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Les pulsars

Le mécanisme le plus naturel pour accélérer une particule chargée est l’utilisation d’un champ électrique. Cependant, pour accélérer des particules de nombre atomique Z jusqu’à des énergies de 1020eV, les champs électrostatiques requis doivent correspondre à une dif-férence de potentiel de 1020

Z Volts. Peu d’objets astrophysiques à l’exception des pulsars qui sont des étoiles à neutrons en rotation, présentent de tels champs.

En effet, pour une pulsation angulaire typique de 70 rad/s, le champ magnétique B à la surface de l’étoile est de l’ordre de 109Tesla. L’amplitude du champ électrique induit est alors donnée par : ǫ = ΩLB soit 7 1014V/m pour un rayon typique de pulsar de 10 km. L’énergie maximale acquise par une particule de charge Ze dans un tel champ est donc : Emax= ZeLǫ≃1019eV pour un proton.

Cependant, il faut tenir compte des pertes énergétiques, principalement par émission synchrotron, subies lors de l’accélération. Ainsi, une charge Q de masse m émet lors d’une

3.2 Les sources astrophysiques 55

acccélération de nature relativiste, une puissance P de la forme P= 2 3 Q2 4πǫ0c3 1 m2  dpµ 2

Pour une particule relativiste (β ∼1),dp =γω p, ω= L et p=γmβc, on obtient finalement P≃ 234πǫQ2c

0

γ4

L2

Pour que les pertes deviennent négligeables devant le gain en énergie acquis durant une pulsation ω, il faut que la dimension caractéritique L de la zone accélératrice soit

 L 1 pc  &  E 100 EeV 3

La taille requise pour accélérer des particules jusqu’à 1020eV est donc d’au moins un parsec, ce qui exclut les étoiles à neutrons.

Une autre approche propose qu’une fraction non négligeable de l’énergie de décéléra-tion de l’étoile à neutrons soit transférée à des noyaux de fer extirpés de la surface de l’é-toile. Si cette condition est réalisée, l’accélération jusqu’à des énergies E ∼ 1021(Z/26)eV devient envisageable. Ce modèle requiert néanmoins que la période de rotation soit suff-isamment lente, i.e. voisine de 10−3 secondes, et que le champ magnétique soit, dans le même temps, excessivement grand B∼ 1013Gauss. De tels objets n’ont jamais été observés jusqu’à présent. Toutefois, si une fraction, supérieure à 10−6, de la population des très je-unes étoiles à neutrons remplit ces conditions alors ces objets suffiraient à expliquer le flux de rayons cosmiques à ultra-haute énergie (pour une revue détaillée cf. B. Rudak [171] et les références attenantes).

Toutefois, si les étoiles à neutrons sont à l’origine du flux de rayons cosmiques observé, celles présentes dans notre Galaxie doivent avoir un rôle prépondérant. Par conséquent, ces modèles prédisent une forte anisotropie en direction du plan galactique. Les résultats de la collaboration Pierre Auger excluent vraisemblablement une origine galactique au delà de 1 EeV (dans la limite où notre connaissance du champ magnétique galactique est réaliste). Dans l’hypothèse où les rayons cosmiques seraient majoritairement des protons, les pulsars ne pourrait alors pas expliquer le flux observé dans la région d’ultra-haute énergie.

Les sursauts gamma (Gamma Ray Burst, GRB)

La compréhension des sursauts gamma s’est spectaculairement améliorée ces dernières années avec la découverte de contreparties X, optique et radio, permettant de les situer dans des galaxies à des distances cosmologiques (z ∼ 0.3−4.5). Un sursaut gamma est un court (de quelques millisecondes à plusieurs centaines de secondes) mais très intense burst de rayons gamma (typiquement entre 100 keV et 1 MeV). Les premières détections furent obtenues par les satellites militaires VELA à la fin des années 60 [172] : environ 500 sources furent ainsi mises en évidence. L’apparente isotropie d’alors fut attribuée à une sensibilité insuffisante des instruments d’époque tandis que la majorité des modèles associaient les sursauts gamma à de possibles étoiles à neutrons d’origine galactique.

Les données de l’instrument BATSE, lancé au début des années 90 à bord du satellite Compton Gamma-Ray Observatory, révolutionnèrent la vision et la compréhension de ces ob-jets. L’un des résultats les plus remarquables, au delà des 3000 GRB détectés, est que la distribution sur le ciel de ces sources est parfaitement isotrope, confirmant l’origine

extra-galactique des sursauts gamma [173]. En 1997, le satellite Beppo-SAX observa, dans le do-maine des rayons X, l’émission rémanente qui intervient quelques heures après le burst de photons gamma [174]. La précision des mesures permit, par la suite, la mise en évidence de contreparties optique et radio.

FIGURE3.4 - Vue schématique du scénario

en trois étapes proposé pour les sursauts gamma (d’après Réf. [175]). Le logarithme

de la distance typique (en mètres) est in-diqué sur le côté.Phase d’accélération : l’énergie présente (énergie thermique, énergie magnétique, ...) est convertie en énergie ciné-tique, portée par les baryons. L’ejecta devient ultra-relativiste.Fin de l’accélération : le facteur de Lorentz final est de l’ordre de 100 voir plus.À grande distance, l’ejecta devient transparent. Si de l’énergie interne résiduelle est encore présente, elle est alors rayonnée (émission photosphérique, quasi-thermique).Les chocs internes : ces on-des de choc se forment en raison on-des in-homogénéités initiales de la distribution du facteur de Lorentz. Elles se propagent dans l’ejecta relativiste et la matière choquée pro-duit le sursaut gamma proprement dit.Le choc en retour : ce choc se forme lorsque la décélération par le milieu extérieur devient importante. Il conduit généralement au flash optique.Discontinuité de contact séparant l’ejecta relativiste du milieu extérieur.Le choc avant : cette onde de choc initialement ultra-relativiste se propage dans le milieu ex-térieur produisant l’émission remanente ob-servée quelques heures après le burst de pho-tons gamma.Lorsque le facteur de Lorentz a suffisamment diminué, l’expansion latérale du jet devient conséquente. Suivant l’énergie cinétique de l’ejecta et la densité du milieu ex-térieur, les phases de chocs internes, choc en retouret choc externepeuvent être chronologiquement séparées ou, au contraire, se superposer.

Si, au début des années 90, le nombre de modèles visant à décrire la formation et l’origine de l’émission des GRBs avoisinait la centaine [176], les mesures précises de distances per-mirent d’écarter la majorité d’entre eux. Ces sources résulteraient de l’expansion d’un vent relativiste de facteur de Lorentz Γ compris entre 100 et 1000. Ce modèle, dit de la "boule de feu" et originellement introduit par B. Paczy ´nski [177] et J. Goodman [178], décompose les sursauts gamma en trois structures distinctes (cf.FIG.3.4) :

- le moteur central résultant de la coalescence d’un système binaire de deux objets com-pacts (deux étoiles à neutrons ou une étoile à neutrons et un trou noir) ou de l’ef-fondrement d’une étoile massive en trou noir (hypernova). Le premier scénario, bien que nettement plus spéculatif, semble privilégier des sursauts gamma courts (tvar ∼ 100 ms) tandis que la seconde hypothèse est associée aux sursauts gamma longs (tvar

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10 s). L’énergie libérée lors de ce processus est alors transmise à un ejecta de matière hautement relativiste,

- à des distances comprises entre 108 et 1010km du noyau centrald, l’ejecta de matière devient transparent et une partie de l’énergie cinétique est alors rayonnée. Divers mé-canismes ont été proposés dont le plus abouti est le modèle des chocs internes [179]. Le postulat de base est que le vent relativiste, émis par le cœur du sursaut gamma, n’est pas homogène et les couches qui le constituent entrent en collision les unes avec les autres du fait de facteurs de Lorentz sensiblement différents. La flambée de pho-tons gamma résulte alors de l’émission synchrotron et Compton inverse d’électrons relativistes,

- à des distances de l’ordre de 1011 à 1016km du cœur, la décélération du vent par le milieu interstellaire devient importante. Dans l’hypothèse où l’énergie cinétique de l’ejecta est encore élevée, un choc violent apparait [180]. Les électrons accélérés en aval du choc externe sont à l’origine de l’émission remanente observée à différentes longueurs d’onde. Accompagnant le choc avant, un choc en retour se propage dans l’ejecta relativiste conduisant vraisemblablement au flash optique observé pour cer-tains GRBs [181].

Bien que le mécanisme à l’origine du vent relativiste soit encore mal compris, le modèle des chocs internes a, aujourd’hui, les faveurs des spécialistes du domaine car il reproduit particulièrement bien les propriétés spectrales et temporelles des sursauts gamma observés par BATSE.

Par ailleurs, il semble que ce soient ces mêmes mouvements internes qui présentent les conditions optimales à l’accélération de rayons cosmiques UHE. En effet, le traitement des mécanismes de Fermi dans des régimes dits ultra-relativistes, c’est-à-dire pour lesquels les facteurs de Lorentz sont très supérieurs à 1, montre que le gain en énergie lors de la première traversée du choc est proportionnel à Γ2

choc puis de l’ordre de 2 pour les cycles suivants. Le temps d’accélération dans de tels environnements se trouve ainsi considérablement réduit (tacc.∝ Γchoc2 ), conférant aux vents des sursauts gamma, l’aptitude à accélérer des particules jusqu’à 1020eV voir au delàe [182]. Cependant, cette estimation dépend très fortement des hypothèses relatives à l’évolution du champ magnétique en fonction de la distance au cœur et reste donc sujette à débat (cf. Réf. [183, 184] par exemple).

Les sursauts gamma sont, par conséquent, des candidats sérieux pour la production de particules d’ultra-haute énergie. En outre, il semble que le taux de GRBs détectés dans l’U-nivers local, i.e. dans la sphère GZK (RGZK ∼ 100 Mpc), permettent d’expliquer le taux d’événements mesuré pour des énergies voisines de 1020eV. Cette hypothèse repose, es-sentiellement, sur l’existence de champs magnétiques extragalactiques suffisamment in-tensesfpour retarder l’arrivée et donc la détection, de particules chargées d’ultra-haute én-ergie [185].

d. soit l’équivalent de 1 à 100 fois la distance Terre-Soleil (unité au).

e. la comparaison de l’échelle temporelle relative aux pertes d’énergie (principalement par effet synchrotron) et du temps nécessaire à l’échappement de la particule de la zone choquée montre que l’énergie maximale accessible peut s’écrire

 E 100 EeV  .2.5×f−2/3 Γ 100 4/3 tvar 1 s 1/3

où f est un facteur, sans unité, dépendant du régime de turbulence ( f ∼1). Dans le cas idéal de sursauts gamma

longs (tvar ≥1 s) où règnent un champ magnétique intense (B∼ 104G), un proton peut être accéléré jusqu’à

3×1020eV.

f. l’intensité du champ magnétique extragalactique est contrainte par la non-détection de rotation Faraday dans le milieu intergalactique. On obtient ainsi une limite supérieure pour une longueur de cohérence λ du

Les restes de supernovæ

Les explosions de supernovæ génèrent une coquille de matière dont l’expansion au sein du milieu interstellaire (MIS) est propice à la formation d’un choc. Le mécanisme de Fermi du premier ordre est alors privilégié pour accélérer des protons jusqu’à des énergies de l’or-dre de 1015eV. D’un point de vue théorique, la physique des SNRs est relativement bien comprise de telle sorte que ces sources pourraient constituer l’essentiel du rayonnement cosmique de "basse énergie" i.e. de quelques GeV jusqu’à la région du genou. Le bilan én-ergétique des supernovæ et leur taux d’occurence permettent de rendre compte du flux de rayons cosmiques mesuré, pourvu qu’une fraction d’environ 10% de l’énergie résiduelle d’une supernova soit convertie sous forme de rayons cosmiques.

FIGURE3.5 - Image en rayons γ, dans le domaine 300 GeV-40 TeV, du reste de supernova RX

J1713.7-3946 [186]. L’échelle linéaire de couleur est en unité d’excès relativement au fond gamma du ciel. Les

contours blancs indiquent la significativité de l’émission gamma à respectivement 5, 10 et 15σ. L’ar-ticle de Aharonian et al. [186] souligne que l’origine de l’émission γ de RX J1713.7-3946 est vraisem-blablement due à la désintégration de pions neutres consécutive aux interactions pp, sans toutefois exclure d’éventuels processus d’émission Compton inverse par des électrons UHE.

Par ailleurs, l’estimation de l’énergie maximale acquise par des protons a longtemps été contrainte par la non-observation de rayonnement gamma dans la région du TeV. Cette émission, résultant de l’interaction des protons accélérés avec la matière environnante

pCR+pMISπ0γTeV

n’avait, avant l’expérience HESS, jamais été détectée. Or, l’absence de contrepartie gamma implique que l’énergie des protons pCRest nécessairement inférieure à quelques 1014eV, donc en-dessous du genou du spectre. Les superbulles, qui associent un grand nombre de super-novæ et s’étendent sur toute l’épaisseur de la Galaxie, offrent alors, une solution alternative permettant de combler le fossé énergétique entre l’énergie maximale supposée des SNRs et le genou du spectre.

Toutefois, les résultats obtenus par l’expérience HESS ont mis en évidence, pour au moins deux supernovæ galactiques, l’émission de rayonnement gamma au delà de 10 TeV (cf.FIG.3.5). Ainsi, l’observation récente d’une émission multi-TeV provenant de la coquille, et non du cœur, de la supernova RX J1713.7-3946 [186], semblerait indiquer que des partic-ules chargées sont accélérées jusqu’à∼100 TeV dans les chocs de SNRs.

3.3 Les noyaux actifs de galaxie et le rayonnement cosmique 59