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Chapitre III : Discussion et perspectives

1. Statut du gène PAX5 dans les LAL-B

La mise en place des leucémies aiguës nécessite selon le schéma classique de Gilliland (Kelly et al., 2002), au moins deux évènements dont la dérégulation de facteurs de transcription essentiels à la différenciation normale.

Mon travail s’est focalisé sur la recherche des mutations de PAX5 dans les LAL-B de l’adulte dans un protocole clinique GRAALL03. Cette approche a montré que PAX5 était muté dans 34% des cas, et qu’on retrouvait la même diversité que dans les LAL-B de l’enfant. Les patients ont été classés en plusieurs catégories : PAX5 sauvage, délétion totale d’un allèle de

PAX5 (groupe PAX5 délété), conduisant théoriquement à une diminution de l’expression de

PAX5, amplification de plusieurs exons de PAX5 et les mutations dites structurelles aboutissant à une altération de la fonction de PAX5, dont des mutations partielles, des mutations ponctuelles et des translocations (groupe PAX5 hypomorphe).

J’ai classé les mutations de PAX5 en fonction de leurs conséquences fonctionnelles probables, basées sur l'étude de Mullighan et al. (Mullighan et al., 2007). L’équipe de Downing a montré que les mutants ayant des délétions de PAX5 et des mutations du domaine de liaison à l’ADN avaient une activité compétitive avec le PAX5 wt plus faible que les protéines chimères qui agissent comme de forts inhibiteurs compétitifs de PAX5 wt. La délétion complète d'un allèle de PAX5 est retrouvée dans 15 % des cas de LAL-B de l’adulte et dans 11 % des cas de LAL- B de l’enfant. Les délétions partielles représentent 18 % chez l’adulte et 22 % chez l’enfant.

123 En ce qui concerne les mutations ponctuelles de PAX5, elles sont détectées dans 7 % des LAL-B de l’adulte et 7 % des LAL-B de l'enfant. La mutation PAX5 P80R est un évènement fréquent et récurrent, elle est détectée dans 5 des 117 cas chez l'adulte et 4 des 192 cas chez l’enfant représentant donc 3 % des LAL-B. Nous avons identifié trois nouvelles mutations : PAX5 S67N, une insertion d’un G dans le codon 138 (exon 4) (I138) et une insertion de deux G dans le codon 336 (exon 8) menant à un décalage du cadre de lecture des derniers exons de PAX5, codant le domaine de transactivation et les domaines inhibiteurs. Malgré les différences d’incidence des causes connues entre l’enfant et l’adulte, PAX5 est affecté de la même manière.

La délétion homozygote de Pax5 dans des souris bloque la différenciation B à un stade précoce. L’analyse des données cliniques a montré que les cellules du groupe PAX5 sauvage et celles du groupe PAX5 hypomorphe sont bloquées à un stade précoce, en B-II alors que les blastes du groupe PAX5 ayant perdu un allèle, sont clairement bloqués à un stade plus tardif en B-III. De plus, le fait le plus marquant pour ce groupe, est qu’il n’y a aucune cellule en B-I (CD10 négatif). Ce résultat suggère que la perte d’un allèle de PAX5 entraine un déficit dans le nombre de copies de PAX5 se caractérisant par un blocage tardif des cellules leucémiques. Il semblerait que ce type d’anomalie soit un évènement secondaire dans la mise en place de la pathologie.

En fonction des anomalies affectant PAX5, deux hypothèses ont été émises : les mutations peuvent être un évènement tardif ou un évènement précoce. Afin de pouvoir répondre à ces hypothèses, une analyse FISH chez un patient ayant la translocation E2A-PBX1, a montré que tous les noyaux possédaient le réarrangement chromosomique E2A-PBX1 mais que la perte d’un allèle de PAX5 était retrouvée uniquement dans 60% des noyaux (Familiades et al., 2009). Cet élément permet d’affirmer que la mutation de PAX5 est clairement un évènement secondaire, ce qui expliquerait le blocage plus tardif des cellules de ce groupe.

De plus la délétion complète d’un allèle de PAX5 est fréquemment associée avec la délétion de CDKN2A localisé dans la partie plus télomérique du bras court du chromosome 9 (Mullighan et al., 2008). Le groupe de Downing avait présenté en 2008, une étude sur la coopération entre les fréquentes mutations de PAX5 et BCR-ABL1 dans les LAL-B. Pour examiner cette association, ils ont transplanté des cellules Pax5+/- de moelle osseuse infectée par des rétrovirus exprimant BCR-ABL1, dans des souris irradiées à une dose sub-létale. La survie des animaux était sévèrement diminuée. De plus les haploinsuffisances concomitantes affectant PAX5 et CDKN2A, réduisent considérablement la survie. Donc la perte d’une copie

124 des gènes PAX5 et CDKN2A est synergique pendant la transformation due à BCR-ABL1 (Miller, Mullighan , Su , et al., Blood (ASH Annual Meeting Abstracts). 2008).

Les mutations structurales ne se comportent pas comme les délétions d’un allèle de PAX5. En effet, les mutations ponctuelles sont fréquemment associées avec la perte du deuxième allèle, suggérant que ces anomalies ne sont pas suffisantes au blocage de différenciation inclus dans le processus oncogénique. Les translocations comme PAX5-ELN, PAX5-ETV6 and PAX5- FOXP1 ont été caractérisées comme des dominants négatifs sur la fonction sauvage de PAX5 (Familiades et al., 2009). D’un point de vue clinique, les patients possédant des mutations structurales de PAX5, sont plus sujets aux rechutes.

Dans le groupe hypomorphe, les mutations ponctuelles semblent représenter une entité à part. Les réarrangements VDJ de la chaine lourde des immunoglobulines surviennent dés les premières étapes de la différenciation B. Dans une moelle osseuse normale, environ 2% des cellules utilisent le réarrangement proximal VH6-1 (le segment VH le plus proximal). Il a été

décrit que le segment VH6-1 était sur-utilisé dans 10% des patients LAL-B de l’adulte

(Mortuza et al., 2001). La délétion homozygote de Pax5 chez la souris a montré que Pax5 était crucial pour la transition DHJH à VHDHJH de la chaine lourde des immunoglobulines et

spécialement pour les réarrangements distaux (Nutt et al., 1997). VH6-1 a été quantifié chez

les patients du protocole GRAALL03. En moyenne, 11,4% des adultes LAL-B (12 cas sur 105) testés sur-utilisent le segment VH6-1, suggérant une modification de l’accessibilité aux

autres segments VH dans cette pathologie. Il semblerait que les mutants affectant le domaine

de liaison à l’ADN de PAX5 P80R et PAX5 S67N, sont associés à cette utilisation, néanmoins cette hypothèse reste à être confirmée (Familiades et al., 2009). Cette association tendrait à démontrer que les mutations ponctuelles sont des évènements précoces dans la mise en place de la maladie. De plus, on a noté aucune association entre les mutations ponctuelles et la présence de BCR-ABL1.

Les mutations de PAX5 déterminées dans les LAL-B de l’adulte varient en termes de structure et de fonction. L’étude des différentes altérations de PAX5 nous renseignera sur leur rôle dans l’oncogenèse B.

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