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Liste des tables

I. Infection par le virus de l’immunodéficience humaine de type

2. Physiopathologie de l’infection par le VIH-

a. Evolution naturelle de l’infection

Le VIH-1 est un virus qui se transmet par plusieurs fluides corporels tels que le sang, les sécrétions vaginales, le sperme et le lait maternel. Alors qu’environ 80% des adultes séropositifs ont été infectés par une exposition des muqueuses vaginales ou rectales lors d’un rapport sexuel, 20% l’ont été par voies percutanées ou intraveineuses. La principale caractéristique immunologique de l’infection par le VIH-1 est une diminution du nombre de LT CD4+ (Rowland-Jones 2003). Rapidement, la déplétion des LT CD4+ est devenue le principal

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La maladie évolue naturellement à travers trois phases successives (Figure 5) :

Figure 5 : Phases de l’infection par le VIH-1 et évolution naturelle en l’absence de traitement ART. Dans le sang, la phase aigüe se caractérise par la déplétion des LT CD4+

parallèlement à une augmentation exponentielle de la charge virale plasmatique. L’initiation de la réponse LT CD8+ spécifique permet de stabiliser la charge virale et de restaurer le nombre de LT CD4+

dans le sang. Pendant la phase chronique, la réplication virale continue et la pression exercée par la réponse immunitaire adaptative entraine la sélection de virus mutés échappant au système immunitaire ; le nombre de LT CD4+ diminue progressivement et la réponse adaptative s’épuise. Le patient devient

vulnérable aux infections opportunistes et à certaines tumeurs malignes, c’est l’entrée dans le stade SIDA.

1) la phase aigüe aussi appelée primo-infection : elle peut être asymptomatique chez certains patients ou bien notable par l’apparition de symptômes 5 à 30 jours après l’exposition au virus. Il peut s’agir de maux de tête, de maux de ventre, de diarrhées, d’un état pseudo-grippal ou d’éruptions cutanées sur le corps et le visage (Timothy Schacker et al. 1996). Immédiatement, après l’exposition au virus, l’inflammation induite par l’infection favorise le recrutement des LT CD4+CCR5+, principales cellules cibles du virus au site d’infection. Le VIH-1 se réplique

alors activement dans la muqueuse et sous-muqueuse génitale. Cette phase est qualifiée de phase éclipse et a lieu entre 7 et 21 jours post-infection ; le virus n’est pas détectable au niveau plasmatique (Brandon F. Keele et al. 2008). Par la suite, le virus et les cellules infectées rejoignent la circulation lymphatique puis les organes lymphoïdes secondaires (Xu, Wang, and Veazey 2013). Le virus se propage rapidement et particulièrement au niveau du tissu lymphoïde

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associé à l’intestin, le GALT (Gut-Associated Lymphoid Tissue) dans lequel les LT mémoires activés CD4+CCR5+ sont présents en très grand nombre (Brenchley, Schacker, et al. 2004;

Mattapallil et al. 2005; R. S. Veazey et al. 2000). Environ 80% des LT CD4+ du GALT sont

éliminés par apoptose au cours des trois premières semaines. En parallèle, plus de 50% des centres germinatifs de l’intestin sont perdus 80 jours après l’infection et impactent ainsi de façon indirecte les lymphocytes B (LB) (McMichael et al. 2010). A ce stade, entre 14 et 25 jours post-infection, la charge virale augmente de façon exponentielle et atteint un pic supérieur à 1.106 copies/ml dans le sang (Little et al. 1999). Il coïncide avec une très forte production de

cytokines inflammatoires par les cellules de l’immunité innée dite « tempête cytokinique » (Roberts et al. 2010). Celle-ci joue un rôle dans la mortalité des LT CD4+ et contribue à une

forte activation cellulaire. De plus, le processus d’apoptose associé provoque la libération de particules apoptotiques possédant des propriétés immunosuppressives. De ce fait, alors que la déplétion des LT CD4+ est en partie liée à l’élimination des cellules directement infectées,

l’ensemble de ces mécanismes indirects (activation immunitaire et immunosuppression) favorisent aussi la propagation virale et impacte négativement l’homéostasie immunitaire (Okoye and Picker 2013; Février, Dorgham, and Rebollo 2011). Enfin, la charge virale plasmatique se stabilise avec l’initiation de la réponse T CD8 spécifique, parallèlement à un

nombre de LT CD4+ qui revient à un niveau proche de la normale dans le sang mais pas dans

le GALT (Mattapallil et al. 2005). Parallèlement, la réponse anticorps par les LB se met en place entre 3 et 4 semaines après l’infection (Tomaras et al. 2008). A ce stade, la dissémination virale est déjà suffisamment avancée pour permettre la formation de réservoirs viraux à travers l’organisme (Bruner et al. 2016; Pilcher et al. 2004; T Schacker et al. 2000).

2) la phase chronique, aussi appelée la phase de latence clinique : elle est asymptomatique et peut durer entre 5 à 12 ans mais varie considérablement d’un patient à un autre (Lemp et al.

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1990). Durant cette période, le virus continue à se répliquer. La pression exercée par la réponse immunitaire adaptative sur la réplication virale associée aux erreurs non corrigées de la transcriptase inverse contribuent à l’apparition de virus mutés échappant à la reconnaissance des antigènes viraux, aux anticorps neutralisants et à la réponse des LT cytotoxiques (Hunt et al. 2008; Wei et al. 2003). La formation de réservoirs viraux est entretenue au sein des LT CD4+

mémoires (Siliciano et al. 2003) et des macrophages (Kruize and Kootstra 2019). Ces réservoirs permettent au virus de se réactiver malgré la pression exercée par le système immunitaire (Pace et al. 2011). A cette persistance virale, sont associées des altérations quantitatives et qualitatives des cellules immunitaires : activation immunitaire et inflammation chronique. Ces processus seront abordés plus spécifiquement en partie II.

3) le stade SIDA : c’est la phase terminale de l’infection en l’absence de traitement. Il est défini par un nombre absolu de LT CD4+ inférieur au seuil de 200 cellules par mm3 dans le sang et

par la survenue de symptômes cliniques. Cette phase s’accompagne d’une mortalité cellulaire

accrue, une activation immunitaire forte, un changement du profil de LT CD4+ Th1 vers un

profil Th2, une diminution de la réponse CD8 spécifique via une altération des fonctions cytotoxiques et une mort cellulaire importante (Langford, Ananworanich, and Cooper 2007). Le patient devient susceptible aux infections opportunistes (Low et al. 2016) et à certaines tumeurs malignes (Shiels and Engels 2017) et meurent rapidement.

b. Apport des traitements antirétroviraux

Au début de l’épidémie par le VIH-1 dans les années 1980, les patients étaient traités tardivement et uniquement pour les infections opportunistes, sans toutefois changer le pronostic vital du patient. Le premier traitement ART efficace à avoir été développé est l’azidothymidine

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(AZT) et apparait en 1987. Il s’agit d’une molécule permettant de bloquer une des enzymes

majeures du cycle de réplication virale : la transcriptase inverse. Les premiers essais cliniques ont mis en évidence une augmentation du nombre de LT CD4+ et une espérance de vie

prolongée des patients en stade SIDA (Fischl et al. 1987). Cette stratégie a permis de réduire la mortalité et la morbidité associées à l’apparition de maladies opportunistes avec en revanche des effets secondaires très importants pour le patient. Cependant, le VIH-1 s’est rapidement adapté à cette monothérapie et a développé des résistances (Larder, Darby, and Richman 1989). Ce n’est qu’en 1996 que le développement de molécules ciblant d’autres protéines virales comme la protéase et l’intégrase (Hammer et al. 1996; Laskey and Siliciano 2014) permet d’envisager des combinaisons de plusieurs ARV et de limiter les résistances.

L’objectif principal du traitement ART est d’empêcher la progression vers le stade SIDA en restaurant et maintenant un nombre de LT CD4+ supérieur à 500 cellules/mm3. Pour cela, le

traitement doit réduire drastiquement la charge virale plasmatique à un niveau indétectable de l’ordre de 50 copies/mL. En effet, ce seuil maximise la restauration immunitaire et minimise le risque de sélectionner des virus résistants. Il réduit également la morbidité associée à l’infection. L’OMS recommande de traiter toute personne infectée le plus tôt possible après le diagnostic. En effet, le traitement ART constitue un moyen performant de réduire le risque de transmission du virus par voie sexuelle (Donnell et al. 2010) en plus des bénéfices apportés par le contrôle de la réplication virale sur la morbidité et mortalité associée (Iwuji et al. 2011).

L’impact des traitements ART sur la réponse immunitaire est notable et d’autant plus lorsque l’initiation du traitement est précoce (Cellerai et al. 2011; Hocqueloux et al. 2013). Ils permettent en premier lieu de réduire drastiquement la charge virale et ainsi d’optimiser la restauration du nombre de LT CD4+ à un taux supérieur à 500 cellules/mm3. Il a été montré un

bénéfice immunologique associé à un ratio CD4/CD8 supérieur à 1, à la préservation du nombre de LT CD4+ mémoires, au maintien d’une diversité du répertoire T et notamment de la réponse

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T CD8 spécifique, à une réduction de la fibrose des tissus lymphoïdes (M. Zeng et al. 2012; Hocqueloux et al. 2013; Cellerai et al. 2011). De plus, le traitement ART diminue également l’activation du système immunitaire, l’épuisement (Maartens, Celum, and Lewin 2014; Trautmann et al. 2006), et l’inflammation systémique chronique dont les conséquences délétères ont été mises en évidence au niveau cardio-vasculaire, métabolique, osseux et neurologique (Sandler et al. 2011).