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La société latino-américaine

II- La situation de la femme en Amérique Latine

2.2. La société latino-américaine

2.2.1.L’éducation dans la société latino-américaine

L’Amérique latine a beaucoup de progrès à faire en matière d’éducation. Mais l’écart éducatif entre hommes et femmes, entre alphabètes et analphabètes, entre ruraux et citadins s’est considérablement réduit depuis le début des années 90.

Le nombre d’enfants déscolarisés a chuté énormément passant de 11,4 millions en 1990 à 2,5 millions en 2005. De nos jours, presque 95% des enfants de la région vont à l’école, mais on compte moins de filles dans les établissements scolaires. On constate que si les garçons redoublent plus, les filles abandonnent plus vite l’école.

En Amérique latine et aux Caraïbes, les efforts ont surtout portés sur l’éducation primaire, où la scolarisation compte un peu plus de 80 millions d’enfants en 2004525.

On remarque que dans les Caraïbes, les filles526 sont plus scolarisées que les garçons et par conséquent, elles réussissent mieux qu’eux dans la vie active. Le taux d’alphabétisation des femmes est beaucoup plus élevé que celui des hommes et les trois quarts des enseignants du primaire sont des femmes. Les hommes préférant l’enseignement supérieur.

Malheureusement ce n’est pas le cas de tous les pays. En effet, l’éducation des femmes et des filles est un problème majeur pour la société latino-américaine. On remarque que selon des études, les garçons sont plus nombreux que les filles à être scolarisés et qu’en conséquence, il existe plus de femmes analphabètes que d’hommes. Cette situation favorise l’exclusion des femmes et les empêche de participer à la vie sociale527. Même si en général le taux d’alphabétisation a grimpé en Amérique Latine, il est passé de 84% en 1990 à 90 % en 2005528, l’éducation progresse, mais ce n’est pas suffisant. Selon le sénateur José Octavio Borón, la qualité de l’éducation serait lamentable dans la région. De nombreuses réformes ont été mises en place mais sont elles utiles ?

C’est dans les campagnes529 que l’on dénombre le plus d’analphabètes, les enfants ne sont pas assidus, ils sont partagés entre leur éducation et le travail. En effet, deux enfants sur cinq ne terminent pas l’école primaire ou la finissent avec au moins deux ans de retard alors qu’en ville, cela n’arrive qu’à un enfant sur six.

525 Statistiques Unesco, « Education pour tous», 2004 (www.unesco.org)

526 Unicef « Situation des enfants dans le monde, Amérique Latine et Caraïbes », 2004 (www.unicef.org)

527 Marina Subirats « La educación de las mujeres : de la marginalidad a la coeducación », Série « Mujer y desarollo n°22 », Cepal, Santiago du Chili, Août 1998 (38 pages)

528 Statistiques Unesco, « Education pour tous», 2004 (www.unesco.org)

529 Jean-Claude Fritz « La nouvelle question indigène. Peuples autochtones et ordre mondial », L’harmattan, Paris, 2005, P.112 (506 pages)

De plus, on remarque que les garçons sont plus nombreux dans ces milieux à fréquenter les établissements scolaires. Les écoles manquent et la qualité de l’enseignement n’est peut-être pas adaptée à ce milieu ? De cette inquiétude est née en Colombie le système éducatif

« Escuela Nueva »530, en effet, avec beaucoup de patience et de persévérance le projet porta ses fruits, et les résultats le démontrent ! Ces campagnes sont mises en place dans la plupart des pays latino-américains. Elles permettent aux enfants pauvres vivant dans des zones rurales ou isolées de s’éduquer tout en apprenant à accepter et respecter les autres.

L’enseignement supérieur est « mis de coté » en effet, l’école primaire préoccupe davantage car c’est tout de même la base de l’éducation. Même si le nombre d’inscrits, en particulier les filles, augmente depuis plusieurs années, on se demande si les cours et les professeurs intéressent réellement les étudiants.

Un peu d’histoire…

Dés la fin du 19e siècle, des femmes militèrent pour améliorer la condition féminine, elles s’attaquèrent en premier lieu à l’éducation, pensant que si l’homme réfléchissait mieux, cela pourrait effacer les inégalités qui résidaient entre les hommes et les femmes. Beaucoup d’entre elles réussirent à entrer au sein de prestigieuses écoles et universités et se firent un nom. Ces femmes issues en particulier de la classe moyenne occupaient des professions plutôt libérales.

Dans l’Antiquité, l’éducation était réservée à une élite religieuse, ceux qui détenaient le pouvoir. Au Moyen-âge, certains réussirent à en bénéficier mais toujours sous le contrôle des religieux. L’éducation de l’époque était une mission évangélique, ce n’est qu’après la séparation de l’église et de l’Etat que nous avons réellement pu jouir d’une éducation laïque basée sur le savoir et la connaissance. En Amérique Latine, l’accès à l’éducation était un privilège et les femmes ne pouvaient pas y accéder, car c’était un domaine extrêmement masculin. Au Panama, Sara Sotillo531, diplômée de la « Escuela Normal de las Institutoras » fit de l’éducation un combat quotidien. Son souhait était de relever les niveaux des instituteurs et par la suite améliorer leurs conditions salariales. Elle fonda en 1944 le « Magisterio Panameño Unido » qui regroupait tous les représentants de toutes les écoles de la capitale. En

530 Bernard Collot « Une école du troisième type ou « la pédagogie de la mouche » », L’harmattan, Paris, 2002, P.245 (330 pages)

531 Universidad de Panamá « Sara Sotillo, una maestra ejemplar », dans « Mujeres que cambiaron nuestra historia », Instituto de la Mujer, Panamá, 1996, P.91 (176 pages)

1946, elle créa des lois relatives à l’éducation (loi n° 36 et 47) et fut à la tête de bon nombre d’association d’instituteurs.

La première organisation féministe, le « Centro Feminista de Renovación », avait pour objectif, l’intensification et la diffusion de la culture de l’élément féminin, l’amélioration d’un point de vue social et moral, l’indépendance économique, l’égalité avec l’homme concernant leurs droits et la responsabilité devant la loi. Sara Sotillo participa en tant que déléguée au premier Congrès féministe célébré le 20 et 21 juin 1923 au Panama où on approuva la création du « Partido Nacional Feminista »532 et la création de la « Escuela de Cultura Femenina ». Le 24 juin 1924, on établit sa création à l’école Manuel José Hurtado pour les femmes mariées ou célibataires de plus de 16 ans. L’accès étant gratuit pendant une durée de sept ans.

Une autre femme, qui a consacré toute sa vie à l’éducation et aux droits de la femme, est Otilia Arosemera de Tejeira533. Orpheline dès ses huit ans, elle prit son destin en main, institutrice en 1923, elle partit aux Etats-Unis où elle obtint son diplôme de Pédagogie à l’Université de Colombia à New-York. Elle fut la première femme panaméenne à être professeur à l’université en 1954. Présidente et fondatrice de la « Asociación de Mujeres Universitarias de Panama » en 1940, elle fut réélue trois fois à ce poste. Elle fut membre du

« Consejo Nacional de Educación » de 1950 à 1962. Secrétaire pour cinq périodes de deux ans à la Commission Nationale de l’Unesco au Panama et vice présidente de 1954 à 1968.

Présidente du « Nacional de Mujeres » en 1979, elle fut représentante du Panama lors du premier « Congreso Femenino Centroaméricano de Educación » au Costa-Rica en 1938 et représentante dans la « New Education Fellowship » aux Etats-Unis en 1941. Elle fut secrétaire générale du PNF entre 1937 et 1938. Tous ces postes lui valurent l’élection de la

« Mujer de las Américas » en 1967.

En Argentine, comme nous l’avons précisé dans une partie précédente, beaucoup de femmes « avaient de l’avance » sur les autres pays latino-américains, elles militaient déjà pour améliorer la condition féminine et surtout pour leurs propres droits. Une d’entre elles se

532 Urania Atenea Ungo Montenegro « Educación de niñas y de mujeres en Ibero-América », Partie 5.4 « Las Mujeres y la educación en América Latina. Una aproximación a los dilemas y desafíos », Jornadas de cooperación sobre género y educación », Antigua, 2006, P.176 (373 pages)

533 Universidad de Panamá « Mujeres que cambiaron nuestra historia », Instituto de la Mujer, Panamá, 1996, P.112 (176 pages)

focalisa sur l’éducation, Cecilia Grierson534. D’origine irlandaise par sa mère et écossaise par son père, elle a commencé à l’âge de 13 ans sa vocation de professeur en donnant des cours avec sa mère dans une école rurale, puis auprès de familles pauvres. Elle fut l’une des premières femmes médecin du pays diplômée en tant que médecin chirurgien de la faculté des sciences et médecines de Buenos-Aires en 1889. Avant d’être diplômée, elle fonda la

« Escuela de Enfermeras del Círculo Médico Argentino » qui fut reconnue en 1891 par l’attention publique, puis se spécialisa dans la gynécologie obstétrique. En 1891, elle fut l’une des membres de la « Asociación Médico Argentino » et elle y implanta un cours de massage, puis écrivit « Masaje y Práctica », précurseur de la kinésiologie moderne. En 1892, elle créa la « Sociedad de Primeros Auxilios » et publia un livre sur l’attention aux blessés accidentés.

Parallèlement, elle dicta des classes d’anatomies dans l’Académie des Beaux Arts et donna des consultations psychopédagogiques gratuites pour les enfants attardés.

Un séjour en Europe l’aida à parfaire ses méthodes en gynécologie et elle y étudia surtout les traitements des aveugles et des sourds et muets. Puis elle publia le livre « Educación técnica de la Mujer ». Cette femme, féministe et socialiste, s’engagea dans le combat pour l’égalité des sexes, auprès de Elvira Rawson ou Julieta Lanteri, ce que ses parents lui inculquèrent elle le transmit à sa façon au peuple argentin et surtout au moins chanceux, précurseur de nombreuses méthodes, notamment l’accidentologie et la kinésiologie, on lui rendit hommage en donnant son nom à l’école d’infirmières de Buenos-Aires. Même si de nos jours, peu de gens la connaissent, elle a travaillé ardemment pour élever le niveau social et intellectuel de la femme argentine.

En Argentine, beaucoup de femmes eurent accès très tôt à l’éducation par rapport aux autres pays latino-américain. Beaucoup d’entre elles étaient issues de la classe moyenne et savaient que l’accès à ce domaine leur apporterait beaucoup pour la suite. Ce comportement facilita l’inscription d’autres femmes et déclencha des changements dans la formulation de lois et réformes favorables à l’accès aux femmes dans l’éducation produits dans les années 70 et 80 en Argentine mais aussi dans d’autres pays du continent.

A cette période, se créèrent des écoles et des lycées dont les objectifs étaient de former de bonnes mères et épouses. Leur programme était élémentaire, il fallait qu’elles sachent lire et

534 Ana María Portugal « Cecilia Grierson, una visionaria del Siglo XIX », MujeresHoy, Santiago du Chili, Le 17 juillet 2003 (www.mujereshoy.com)