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3.2 Puits quantiques à marche en GaN/AlGaN polaires

3.2.3 Spectroscopie d’électroluminescence

Plusieurs travaux mentionnent l’observation de l’électroluminescence de puits GaN/AlGaN dans la gamme THz. Dans l’équipe de R. Paiella, un signal d’électroluminescence aux alentours de 30 meV a été mesuré en appliquant un champ électrique perpendiculairement au plan de puits couplés GaN/Al0.15Ga0.85N refroidis à 20 K [Sudr 10]. Dans l’équipe de H. Hirayama, W. Terashima et al. affirment l’observation d’une émission spontanée ISB THz par l’application d’un champ électrique perpendiculairement au plan des puit GaN/Al0.2Ga0.8N d’une structure à cascade quantique. On peut cependant noter que l’émission est mesurée à une longueur d’onde qui ne correspond pas à la transition ISB attendue et que l’élargissement spectral de l’émission est particulièrement fin pour une transition ISB dans la gamme THz.

Prenant exemple sur ces travaux, j’ai tenté des expériences d’électroluminescence avec les échantillons de la série CCO21X en utilisant un transport horizontal des électrons. L’idée est d’accélérer les électrons dans le plan des couches. Les électrons acquièrent une énergie cinétique 𝐸𝑐= 𝑚/2 (µ𝐹)², sous l’effet du champ électrique F (où µ est la mobilité des électrons dans le puits). En communiquant aux électrons une énergie suffisante, ils peuvent diffuser dans l’état E2 par des processus inélastiques comme l’interaction électron-électron ou électron-phonon. Ensuite ces porteurs pourront relaxer vers l’état E1 en émettant des photons d’énergie E21. Les différents processus intervenant dans le phénomène de l’électroluminescence sont illustrés dans la Figure 3.7.

Sous l’effet du champ électrique, deux types de rayonnement sont émis simultannément, l’émission spontanée ISB et le rayonnement du corps noir issu de l’effet Joule. Néanmoins plusieurs caractéristiques permettent de différentier ces deux types de rayonnement.

Premièrement, tandis que l’émission spontanée ISB correspond à un élargissement spectral de type lorentzien ou gaussien, l’élargissement spectral du corps noir est dicté par la loi de Planck. Deuxièmement le rayonnement ISB est polarisé TM alors que le rayonnement du corps noir ne l’est pas. Finalement la dynamique de ces deux types d’émission pour une variation du champ électrique

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est différente. La dynamique d’émission du corps noir pour une variation de température ΔT est limitée par la vitesse de propagation de la chaleur dans le GaN. La variation du spectre du corps noir induit par le champ électrique se produit à une fréquence inférieure au kHz. En revanche la dynamique d‘émission spontanée ISB est très rapide par rapport aux effets thermiques.

Figure 3.7 – Illustration de l’accélération de l’électron, initialement dans la sous-bande fondamentale, par le champ électrique F (flèche rouge) puis de sa diffusion dans la sous-bande

excitée (flèche verte) et finalement de la relaxation radiative entre les sous-bandes excitée et fondamentale (flèche orange).

Un masque de motifs rectangulaires de largeur de 0.5 mm et de longueur de 1 mm a été utilisé pour graver cette surface. La gravure est effectuée jusqu’à atteindre le milieu de l’hétérostructure pour éviter la fuite du courant par la couche de contact inférieure fortement dopée et donc de faible résistivité. Pour la même raison, la couche de contact supérieure est préalablement gravée, avant la gravure décrite précédemment. Puis des électrodes (Ti/Al/Ti/Au) sont déposées sur les surfaces de 0.5x1 mm² exposées par la gravure. Après cette étape de fabrication en salle blanche, la face latérale de l’échantillon est polie pour obtenir une surface de rugosité inférieure à 1 µm. La longueur d’onde ISB émise étant largement supérieure à la rugosité de cette surface, une bonne extraction de lumière est garantie.

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Pour les mesures d’électroluminescence, l’échantillon est placé dans un cryostat et refroidi à 77 K. L’échantillon est placé au foyer d’un miroir parabolique qui dirige le faisceau vers un interféromètre à transformée de Fourier, Brüker Vertex 70v. Afin de maximiser le signal, un QCL THz GaAs/AlGaAs est utilisé pour optimiser le montage optique et s’assurer que la position de l’échantillon correspond bien au foyer du miroir parabolique. Pour détecter le signal, un bolomètre QMC Instruments Ltd, sensible dans la gamme 2.5 – 18 THz, est utilisé. Le cryostat est enfermé dans une boite de plexigas purgée à l’azote afin de minimiser les absorptions par les gaz atmosphériques. Pour la même raison, l’interféromètre est mis sous vide.

La tension appliquée sur l’échantillon et le QCL est produite par un générateur Agilent 8114A fonctionnant en mode pulsé avec une fréquence de l’ordre de la centaine de kHz jusqu’à plusieurs MHz. Ce signal est sur-modulé à la fréquence de 444 Hz qui correspond à la fréquence de la bande passante à -3 dB du bolomètre. Cette sur-modulation est utilisée par une détection synchrone pour mesurer l’électroluminescence en mode step-scan. Puis la mesure différentielle est normalisée par l’émission sans excitation électrique en mode rapid-scan, ∆𝑇 𝑇⁄ , pour s’affranchir de la réponse 0 spectrale du système (émission corps noir de la scène, optiques et détecteur).

L’utilisation de cette tension pulsée a pour but de révéler l’émission spontanée ISB en atténuant l’émission corps noir. Le duty cycle de la première modulation est aussi utilisé afin d’augmenter l’émission ISB en réduisant l’émission corps noir. Plusieurs mesures ont été effectuées en changeant différents paramètres de l’expérience notamment la fréquence et le duty cycle de la première modulation. La mesure la plus aboutie est présentée en Figure 3.8 et correspond à la mesure de l’échantillon CCO215A avec une tension de 26 V modulée à une fréquence de 3 MHz avec un duty cycle de 50 %. Ces mesures montreraient une émission vers 18 meV, ce qui est en contradiction avec les mesures d’absorption THz.

Figure 3.9 – Ratio TM sur TE du spectre d’électroluminescence (rouge) à 300K et spectres de transmission, TM (bleu) et TE (vert), à 4 K pour un échantillon constitué de puits quantiques à

marche épitaxié par MBE extrait de [Juli 11]. L’épaisseur de la marche est de 15 nm.

Ces travaux ont été initiés par les résultats de S. Sakr qui a montré une électroluminescence à 2.1 THz à température ambiante dans des structures similaires de puits quantique à marche épitaxiées par MBE [Juli 11]. S. Sakr, en appliquant une tension de 26 V modulée à une fréquence de

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3 MHz avec un duty cycle de 40 %, mesure la luminescence de l’énergie ISB attribuée à la transition e3→e2. Le ratio TM sur TE des spectres d’électroluminescence à 300 K et les spectres de transmission, TM et TE, à 4 K pour un échantillon constitué de puits quantiques à marche (épitaxié avec une épaisseur de marche de 15 nm) sont présentés en Figure 3.9 et extrait de [Juli 11]. La luminescence à 2.1 THz est corroborée par le spectre de transmission et est en accord avec les simulations.

Cependant ce travail est encore en cours et les résultats préliminaires ne sont pas concluants du fait de la présence d’une émission corps noir qui masque le signal d’électroluminescence.