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d’autres soulignent que qualifier le propriétaire privé de « fonctionnaire » peut présenter des limites conceptuelles, comme le fait de ne pouvoir révoquer ce fonctionnaire particulier en cas

de faute

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.

740 DUTHOIT, Un précurseur : Henri Lorin (1857-1914) [1944], dans Mélanges économiques dédiés à

M. le professeur René Gonnard, L.G.D.J., Paris, 1946, p. 89-103, spéc. p. 98, dans le même sens, p. 93 et 97.

741 DUTHOIT, Un précurseur : Henri Lorin (1857-1914) [1944], op. cit. p. 93, souligné par nous. Henri LORIN

y est présenté comme faisant partie de l’école réaliste du catholicisme social aux côté de Albert de MUN, René de La TOUR du PIN et Léon HARMEL.

742 VREGILLE, Gonzague (de), De la fonctionnarisation progressive de la propriété individuelle, dans Mélanges

économiques dédiés à M. le professeur René Gonnard, L.G.D.J., Paris, 1946, p. 417-426, spéc. p. 418. L’auteur, juge au tribunal civil de Lons-le-Saunier, considère qu’une révolution est passée inaperçue s’agissant de la perte du droit personnel de libre disposition et en appelle … à Dieu (sic), « Dieu veuille que l’on trouve longtemps encore des propriétaires […] pour répondre aux créanciers », op. cit. p. 417 et 423.

743 BODIN, Charles, Le partage des ressources terrestres entre les peuples, dans Comptes rendus des Semaines

Sociales de France, Paris, XXème session 1928, La loi de Charité, principe de vie sociale, Lyon, Chronique

sociale de France, cours, p. 455-472, spéc. p. 460. Après avoir relevé que l’idée qui domine la conception chrétienne du droit de propriété est celle d’une gestion des biens dans l’intérêt des semblables, l’auteur ajoute : « Chaque collectivité économique a le devoir de faire respecter le droit naturel de propriété des individus qui la composent sur les ressources terrestres qui leur sont échues en partage, mais aussi celui de veiller à ce que ses membres ne négligent pas de mettre ces mêmes ressources en valeur, et cela, non seulement dans leur propre intérêt, non seulement dans l’intérêt même de leurs concitoyens, mais aussi dans l’intérêt de l’humanité toute entière », souligné par nous. Il conclut qu’« Il n’est pas d’utilité véritable et définitive qui puisse être contraire au bien » et qu’« Il n’y a pas de bien hors de la loi de Charité, qui est essentielle et universelle dans le temps et dans l’espace » (p. 472).

744 Par ex., l’économiste Charles BODIN prend ses distances par rapport à certains sociologues qui tendent à

traiter le propriétaire comme un « fonctionnaire social » accablé de devoirs et presque totalement dépourvu de droits, Le partage des ressources terrestres entre les peuples, 1928, op. cit., p. 458.

745 Par ex., ce commentaire de l’avocat P. DRILLON, « Max Turmann reconnaît le droit de propriété

individuelle, mais il fait de la propriété « une fonction sociale ». Si l’on veut par là indiquer que le propriétaire a des devoirs sociaux à remplir, rien de mieux et j’y souscris volontiers ; mais faut-il en conclure qu’il est fonctionnaire de la société et que, au cas où il ne s’acquitterait pas de ses obligations, sa charge pourrait lui être

– 165 – Dans le droit fil du personnalisme, de nombreux auteurs distinguent propriété

« personnelle » et propriété « individuelle ». Jean de FABRÉGUES est un des rares auteurs,

pour ne pas dire le seul, à pousser la distinction entre propriété « personnelle » et « fonction

sociale» du droit de propriété

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. En revanche, le propos redevient cohérent avec les autres

auteurs chrétiens lorsqu’il s’agit d’analyser, et de critiquer, la thèse d’une propriété dite

« individuelle » ou « absolue »

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, « Retenir la propriété dans l’horizon du droit individuel, ce

n’est donc pas seulement réduire la propriété – ce qui perd toute possibilité de justification

dans l’injustice, le besoin ou la simple inégalité même – c’est oublier toute l’essence de l’être

humain, c’est le rejeter lui-même dans le monde de l’individu, donc des êtres-choses séparés

retirée ? », dans Bulletin des Sciences sociales, dans Revue des sciences ecclésiastiques [Science catholique. Revue des questions sacrées et profanes], 15ème année, n°7, 15 juin 1901, p. 651-667, spéc. p. 653, souligné par

nous, à propos d’un commentaire de TURMANN, Max, Le développement du Catholicisme social depuis l’Encyclique Rerum novarum (15 mai 1891) ; Idées directrices et caractères généraux, Paris, Félix Alcan, Collection « Bibliothèque générale des sciences sociales », 1900, 334 p.

746 FABRÉGUES, Jean (de), Propriété personnelle et morale chrétienne, dans La propriété est-elle un péché ?

Revue périodique Sources, n°8, mai-juin 1953, p. 112-121, spéc. p. 114 et 115 : « Fonction sociale ? Non [souligné en gras par l’auteur, p. 114]. / Ici, certains dirons sans doute : la propriété est donc, pour vous, justifiée par sa fonction sociale et c’est celle-ci seule qui fonde un droit, beaucoup plus social en conséquence que personnel. Le texte du Souverain Pontife, cité plus haut ne se situe pas le moins du monde dans cet horizon. C’est au contraire au nom de la protection de chaque personne qu’il appelle au respect de la propriété. Or, la ligne de pensée (existentialiste) rappelée plus haut offre, à notre sens, ici comme ailleurs, l’avantage considérable de franchir l’éternel dilemme du subjectif et de l’objectif. La propriété-fonction sociale prend le visage d’un droit seulement justifié par ses fins, extérieures au propriétaire, d’un droit social, objectif. La propriété-droit subjectif, en revanche, paraît ne faire nulle place au souci des autres et semble (au moins) autoriser tout usage (ou non-usage) des biens possédés. Entre celle-ci et celle-là, le dialogue est apparu sans issue. / Propriété personnelle ? Oui [souligné en gras par l’auteur, p. 115]. / Considéré dans l’esprit que nous avons dit plus haut, la propriété prend un tout autre visage. C’est, certes, à des personnes qu’elle est concédée, et non pas seulement pour leur permettre de remplir telles fonctions utiles ou indispensables. C’est à la personne pour qu’elle soit elle-même, pour qu’elle ait la liberté, c’est-à-dire la possibilité d’être elle-même. Mais être soi- même, être personne humaine, n’est jamais rester fermé sur soi-même. Être soi-même, c’est toujours se construire, s’acheminer, tendre vers un achèvement, et cela par une série d’échanges dont les fins ou les modalités sont toujours exprimables en termes de ce qu’il faut bien appeler l’amour. La cité, le village, l’entreprise, le commerce même sont tissés de soucis d’amour. À partir du moment où ils ne sont plus que soucis de possession, d’accroissement de possession, où les relations d’échange sont absolument séparées de la considération des personnes qui échangent, ils tombent dans le registre du pouvoir pur, de la possession, dans le registre des choses et de la mort. / Mais l’être humain est inséparable des autres [souligné en gras par l’auteur, p. 115]. / Ce qui nous est donné, les biens qui nous arrivent, nous sont donc toujours donnés à la fois pour nous et pour les autres, pour que naissent ces relations d’échange, de mutualité, où la considération de soi-même ne peut jamais être complètement séparée de la considération de l’autre ou des autres », souligné par l’auteur.

747 « Pas de « propriété absolue » [souligné en gras par l’auteur (…) ] le « droit de propriété » n’est lui-même

droit que lié à un devoir, celui d’être un homme parmi les hommes, d’aider les autres hommes à faire leur destin. Mais on n’aide « les autres » qu’en étant plus profondément « soi-même », en étant celui-là que la Providence vous a chargé d’être là où vous êtes. Et, pour être ce que la Providence vous a chargé d’être là où vous êtes certains moyens sont nécessaires. La « propriété » s’étend aussi loin que nécessaire pour que nous soyons ce

les uns des autres, unis seulement par des droits-revendications qui s’opposent. La propriété

droit-individuel conduit au monde de la lutte-à-mort parce qu’elle s’est enfermée dans

l’horizon inhumain des individus séparés, des individus-atomes, des hommes, repliés sur eux-

mêmes »

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. Précisément, la Déclaration de 1789 mentionne un droit « sacré », l’« homme » et

le « citoyen ». La lettre, comme l’esprit, de la Déclaration n’a pas pour sujet l’« individu »,

mais la « personne » avec son masque de citoyen.

– 166 – Dans le fil des travaux weberiens, certains auteurs ajoutent que

« l’homo aeconomicus n’est pas autre que l’homo peccator » et soulignent que tout discours

sur l’économique tendant à exalter la grandeur de l’homme créateur et sa domination sur le

monde (avec une passion productiviste nourrie par l’admiration du pouvoir de fabrication de

l’homme) est mensonger s’il oublie la dimension du « péché »

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.

Soulignons, par ailleurs, que Bernard LAURENT a rendu justice à la pensée sociale de