• Aucun résultat trouvé

Chapitre III. Investigations géophysiques : intérêts et apport pour le projet de

1.1.4 Sondage de résonance magnétique des protons

La Résonnance Magnétique des Protons (RMP) est une méthode qui a l’originalité d’être directement sensible à la quantité d’eau contenue dans le sous-sol. L’inversion des données issues de cette technique permet de déterminer une distribution de la teneur en eau en fonction de la profondeur et de fournir des indications sur les paramètres hydrodynamiques des formations aquifères. Les résultats RMP peuvent ainsi contribuer à l’élaboration de modèles hydrogéologiques mieux contraints et à une implantation plus performante de forages productifs (Chalikakis 2006). Schématiquement le principe physique de la RMP repose sur le fait que les protons qui constituent les noyaux d'hydrogène des molécules d'eau, placés dans un champ magnétique Ho (tel que le champ magnétique terrestre), possèdent des moments magnétiques non nul qui, à l'équilibre, sont alignés dans la direction de ce champ principal Ho

(Figure 3.16). L'émission d'un champ magnétique perturbateur à une fréquence spécifique (dite fréquence de Larmor) modifie cet état d'équilibre et provoque une précession des moments magnétiques autour de la direction du champ magnétique initial. Après coupure du champ excitateur, au cours du retour à l'état d'équilibre, un champ magnétique de relaxation est émis par les protons, constituant ainsi le signal RMP mesuré. Celui-ci, souvent faible, correspond à une différence de potentiel mesurable, de l'ordre de quelques nanovolts. Son amplitude est d'autant plus intense que le nombre de protons entrés en résonance est grand, et donc que la teneur en eau est importante. L’importance des phénomènes de précession à l’excitation et de relaxation à la coupure du champ perturbateur est aussi fonction de la taille moyenne des pores de la formation aquifère (Nielsen et al. 2011). Ainsi l’amplitude du signal RMP mesurée en fonction de l’intensité du champ transmis nous renseigne sur la teneur en eau dans le sous-sol et sur la profondeur et l’épaisseur de la nappe; le temps de relaxation (temps de décroissance du signal mesuré), extrait à partir des graphes des sondages RMP, nous renseignent sur la taille moyenne de pores dans la nappe. Il est d'autant plus long que les protons sollicités sont ceux d'une eau peu enserrée dans la roche, donc d'une nappe à potentiel hydrodynamique élevé garantissant un débit suffisant au pompage.

Contrairement aux autres méthodes géophysiques de prospection (méthodes électriques, électromagnétiques, sismiques…), pour lesquels les paramètres mesurés ne concernent pas directement l'eau souterraine mais l'ensemble du milieu poreux, le signal étudié en RMP provient directement et uniquement des molécules d'eau (Chalikakis et al. 2009 ; Legchenko et al. 2004). En effet, la fréquence spécifique à laquelle les protons sont excités est caractéristique de l'atome d'hydrogène et assure ainsi que cette méthode est sélective. La très

124

grande majorité des noyaux d'hydrogène présents dans le sous-sol sont ceux des molécules d'eau (si le milieu n’est pas très riche en matière organique). Ceci implique que la méthode RMP renseigne spécifiquement et directement sur la présence ou l'absence d'eau dans le milieu étudié ainsi que sur les caractéristiques hydrodynamiques du milieu.

Figure 3. 16 Principe de mesure RMP (Boucher 2007)

Sur le terrain, une boucle émettrice dans laquelle on envoie un courant électrique alternatif, crée un champ d’excitation oscillant à la fréquence de Larmor (Figure 3.17)

Figure 3. 17 Principe de mise en œuvre d’un sondage RMP sur terrain (Boucher 2007) Cette fréquence est calculée, après avoir mesuré l’amplitude du champ géomagnétique H0

avec un magnétomètre à proton. Après l’arrêt du champ d’excitation, on mesure dans cette même boucle le champ de relaxation produit par les noyaux d’hydrogène. Sur un site donné, la profondeur d’investigation est fonction de la taille de la boucle, de la résistivité des terrains et du moment d’excitation (produit du courant primaire par sa durée d’injection).

125

L’impulsion de courant alternatif I(t) envoyé dans la boucle est décrite par l’équation suivante :

0 0

( ) cos( )

I t It 0 t 

, (3.5) Avec : 02f0 H0

I0 : amplitude initiale, choisie en fonction de la profondeur d’exploration souhaitée τ: durée de l’impulsion

f0 : fréquence de Larmor qui varie entre 800 et 3000 Hz en fonction de l’amplitude du champ géomagnétique,

ω0 : pulsation du courant émis dans la boucle correspondant à la fréquence de Larmor des protons,

H0 : amplitude du champ géomagnétique terrestre

γ: facteur hydrodynamique des protons (γ=0.2675 Hz/nT)

Le signal de relaxation RMP E(t, q) est donné par une formule de forme exponentielle décroissante qui dépend du moment d’excitation q=I0τ :

*

2 0 0

( , ) 0( ) exp( ) cos( )

E t q E q t T t (3.6)

Avec : E0(q) : amplitude initiale RMP T2* : temps de relaxation spin-spin υ0 : phase du signal RMP

Les paramètres E(q), T2* et υ0 sont les paramètres calculés à partir du signal enregistré dans la boucle réceptrice. La détermination de la variation de ces paramètres conduit à une estimation de la teneur en eau dans les formations du sous-sol ainsi que la profondeur d’investigation. En effet, l’augmentation du paramètre q permet d’augmenter le volume investigué et un ensemble de mesure E(t,q) pour des q croissants constitue un sondage RMP en profondeur.

L’amplitude initiale E0(q) du signal RMP ne peut pas être mesurée par les équipements actuellement disponibles, au moment de la coupure de l’impulsion, car le temps instrumental τd nécessaire pour réaliser la commutation entre transmission et réception est de 40 ms. L’amplitude initiale est alors calculée par la formule :

* 0 2 exp( d ) rd E E T   (3.7)

126

De plus, l’amplitude initiale E0(q) est fonction du nombre de protons excités, elle permet d’obtenir une information sur la teneur en eau et l’épaisseur des couches. Cette amplitude varie de quelques dizaines de nV à quelques mV (Legchenko et al. 1997).

La constante de temps de décroissance du signal, T2* est liée à l’environnement dans lequel se situent les protons. Les principaux facteurs qui vont influencer la constante de temps T2* sont la taille moyenne de pores et l’inhomogénéité du champ statique. Plus la taille de pores de la roche est grande (porosité totale élevée), plus le temps de décroissance est long (Figure 3.18).

Figure 3. 18 Illustration schématique du principe de la méthode RMP (l’émission d’une impulsion

d’excitation (en rouge) est suivie de la réception d’un signal de relaxation (en bleu) après une courte période de temps mort) (Legchenko et al. 1997)

Compte tenu de la faiblesse de son amplitude, le signal RMP doit être accumulé lors de l’acquisition, en utilisant le logiciel PRODIVINER, pour diminuer l’influence relative du bruit électromagnétique naturel ou anthropique. La courbe d’un sondage RMP visualisée sur NUMIS PRO est un graphique qui représente l’amplitude initiale du champ de relaxation des protons en fonction de l’intensité d’excitation. Un signal RMP non nul est directement lié à la présence d’eau dans le sous-sol (Figure 3.19).

Figure 3. 19 Comparaison du signal RMP pour un site offrant un débit important et un autre

127

Mise en œuvre des sondages RMP à Kettara

Deux sondages RMP ont été réalisés au niveau du site de Kettara. Un sondage juste à l’aval du parc à résidus et un autre à environ 2 km au Sud Ouest directement sur le terrain schisto-gréseux qui constitue le soubassement des rejets miniers. (Figure 3.20). L’appareil utilisé pour l’acquisition de ces sondages est de type NUMIS PRO d’IRIS Instruments (Figure 3.21 d). Pour les deux sondages RMP, une boucle de carré de 100 m de coté a été utilisée (Figure 3.21 a et b). Nous avons tout d’abord mesuré le bruit électromagnétique ambiant pour en tenir compte lors de l’acquisition et le champ magnétique local pour calculer la fréquence de Larmor d’excitation (Figure 3.21 c). L’ordre de grandeur du champ magnétique terrestre dans la région de Kettara est de 40 675.9 nT, qui est proche de la moyenne de la ville de Marrakech (40 600 nT), variant très peu à l’échelle de la zone de déploiement de la boucle. La fréquence de Larmor calculée est de l’ordre de 1700 Hz.

128

Figure 3. 21 Matériel NUMIS PRO utilisé pour l’acquisition des sondages RMP

Inversion des données RMP

L’inversion des données conduit à un profil de teneur en eau en fonction de la profondeur. Comme souvent en géophysique, le problème inverse est mal conditionné de sorte qu’il n’y a pas une solution unique. Ainsi plusieurs modèles de distribution de teneur en eau peuvent expliquer un même jeu de données (Legchenko et al. 2004). C’est pour cela qu’il faut bien étudier les données à l’entrée dans la matrice d’inversion qui est utilisée par le logiciel SAMOVAR qui permet de réaliser cette opération. Pour construire la matrice d’inversion, on spécifie le fichier des données du terrain, les caractéristique de la boucle, la profondeur d’investigation et la résistivité à priori pour les couches cernées par cette profondeur.