• Aucun résultat trouvé

3.2.1

Conditions de l’étude

Les spectres d’excitation permettent de connaître les transitions possibles par absorp- tion de deux photons du faisceau laser qui conduisent à exciter les premiers états ato- miques et les états moléculaires qui leur sont corrélés, à partir des niveaux fondamentaux atomique et moléculaire. Ils conduisent à repérer les longueurs d’onde d’excitation qui permettent de peupler sélectivement un état atomique ou moléculaire donné. Les spectres d’excitation sont obtenus par enregistrement de la fluorescence induite par absorption de deux photons laser (TALIF). Ces spectres sont donc tracés en faisant varier la longueur d’onde du faisceau laser doublé en fréquence issu du laser à colorant et en enregistrant la fluorescence UVL du krypton à une longueur d’onde d’émission fixe choisie à l’aide d’un filtre interférentiel. Cette longueur d’onde est choisie en fonction de la pression du gaz. Pour des pressions de l’ordre de 100 Torr et plus, l’essentiel de la fluorescence provient du second continuum du krypton centré à 148 nm. Les émissions sont donc enregistrées à travers un filtre interférentiel centré à 145 nm et de largeur à mi-hauteur (FWHM) 17, 5 nm.

3.2.2

Spectres d’excitation obtenus par TALIF

La figure 3.1 représente un spectre d’excitation tracé à une pression de krypton de 200 Torr [Jab08b]. L’axe des ordonnées correspond à l’intensité de la fluorescence UVL du second continuum détecté à travers un filtre interférentiel centré à 145 nm. Cette intensité UVL est égale au nombre de photons enregistrés par seconde ramené à un carré de l’énergie laser de 1 mJ2. Sur ce spectre sont représentées les longueurs d’onde théoriques

des transitions à deux photons de l’état atomique fondamental vers les états Kr5s [3/2]o 2

et Kr5s [3/2]o 1.

Ce spectre présente des similitudes évidentes avec celui enregistré dans les mêmes conditions d’excitation et à la même pression dans le xénon [Led06] (figure 3.2).

L’analyse de ces deux spectres permet de distinguer une raie atomique à 250, 044 nm pour le krypton et à 298, 166 nm pour le xénon, de très faible largeur spectrale. Elle correspond à une excitation atomique à deux photons. Pour le krypton, cette excitation est relative à une transition d’énergie 79986 cm−1. Cet état atomique est donc sans ambiguïté

l’état métastable Kr5s [3/2]o

2 d’énergie 79972, 5 cm

1d’après les tables de Moore [Moo49].

La raie d’absorption atomique observée figure 3.1 est relative à la transition :

Kr 1S0 + 2hν250,044 nm −→ Kr 5s [3/2]o2 (3.1)

Cette raie d’absorption atomique possède une largeur à mi-hauteur extrêmement faible ∆λ = 0, 002 nm comme l’atteste la figure 3.3. Cette largeur spectrale est de l’ordre de grandeur de celle du faisceau laser issu du laser à colorant.

Figure 3.1 – Spectre d’excitation du krypton à pKr = 200 Torr. Emission du second continuum enregistrée derrière un filtre interférentiel centré à 145 nm.

Figure3.2 – Spectre d’excitation du xénon à pXe = 200 Torr. Emission du second conti- nuum enregistrée derrière un filtre interférentiel centré à 168 nm.

A partir des caractéristiques expérimentales de cette raie spectrale, il est possible d’estimer la section efficace généralisée d’excitation multiphotonique à deux photons de l’état métastable Kr 5s [3/2]o

2.

Les photons UVL sont émis dans le volume d’interaction du gaz avec le faisceau laser soit dans un cylindre d’axe Oz de longueur égale à la longueur parcourue par le faisceau laser dans la cellule contenant le krypton et de rayon le beam waist du faisceau laser que l’on considérera comme constant dans la cellule car le faisceau, très peu divergent, n’est pas focalisé. Le diamètre du faisceau laser étant petit par rapport à la dimension de la cellule, on peut considérer que les photons sont émis par des éléments de volume

Figure 3.3 – Spectre d’excitation de l’état métastable du krypton à pKr = 200 Torr. Emission du second continuum enregistrée derrière un filtre interférentiel centré à 145 nm. cylindriques de longueur dz situés sur l’axe Oz selon un angle solide Ω′ (figure 3.4).

Le faisceau étant homogène dans toute la cellule, le nombre de photons dn par unité de temps émis par un élément de volume de longueur dz dans la direction (θ′

, ϕ′) sous

un angle solide Ω′ est proportionnel au nombre dN de photons émis dans le volume

d’interaction de longueur dz pendant le temps dt : dn dt = Ω′ 4π dN dt cos π 2 − θ ′ (3.2) N est le nombre total de photons émis dans le volume d’interaction : dN = Ndz

L. En

assimilant dt à la durée d’un flash laser ∆t, on obtient le nombre de photons détectés par flash laser en fonction du nombre total de photons émis dans la cellule par flash laser :

dn = NΩ ′ 4π dz L cos π 2 − θ ′ (3.3) Les photons sont détectés par le photomultiplicateur si l’angle θ sous lequel ils sont collectés est inférieur à l’angle maximal de collecte θP M = π6. Sous cet angle θ seuls sont

collectés les photons émis à la distance r du centre de la photocathode de surface utile S sous un angle solide :

Ω = S cos θ

r2 (3.4)

où r représente la distance entre le point d’émission et le centre de la photocathode. Le faisceau étant perpendiculaire à l’axe du photomultiplicateur, les photons émis dans la direction θ′

= π2 − θ sous un angle solide Ω sont susceptibles d’être détectés. La fenêtre d’entrée du photomultiplicateur est placée derrière un hublot en fluorure de magnésium de transmission T1 = 85% et derrière un filtre interférentiel de transmission T2 = 8, 5%.

Figure 3.4 – Géométrie de la cellule, du volume d’interaction et des angles de détection des photons UVL.

Le rendement quantique du photomultiplicateur η à 145 nm est voisin de 5%. Le nombre des photons collectés par flash laser peut se mettre sous la forme :

n = T1× T2× η × Z +θP M −θP M NS cos2θ 4πr2 dz L . (3.5) Soit en fonction de la distance YP M de l’axe du faisceau à la photocathode du photomul-

tiplicateur : n = T1× T2× η × Z +θP M −θP M NS cos2θ 4πYP ML dθ (3.6)

La surface de la photocathode est égale à S = 32, 2 mm2, la distance est Y

P M = 40 mm

et la longueur utile du faisceau est L = 46 mm. La proportion du flux de photons collectés par le photomultiplicateur par rapport au flux total émis par l’ensemble du faisceau dans la cellule pendant l’intervalle de temps s’écrit :

n N = T1× T2× η × S 4πLYP M  θP M + 1 2sin 2θP M  (3.7) Dans nos conditions expérimentales, un photoélectron détecté par le photomultiplicateur équivaut donc à l’émission dans la cellule de (0, 95 ± 0, 47) × 105 photons VUV. D’après

le spectre d’excitation de la figure 3.3, le nombre de photons détectés par unité de temps est au maximum égal à 27 soit, compte tenu de la fréquence de tir laser égale à 30 Hz, 0,9 photons par tir laser. Les résultats précédents permettent d’évaluer le nombre de photons émis par tir laser : n = (1, 02 ± 0, 54) × 106 photons VUV.

Lors de la formation par excitation multiphotonique à deux photons de l’état méta- stable Kr 5s [3/2]o

2, la probabilité de transition à deux photons est donnée par :

W(1S0→5s[3/2]o 2) = σ (2) I hν 2 (3.8) avec σ(2), la section efficace généralisée d’excitation à 2 photons exprimée en cm4s, I

l’intensité du faisceau laser en W/cm2 et hν, l’énergie d’un photon laser incident. En

négligeant les phénomènes d’ionisation multiphotonique, on peut raisonnablement esti- mer que la création de chaque état excité conduit à l’émission d’un photon UVL via la formation de l’excimère Kr2(A 1u) et son émission radiative.

Le nombre d’états métastables créés par flash laser s’écrit en fonction de la probabilité de transition :

N5s[3/2]o

2 = W(1S0→5s[3/2]o2)

LpKr

760 V ∆t (3.9) avec L = 2, 5 × 1019cm3, le nombre de Loschmidt à 20

C, V = (0, 15 ± 0, 05) cm3 le

volume estimé d’interaction, et ∆t = (7, 0 ± 0, 5) ns la durée du flash laser. La probabilité de transition vaut donc :

W(1S05s[3/2]0

2) = (1, 2 ± 0, 7) × 10

5

s−1 (3.10) Le spectre enregistré à 200 Torr étant normalisé à une énergie au carré de 1 mJ2, on peut

donc calculer une valeur approchée de la section efficace généralisée :

σ(2) = 3, 8 × 10−55±1cm4s (3.11) Cette valeur est comparable à la section efficace d’excitation à deux photons du premier état métastable du xénon déterminée dans des conditions expérimentales analogues dans notre équipe [Led06] :

σ(2) = 1, 0 × 1054±1

Il n’existe pas dans la littérature d’éléments de comparaison pour le krypton. Seuls Gornik et al. [Gor82] trouvent pour l’excitation du premier métastable du xénon une valeur proche σ(2) = 1, 0 × 10−53cm4s et pour l’excitation à deux photons de certains états

de la configuration Xe6p des valeurs de section efficace généralisée à 2 photons dont les ordres de grandeurs sont 109 à 1010 fois plus élevés que les valeurs relatives à l’excitation

des états de la configuration Xe6s [Gor81].

La valeur de la section efficace généralisée d’excitation à 2 photons du premier état métastable du krypton illustre les difficultés expérimentales rencontrées lorsque l’on sou- haite procéder à un peuplement sélectif de cet état. L’excitation doit en effet se produire à l’aide d’un faisceau laser de forte intensité (compte tenu de la faible section efficace d’excitation) et de très faible largeur spectrale (0, 002 nm). Toutefois, l’énergie doit de- meurer suffisamment faible pour éviter des phénomènes d’ionisation multiphotonique. A ces contraintes doivent s’ajouter l’absence de dérive en longueur d’onde et une stabilité énergétique du faisceau laser afin de pouvoir réaliser des enregistrements suffisamment longs du fait des faibles taux de comptage des photons de fluorescence UVL.

Le spectre de la figure 3.1 ne peut être comparé à aucun travail équivalent effectué dans le krypton pur. Les courbes de potentiel du krypton calculées par Audouard et Spie- gelmann [Aud91] (figure 3.5 ) et les résultats similaires obtenus dans le xénon permettent néanmoins d’interpréter ce spectre.

La bande moléculaire de très faible intensité observée à 248, 6 nm ne peut correspondre qu’à un état moléculaire corrélé à l’état Kr5s [3/2]o

2. Il s’agit de l’état moléculaire disso-

ciatif Kr2(A 1g). L’attribution à l’état Kr2(A 2g) est moins probable car, dans ce cas, la

bande d’absorption devrait s’étendre vers les grandes longueurs d’onde. Cette bande est aussi observée dans le xénon et correspond à l’excitation moléculaire de l’état Xe2(A 1g).

Elle possède une plus forte intensité et s’étend vers le rouge car cet état moléculaire possède un faible puits de potentiel [Jon02].

La large bande d’absorption moléculaire située entre 244 nm et 247 nm est due à la superposition de deux bandes relatives à l’excitation des états moléculaires corrélés à l’état résonant Kr5s [3/2]o

1soient les états Kr2(B 1g) et Kr2 B 0+g



qui sont tous les deux répulsifs d’après Audouard et Spiegelmann [Aud91]. L’énergie potentielle de l’état Kr2 B 0+g

 étant toujours supérieure à celle de l’état moléculaire Kr2(B 1g) dans la partie correspondant

au puits de potentiel de l’état fondamental, on peut considérer que l’aile rouge de la bande moléculaire correspond à l’excitation de l’état 1g tandis que le maximum et les plus

courtes longueurs d’onde correspondent à l’excitation de l’état 0+ g.

Documents relatifs