• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 3 : CONCEPTION D'UNE EXPERIENCE DE FLUORESCENCE RESOLUE EN TEMPS POUR

3.2. Description du montage expérimental

3.2.2. Spécificités

3.2.2.1. Porte-échantillon

Les expériences de génération de somme de fréquences nécessitent l'excitation de l'échantillon par une source laser intense (1 à 100 mW). L'étude de solutions faiblement visqueuses ou de solides cristallins cryogénisés par FU pose peu de problème du point de vue de l'échantillon tant que celui-ci est photo-stable. Dans ces milieux, la thermalisation

le cas des films fins, une très forte absorption est concentrée sur très peu de matière et le risque de dégradation thermique est alors fort. Dès lors, une attention particulière doit être apportée à la stabilité de l'échantillon.

Dans notre dispositif, l'échantillon est mis en mouvement afin de répartir l'énergie d'excitation sur une plus grande surface. Une combinaison de moteurs pas à pas de rotation et de translation est utilisée afin que le faisceau laser décrive une spirale sur l'échantillon. Ces moteurs sont asservis de façon à contrôler le rayon de cette spirale et la vitesse du faisceau dans le référentiel de l'échantillon. Ce dispositif a été réalisé sur mesure par la société SourceLabg et est représenté en Figure 3.5.

Dans nos expériences, une vitesse de déplacement du faisceau pompe de 20 mm/s a été utilisée. Du fait du nombre de pas dans les moteurs, nous estimons que ~250 000 impulsions excitent le même emplacement sur l'échantillon avant son prochain mouvement. Toutefois, sur une seconde, la puissance est répartie sur une surface de 1 mm². Pour la puissance d'excitation de 10 mW utilisée, cela représente une puissance surfacique de 1 W.cm-2.

Figure 3.5. Schéma du porte-échantillon réalisé par la société SourceLab. Crédits,

SourceLab.

3.2.2.2. Correction de la dispersion spectrale

Depuis l’émission par la molécule jusqu'à la génération de somme de fréquences, la fluorescence, multi-chromatique, traverse différents milieux dispersifs. La vitesse des photons de faible longueur d'onde qui composent la fluorescence y est inférieure à celle

des photons de plus grande longueur d'onde. Cet effet de dispersion de vitesse de groupe (en anglais Group Velocity Dispersion, GVD) doit être corrigé afin de mesurer des TRFS sans recourir à un post-traitement.

Dans notre expérience, le décalage temporel entre deux longueurs d’onde de fluorescence est calculé à l’aide de l’indice de réfraction 𝑛(𝜆) des différents milieux dispersifs traversés par la fluorescence. En pratique, à partir des valeurs tabulées de 𝑛(𝜆), la dépendance de l’indice de phase à la longueur d'onde est modélisée par l'équation de Sellmeier148,152,153 : 𝑛2(𝜆) = A + B C − 𝜆2+ D𝜆2 (3.8) 𝑛𝑔(𝜆) = 𝑛 − 𝜆² 𝑛 [ B (C − 𝜆2)2− D] (3.9)

L’équation (3.10) permet d’obtenir l’indice de groupe de l’indice de phase et donc la vitesse de groupe de l’onde polychromatique. Le délai temporel Δ𝑡 entre deux longueurs d’onde de fluorescence 𝜆𝑟 et 𝜆𝑏 dans un milieu dispersif d’une épaisseur 𝑑 est alors

composé par un décalage de la ligne à retard Δ𝑥 selon l’équation : Δ𝑥 = 1

2𝑑 [𝑛𝑔(𝜆𝑟) − 𝑛𝑔(𝜆𝑏)] (3.10)

La fluorescence traverse plusieurs milieux dispersifs : un filtre optique (permettant l’absorption du reste de la pompe), ~1,5 mm de cristal de BBO et, dans le cas des cellules complètes, 2,2 mm de verre BK7 sur laquelle le FTO est déposé. La quantité d’air est négligée car faiblement dispersive. Une fois le délai calculé, ce dernier est compensé par un décalage de la ligne à retard pour chaque longueur d’onde mesurée lors de l'acquisition des TRFS.

Cette correction n’est pas parfaite. Par exemple, l'épaisseur effective de cristal de BBO intervenant dans le processus de la génération de somme de fréquences n'est pas connue. Il en résulte une incertitude sur les TRFS aux temps courts. Afin de minimiser la dispersion, la collection de la fluorescence est assurée par des miroirs et non par des lentilles et les milieux dispersifs sont choisis les plus fins possibles. Le milieu le plus dispersif est le filtre placé entre les deux miroirs paraboliques. Son épaisseur (3 mm) est nécessaire afin de bloquer complètement la réflexion de la pompe sur l’échantillon solide qui est également transporté par le miroir parabolique.

3.2.2.3. Sensibilité spectrale

La sensibilité spectrale de l’expérience est corrigée en post-traitement à l’aide de la comparaison du spectre de fluorescence stationnaire et du TRFS mesuré aux temps longs (~200 ps) d’un fluorophore référence. Les "temps longs" font référence au domaine temporel où tous les processus de relaxation spectrale sont jugés terminés. Le fluorophore est choisi pour que sa durée de vie de fluorescence soit très longue de sorte que les spectres de fluorescence stationnaire et aux temps longs soient identiques. Pour les spectres décrits dans le prochain chapitre, la courbe de correction a été obtenu par l’étude de la C153 dans l’EtOH (𝜆𝑓 = 520 nm) et du colorant donneur-accepteur RK1 dans

le THF (𝜆𝑓 = 709 nm, structure page 81). Les spectres de fluorescence stationnaire et obtenus par FU sont comparés dans la Figure 3.6. Les coefficients de correction sont alors obtenus par le rapport du spectre stationnaire par le spectre obtenu par FU aux temps longs. Ces courbes ont ensuite été normalisées par leur valeur à 620 nm (longueur d'onde de l'optimisation de l'expérience), rassemblées et ajustées par une fonction polynomiale d'ordre 3. Cet ajustement est ensuite utilisé comme courbe de correction spectrale pour notre expérience. Cette méthode de correction spectrale est largement utilisée dans la littérature, notamment par Ernsting et coll.149,154

Figure 3.6. Spectres de fluorescence stationnaire de C153 dans l'EtOH (bleu foncé) et de RK1 dans le THF (rouge foncé) et TRFS à 200 ps de la C153 dans l'EtOH (bleu) et de RK1

dans le THF (rouge). Les symboles représentent les courbes de correction spectrales obtenues pour la C153 (carrés bleus) et pour RK1 (carrés rouges). La courbe de

correction utilisée est indiquée par un trait plein noir. La longueur d'onde d'excitation est 450 nm.

La sensibilité spectrale dépend principalement de la sensibilité de la détection (monochromateur et photomultiplicateur) et de l’efficacité du processus de génération de somme de fréquences. Dans notre montage, la sensibilité spectrale décroit dans le proche UV. La fréquence somme correspond alors à des longueurs d'onde inférieures à 360 nm qui ne sont pas optimales pour notre détection. Au contraire, le choix d'un cristal de BBO optimisé pour le type I permet d'obtenir un coefficient d'efficacité du processus de FU ne variant que de 2% entre 500 et 1000 nm alors que de très fortes variations sont attendues lors d'une utilisation du BBO en type II (voir Figure 3.3).

3.2.2.4. Domaine spectral

Le choix d’un cristal de type I pose des problèmes pour le domaine spectral accessible dans notre montage. En effet, pour la fluorescence émise à des longueurs d'onde proches de la porte optique (900 nm), l'angle d'accord de phase optimale à la génération de somme de fréquences génère aussi la deuxième harmonique de la sonde (450 nm). De la même façon, le monochromateur utilisé n'est pas parfait et peut laisser passer une partie de la lumière aux longueurs d'onde proches de celle désirée. Il est ainsi impossible de mesurer la fluorescence autour de la longueur d'onde de la porte. L'utilisation d'un cristal de type II ajouterait un décalage de plus de 10° entre l'angle d'accord de phase optimale pour le doublage et la génération de somme de fréquences au détriment de la sensibilité.

Afin de séparer le signal somme de la seconde harmonique générée par la sonde seule, la sonde est hors du plan horizontal. En pratique, la sonde est envoyée depuis un miroir plus haut que le cristal somme alors que le deuxième miroir parabolique est un peu plus bas que le cristal somme. Le vecteur d'onde de la somme, qui est la somme des vecteurs d'onde de la sonde et de la fluorescence, est alors proche du plan horizontal alors que la seconde harmonique garde la direction de la sonde et sort du plan horizontal. La seconde harmonique peut alors être bloquée sans nuire au signal somme.

Dans cette géométrie, la fluorescence et la sonde ont le même angle d’incidence sur le cristal vis-à-vis de l’angle d’accord de phase.

Compte tenu de la sensibilité et de la largeur de la bande passante de notre montage, nous avons les moyens de mesurer la fluorescence entre 460 et 820 nm pour une pompe à 450 nm.

3.2.2.5. Résolution temporelle

Notre oscillateur délivre des impulsions de largeur à mi-hauteur 𝑓𝑤ℎ𝑚 = 120 fs. Les impulsions s’élargissent lors des phénomènes de réflexion et passage au travers de milieux dispersifs comme les lentilles et les filtres.

En utilisant un miroir placé sur le porte échantillon, il est possible d’estimer la largeur des impulsions par une mesure de corrélation croisée entre la sonde et la pompe. Une gaussienne correspondant à la troisième harmonique (THG) est alors générée dans le cristal somme (voir ci-dessous). Sa largeur à mi-hauteur est égale à ~300 fs.

Lorsque le porte échantillon est mis en rotation, la largeur à mi-hauteur de la THG augmente. La planéité de la rotation est alors imparfaite. Après réglage, une largeur à mi- hauteur de 400 à 500 fs est obtenue. Nous estimons la résolution temporelle de l’expérience à ~300 fs après déconvolution.