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Liste des tables

I. Infection par le virus de l’immunodéficience humaine de type

3. Spécificité des traitements antirétrovirau

a. Différentes classes d’antirétroviraux

Les ARV sont regroupés en six classes différentes en fonction de l’étape du cycle de réplication bloquée : les antagonistes du corécepteur d’entrée CCR5 (anti-CCR5), les inhibiteurs de fusion (IF), les inhibiteurs nucléosidiques (INTI) et les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI), les inhibiteurs de l’intégrase (INI) et les inhibiteurs de la protéase (IP). Actuellement, l’OMS préconise l’association de trois ARV afin de limiter l’émergence de virus résistants et de s’adapter à la variabilité de réponses aux traitements des patients (Calvez et al. 2017; Todesco et al. 2015), avec en première intention l’association de deux INTI avec un troisième agent. La combinaison de la trithérapie pourra être adaptée en fonction de la réponse virologique et immunologique du patient mais aussi de la tolérance. Le traitement ART doit réduire la charge virale plasmatique à 50 copies/mL en six mois avec des objectifs intermédiaires de référence après 1 et 3 mois de prise du traitement. L’échec de ces objectifs implique la recherche d’une mauvaise observance chez le patient, la possibilité d’interaction médicamenteuse ou un sous-dosage du traitement ART, et de corriger la cause identifiée dans les plus brefs délais.

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Il existe désormais une trentaine de molécules antirétrovirales sur le marché. Les interactions médicamenteuses entre les ARV, ou bien avec d’autres médicaments, sont nombreuses. Ces interactions potentialisent ou antagonisent l’effet d’un médicament. Ces dernières se manifestent principalement au niveau de l’absorption intestinale et du métabolisme hépatique. Elles sont majoritairement basées sur le cytochrome P450 3A4 (CYP 3A4) qui est l’une des enzymes majeures impliquées dans le métabolisme de plus de 60% des médicaments commercialisés.

Malgré le développement de nouveaux ARV agissant sur des sites d’actions différents,

aujourd’hui deux associations fixes d’INTI sont recommandées préférentiellement pour leur

efficacité, leur tolérance ainsi que la facilité de prise du traitement (1 comprimé par jour) qui permet une meilleure compliance du patient. Il s’agit de l’association ténofovir disoproxil fumarate (TDF)/emtricitabine (FTC) et de l’association abacavir (ABC)/lamivudine (3TC). Elles présentent la même efficacité sur le plan virologique et immunologique lorsqu’elles sont associées à l’inhibiteur d’intégrase dolutégravir (DTG), contrairement à ce que suggéraient des études plus anciennes où ces molécules étaient associées à l’éfavirenz ou des IP (Arribas et al. 2008; Gallant et al. 2006; Sax et al. 2011; Post et al. 2010). L’association ABC/3TC constitue une alternative au TDF/FTC chez les patients à risque rénal ou osseux, et elle est fortement préconisée si le patient ne porte pas l’allèle HLA B*5701 afin de limiter une réaction d’hypersensibilité de type IV pouvant être mortelle. La majorité des patients infectés par le VIH-1 est traitée par une trithérapie composée de TDF/FTC ou ABC/3TC associée à un inhibiteur d’intégrase de première génération, le raltégravir (RAL) ou de seconde génération, le dolutégravir (DTG) ou le bictegravir (BIC). A noter qu’un test génotypique incluant la recherche de mutation de résistance dans le gène de l’intégrase est recommandé avant l’initiation du premier traitement ART associant un INI. Quelques différences sont observées entre RAL et DTG ou BIC. Le RAL est le premier représentant de la classe des INI et présente

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une efficacité et une tolérance globalement bonne. En revanche, en cas d’échec virologique l’apparition de virus résistants est forte contrairement au DTG et au BIC qui présentent l’avantage d’une sélection de virus résistants plus faible. Associé au TDF/FTC, son efficacité et sa tolérance sont bonnes et ont été démontrées dans plusieurs essais cliniques de phase 3 (Raffi et al. 2013; S. Walmsley et al. 2015; S. L. Walmsley et al. 2013; Clotet et al. 2014). Le RAL et DTG ont montré des effets indésirables neuropsychiques (troubles du sommeil, anxiété, céphalées, vertiges et troubles de la concentration) et sont associés à des arrêts plus fréquents du traitement dans le cas du DTG (Hoffmann et al. 2017; Peñafiel et al. 2017). De plus, des travaux ont mis en évidence un effet possible du DTG dans la prise de poids (Norwood et al. 2017) et du RAL dans des modifications de composition de la graisse corporelle (McComsey et al. 2016), des effets initialement sous-évalués. Compte tenu du recul clinique désormais significatif et les effets indésirables limités par rapport à d’autres combinaisons, ces schémas thérapeutiques restent les plus prescrits en première intention.

b. Pharmacocinétique : formulation et diffusion des antirétroviraux

Le virus, bien qu’il soit contrôlé, persiste à l’état latent à travers des réservoirs (Lambotte et al. 2004; Trono et al. 2010), difficilement accessibles à la diffusion des ARV. Les connaissances sur la capacité de diffusion des ARV dans ces différents réservoirs représentent actuellement un enjeu fondamental pour pouvoir envisager un traitement curatif du VIH-1. Ils constituent actuellement le facteur limitant pouvant conduire à un échec thérapeutique, et ce malgré un traitement ART efficace et une observance optimale. D’une façon générale, plusieurs facteurs conditionnent la diffusion tissulaire des médicaments : leurs propriétés physicochimiques comme leur poids moléculaire et leur lipophilie, la fixation aux protéines plasmatiques pouvant ralentir la diffusion du médicament, les propriétés anatomiques et

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physiologiques du compartiment viral, c’est-à-dire le pH, la concentration en protéines cellulaires ou tissulaires capables de lier le médicament ou encore la lipophilie. Enfin, des transporteurs peuvent faciliter ou empêcher l’entrée des ARV au sein des cellules et à travers les barrières anatomiques. Les degrés de pénétrance des ARV les plus faibles sont retrouvés dans le système nerveux central (SNC) lié à la présence de la barrière hématoencéphalique (Ene, Duiculescu, and Ruta 2011). La diffusion dans les liquides génitaux est variable. A l’inverse, la muqueuse rectale qui présente la caractéristique d’être lipophile, richement vascularisée et contenant de nombreuses protéines de transport, permet une diffusion très importante des ARV (Thompson, Cohen, and Kashuba 2013; Else et al. 20111; S. Taylor and Davies 2010). Toutefois, le degré de pénétrance des ARV dans ce tissu reste très variable selon la classe de médicaments et au sein même de celle-ci (Cottrell, Srinivas, and Kashuba 2015).

c. Comorbidités liées à la persistance virale et à la toxicité des antirétroviraux

Le développement des ARV et les progrès de la recherche ont permis d’améliorer sensiblement l’efficacité et la tolérance de ces médicaments mais certains effets indésirables subsistent. Les effets combinés de l’infection (persistance du virus, associée à une inflammation et une activation du système immunitaire) et des ARV peuvent mener à l’apparition de comorbidités.

Les troubles métaboliques sont des effets indésirables caractéristiques d’une prise du traitement ART au long cours et concernent la très grande majorité des ARV. Ils sont basés sur les troubles du métabolisme lipidique (lipodystrophie) et glucidique (insulinorésistance). La lipodystrophie, c’est-à-dire la modification de la répartition du tissu adipeux corporel, est une complication historique du traitement ART et représente un surrisque cardiovasculaire. A la suite des stratégies thérapeutiques recommandées depuis 2010 qui préconisent l’abandon des

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INTI et des IP les plus pourvoyeurs d’anomalies métaboliques, les symptômes cliniques se sont améliorés. La perturbation du métabolisme glucidique repose principalement sur un état d’insulinorésistance pouvant conduire au risque de développer un diabète de type 2. Le rôle de certains ARV, en particulier les IP, ayant des effets néfastes sur la sécrétion d’insuline (B. Sharma 2014) favorisant la survenue d’un diabète, a été montré avec l’utilisation d’association antirétrovirales de premières générations (De Wit et al. 2008; Ledergerber et al. 2007; Capeau et al. 2012; Riyaten et al. 2015). Il n’a pas été retrouvé d’association entre le risque de diabète et la mise en place des stratégies thérapeutiques recommandées depuis 2010. Il faut cependant noter que le virus contribue également à l’installation de ces désordres métaboliques (Giralt, Domingo, and Villarroya 2011).

De nombreuses autres comorbidités ont été observées (Allavena et al. 2018) : ostéoporose, sarcopénie, apparition de myopathies et de fatigue musculaire. On note également diverses manifestations cardiovasculaires telles que l’athérosclérose, l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque et l’infarctus du myocarde. En France, les maladies cardiovasculaires constituent la troisième cause de décès des patients infectés. L’essai clinique SMART montrent que le VIH-1 lui-même est un facteur de risque d’athérosclérose (Ross et al. 2009; Grunfeld et al. 2009) et certaines études insistent sur le rôle de l’activation immunitaire prolongée et l’inflammation à bas bruit comme facteurs de risques de développer ces pathologies cardiovasculaires (Nou, Lo, and Grinspoon 2016; S. Lang et al. 2012). Des atteintes rénales sont également à considérer en lien avec la forte prévalence des comorbidités cardiovasculaires et métaboliques, du vieillissement de la population, et de l’impact de l’exposition cumulée et prolongée à certains ARV. Enfin, les maladies neurodégénératives (Nightingale et al. 2014; Robertson et al. 2010; A. Shah et al. 2016) et l’apparition de troubles psychiatriques (troubles dépressifs, anxieux, état de stress) (Langebeek et al. 2017) sont également notables.

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Malgré l’apport du traitement ART, deux problématiques majeures restent à prendre en considération dans la prise en charge de cette maladie afin de limiter l’incidence des comorbidités : la persistance du virus au sein de réservoirs viraux et les défauts de la réponse immunitaire associés à cette persistance.

II.

Persistance virale et réponses immunitaires altérées