• Aucun résultat trouvé

1.3 Mod´ elisation des condensats de Bose-Einstein ` a temp´ erature non nulle

2.1.2 La statistique de Bose-Einstein

On propose de d´eriver la statistique de Bose-Einstein dans cette partie. Celle-ci d´ecrit pour un gaz parfait de bosons, le nombre moyen d’atomes nT ,µ(j) par ´etat j d’´energie

εj, pour le potentiel chimique µ et une temp´erature T fix´es. On suppose que les niveaux

d’´energie sont ordonn´es pour que la suite (εj)j∈N soit croissante. On rappelle d’ailleurs

qu’il suffit que le potentiel de confinement soit infini `a l’infini pour que ce spectre d’´energie soit discret. Comme il est possible qu’un niveau d’´energie soit compos´e de plusieurs ´etats, on introduit le nombre moyen d’atomes nT ,µ(εj) par niveau d’´energie donn´e par,

nT,µ(εj) = gjnT ,µ(j),

o`u gj est la d´eg´en´erescence du niveau d’´energie εj. La statistique est alors donn´ee par,

nT,µ(j) =

nT ,µ(εj)

gj

= 1

e(εj−µ)/kBT − 1. (2.1)

Tout d’abord, on peut noter que n´ecessairement ε0 > µ pour que nT ,µ(0) soit bien d´efini

et positif. Dans ce cas on a alors pour tout j∈ N, nT,µ(j) > 0. Avant d’expliquer comment

cette statistique d´ecrit le ph´enom`ene de condensation de Bose-Einstein, nous pr´esentons maintenant deux d´erivations de celle-ci.

Cette statistique est obtenue classiquement dans le formalisme de la physique statis- tique. Deux d´erivations simples peuvent ˆetre obtenues dans l’ensemble grand-canonique, et dans l’ensemble microcanonique. Pour rappel, les ensembles statistiques sont des abs- tractions centrales en physique statistique. Ce sont des collections de copies d’un syst`eme physique qui d´ecrivent l’ensemble des ´etats possibles du syst`eme, sous des contraintes ext´erieures fix´ees, telles que la temp´erature, le nombre de particule, le volume ou encore l’´energie. L’ensemble grand-canonique correspond au cas d’un syst`eme en contact avec un r´eservoir (un ensemble de taille beaucoup plus grande) avec lequel il peut ´echanger de l’´energie et des particules. On suppose dans ce cas que le volume, la temp´erature et le potentiel chimique sont fix´es. L’ensemble microcanonique correspond au cas d’un syst`eme isol´e. Dans ce cas, le nombre de particules, le volume et l’´energie sont fix´es.

D´erivation dans l’ensemble grand-canonique

On suit la d´erivation de [67]. Puisque la statistique donn´ee par (2.1) fait intervenir le potentiel chimique et la temp´erature, le cadre naturel de sa d´erivation semble donc ˆetre l’ensemble grand canonique. En effet, le raisonnement est particuli`erement abordable dans ce cadre. Pour obtenir cette statistique, nous consid´erons un gaz parfait de bosons de po- tentiel chimique µ et de temp´erature T . Les particules n’´etant pas en interaction, chaque sous-ensemble de particules d’´energie ε forme un syst`eme thermodynamique en interaction

2.1. La physique de la condensation de Bose-Einstein 39

avec le r´eservoir. L’ensemble grand-canonique est donc d’une certaine mani`ere une tensori- sation d’ensembles grand-canoniques pour chaque niveau d’´energie. Comme chaque niveau d’´energie peut contenir tout nombre de bosons, tous les ´etats du syst`eme possibles sont les configurations avec n particules (indiscernables) dans l’´etat ´energie ε, donc d’´energie nε. Ainsi, la probabilit´e que le syst`eme soit compos´e de n particules est en(µ−ε)/kBT, et la

fonction de partition de l’ensemble grand-canonique pour le niveau d’´energie ε est donn´e par,

Z(ε) =X

n∈N

en(µ−ε)/kBT = 1

1− e(µ−ε)/kBT.

On peut alors calculer le nombre moyen de particules dans l’´etat d’´energie ε,

nT ,µ(εj) = kBT 1 Z  ∂Z ∂µ  T = 1 e(εj−µ)/kBT − 1.

D´erivation dans l’ensemble microcanonique

On d´etaille une seconde d´erivation approch´ee dans l’ensemble canonique. Ce calcul fut entrepris, `a la suite des travaux de Bose, par Einstein en 1924-1925. Dans ce cadre ce sont la temp´erature et le nombre d’atomes qui sont fix´es. Bien que ce cas soit moins naturel, que les calculs soient plus p´enibles et que le r´esultat ne soit valide que dans la limite d’un fort taux de d´eg´en´erescence, le calcul est toutefois tr`es int´eressant car il fait intervenir le d´enombrement des ´etats d’´energie et permet de mieux comprendre la diff´erence avec la statistique de Maxwell-Boltzmann. Comme on se place dans l’ensemble canonique, c’est cette fois-ci le nombre de particules N et l’´energie du syst`eme E qui sont fix´es. Supposons que le niveau d’´energie εj comporte nj atomes. On peut compter le nombre de fa¸cons dont

ces atomes se r´epartissent sur les ´etats d’´energie εj. On le note w(nj, gj), et le calcul (men´e

dans [45]) donne,

w(nj, gj) =

(nj+ gj− 1)!

nj!(gj− 1)!

.

Ainsi, le nombre de configurations pour le syst`eme entier s’´ecrit,

W ((nj), (gj)) = Y j∈N (nj+ gj − 1)! nj!(gj− 1)! .

De part le choix de l’ensemble statistique, les contraintes du syst`eme s’´ecrivent

X j∈J0,nK nj = N et X j∈J0,nK njεj = E.

Il s’agit alors de maximiser (sous ces contraintes) le nombre de fa¸cons de r´epartir ces N particules pour obtenir la statistique de Bose-Einstein. En pratique, au lieu de maximi-

ser W ((nj), (gj)), on maximise son logarithme `a l’aide d’une approche Lagrangienne. On

introduit α et β les multiplicateurs de Lagrange, et on maximise

L((nj), α, β) = log W ((nj), (gj)) + α  NX j nj  + β  EX j njεj  .

En utilisant la formule de Stirling, on obtient

log w(nj, gj) = (nj+ gj) log(nj+ gj)− njlog(nj) + O(ln(nj + gj)).

En n´egligeant le reste, O(ln(nj+ gj)), et en r´esolvant le probl`eme d’optimisation simplifi´e,

on obtient,

nj =

gj

eα+βεj − 1.

On d´efinit alors le potentiel chimique µ et la temp´erature T tels que α = µ kBT

et

β = 1 kBT

.

Le lecteur pourra se convaincre que l’approximation faite par l’utilisation de la formule de Stirling ainsi que par la simplification du Lagrangien est justifi´ee dans la limite o`u gj

et nj sont tous deux grands devant 1. Dans la limite o`u seulement gj est grand, un calcul

plus fin permettrait toujours de d´emontrer une d´ecroissance exponentielle de nj/gj en le

niveau d’´energie εj, ce qui est suffisant pour justifier le ph´enom`ene de condensation de

Bose-Einstein.

L’aspect gr´egaire des bosons indiscernables

Consid´erons N particules qui peuvent se trouver dans deux ´etats A ou B. Si l’on suppose les particules indiscernables, et que toutes les ´eventualit´es sont ´equiprobables, alors la probabilit´e que toutes les particules se trouvent dans l’´etat A est p1 = 1/(N +1). Si

l’on consid`ere maintenant les particules discernables et qu’`a nouveau toutes les ´eventualit´es sont ´equiprobables, alors la probabilit´e que toutes les particules se trouvent dans l’´etat A est p2 = 1/2N. Ainsi pour un grand nombre de particules p1  p2.

Ce petit exemple illustre bien que la statistique de Bose-Einstein (qui suppose les bosons indiscernables) entraˆıne une sorte de perte d’ind´ependance entre les particules par rapport `a la statistique de Boltzmann. Cette d´ependance est en fait l’analogue du fait qu’il faille restreindre l’espace de Hilbert aux fonctions d’onde sym´etriques par ´echange de deux particules.

En effet, un syst`eme `a N bosons indiscernables peut ˆetre d´ecrit par une fonction d’onde

ψ(t; x1, . . . , xN),

2.1. La physique de la condensation de Bose-Einstein 41

d’indiscernabilit´e, une telle fonction d’onde ψ doit ˆetre inchang´ee par ´echange entre deux particules. Ainsi pour toute permutation σ deJ1, N K,

ψ(t; x1, . . . , xn) = ψ(t; xσ(1), . . . , xσ(n)).

De telles fonctions d’onde appartiennent donc `a l’espace

L2(R3, C)⊗S. . .⊗SL2(R3, C),

constitu´e des fonctions sym´etriques de l’espace (2.2) (voir [35]), et non pas `a l’espace

L2(R3, C)⊗ . . . ⊗ L2(R3, C) (2.2) tout entier.

Il est possible de d´eduire de cette restriction aux fonctions d’ondes compl`etement sym´etriques le ph´enom`ene d’´emission stimul´ee. Celui-ci consiste en le fait que la probabilit´e pour qu’une particule dans un ´etat φksubisse une transition vers un ´etat φl est multipli´ee

par N + 1 si cet ´etat est d´ej`a occup´e par N particules. Il est alors possible de retrouver la statistique de Bose-Einstein `a partir de bilan d’´energies lors de collisions entre particules. Voir [49].

2.1.3 Le ph´enom`ene de condensation de Bose-Einstein pour un gaz par-

Documents relatifs