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II. Matériel et méthodes générales

II.2. Sites d’étude

Deux sites d’études ont été utilisés pour cette thèse (Fig. II.2).

Fig. II.2 : localisation des deux sites d’étude

II.2.1. Forêt de Chizé

Pour l’étude énergétique (article 1), les bécasses ont été capturées autour de la Réserve Nationale de Chasse et de Faune Sauvage de Chizé (Deux-Sèvres, 2500 ha), gérée par l’ONCFS et l’ONF. Ce site a été choisi car il abrite une forte population de bécasses hivernan-tes, mais surtout parce que le CNRS-CEBC, au centre de la forêt, dispose d’une chambre res-pirométrique pour effectuer les mesures de métabolisme. Il n’existe que très peu de chambres respirométriques en France (Paris, Lyon, Strasbourg) et celle-ci permettait un accès facile aux oiseaux. La forêt de Chizé se trouve à 60 km du littoral Atlantique. Les hivers y sont doux et pluvieux. Beaucoup de bécasses hivernent dans la forêt, surtout du fait qu’elle est pour moitié en réserve de chasse. Toutefois, la forêt de Chizé ne se trouve pas au cœur de l’aire d’hivernage (les effectifs maximums en hiver se trouvant en Bretagne et Normandie) et sur-tout elle présente des peuplements de hêtres et de chênes sur sols calcaires intermédiaires en-tre les forêts du Nord de la France et les forêts méridionales. Enfin, les pratiques agricoles autour de la forêt sont principalement céréalières et il ne subsiste pratiquement plus de prai-ries naturelles, considérées comme des ressources clés pour les bécasses lors des précédentes

études. Une première étude sur l’utilisation et la sélection de l’habitat ne pouvait avoir lieu dans ce contexte si particulier. C’est pourquoi nous avons été amenés à choisir un deuxième site d’étude plus « traditionnel » et correspondant à l’habitat « type » de la Bécasse.

II.2.2. Forêt de Beffou

Le deuxième site d’étude se trouve en Bretagne, dans les Côtes d’Armor (commune de Loguivy-Plougras), au cœur de la plus importante région française d’hivernage pour la Bé-casse (Fig. I.2). Il s’agit de la forêt départementale de Beffou (48°30’N, 3°28’W) et son bo-cage environnant.

II.2.2.1. Contexte général

La région de Beffou est relativement vallonnée, avec de nombreuses collines entrecoupées de vallées. Le point le plus bas se trouve à 180 m d’altitude et le point culminant, le « Pavé », 322 m, se trouve au centre du massif forestier (Fig. II.3). Il s’agit de l’extrémité Est des Monts d’Arrée. Le sous-sol est formé de roches magmatiques basiques (méta-diorites) dont la rareté, au niveau régional, constitue l’originalité de la forêt. Cela se traduit par une diversité floristi-que importante. Le climat breton est océanifloristi-que : l’hiver y est pluvieux et venteux, mais avec des températures douces (moyenne 5°C en Janvier, source Météo France).

La forêt départementale de Beffou (615 ha) appartient au Conseil Général des Côtes d’Armor et elle est gérée par l’Office National des Forêts. Pour notre étude axée sur le com-portement et la sélection d’habitat, il fallait une forêt en réserve de chasse, pour limiter les pertes dues à la chasse. La chasse à la Bécasse est interdite dans la forêt départementale de-puis 1995, mais elle est autorisée dans les bosquets et les haies alentour (Fig. II.3). La réparti-tion des bécasses a délimité la zone d’étude. La superficie de cette zone était de 1726 ha lors de l’hiver 1999-2000 : elle comprenait toute la forêt départementale et le bocage au sud de la forêt, où toutes les bécasses ont été capturées et qu’elles ont continué à utiliser. Les bagueurs de l’ONCFS locaux, H. Jamin et J. P. Richard, n’ont jamais trouvé de bonnes zones de ba-guage au nord de la forêt. Notre but étant d’en attraper le plus possible dans les plus brefs délais, nous avons concentré notre effort de capture uniquement sur la zone au sud et à l’ouest de la forêt. Lors des deux hivers suivants, les bécasses ont toujours été capturées sur les mê-mes sites, mais la superficie de la zone d’étude a été augmentée (1756 ha en 2000-2001 et 1938 ha en 2001-2002) pour suivre les mouvements de plusieurs oiseaux ayant bougé au cours de l’hiver (quatre sont allées au nord de la forêt et une plus au sud) (Fig. II.3).

Fig. II.3 : Carte de la zone d’étude autour de la forêt de Beffou, avec les limites utilisées en 2000 (trait plein) puis en 2001 et 2002 (pointillé). La partie en réserve de chasse figure en vert fonçé alors que les bois chassés sont en marron. Les champs sont en blanc et sont séparés par des haies (traits noir). Les routes sont des doubles traits noirs et les chemins forestiers sont représentés en jaune. Le « Pâvé », point culminant, est matérialisé par le triangle rouge.

$ T bois champs réserve $ T PavéChemins Cours d'eau limite 2000 limite 2001 & 2002 0 2 4 Kilometers N

Fig. II.4 : Carte des principaux peuplements forestiers dans la zone d’étude de Beffou.

Champs assolement 2002 Plantation Taillis Futaie feuillus Futaie mixte Futaie résineux Forêt humide Friche Cours d'eau 0 2 Kilometers

II.2.2.2. Description du milieu forestier

La forêt bretonne est particulière car les bois et forêts ne représentent que 11% de l’utilisation du territoire contre 27% en moyenne en France (Colombet et al. 1996). Toutefois, les arbres sont omniprésents en Bretagne et les haies et les bosquets de moins de 50 ares re-présentent respectivement 8 et 16 % de la surface boisée en Bretagne (contre 2 % et 4 % res-pectivement en moyenne en France ; Colombet et al. 1996). De même 57 % des forêts privées bretonnes ont une surface inférieure à 10 ha contre 40 % en France. Traditionnellement la forêt bretonne était constituée de taillis et taillis-sous-futaie feuillus, pour la production de bois de chauffage. Depuis le XIXème siècle, des futaies résineuses ont été introduites pour compléter les besoins croissants en bois d’œuvre et représentent 46 % de la surface boisée en Bretagne contre 37 % en France (Colombet et al. 1996). Entre 1968 et 1987, 87 % des arbres plantés en Bretagne étaient des conifères, 10 % étaient des peupliers et seulement 3% des au-tres feuillus. Depuis l’ouragan de 1987, la proportion de feuillus plantés est remontée à 38 %, pour 13 % de peupliers et 49 % de conifères (Colombet et al. 1996).

La formation climacique du Trégor est la hêtraie hyper-atlantique à ifs et à houx. Ces trois essences sont encore majoritaires dans la forêt de Beffou. Les peuplements de la forêt de Bef-fou sont très diversifiés, mais ils peuvent être grossièrement séparés en trois habitats princi-paux : les vieilles futaies caduques (30%) et résineuses (20%) et les jeunes plantations de hê-tres et de chênes (30%) (fig. II.4, détail des surfaces dans l’article 2).

Les futaies de feuillus anciennes étaient constituées principalement par des Hêtres Fagus

sylvatica et des Chênes Quercus robur et Q. sessiliflora (de 15 à 30 m de haut et de 40 à 120

ans d’âge), ainsi que quelques Frênes Fraxinus excelsior. Les futaies de conifères étaient principalement composées d’Epicéas de Sitka Picea sitchensis, de Sapins pectinés Abies alba et de Douglas A. grandis , entre 15 et 40 m de hauteur et entre 30 et 120 ans d’âge. Les pinè-des étaient composées de Pins sylvestres Pinus sylvestris ou de Pins maritimes Pinus pinaster (20-30 m de hauteur). Dans chacun des quatre types de futaie, la strate arbustive (constituée d’Ifs Taxus baccata, de Houx Ilex aquifolium et de Noisetiers Coryllus avelana) était peu dé-veloppée, voire pratiquement inexistante, tout comme la strate herbacée (constituée de Fougè-res aigles Pteridium aquilinum, de Ronces Rubus fructicosus, de graminées et de litière). Les plantations de feuillus étaient composées surtout de jeunes hêtres et de chênes (et localement de frênes et de Châtaigniers Castanea sativa), âgées de 10 à 15 ans et d’une hauteur de 2 à 4 m, plantées après l’ouragan d’octobre 1987. Les plantations de résineux étaient composées principalement de Pins maritimes et de Sapins de Douglas. Les taillis étaient le stade intermé-diaire entre les plantations de feuillus et les futaies, avec des arbres de 5 à 10 m et une strate

arbustive importante. Les taillis sous futaie étaient caractérisés par des grands arbres feuillus et une strate arbustive importante. Les nombreuses sources et ruisseaux de la région ont favo-risé l’apparition de zones humides forestières, composées de Saules Salix sp, d’Aulnes Alnus

glutinosa et de Peupliers Populus sp, d’âge et de taille variées, et de plantes aquatiques (Joncs Juncus conglomeratus et Molinies Carex paniculata ).

II.2.2.3. Description du bocage

Le bocage est encore très présent en Bretagne, avec un total régional estimé à 251 000 km de haies et 40% du territoire couverts d’un maillage où l’enclos moyen est inférieur à 4 ha (Prat et al. 1999). Dans la zone d’étude, les haies totalisent plus de 200 km de linéaire. Elles sont constituées d’arbres et d’arbustes plantés sur un talus de pierres. Les essences étaient les même qu’en forêt, avec une majorité de hêtres, de chênes et de frênes, de noisetiers, d’ifs, de fougères et de ronces. On trouvait aussi dans le bocage de petites landes, issues de parcelles agricoles, souvent relativement humides, laissées en jachère depuis de nombreuses années, qui se re-végétalisaient naturellement en taillis denses de saules, ajoncs, genêts et prunelliers.

Le parcellaire agricole (habitat nocturne pour les bécasses) était composé de 1204 parcel-les en 2000 (total 968 ha), 1194 parcelparcel-les en 2001 (973 ha) et 1362 parcelparcel-les en 2002 (1105 ha). La taille moyenne des parcelles est inférieure à 1 ha. La région est principalement vouée à l’élevage de vaches laitières. A l’exception des zones de fond de vallée trop humides qui sont maintenues constamment en prairies, le reste du parcellaire est soumis à des rotations : 2 à 3 ans de cultures céréalières (blé pour le fourrage ou maïs pour l’ensilage) suivi de périodes de 5 à 8 ans en prairie. Les prairies représentaient 70 % de toutes les parcelles et pouvaient être séparées en deux types : les prairies artificielles (soumises aux rotations d’assolement, habituellement situées dans les pentes ou au sommet des collines) ; et les prairies humides permanentes. Le reste du parcellaire était constitué de semis (de blé d’hiver ou d’herbe) ou de chaumes (de blé ou de maïs). Enfin, une part minime du parcellaire contenait du colza, de la luzerne ou des labours.