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3.3 Agr´egats purs

3.3.1 Sp´ecificit´e des calculs d’agr´egats

Comme nous l’avons vu au chapitre 2, la simulation de syst`emes de taille finie comme les agr´egats induit un certain nombre de complications, comme par exemple, lorsqu’on utilise un code d’ondes planes, le choix d’une cellule de simulation assez grande pour n´egliger les interactions entre les images p´eriodiques. Nous avons maill´e la premi`ere zone de Brillouin avec le seul point Γ pour ne pas tenir compte de la p´eriodicit´e artificielle. La plupart des calculs ont ´et´e r´ealis´es au moyen d’une pr´erelaxation `a basse ´energie de cut-off Ecut= 260 eV puis ont ´et´e relax´es `a nouveau avec Ecut= 400 eV.

Mais d’autres probl`emes majeurs, sp´ecifiques aux agr´egats, se posent.

Optimisation g´eom´etrique

Le premier concerne l’optimisation g´eom´etrique : il s’agit du nombre important de degr´es de libert´e en comparaison d’un syst`eme p´eriodique tel un cristal massif (o`u quelques param`etres de maille seulement sont `a optimiser), conduisant `a de nombreux minima locaux dans la surface d’´energie potentielle. La tˆache est en effet rendue plus difficile du fait de la grande vari´et´e de sym´etries que le syst`eme peut adopter du fait de l’abandon de l’invariance par translation. La recherche pr´ecise de l’´etat fondamental n´ecessite ainsi de consid´erer plusieurs g´eom´etries initiales explorant au mieux l’espace des configurations. La figure 3.13 illustre les structures que nous avons choisies : s’il est possible d’envisager toutes les topologies d’agr´egats possibles pour les tout petits agr´egats (2 `a 4 atomes), le coˆut calculatoire augmente tr`es rapidement (et encore davantage lorsque l’on consid´erera, au chapitre suivant, plusieurs compositions pour chaque g´eom´etrie). Nous avons donc choisi d’effectuer une exploration relativement fouill´ee des isom`eres `a 7 atomes, taille pour laquelle c’est encore envisageable ; pour les autres tailles (5, 6 et 13 atomes), nous nous sommes content´es de consid´erer quelques sym´etries particuli`eres qui apparaissent favorables dans la litt´erature. En raison du processus d’optimisation, la sym´etrie de l’agr´egat, si elle correspond `a un ´etat m´etastable, est conserv´ee au cours de la relaxation ; c’est pourquoi nous sommes partis de g´eom´etries l´eg`erement perturb´ees par rapport `a la g´eom´etrie

id´eale (comme par exemple les triangles aigus et obtus) afin de prendre en compte la possibilit´e de distorsions de Jahn-Teller.

Compte tenu de cette complexit´e, les ´etudes th´eoriques sur les agr´egats peuvent se classer en diff´erentes cat´egories r´esultant du mˆeme compromis entre pr´ecision du r´esultat et temps de calcul :

• le premier type de calculs concerne les petits agr´egats comportant de deux `a une dizaine atomes. La taille r´eduite du syst`eme ´etudi´e permet de rechercher son ´etat fondamental en optimisant la g´eom´etrie de fa¸con compl`ete, par des techniques telles que dynamique mol´eculaire, gradient conjugu´e, m´ethode de Newton... Ces calculs sur g´eom´etrie relax´ee deviennent tr`es rapidement coˆuteux lorsque le nombre d’atomes dans le syst`eme croˆıt ; c’est pourquoi leur essor est relativement r´ecent. C’est le type de calculs que nous avons effectu´es sur les petits agr´egats ;

• `a l’oppos´e se situent les ´etudes d’agr´egats plus gros de taille exp´erimentale ou presque (quelques dizaines d’atomes et au del`a), pour lesquels une optimisation de la g´eom´etrie serait trop gourmande en temps de calcul. Dans ces simulations, on impose g´en´erale- ment une sym´etrie particuli`ere fig´ee et on donne `a la distance interatomique sa valeur dans le mat´eriau massif. Ce genre de calculs, parmi lesquels figurent essentiellement les premi`eres ´etudes th´eoriques, permet notamment d’expliquer les grandes tendances, comme par exemple l’effet de taille ou l’influence de la sym´etrie sur les propri´et´es ma- gn´etiques. Mais il convient de garder `a l’esprit qu’on calcule l`a l’´etat fondamental d’un syst`eme dont la g´eom´etrie est contrainte ; or nous avons vu pr´ec´edemment que ces effets de relaxation peuvent s’av´erer tr`es importants ;

• entre ces deux extrˆemes, plusieurs variantes peuvent ˆetre rencontr´ees. Le premier pas vers les calculs avec optimisation compl`ete de la g´eom´etrie consiste `a optimiser, `a sym´e- trie donn´ee impos´ee, la distance interatomique en minimisant l’´energie totale de l’agr´egat au moyen de dilatations/contractions isotropes de la g´eom´etrie. L’´etude des ´eventuelles distorsions de Jahn-Teller peut ensuite ˆetre men´ee en autorisant la variation de certaines longueurs de liaisons seulement. En travaillant ainsi avec un nombre r´eduit de degr´es de libert´e, on diminue notablement le temps de calcul.

Grˆace aux avanc´ees technologiques dans le monde informatique, cette s´eparation tend cependant `

a s’estomper, et l’on tend actuellement vers des calculs tout optimis´e✁ . La combinaison d’une m´ethode semi-empirique, moins fiable mais rapide, pour effectuer les premi`eres relaxations, `a une m´ethode ab initio comme la DFT, coˆuteuse mais pr´ecise, est `a ce titre particuli`erement avantageuse.

Optimisation magn´etique

Pour chacune des topologies d’agr´egats envisag´ees, il convient en outre d’effectuer une optimisation de la structure ´electronique. Dans le formalisme de spin colin´eaire que nous utili- sons, le seul nombre magn´etique auquel nous avons acc`es est la projection Sz sur l’axe quantique de r´ef´erence (de choix quelconque) du moment magn´etique total de spin S, correspondant `a la diff´erence entre le nombre des ´electrons de spin ↑ et celui des ´electrons de spin ↓. Or le paragraphe §3.1 (notamment la figure 3.4) a montr´e pour les syst`emes de faible coordinence une ´evolution par pas discrets du moment magn´etique moyen par atome, µ, au contraire du cristal massif pour lequel µ pr´esente une variation continue. Cette sp´ecificit´e des syst`emes de basse dimensionalit´e complique singuli`erement la recherche du moment magn´etique optimal : en particulier, les algorithmes traditionnels de minimisation ´echouent tr`es fr´equemment lorsque l’´etude porte sur de petits agr´egats, restant tr`es souvent bloqu´es dans des ´etats m´etastables dont la multiplicit´e de spin ne correspond pas `a celle de l’´etat fondamental.

N = 3 N = 4 N = 5 N = 6 N = 7 N = 13 linéaire équilatéral (D3h) aigu (C2v) obtus (D2d) raquette carré (D4h) pyramide carrée (D4h) octaèdre (Oh) icosaèdre (Ih) bipyramide triangulaire (D3h) losange (D2h) tétraèdre (Td) décaèdre (bipyramide pentagonale D5h) octaèdre avec un atome de plus

Fig. 3.13 – Les g´eom´etries d’agr´egats utilis´ees dans notre travail. Pour quelques structures particu- li`erement stables, la sym´etrie est indiqu´ee entre parenth`eses.

topologies initiales, nous avons ainsi effectu´e une relaxation g´eom´etrique pour plusieurs valeurs admissibles fix´ees de Sz, et d´etermin´e ensuite l’´energie de coh´esion des structures stables obtenues en fonction de Sz. La figure 3.14 illustre sch´ematiquement l’´evolution attendue de l’´energie de coh´esion Ecoh en fonction de la valeur de Sz impos´ee : compte tenu de la d´eg´en´erescence en Sz pour un ´etat de S donn´e, les courbes Ecoh= f (Sz) devraient pr´esenter un plateau constant pour Sz ≤ Szmaxet diminuer rapidement ensuite pour Sz ≥ Szmax, la valeur critique Szmax´etant en fait la projection maximale de S sur l’axe quantique. La d´etermination de l’´energie de coh´esion du plateau le plus stable ainsi que son Szmax doit permettre alors de remonter aux caract´eristiques de l’´etat fondamental correspondant `a la topologie ´etudi´ee.

En pratique, les r´esultats des calculs, pr´esent´es pour quelques structures pures `a la fi- gure 3.15, apparaissent diff´erents : les plateaux horizontaux attendus sont le plus souvent in- clin´es et extrˆemement raccourcis, voire inexistants. Ce probl`eme est connu en DFT ; portant le nom de contamination de spin, il r´esulte du fait que les fonctionnelles d’´energie d’´echange- corr´elation actuellement utilis´ees, approch´ees, sont incapables par construction de prendre en compte la d´ependance correcte suivant les nombres quantiques S, Sz, etc... Cette prise en compte n´ecessiterait une d´ependance beaucoup plus fine de la fonctionnelle vis-`a-vis de la densit´e ´elec- tronique que celle r´ealis´ee actuellement dans les fonctionnelles approch´ees dont nous disposons. En cons´equence, l’´energie de coh´esion calcul´ee pour une valeur de Sz donn´ee peut contenir des contributions plus ou moins stabilisantes provenant d’´etats de spins S diff´erents. Ce ph´enom`ene est `a l’origine de l’´evolution croissante de Ecoh pour les faibles valeurs de Sz. La valeur de Sz d´elimitant l’extr´emit´e droite du plateau peut ˆetre le plus souvent consid´er´ee comme la valeur maximale admissible Szmax : `a moins qu’un ´etat moins stable de spin S plus ´elev´e soit situ´e tr`es proche en ´energie, Ecoh d´ecroˆıt ensuite rapidement pour Sz ≥ Szmax. Il semble toutefois difficile de conclure quant `a l’existence d’´etats d´eg´en´er´es de spins S inf´erieurs.

La d´etermination de Szmaxpeut ˆetre difficile : dans certains cas, notamment pour l’agr´egat Co13icosa´edrique, l’extr´emit´e droite du plateau n’est pas clairement marqu´ee ; de plus, selon la fonctionnelle utilis´ee, Szmaxn’est pas forc´ement la valeur de Szqui maximise l’´energie de coh´esion. Nous pr´esentons `a la figure 3.16 des courbes Ecoh = f (Sz) pour les agr´egats icosa´edriques purs ´etudi´es dans diff´erentes approximations de la fonctionnelle d’´energie d’´echange-corr´elation : LDA et GGA ; dans ce dernier cas, les deux formules d’interpolation a et b d´ej`a mentionn´ees dans ce chapitre sont compar´ees. Conform´ement `a nos pr´ec´edentes observations, les performances de la fonctionnelle GGA PW91 apparaissent plutˆot bonnes, et nettement meilleures que celles de la LDA ; la formule d’interpolation n’influe pas sur la d´etermination du moment magn´etique optimal. Par la suite, `a d´efaut de pr´ecision, les r´esultats pour les petits agr´egats seront donn´es pour la fonctionnelle GGA-b.

En r´esum´e, la recherche du moment magn´etique optimal est complexe ; pour chacune des topologies envisag´ees, nous devons proc´eder par optimisation de la g´eom´etrie pour diff´erentes valeurs impos´ees de Sz. L’interpr´etation des courbes Ecoh = f (Sz) demande une certaine pr´e- caution, mais nous verrons dans les paragraphes suivants que nos r´esultats sont en bon accord avec les calculs ant´erieurs, qu’il s’agisse de calculs DFT ou autres, et avec les quelques rares valeurs exp´erimentales.

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