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Sentiment d’information et craintes des jeunes

Dans le document Les comportements de santé des jeunes (Page 55-68)

en matière de santé

François Beck Romain Guignard Jean-Baptiste Richard

56 Les comportements de santé des jeunes - Analyses du Baromètre santé 2010

pa lement ici d’estimateurs permettant de mettre au jour de grandes tendances au niveau populationnel.

Depuis 2000, le Baromètre santé de l’Inpes pose une série de questions sur le sentiment d’être informé sur de grands thèmes de santé. Les items questionnés dans chacune des vagues d’enquête ont pu varier en fonction des préoccupations du moment, mais la majorité d’entre eux est restée identique d’une vague à l’autre. La dépression et le cancer ont été introduits en 2005, les nouvelles épidémies et la maladie d’Alzheimer en 2010, tandis que l’alimenta-tion n’a plus été posée en 2010,

principa-lement par souci de longueur du question-naire. La pollution de l’air et de l’eau a été remplacée par un seul item plus générique :

« les risques de santé liés à l’en vi ron-nement ».

Une série de questions sur les craintes suscitées par différents risques ou maladies est également posée depuis 2000 dans cette enquête. La formulation invitait ex pli-ci tement le répondant à évoquer sa propre situation face au risque ou à la maladie :

« Parmi ces différents risques ou maladies, dites-moi si vous les craignez pour vous-même, pas du tout, peu, pas mal ou beaucoup ? »

L’évoLUTIon DU SenTIMenT D’InfoRMATIon De LA PoPULATIon Pour la quasi-totalité des thèmes proposés,

la majorité des personnes interrogées se déclarent bien informée, ce qui constitue globalement une satisfaction. Concernant les thèmes pour lesquels ce n’était pas le cas en 2000 (comme le cannabis) ou en 2005 (comme la dépression), le sentiment d’information s’est nettement amélioré [tableau I]. Il en est ainsi des jeunes de 15-30 ans comme du reste de la population.

On observe quatre grands groupes de thèmes :

–ceux pour lesquels le sentiment d’infor-mation des jeunes apparaît globalement très élevé (entre 88 et 93 %, à l’exception du cannabis, sujet sur lequel 75 % des jeunes se sentent bien informés), c’est le cas des substances psychoactives, en particulier du tabac et de l’alcool, et de la santé sexuelle (en particulier la contraception et le sida).

Si alcool, tabac et cannabis affichent une progression dans ce sentiment d’informa-tion entre 2000 et 2010, parfois importante (+6 points pour le tabac et +10 points pour l’alcool et +28 points pour le cannabis), c’est aussi le cas pour la contraception (+8 points entre 2000 et 2010), mais pas pour le sida,

pour lequel il faut souligner que le niveau était déjà de 90 % en 2000 ;

–ceux pour lesquels le sentiment d’infor-mation est nettement majoritaire, mais à un niveau inférieur, avec une part de la popula-tion s’estimant en déficit d’informapopula-tion de l’ordre d’un tiers. Il s’agit du cancer (69 % se disent « bien » ou « très bien » informés), des nouvelles épidémies, des vaccina-tions et des infecvaccina-tions sexuellement trans-missibles (IST) autres que le sida (64 % de personnes se sentant bien informées pour chacun). Le sentiment d’information sur les vaccinations apparaît en légère hausse par rapport à 2005 (+4 points). En revanche sont en hausse très nette les IST autres que le sida (+11 points par rapport à 2000) et le cancer (+5 points par rapport à 2005) ; –les risques de santé liés à l’environnement suscitent un sentiment partagé, avec 52 % des 15-30 ans se sentant bien informés ; –enfin, les maladies professionnelles, la dépression et la maladie d’Alzheimer constituent les seuls thèmes pour lesquels une majorité des jeunes se sent mal informée (la proportion de bien informés est comprise entre 39 et 44 %). Soulignons

57 Sentiment d’information et craintes des jeunes en matière de santé

toutefois la hausse très significative du sentiment d’information sur la dépression1 (+9 points depuis 2005).

Les jeunes se distinguent du reste de la population pour un certain nombre de thèmes : sur les substances psychoactives, ils apparaissent légèrement plus souvent bien informés que les 31-75 ans sur le tabac mais se sentent surtout beaucoup plus informés sur le cannabis que leurs aînés (+15 points). Par ailleurs, ils se sentent plus informés sur les nouvelles épidémies et le sida. En revanche, ils accusent un déficit d’information plus net que les 31-75 ans sur les vaccinations (−5 points), les maladies professionnelles et le cancer (−9 points pour chacun) et surtout sur la dépression et la maladie d’Alzheimer (respectivement −13 et −14 points). Pour les autres thèmes, ils

ne se distinguent pas particulièrement des personnes plus âgées.

Les tendances d’évolution obtenues chez les jeunes apparaissent très similaires à celles observées sur l’ensemble de la population, les seules différences notables portent sur le sentiment d’information sur les vaccinations (tendance à la légère baisse parmi les 31-75 ans, tandis que la tendance est plutôt à la hausse parmi les jeunes), ainsi que sur la contraception et la dépression, thèmes pour lesquels la hausse du senti-ment d’information s’avère plus nette parmi les 15-30 ans.

évolution des pourcentages de personnes âgées de 15 à 30 ans déclarant se sentir « bien » ou « très bien » informées sur différents risques ou maladies entre 2000 et 2010, et comparaison avec les 31-75 ans (en pourcentage)

2000 2005 2010 Tendance Différence

2000/2005 Différence

2005/2010a 31‑75 ans (2010)

Tabac 87,0 92,9 93,3 ΩC *** ns 91,2#

Alcool 79,0 86,7 89,5 Ω *** * 88,9

Contraception 81,2 82,4 89,1 Ω ns *** 87,3

Sida 89,8 88,7 88,0 C ns ns 84,6##

Cannabis 47,0 65,7 75,1 Ω *** *** 59,7###

Cancer 61,4 69,0 Ω *** 77,9###

Nouvelles épidémies 64,5 58,2###

Vaccinations 62,8 59,9 64,2 ≈Ω * * 69,2###

Alimentation 59,1 59,4 C ns

IST (hors sida) 48,8 58,6 63,8 Ω *** ** 66,0

Risques de santé liés à

l’environnement 51,6 51,4

Maladie d’Alzheimer 44,4 58,5###

Dépression 32,1 40,8 Ω *** 53,9###

Maladies professionnelles 38,9 47,4###

Pollution de l’air 41,6 38,6 *

Pollution de l’eau 20,1 22,2 C ns

* : p<0,05 ; ** : p<0,01 ; *** : p<0,001. Évolutions significatives 2000/2005 et 2005/2010.

# : p<0,05 ; ## : p<0,01 ; ### : p<0,001. Différences significatives entre 15‑30 ans et 31‑75 ans en 2010.

a. Tests effectués sur les détenteurs de ligne fixe en 2010 car la question n’était pas posée en 2005 pour les détenteurs exclusifs de téléphone portable.

Sources : Baromètres santé 2000, 2005, 2010, Inpes.

TaBLEau I

1. Les questions sur les maladies professionnelles et la mala-die d’Alzheimer ayant été posées pour la première fois en 2010, aucune tendance n’est mesurable.

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Parmi les 15-30 ans interrogés en 2010, le sentiment d’information diffère selon le thème abordé et le sexe. Les femmes se sentent plus souvent bien informées que les hommes sur la contraception (94,6 % vs 83,4 % ; p<0,001), les IST en dehors du sida (67,8 % vs 59,9 % ; p<0,01), la dépres-sion (44,5 % vs 37,2 % ; p<0,01). Parmi les nouveaux thèmes abordés en 2010, les femmes se déclarent plus souvent bien infor-mées sur la maladie d’Alzheimer (48,3 % vs 40,4 % ; p<0,01).

Les hommes, en revanche, se déclarent plus souvent bien informés sur le cannabis (77,5 % vs 72,6 % ; p<0,05), les maladies professionnelles (42,2 % vs 35,6 %, p<0,001) ou les risques de santé liés à l’en vi-ron nement (56,1 % vs 47,1 % ; p<0,001), tandis que les niveaux observés sur le tabac, l’alcool, le cancer, les nouvelles épidémies, les vaccinations ou le sida apparaissent tout à fait similaires [tableau II]. Notons enfin

que parmi l’ensemble des 15-75 ans, ces différences apparaissent identiques.

Sans rentrer dans le détail des liens entre comportements de santé et senti-ment d’information, il apparaît utile de considérer l’interaction possible entre la consommation des substances psychoac-tives et le fait de se sentir informé sur ces différentes substances. Les fumeurs ne se sentent pas moins bien informés sur les maladies liées au tabac que le reste de la population (93,9 % d’entre eux se sentent bien informés contre 92,8 % des non-fumeurs). Il en va de même sur les différents indicateurs de consommation d’alcool ou d’ivresse. En revanche, les consommateurs actuels de cannabis se sentent nettement mieux informés (87,5 %) que ceux qui n’en ont pas consommé au cours de l’année (72,5 %). Ces caractéris-tiques ne distinguent pas particulièrement les jeunes de l’ensemble des 15-75 ans.

comparaison de la proportion de personnes âgées de 15 à 30 ans déclarant se sentir « bien » ou « très bien » informées sur différents risques ou maladies selon le sexe, en 2010 (en pourcentage)

Hommes Femmes Ensemble p

Tabac 93,4 93,2 93,3

Alcool 90,4 88,7 89,5

Contraception 83,4 94,6 89,1 ***

Sida 88,4 87,7 88,0

Cannabis 77,5 72,6 75,1 *

Cancer 67,1 71,0 69,0

Nouvelles épidémies 65,4 63,6 64,5

Vaccinations 63,6 64,8 64,2

IST (hors sida) 59,9 67,8 63,4 **

Risques de santé liés à l’environnement 56,1 47,1 51,6 ***

Maladie d’Alzheimer 40,4 48,3 44,4 **

Dépression 37,2 44,5 40,8 **

Maladies professionnelles 42,2 35,6 38,9 *

* : p<0,05 ; ** : p<0,01 ; *** : p<0,001. Différences significatives entre hommes et femmes.

Source : Baromètre santé 2010, Inpes.

TaBLEau II

59 Sentiment d’information et craintes des jeunes en matière de santé

évolution des pourcentages de personnes âgées de 15 à 75 ans déclarant craindre

« pas mal » ou « beaucoup » pour eux-mêmes différents risques ou maladies entre 2000 et 2010, et comparaison avec les 31-75 ans (en pourcentage)

2000 2005 2010 Tendance Différence

2000/2005 Différence

2005/2010a 31‑75 ans (2010)

Accidents de la circulation 62,2 59,8 50,0 ns *** 53,7#

Cancer 49,1 51,6 47,8 C ns ns 58,2###

Consommation d’aliments

pollués ou transformés 37,4 37,1 C ns 49,7###

Maladies dues au tabac 34,6 39,4 31,6 Ω≈ *** *** 25,0###

Maladies cardiaques 27,9 31,1 27,9 Ω≈ ** * 39,7###

Maladie d’Alzheimer 25,4 24,4 C ns 43,7###

Les nouvelles épidémies 27,0 20,1 *** 25,7###

Les accidents domestiques 21,2 26,1 19,2 Ω≈ *** *** 22,0#

Sida 37,9 33,5 ***

IST (hors sida) 29,7 31,5 C ns

Maladies professionnellesb 18,2 19,9

Maladies dues à l’alcool 13,3 15,8 12,8 Ω≈ ** *** 11,5

* : p<0,05 ; ** : p<0,01 ; *** : p<0,001. Évolutions significatives 2000/2005 et 2005/2010.

# : p<0,05 ; ## : p<0,01 ; ### : p<0,001. Différences significatives entre 15‑30 ans et 31‑75 ans en 2010.

a. Tests effectués sur les détenteurs de ligne fixe en 2010 car la question n’était pas posée en 2005 pour les détenteurs exclusifs de téléphone portable.

b. La question était posée à l’ensemble de la population.

Source : Baromètres santé 2000, 2005, 2010, Inpes.

TaBLEau III

L’évoLUTIon DeS CRAInTeS De LA PoPULATIon Globalement, les principaux problèmes de

santé publique suscitent moins souvent la crainte qu’il y a dix ans. Les niveaux de certaines craintes s’avèrent stables sur l’ensemble de la période (cancers, consommation d’aliments pollués ou transformés, maladies cardiaques, maladie d’Alzheimer, accidents domestiques et maladies dues à l’alcool) et d’autres en baisse (accidents de la circulation, maladies dues au tabac, nouvelles épidémies, sida).

Les jeunes se distinguent du reste de la population par le fait qu’ils expriment moins de craintes sur de nombreux thèmes. Il n’y a que sur les maladies liées au tabac qu’ils expriment un niveau de crainte supérieur à celui exprimé par les 31-75 ans (32 % contre 25 %), tandis que pour deux types de patho-logies, il n’apparaît pas de distinction suivant l’âge : les maladies professionnelles et celles liées à l’alcool.

Pour le reste, les niveaux de crainte exprimés par les jeunes apparaissent moins élevés, voire nettement plus faibles que ceux exprimés par leurs aînés. La maladie d’Alzheimer en particulier suscite beaucoup moins la crainte parmi les 15-30 ans (−20 points), tout comme, dans une moindre mesure, les maladies cardiaques et la consommation d’aliments pollués ou transformés (−12 points pour chacun), le cancer (−10 points), les nouvelles épidémies (−6 points) et les accidents, qu’ils soient domestiques ou liés à la circulation (−3 points) [tableau III].

Les tendances d’évolution observées chez les jeunes sont très similaires à celles émanant de l’ensemble de la population, les seules différences notables sont sur la crainte suscitée par la consommation d’ali-ments pollués ou transformés, qui apparaît en hausse parmi les 31-75 ans tandis qu’elle

60 Les comportements de santé des jeunes - Analyses du Baromètre santé 2010

est stable parmi les jeunes, ainsi que sur la crainte des maladies liées au tabac, qui a baissé plus fortement parmi les jeunes que dans le reste de la population.

Concernant les substances psychoac-tives, le fait d’être soi-même fumeur ou consommateur régulier d’alcool augmente très fortement la crainte des maladies liées au tabac et à l’alcool : parmi les fumeurs

quotidiens, 59,6 % des 15-30 ans déclarent craindre les maladies liées au tabac, contre 27,2 % des fumeurs occasionnels et 15,2 % des non-fumeurs, tandis que 40,9 % des personnes à risque de dépendance à l’alcool, au sens du test [6], déclarent craindre les maladies liées à l’alcool, contre seulement 10,4 % de l’ensemble des non-buveurs et des buveurs sans risque.

SenTIMenT généRAL D’InfoRMATIon eT De CRAInTe Les caractéristiques qui sont associées au

sentiment d’être bien informé et aux craintes de la population diffèrent d’un thème à l’autre, incluant plus ou moins fortement les compor-tements de santé tels que les consommations de substances psychoactives par exemple.

Il est néanmoins apparu utile d’étudier les principaux facteurs associés au sentiment d’information et aux craintes par le biais d’un

score additionnant les réponses obtenues aux treize questions sur le sentiment d’informa-tion d’une part, et aux neuf quesd’informa-tions sur les craintes d’autre part. L’idée était d’observer à la fois les caractéristiques des individus présentant un sentiment général de mauvaise information (le quart de la population se sentant globalement le moins informé) et celles des individus présentant un niveau de

facteurs associés au sentiment d’être mal informé (quartile le moins informé sur le score de cumul des différents thèmes évoqués) parmi les personnes âgées de 15 à 30 ans, en 2010

n % ORa IC

Sexe

Homme (réf.) 954 29,0 1

Femme 1 058 27,7 0,8 0,7 ; 1,0

Âge ***

15-19 ans (réf.) 545 20,9 1

20-25 ans 760 31,3 1,4* 1,0 ; 1,9

26-30 ans 707 32,2 1,6* 1,1 ; 2,2

Situation financière perçue ***

Ça va (réf.) 1 299 24,2 1

C’est juste 463 32,5 1,5*** 1,2 ; 1,9

C’est difficile 250 41,7 1,9*** 1,4 ; 2,6

Situation professionnelle **

Travaille (réf.) 949 31,0 1

Étudiant 766 23,3 1,0 0,7 ; 1,3

Au chômage/inactif 297 34,1 0,9 0,7 ; 1,2

* : p<0,05 ; ** : p<0,01 ; *** : p<0,001. Résultats obtenus par le test du Chi2 de Pearson pour la colonne pourcentage (pourcentages pondérés issus des tris bivariés pour les croisements entre chacune des covariables et la variable dépendante) et par le test de Wald pour la colonne OR (odds‑ratios issus des régressions logistiques).

Source : Baromètre santé 2010, Inpes.

TaBLEau IV

61 Sentiment d’information et craintes des jeunes en matière de santé

facteurs associés à l’expression d’un nombre élevé de craintes (quartile présentant le plus de craintes sur le score de cumul des différents thèmes évoqués) parmi les personnes âgées de 15 à 30 ans, en 2010

n % ORa IC

Sexe *

Homme (réf.) 954 18,4 1

Femme 1 058 23,7 1,4** 1,1 ; 1,7

Âge

15-19 ans (réf.) 545 18,6 1

20-25 ans 760 21,3 1,1 0,8 ; 1,5

26-30 ans 707 23,1 1,1 0,7 ; 1,6

Situation financière perçue **

Ça va (réf.) 1 299 18,5 1

C’est juste 463 22,2 1,3 1,0 ; 1,7

C’est difficile 250 31,3 2,1*** 1,5 ; 2,8

Situation professionnelle

Travaille (réf.) 949 23,0 1

Étudiant 766 18,9 0,9 0,6 ; 1,2

Au chômage/inactif 297 21,6 0,9 0,7 ; 1,3

Sentiment d’information **

1er quartile (bien informé) (réf.) 386 15,9 1

2e quartile 548 18,0 1,2 0,9 ; 1,7

3e quartile 526 22,2 1,3 0,9 ; 1,9

4e quartile (mal informé) 552 26,5 1,6** 1,2 ; 2,2

* : p<0,05 ; ** : p<0,01 ; *** : p<0,001. Résultats obtenus par le test du Chi2 de Pearson pour la colonne pourcentage (pourcentages pondérés issus des tris bivariés pour les croisements entre chacune des covariables et la variable dépendante) et par le test de Wald pour la colonne OR (odds‑ratios issus des régressions logistiques).

Source : Baromètre santé 2010, Inpes.

TaBLEau V

crainte global élevé (le quart de la population exprimant le plus de craintes à l’égard des risques ou maladies évoqués).

Parmi les 15-30 ans, le sentiment d’être mal informé sur les thèmes de santé évoqués dans le Baromètre santé 2010 se révèle forte-ment marqué par l’âge et la précarité finan-cière. En effet, les adolescents présentent un sentiment d’information nettement plus élevé que les 20-30 ans, tandis que le fait de considérer sa propre situation financière comme satisfaisante est lié à un meilleur sentiment d’information, et ce avec un fort gradient. En revanche, il n’apparaît lié ni au sexe ni à la situation professionnelle, même si les étudiants présentent un sen timent général d’information plus élevé que les

actifs (ce lien est principalement dû à un effet de l’âge) [tableau IV].

À l’inverse du sentiment d’information, le niveau général de crainte exprimé par les femmes apparaît nettement supérieur à celui exprimé par les hommes, tandis que le lien avec l’âge n’est pas significatif au sein des 15-30 ans. En revanche, on retrouve le lien avec la précarité financière, qui isole cette fois fortement ceux qui se trouvent dans la plus grande difficulté. À l’inverse de ce qui est observé sur l’ensemble de la popula-tion, aucun lien avec la situation profession-nelle n’est par contre observé. Enfin, un plus mauvais sentiment d’information apparaît également augmenter le niveau de crainte ressenti [tableau V].

62 Les comportements de santé des jeunes - Analyses du Baromètre santé 2010

qUeLqUeS éLéMenTS De RéfLexIon AUToUR De CeS RéSULTATS Le niveau général de crainte exprimé par

les femmes, nettement supérieur à celui exprimé par les hommes, rejoint un niveau de préoccupation pour les questions de santé que l’on sait plus fort chez les femmes [7]. En revanche, le sentiment d’infor-mation n’apparaît pas plus fort chez les femmes et dépend surtout du thème dont il est question (plus fort que celui exprimé par les hommes sur la contraception, les IST autres que le sida, la maladie d’Alzheimer et la dépression ; plus faible sur le cannabis, les maladies professionnelles et les risques de santé liés à l’environnement). Ce résultat contraste avec le fait que le recours à des informations relatives à la santé, par le biais des médias par exemple, s’avère plutôt féminin : sept femmes sur dix (contre un homme sur deux) suivent des émissions sur la santé à la télévision ou à la radio ; la différence par sexe est encore plus nette pour ce qui est de la lecture des pages santé de la presse généraliste d’une part, et des magazines grand public consacrés à la santé d’autre part : en 2001, 60 % des femmes avaient coutume d’en lire, contre 32 % des hommes [8].

D’une manière générale, les femmes apparaissent davantage concernées par les questions de santé que les hommes [9], que ce soit pour elles ou pour les autres membres de leur famille. De nombreux travaux de sociologie ont montré que ce souci ne relève pas d’une simple compé-tence féminine (une plus grande sensibi-lité par exemple) mais reflète plus vraisem-blablement le partage encore inégal des tâches domestiques et en particulier des soins accordés aux enfants d’une part, et aux ascendants d’autre part. Les fonctions d’éducation, de veille, d’entretien, de soin et d’attention sont en effet traditionnellement dévolues aux femmes et restent toujours majoritairement accomplies par elles [10].

En termes de sentiment d’information, il est important de remarquer que, pour les plus jeunes comme pour les plus âgés, un niveau très élevé est observé pour quatre grands thèmes : tabac, alcool, sida et contra-ception. Neuf personnes sur dix se déclarent bien informées sur ces sujets de santé, qui ont fait par ailleurs l’objet de nombreuses campagnes d’information et de sensibilisa-tion par l’Inpes, le CFES auparavant, ainsi que par d’autres acteurs de santé publique, et il semble ainsi que ces efforts d’informa-tion du public portent leurs fruits.

La hausse très nette du sentiment d’infor-mation des jeunes (comme de l’ensemble de la population) sur le cannabis est à mettre au compte à la fois de la forte diffu-sion de ce produit depuis les années 1990 et des initiatives prises au milieu des années 2000, avec de grandes campagnes à desti-nation des jeunes et des parents, et l’édi-tion à plusieurs millions d’exemplaires du livret « Savoir plus, risquer moins » par l’Inpes et la MILDT. Un autre paramètre à ne pas négliger est l’importance du trai tement médiatique accordé à ce sujet depuis plusieurs années, dans des contextes relevant souvent de questions politiques, économiques et sociales. Notons é ga lement que, pour le cannabis, à l’inverse de ce qui est observé sur l’alcool et sur le tabac, le fait d’être consommateur s’accompagne d’un sentiment d’information nettement renforcé.

La hausse du sentiment d’information sur la dépression est pour sa part pro ba blement au moins en partie liée au lancement de la première campagne nationale d’informa-tion sur les troubles dépressifs à la fin de l’année 2007, ainsi qu’aux actions qui ont entouré cette campagne. Les données d’éva-luation de la campagne avaient montré de très bonnes performances en termes de diffusion et de réception du message, aussi

63 Sentiment d’information et craintes des jeunes en matière de santé

bien auprès du grand public que des profes-sionnels de santé interrogés. Parallèlement, l’étude d’impact du livret d’information diffusé dans le cadre de la campagne avait montré (suivi à trois mois) une évolution significative des connaissances, croyances et attitudes sur la dépression. Sur la période 2005-2010, on a pu également observer une hausse très nette du recours au soin en cas d’épisode dépressif caractérisé [11]. Toutefois, l’opportunité d’une nouvelle action de grande ampleur sur cette patho-logie serait à discuter, dans la mesure où certaines controverses récentes ont surgi sur la légitimité de la distinction entre tristesse et dépression [12] et sur la crainte d’une surmédicalisation de la souffrance psychique qui serait orchestrée par l’indus-trie pharmaceutique [13].

Au titre des limites de cette étude, il faut souligner qu’un indicateur tel que le sentiment d’information peine à rendre compte de l’avis des personnes se sentant à distance des risques (typiquement sur le cannabis, l’alcool, les maladies profession-nelles…). Néanmoins, il n’est pas illégitime d’envisager comme nécessaire une infor-mation minimale sur les grands thèmes de santé, y compris lorsque les gens ne se

Au titre des limites de cette étude, il faut souligner qu’un indicateur tel que le sentiment d’information peine à rendre compte de l’avis des personnes se sentant à distance des risques (typiquement sur le cannabis, l’alcool, les maladies profession-nelles…). Néanmoins, il n’est pas illégitime d’envisager comme nécessaire une infor-mation minimale sur les grands thèmes de santé, y compris lorsque les gens ne se

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