminé. Des ARN de transfert (ARNt) vont alors porter chaque acide aminé dans la sous-unité L du ribosome qui va assembler les acides aminés formant la chaîne peptidique correspondante (Figure 10). C’est donc le passage de la structure linéaire au sein de la cavité qui va permettre la synthèse des chaînes peptidiques.

Figure 10. Fonctionnement du ribosome

3. La protéine RecA :

La protéine RecA, synthétisée par l’ADN-topoisomérase de la bactérie Escherichia coli, a la forme d’un nœud de trèfle 31 (Figure 11)25. C’est un des acteurs essentiels de la « réponse

SOS » des bactéries, processus résultant d’un stress causant des dommages à l’ADN, et qui est indispensable à la réparation de celui-ci26. La protéine RecA permet de séparer les deux brins

normaux d’un ADN sain et d’extraire une séquence destinée à remplacer un brin d’ADN endommagé. Ainsi, si l’un des deux brins d’ADN produits pendant la réplication est défectueux, un autre brin d’ADN dissocié par la protéine sera assemblé avec l’ADN lésé. Les

25 Krasnow, M. A.; Stasiak, A.; Spengler, S. J.; Dean, F.; Koller, T.; Cozzarelli, N. R. Nature 1983, 304 (5926), 559–

560.

26 Guerin, E.; Cambray, G.; Sanchez-Alberola, N.; Campoy, S.; Erill, I.; Da Re, S.; Gonzalez-Zorn, B.; Barbe, J.; Ploy,

(30)

21

enzymes réparatrices pourront alors compléter les deux doubles hélices sans perte d’information génétique.

Figure 11. Protéine RecA en noeud de trèfle

4. La λ-exonucléase :

La λ-exonucléase est une enzyme permettant l’hydrolyse d’un des deux brins de la double hélice de l’ADN. Composée de trois protéines s’ordonnant de façon à former un macrocycle (Figure 12a), elle fonctionne selon une structure de pseudo-rotaxane27 : le double brin d’ADN

passe dans la cavité formée par les trois protéines pour atteindre le centre catalytique de l’enzyme. L’hydrolyse sélective et continue du brin d’ADN d’extrémité 5’ conduit à la libération d’un ADN simple brin servant de substrat pour d’autres enzymes de recombinaison28 (Figure

12b).

27 Kovall, R. Science 1997, 277 (5333), 1824–1827.

(31)

22

Figure 12. a) Structure DRX et potentiel électrostatique de la λ-exonucléase ; b) Pseudo-rotaxane formé lors du

fonctionnement de la λ-exonucléase

A l’instar de ces quelques exemples, de nombreux processus biologiques reposent sur l’utilisation de machines moléculaires. Les chimistes se sont donc inspirés de la nature pour synthétiser leurs propres machines moléculaires telles que des muscles, des transporteurs, des pompes, des catalyseurs,29 etc.

B. Les machines moléculaires entrelacées synthétiques :

La majorité des machines moléculaires entrelacées synthétiques fonctionnent grâce au contrôle du mouvement de translation d’un macrocycle le long d’un axe. En effet, le macrocycle est capable d’adopter une position préférentielle grâce à la mise en place d’interactions avec certaines régions spécifiques (nommées stations moléculaires) de l’axe (Figure 13). Un stimulus externe est capable de modifier ces interactions afin de changer la conformation de cette structure en déplaçant le macrocycle sur une autre station. Ce stimulus peut être de différentes natures chimiques30, photochimiques31 ou encore thermique32.

29 Kassem, S.; van Leeuwen, T.; Lubbe, A. S.; Wilson, M. R.; Feringa, B. L.; Leigh, D. A. Chem. Soc. Rev. 2017, 46

(9), 2592–2621.

30 Waelès, P.; Fournel-Marotte, K.; Coutrot, F. Chem. - Eur. J. 2017, 23 (48), 11529–11539.

31 Altieri, A.; Bottari, G.; Dehez, F.; Leigh, D. A.; Wong, J. K. Y.; Zerbetto, F. Angew. Chem. Int. Ed. 2003, 42 (20),

2296–2300.

(32)

23

Figure 13. Changement co-conformationnel de [2]rotaxane par translation de macrocycle

La première machine moléculaire à mouvement de translation contrôlable, considérée alors comme une « navette » moléculaire, a été synthétisée et optimisée par Stoddart et coll33. Le

[2]rotaxane 5 est constitué d’une station 4,4-dianiline (rouge) et une station 4,4-dialkoxyphényle (orange) d’affinité différente avec le macrocycle (cyclobisparaquat-(para-phénylène), CBPQT4+) (bleu) (Schéma 3).

Schéma 3. Première machine moléculaire à translation de macrocycle de type [2]rotaxane

A l’état initial, le macrocycle pauvre en électrons est localisé sur la station 4,4-dianiline, plus riche en électrons, grâce à des interactions électrostatiques. La machine peut être mise en

33 Anelli, P. L.; Spencer, N.; Stoddart, J. F. J. Am. Chem. Soc. 1991, 113 (13), 5131–5133 ; Bissell, R. A.; Córdova,

(33)

24

marche de deux manières : par protonation ou oxydation de la station 4,4-dianiline. Dans les deux cas, la déstabilisation des interactions avec le macrocycle provoque la migration de celui-ci vers la station 4,4-dialkoxyphényle 6 qui devient la station de meilleure affinité car plus riche en électrons. La réduction ou la déprotonation de la 4,4-dianiline rétablit l’état initial de la structure en replaçant le macrocycle sur la station de départ, rendant le fonctionnement de cette machine réversible.

Ce type de système faisant appel à des stations moléculaires peut également fonctionner avec des caténanes. Ainsi, Sauvage et coll. ont publié un interrupteur moléculaire utilisant ce type de machinerie sur un [2]caténane34. Ce moteur est constitué de deux macrocycles identiques

entrelacés portant chacun un motif 2,9-diphényl-1,10-phénantroline (dpp) (rouge) et un motif terpyridine (bleu) (Schéma 4).

Schéma 4. Structure et fonctionnement du moteur rotatif de Sauvage et coll.

Le fonctionnement de cette machine repose sur le degré d’oxydation d’un atome de cuivre piégé au centre de la cavité du macrocycle. En effet, la fonction dpp, possédant deux atomes d’azote, est un ligand bivalent, tandis que le motif terpyridine, qui en possède trois, est un ligand trivalent. Le changement de degré d’oxydation du cuivre induit un changement de géométrie de coordination. Le cuivre (I) se coordonne de façon tétraédrique alors que le cuivre (II) se coordonne de façon hexagonale. Ainsi, lorsque le cuivre est à l’état d’oxydation +I, il est chélaté préférentiellement par les deux ligands dpp, conduisant à la co-conformation 7 du caténane. L’oxydation de l’atome de cuivre en cuivre (II) change la géométrie de coordination de celui-ci, qui va alors être chélaté préférentiellement par les deux motifs terpyridine, conduisant à la co-conformation 8. Ce changement de ligand entraîne alors la rotation de

34 Livoreil, A.; Dietrich-Buchecker, C. O.; Sauvage, J.-P. J. Am. Chem. Soc. 1994, 116 (20), 9399–9400 ; Cárdenas,

(34)

25

chaque macrocycle par rapport à l’autre de façon successive. La réduction de l’atome de cuivre provoque une nouvelle rotation permettant le retour à l’état initial.

Ces deux premières machines peuvent donc être considérées comme le point de départ du contrôle du mouvement à l’échelle moléculaire. Ainsi, en gardant ce système de mouvement et en complexifiant les structures des molécules, les chimistes ont pu élaborer des machines de plus en plus sophistiquées. Les muscles moléculaires en sont un bon exemple. En 2000, Sauvage et coll. mettent au point le premier muscle moléculaire artificiel sous la forme d’un [2]rotaxane35. Celui-ci est constitué de deux éléments identiques : un macrocycle portant une

chaîne latérale sur laquelle repose une station phénantroline et une station terpyridine. Chaque chaîne latérale d’un macrocycle passe dans la cavité du second, formant ainsi la structure entrelacée de type « daisy-chain » qui est maintenue par deux groupements tri(4-(tert-butyl)phényl)méthyles stoppeurs (Schéma 5).

Schéma 5. a) Structure et fonctionnement du premier muscle moléculaire artificiel ; b) Représentation de la

contraction de fibres musculaires

Comme pour le caténane présenté plus haut, cette machine fonctionne grâce à une différence de géométrie de coordination entre deux cations métalliques. Ainsi, en présence de cuivre(I), de géométrie tétraédrique, celui-ci va venir être chélaté par les motifs phénantroline de

(35)

26

l’ensemble de la structure, conduisant à une forme « décontractée » 9 du muscle. Lorsque les ions cuivre (I) sont remplacés par des ions zinc (II), de géométrie penta-coordinés, le zinc peut alors être chélaté par un motif phénantroline du macrocycle et par un motif terpyridine de la chaîne, conduisant à la forme « contractée » 10 du muscle. Ce phénomène de relaxation/contraction est le même que celui observé lors du mouvement des filaments de myosine le long des brins d’actine, phénomène responsable de la contraction musculaire dans le corps humain. De plus, des calculs théoriques ont également pu estimer une variation de longueur de 65 à 83 Å entre les deux configurations de la machine. Cette variation représente un allongement de 21 %, une valeur comparable à celle des muscles naturels (27 %). Ce type de système a par la suite pu être amélioré, par exemple en utilisant trois stations sur l’axe conduisant à l’obtention de trois niveaux de contraction36.

Si ces premières machines artificielles ne permettent qu’un contrôle du mouvement à l’échelle moléculaire, les chimistes ont par la suite essayé de les rendre actives vis-à-vis d’un environnement extérieur. La position du macrocycle sur l’axe pourrait alors avoir une influence sur d’autres molécules ou systèmes à la manière d’un pseudo-réseau moléculaire.

1. Les catalyseurs ON/OFF :

Les catalyseurs ON/OFF reposent sur l’utilisation d’un macrocycle qui, en fonction de sa position sur l’axe du rotaxane, est capable de masquer ou non un site catalytique. Leigh et

coll. publient en 2012 un [2]rotaxane possédant cette propriété37. L’amine secondaire du fil

du rotaxane 11 sert de catalyseur pour l’addition de Michael d’un thiol sur un aldéhyde α,β-insaturé (Schéma 6).

36 Romuald, C.; Busseron, E.; Coutrot, F. J. Org. Chem. 2010, 75 (19), 6516–6531.

37 Blanco, V.; Carlone, A.; Hänni, K. D.; Leigh, D. A.; Lewandowski, B. Angew. Chem. Int. Ed. 2012, 51 (21), 5166–

(36)

27

Schéma 6. Principe de fonctionnement du catalyseur ON/OFF développé par Leigh et coll.

Cette machine fonctionne grâce à un système pH-métrique. En milieu acide, l’amine secondaire protonée entraîne des interactions type ion/dipôle avec le macrocycle, provoquant la migration de celui-ci autour de cette station et bloquant l’accès au site catalytique. Le catalyseur 11 est en position OFF et la réaction d’addition n’a pas lieu. En présence d’une base, l’ammonium repasse sous forme amine et le macrocycle se déplace vers les stations méthyltriazoliums, libérant ainsi l’accès au site catalytique. Le catalyseur 12 est en position ON et l’addition de Michael s’effectue avec un rendement de 83 %. L’ajout de TFA inhibant à nouveau le catalyseur, le fonctionnement de cette machine est donc réversible.

Plus récemment, Leigh et coll. ont optimisé ce type de catalyseur en utilisant un carburant chimique pour contrôler la position du macrocycle38. Ainsi, le [2]rotaxane 14 est équipé d’une

station amine secondaire et d’une station thio-urée capable de catalyser la réduction de nitrostyrène en présence d’ester de Hantzsch39 (Schéma 7).

38 Biagini, C.; Fielden, S. D. P.; Leigh, D. A.; Schaufelberger, F.; Di Stefano, S.; Thomas, D. Angew. Chem. Int. Ed.

2019, 58 (29), 9876–9880.

(37)

28

Schéma 7. Principe de fonctionnement du catalyseur à carburant de Leigh

(38)

29 2. Les moteurs à carburant chimique :

En utilisant le type de fonctionnement décrit ci-dessus, Leigh et coll. ont également développé un moteur rotatif unidirectionnel à carburant40. Celui-ci est composé d’un [2]caténane

constitué d’un premier macrocycle dérivé d’éther couronne (vert) et d’un deuxième macrocycle sur lequel sont placés deux stations, amine (rouge) et triazolium (orange), séparées par deux stoppeurs labiles, une hydrazone (violet) et un disulfure (bleu) (Schéma 8).

Schéma 8. Principe de fonctionnement du moteur moléculaire à carburant de Leigh

A l’état initial, le macrocycle est positionné sur la station triazolium, de meilleure affinité avec celui-ci. L’injection de carburant acide trichloroacétique « démarre » le moteur. La protonation de l’amine sous forme d’ammonium rend celle-ci plus affine pour le macrocycle. De plus, si en milieu acide, le stoppeur disulfure reste stable, le stoppeur hydrazone devient labile grâce à des échanges avec l’hydrazine 17 présente dans le milieu. Le macrocycle peut alors se déplacer vers la station ammonium. Au cours du temps, la décomposition du trichloroacétate en chloroforme et dioxyde de carbone, catalysée par de la triéthylamine, va peu à peu augmenter le pH du milieu, conduisant à la déprotonation de l’ammonium. A pH basique, le stoppeur hydrazone redevient stable tandis que le stoppeur disulfure peut s’échanger avec d’autres thiols 18 et 19 présents dans le milieu. Le macrocycle revient alors vers la station triazolium de départ. Un cycle complet de rotation est effectif après environ

40 Erbas-Cakmak, S.; Fielden, S. D. P.; Karaca, U.; Leigh, D. A.; McTernan, C. T.; Tetlow, D. J.; Wilson, M. R.

(39)

30

une heure à 60°C avec un rendement de 87 %. L’ajout de carburant permet de recommencer le processus de rotation unidirectionnelle.

3. Les pompes moléculaires :

Les pompes moléculaires sont des systèmes permettant de capter des molécules au sein d’un milieu. Stoddart et coll. ont publié un exemple de ce type de système avec un [2]rotaxane capable de se charger en macrocycle41. La pompe est composée d’un fil 21 comportant à

l’entrée un motif 2,6-diméthylpyridinium, Py2+ (rouge) et un motif viologène dicationique, V2+

(bleu). Un motif isopropylphénoxy (orange) est placé en milieu d’axe (Schéma 9).

Schéma 9. Structure et fonctionnement de la pompe moléculaire de Stoddart et coll.

A l’état initial, les motifs Py2+ et V2+ forment une barrière énergétique forte pour le passage

du macrocyle tétracationique CBPQT4+ 20 (vert) également pauvre en électrons. La réduction

des motifs viologènes du macrocycle et de l’axe permet d’activer la pompe. La force répulsive coulombienne entre le macrocycle et le Py2+ diminue ce qui permet au macrocycle de glisser

vers le site de reconnaissance V·+ qui va stabiliser celui-ci par π-mérisation radical-radical des

motifs V·+ du macrocycle, formant le [2]rotaxane 22. L’oxydation de la pompe permet de

régénérer les motifs V2+ de départ (23). Les forces de répulsion initiales sont alors rétablies et

41 Pezzato, C.; Nguyen, M. T.; Cheng, C.; Kim, D. J.; Otley, M. T.; Stoddart, J. F. Tetrahedron 2017, 73 (33), 4849–

(40)

31

vont entraîner le passage du macrocycle sur la partie droite de l’axe, ceci étant également favorisé par les répulsions stériques entre le macrocycle et les deux méthyles du motif Py2+.

Le cycle de « pompage » est alors terminé (24). Un autre cycle de réduction-oxydation permet à la pompe de capter un deuxième macrocycle (25) conduisant à la formation du [3]rotaxane

26, le motif isopropylphénoxy empêchant le retour en arrière du premier macrocycle. 4. Les machines à effet de surface :

La capacité de contrôle de la position du macrocycle sur un axe permet également de modifier les propriétés physicochimiques d’une molécule. Ainsi, l’équipe de Leigh a fonctionnalisé une surface d’or avec une nouvelle machine moléculaire 27 capable de modifier la tension de surface du matériau42. Celle-ci est basée sur une structure de [2]rotaxane possédant sur son

axe deux stations : une station fumaramide pouvant être isomérisée (bleu/orange) et une station tétrafluorosuccinamide (rouge) (Schéma 10).

Schéma 10. Structure et fonctionnement de la machine moléculaire du groupe de Leigh 27 (à gauche) et images

du déplacement d'une goutte de diiodométhane sur une surface d’or greffée de machines moléculaires 27 (à droite).

42 Berna, J.; Leigh, D. A.; Lubomska, M.; Mendoza, S. M.; Rez, E. M. P.; Rudolf, P.; Teobaldi, G.; Zerbetto, F. Nat.

(41)

32

A l’état initial, le macrocycle est préférentiellement sur la fonction fumaramide de conformation (E). Sous irradiation UV, l’alcène s’isomérise en configuration (Z) empêchant le macrocycle de former des liaisons hydrogène avec cette station. Le macrocycle se déplace alors sur la station tétrafluorosuccinamide (28). Ce déplacement masque la fonction hydrophobe, changeant ainsi la tension de surface du matériau.

Une goutte de diiodométhane a été déposée sur une surface d’or fonctionnalisée par le [2]rotaxane 27. En irradiant une partie de cette surface, une différence de tension de surface se crée, permettant à la goutte d’accumuler de l’énergie. Dans un premier temps, la goutte s’étale (t = 160 s) puis, lorsque l’énergie est suffisante, elle se déplace sur la partie irradiée (t = 640 s). La minimisation de tension de surface permet à la goutte de se déplacer dans le sens ascendant le long d’une pente inclinée à 12°, créant ainsi un mouvement à l’échelle macroscopique. D’autres groupes ont également synthétisé des machines capables de courber une surface d’or43 ou encore de modifier l’aspect physique d’une solution (liquide en

gel)44.

5. Les machines moléculaires à activité biologique : a. Les boucliers moléculaires :

Les boucliers moléculaires sont des machines entrelacées utilisant le macrocycle pour protéger une partie de la molécule vis-à-vis d’un environnement extérieur. En 2009, Aucagne, Papot, Leigh et coll. ont synthétisé le [2]rotaxane 29 capable de vectoriser un agent cytotoxique, la Met-enképhaline (Schéma 11)45.

43 Liu, Y.; Flood, A. H.; Bonvallet, P. A.; Vignon, S. A.; Northrop, B. H.; Tseng, H.-R.; Jeppesen, J. O.; Huang, T. J.;

Brough, B.; Baller, M.; Magonov, S.; Solares, S. D.; Goddard, W. A.; Ho, C.-M.; Stoddart, J. F. J. Am. Chem. Soc.

2005, 127 (27), 9745–9759.

44 Goujon, A.; Lang, T.; Mariani, G.; Moulin, E.; Fuks, G.; Raya, J.; Buhler, E.; Giuseppone, N. J. Am. Chem. Soc.

2017, 139 (42), 14825–14828Goujon, A.; Mariani, G.; Lang, T.; Moulin, E.; Rawiso, M.; Buhler, E.; Giuseppone,

N. J. Am. Chem. Soc. 2017, 139 (13), 4923–4928.

45 Fernandes, A.; Viterisi, A.; Coutrot, F.; Potok, S.; Leigh, D. A.; Aucagne, V.; Papot, S. Angew. Chem. Int. Ed.

(42)

33

Schéma 11. Design et fonctionnement du bouclier moléculaire 29

Sur cette machine, le macrocycle joue le rôle de bouclier moléculaire en protégeant le peptide des peptidases plasmatiques. Sous l’action de la β-galactosidase, la liaison glycosidique du stoppeur galactosilé est clivée. Une élimination 1,6 suivie d’une décarboxylation du composé

30 permet le désenfilement du macrocycle et la libération du pentapeptide 31. Les stabilités

du fil 31 et du rotaxane 29 ont été comparées dans le plasma humain. Alors que le peptide seul est dégradé en moins de 5 minutes, le [2]rotaxane 29 est récupéré à 95 % après trois jours.

Ce système de bouclier a été de nouveau exploité par l’équipe de Papot pour la synthèse du premier [2]rotaxane biocompatible enzymo-sensible 32 pour la libération intracellulaire sélective du paclitaxel, molécule utilisée en chimiothérapie anticancéreuse (Schéma 12)46.

46 Barat, R.; Legigan, T.; Tranoy-Opalinski, I.; Renoux, B.; Péraudeau, E.; Clarhaut, J.; Poinot, P.; Fernandes, A. E.;

(43)

34

Schéma 12. Représentation schématique du fonctionnement du [2]rotaxane 32

L’originalité de ce système réside dans l’ouverture contrôlée du macrocycle, qui conduit au désassemblage des éléments entrelacés. Ce [2]rotaxane est composé d’un fil comportant une partie stoppeur hydrosoluble (bleue) et un ester (violet) du taxol (rouge). Celui-ci est encapsulé dans un macrocycle (vert) auquel est associé un espaceur auto-immolable (gris) relié à une gâchette enzymatique (orange). La présence du macrocycle autour du fil permet au [2]rotaxane 32 d’être stable dans les vaisseaux sanguins en protégeant l’ester présent sur le fil de l’hydrolyse enzymatique. Après pénétration du [2]rotaxane 32 dans les cellules cancéreuses, la β-galactosidase intracellulaire clive la gâchette enzymatique conduisant au phénol 33. L’espaceur auto-immolable subit alors une élimination 1,6 suivie d’une décarboxylation formant l’aniline 34. Après des réactions d’élimination 1,6 et 1,4, le fil 35 est libéré grâce à l’ouverture du macrocycle. L’ester du fil 35 devient alors accessible aux estérases intracellulaires et peut être hydrolysé pour libérer la substance active, le paclitaxel.

b. Les nanovalves :

(44)

35

pores de nanoparticules et possédant plusieurs stations. Le macrocycle peut alors servir de « bouchon » à la cavité : lorsque le macrocycle est proche de la cavité, il empêche l’entrée ou la sortie de molécules organiques dans celle-ci. Au contraire, lorsqu’il est loin de la cavité, celle-ci est libre d’accès. En 2005, Stoddart, Zink et coll. proposent le premier exemple de nanovalves réversibles pouvant capter et libérer des molécules de rhodamine emprisonnées dans une particule sphérique de silice microporeuse47. Ces nanovalves sont formées du

[2]rotaxane 37 composé d’un macrocycle CBPQT4+ et d’un fil avec une station

tétrathiafulvalène (TTF) (bleu) et une station dioxynaphtalène (DNP) (rouge) (Schéma 13a). Ce rotaxane est ensuite fixé à une particule sphérique de silice microporeuse afin de fonctionnaliser toute la surface de la particule. A l’état initial, le macrocycle est sur la station TTF, laissant libre accès aux cavités pour les molécules de rhodamine : les nanovalves se chargent (Etape 1). En oxydant la station TTF en TTF2+ avec Fe(ClO

4)3, le macrocycle se déplace

sur la station DNP obstruant alors la cavité et emprisonnant les molécules de rhodamines (Etape 2). Le milieu est ensuite lavé avant de réduire les stations TTF2+ en TTF afin de faire

revenir le macrocycle sur cette dernière et d’ouvrir les cavités (Etape 3). Les molécules de rhodamine peuvent alors sortir dans le milieu (Etape 4). Le cycle a été réalisé deux fois successivement et l’analyse spectroscopique a permis de prouver l’efficacité de cette machine.

47 Nguyen, T. D.; Tseng, H.-R.; Celestre, P. C.; Flood, A. H.; Liu, Y.; Stoddart, J. F.; Zink, J. I. Proc. Natl. Acad. Sci.

(45)

36

Schéma 13. a) Structure du [2]rotaxane 37 ; b) Schéma de fonctionnement des nanovalves

Ces travaux ont été initiateurs d’autres systèmes de nanovalves fonctionnant par modifications chimiques48, biochimiques49 ou physiques50. L’intérêt principal de ces systèmes

est de pouvoir proposer de nouveaux outils pour le transport et la libération sélective de substances biologiquement actives.

IV. Présentation du sujet :

Bien que de nombreuses générations de chimistes aient été inspirées par la structure des produits naturels, l’imitation des processus utilisés par la nature pour la synthèse des

48 Nguyen, T. D.; Leung, K. C.-F.; Liong, M.; Pentecost, C. D.; Stoddart, J. F.; Zink, J. I. Org. Lett. 2006, 8 (15),

3363–3366.

49 Meng, H.; Xue, M.; Xia, T.; Zhao, Y.-L.; Tamanoi, F.; Fraser, J.; Zink, J. I.; Nel, A. E. J. Am. Chem. Soc. 2010, 132

(36), 12690–12697.

50 Yan, H.; Teh, C.; Sreejith, S.; Zhu, L.; Kwok, A.; Fang, W.; Ma, X.; Nguyen, K. T.; Korzh, V.; Zhao, Y. Angew Chem

(46)

37

composés organiques a reçu beaucoup moins d'attention. Afin de préparer les molécules essentielles à leur survie, les systèmes vivants utilisent des réseaux moléculaires hautement sophistiqués, constitués de composants interconnectés comme l'ADN, l'ARN, les protéines et les petites molécules. Ces réseaux moléculaires fabriquent des produits naturels extrêmement complexes en contrôlant la formation et la rupture de liaisons chimiques de manière très efficace. Au cours de ces processus, les systèmes vivants utilisent souvent des machines moléculaires fonctionnant de manière processive. Par exemple, des machines moléculaires naturelles telles que la polycétide synthase, l'ADN polymérase ou le ribosome sont intégrées dans des réseaux biochimiques conçus pour la construction itérative de macromolécules naturelles tels que les biopolymères.

La conception de réseaux moléculaires artificiels, capables de rivaliser avec les processus naturels de synthèse, pourrait apporter un nouveau paradigme en chimie organique. Ainsi, mes travaux de thèse s’inscrivent dans un programme de recherche ambitieux dédié au développement de réseaux moléculaires bio-inspirés et programmés pour la synthèse itérative de molécules organiques. Dans ce cadre, l’objectif principal de ma thèse est d’étudier un réseau moléculaire polyvalent conçu pour la préparation d'une large gamme de composés organiques. Ce réseau est composé de deux machines artificielles, l’une conduisant à l’amplification autocatalytique d’un signal et l’autre permettant la synthèse processive de molécules organiques, à la manière des polymérases naturelles51 (Figure 14).

Figure 14. Mise en réseau de machines moléculaires

(47)

38

En imitant ainsi les processus synthétiques se déroulant au sein des organismes vivants, ce projet pourrait constituer l'aube d'une nouvelle révolution industrielle basée sur le développement d'usines moléculaires où différentes machines moléculaires collaboreraient pour construire des composés très complexes.

Cette étude pourrait également avoir un impact en biologie. En imitant les processus utilisés par les systèmes vivants, ce projet pourrait en effet contribuer à une meilleure compréhension des principes organisationnels des réseaux biologiques en relation avec leurs fonctions. Dans ce contexte, des réseaux artificiels pourraient être utilisés comme modèles pour prédire le comportement des systèmes naturels, ce qui pourrait être très utile pour des applications biomédicales.

Le premier réseau moléculaire envisagé par notre équipe est composé (1) du [2]caténane 38 jouant le rôle d’un amplificateur autocatalytique et (2) du [1]rotaxane 43 imitant la processivité des polymérases naturelles. Le fonctionnement en réseau de ces deux systèmes est décrit sur le schéma 14.A l’état initial, un atome de cuivre (I), piégé dans le caténane 38 grâce aux deux ligands phénantroline et à la liaison mécanique, est inactif. En présence d’un déclencheur, le caténane 38 auto-immolable est capable de s’ouvrir pour former le complexe

bis-phénantroline de cuivre (I) 39. La liaison mécanique étant rompue, le cuivre (I) devient accessible pour catalyser la déprotection du carbamate de propargyle 40 conduisant à la formation du composé 4152. Celui-ci peut alors intervenir dans le fonctionnement des deux

systèmes. D’une part, il peut déclencher l’ouverture d’un autre caténane 38 et ainsi, en reprenant le processus précédant, auto-amplifier sa propre production. D’autre part, il va également pouvoir être polymérisé grâce au [1]rotaxane 43. En effet, la fonction thioester de cette deuxième machine est le point de départ d’une succession de commutations topologiques [1]-[2]rotaxane alimentées par la présence dans le milieu du composé 41. Cette polymérisation est assurée par le groupement stoppeur porté par ce dernier permettant d’éviter le désentrelacement de la structure et conduisant à la libération du composé 42. L’introduction dans le système d’un composé « terminal » conduira à la libération du macrocycle 44 et du polymère 45 et mettra fin au fonctionnement du système.

52 Wang, X.; Liu, Y.; Fan, X.; Wang, J.; Ngai, W. S. C.; Zhang, H.; Li, J.; Zhang, G.; Lin, J.; Chen, P. R. J. Am. Chem.

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39

Schéma 14. Principe de fonctionnement de l'usine moléculaire

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tant que polymérase artificielle en commençant également par des rappels bibliographiques sur les machines à fonctionnement itératif et les stratégies de synthèse des [1]rotaxanes.

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Chapitre 1 : Synthèse et étude du

fonctionnement d’un [2]caténane

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(52)

43

I. Introduction :

A. Objectif du projet :

La première partie de mes travaux a été consacrée à l’étude d’un nouveau concept de détection et d’auto-amplification d’un signal. Celui-ci est basé sur un réseau moléculaire présentant comme élément clé le caténane 38 formé par deux macrocycles identiques et constitués des trois éléments principaux suivants :

- Une gâchette sensible à un déclencheur permettant l’activation du processus (vert). - Une partie auto-immolable conduisant à l’ouverture du caténane par rupture de la

liaison mécanique (bleu).

- Un motif phénantroline endocyclique (rouge) permettant la chélation de cuivre (I)

(orange) au centre de la cavité du caténane.

Le principe de fonctionnement de ce système repose sur des propriétés intrinsèques liées à l’entrelacement (Schéma 15).

Schéma 15. Principe de fonctionnement général du [2]caténane 38 envisagé

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44

un complexe tétraédrique. Ce système est de plus « verrouillé » par la liaison mécanique de la structure qui empêche l’écartement et l’échange de ligands du cuivre. Sous cette forme, l’ion cuivre (I) est inaccessible et donc inactif en tant que catalyseur. La présence d’un stimulus spécifique déclenche l’activation des deux gâchettes présentes sur le caténane, conduisant à la libération de la dianiline 46 (Etape 1). En 2015, Papot et coll. ont montré que ce type de structure macrocyclique pouvait subir une double élimination 1,6 puis 1,4 conduisant à l’ouverture du macrocycle46. Cette double élimination s’effectuant sur chaque macrocycle du

caténane, celle-ci devrait conduire à la libération du complexe bis-phénantroline 39 (Etape 2). L’ion cuivre (I), libéré de la contrainte de la liaison mécanique, devient actif. Il peut alors catalyser la déprotection de nouvelles molécules de déclencheurs (Etape 3) pouvant à leur tour activer d’autres caténanes (Etape 4). Ainsi, potentiellement, l’introduction de deux molécules de déclencheur permettrait l’activation de la totalité des caténanes présents par un processus d’auto-amplification.

Ce système présente plusieurs aspects extrêmement novateurs pour le monde la chimie. C’est le premier système moléculaire entrelacé capable de détecter un signal et de l’auto amplifier de manière catalytique. Ce caténane est également le premier catalyseur métallique commutable via la rupture d’une liaison mécanique.

Pour réaliser cette étude, nous nous sommes intéressés à deux caténanes portants des gâchettes différentes. Le premier caténane étudié 47 porte des gâchettes allyloxycarbamates (Alloc) sur les deux anilines (Schéma 16). En présence de palladium (0), deux molécules de coumarine 48 effectuent une réaction type Tsuji-Trost sur les groupements Alloc conduisant à la déprotection des deux anilines 46 et à la coumarine allylée 49. Le caténane déprotégé 46 « s’ouvre » pour former le complexe 39. Récemment, le groupe de Chen et coll. ont montré que des complexes de cuivre (I) étaient capables de déprotéger des carbamates de di-méthyl-propargyle conduisant à la libération d’amines52. Le complexe 39 déprotège donc la coumarine

50, régénérant ainsi une nouvellement molécule de coumarine libre 48. Cette dernière peut

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Schéma 16. Fonctionnement du premier caténane 47 portant des gâchettes allyloxycarbamates

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Schéma 17. Fonctionnement du deuxième caténane 51 portant des gâchettes fluorénylmethoxycarbonyle

Avant de détailler les synthèses et les résultats obtenus dans le cadre de l’étude de ces deux caténanes, nous allons faire un rappel des systèmes d’amplification ainsi que des stratégies de synthèse des caténanes décrits dans la littérature.

B. Rappels bibliographiques :

1. Les systèmes d’amplifications :

L’amplification est un procédé qui convertit un faible signal en un signal fort à la suite de diverses transformations grâce à un amplificateur. Ce phénomène est par exemple largement utilisé dans les systèmes auditifs pour augmenter un volume audio. En chimie, les systèmes d’amplification sont surtout utilisés pour améliorer la sensibilité des techniques de détection53. En effet, la capacité à détecter des concentrations de plus en plus faibles de

différents analytes, avec pour but ultime la détection d’une molécule unique, est un challenge

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47

sociétal dans de nombreux domaines comme le diagnostic54, le contrôle environnemental55 ou

encore l’analyse médico-légale56. Si la sensibilité de détection demeure un challenge, il en est

de même pour la polyvalence des processus d’amplification. En effet, au vu de l’immense quantité d’analytes potentiellement détectables, il serait extrêmement intéressant d’obtenir non pas un processus d’amplification différent pour chaque analyte, mais plutôt un seul processus adaptable en fonction de l’analyte recherché.

Il existe un large panel de méthodes d’amplification publiées dans la littérature. Ces méthodes reposent en général sur une des quatre approches suivantes (Figure 15) :

- L’amplification de la cible, qui repose sur l’augmentation du nombre de phénomènes de reconnaissance analyte/récepteur par analyte (Figure 15a).

- L’amplification des émetteurs, qui repose sur l’augmentation du nombre d’émetteurs de signal par évènement de détection d’analyte (Figure 15b).

- L’amplification de signal, permettant d’augmenter le signal émit lors d’un phénomène de reconnaissance analyte/récepteur (Figure 15c).

- L’amplification des récepteurs, qui augmente le nombre de récepteurs permettant de détecter un analyte (Figure 15d).

54 Tang, Y. W.; Procop, G. W.; Persing, D. H. Clin. Chem. 1997, 43 (11), 2021–2038.

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