• Aucun résultat trouvé

5. T ROUBLE DE LA FAMILIARITE ET COMPORTEMENTS VIOLENTS DANS LA SCHIZOPHRENIE

5.1. Schizophrénie et violence

5. TROUBLE DE LA FAMILIARITE ET COMPORTEMENTS VIOLENTS DANS

LA SCHIZOPHRENIE

5.1. Schizophrénie et violence

La violence est définie par l’OMS comme l'utilisation intentionnelle de la force physique, de menaces à l’encontre des autres ou de soi-même, contre un groupe ou une communauté, qui entraîne ou risque fortement d'entraîner un traumatisme, des dommages psychologiques, des problèmes de développement ou un décès (Organisation mondiale de la Santé, 2002). Les comportements violents regroupent donc une grande variété d’actes, comme frapper une personne, casser des objets, menacer avec une arme, etc.

Pendant plusieurs années, il a été défendu l’idée que souffrir de schizophrénie ne majorait pas le risque de violence. Malgré les résultats de plusieurs études en faveur d’une association entre la schizophrénie et le risque de violence, cette idée a longtemps été soutenue, notamment dans le but de limiter le développement de mesures médicolégales et de politiques restrictives pour les patients souffrant de troubles mentaux (Fazel et al., 2009a). La question de l’association entre schizophrénie et violence reste donc d’actualité et nécessite d’être prise en considération, en particulier du fait de son rôle dans la stigmatisation des patients en psychiatrie, qui constitue un obstacle majeur pour l’accès aux soins de ces patients (Fazel et al., 2009a).

Différents facteurs de risque de comportement violent ont été mis en évidence chez les patients souffrant de schizophrénie (voir tableau 2). Il est important de garder à l’esprit que ces facteurs de risques ne sont pas des facteurs prédicteurs de violence, mais bien des caractéristiques pouvant statistiquement augmenter la probabilité de survenue d’un comportement violent. En ce qui concerne les patients souffrant de schizophrénie, une partie de ces facteurs est identique à ceux retrouvés en population générale, d’autres sont spécifiques aux patients souffrant de schizophrénie. Il a été établi que le nombre de comorbidités associées au diagnostic de schizophrénie augmentait le risque de violence (Haute Autorité de Santé, 2011). Il est donc essentiel de connaitre ces

58

facteurs de risques, afin d’une part d’en effecteur la recherche systématique lors de l’évaluation du risque de violence, et d’autre part, d’en constituer des cibles thérapeutique dans la prise en charge des patients.

Chacun des facteurs de risque identifié est susceptible d’augmenter la probabilité de survenue d’un comportement agressif, néanmoins ce risque reste modéré. Le seul facteur de risque augmentant de manière importante le risque de passage à l’acte agressif est la consommation de substances psychoactives. De nombreuses études ont en effet montré que la dangerosité des patients souffrant de schizophrénie était majoritairement attribuable aux abus ou dépendances aux substances psychoactives, ces résultats ayant été confirmé par une méta-analyse (Fazel et al., 2009a). Parmi ces consommations, les plus fréquentes sont l’alcool, le cannabis et les benzodiazépines. Si il est aujourd’hui admis que la présence d’un trouble psychotique est associée à un risque plus important de comportement violent par rapport à la population générale (Bo et al., 2011; Taylor, 2008; Weiss, 2012), ce risque reste moins bien important que celui associé aux consommations de toxiques (Volavka, 2013).

59

Tableau 2: Facteurs associés à la violence chez les patients souffrant de troubles schizophréniques (issu du Rapport d’orientation de la commission d’audition HAS 2011).

Facteurs généraux Facteurs spécifiques

Facteurs sociodémographiques Diagnostic actuel

- Âge jeune < 40 ans - Genre masculin

- Statut économique précaire - Faible niveau d’éducation - Célibat

- Schizophrénies de forme paranoïde

- Abus ou dépendance aux substances psychoactives

comorbide

- Personnalité antisociale comorbide (héboïdophrénie)

Antécédents Symptômes

- Antécédents personnels et familiaux judiciaires,

de violence envers autrui ou d’incarcération - Antécédents d’abus ou de dépendance à l’alcool

- Antécédents de « troubles des conduites » dans l’enfance ou à l’adolescence

- Antécédents de victimation - Retard mental

- Symptomatologie psychotique positive - Idées délirantes de persécution, de mégalomanie, de mysticisme, syndrome d’influence

- Menaces écrites ou verbales évoquant un scénario de passage à l’acte en cours de constitution

- Fascination pour les armes - Méfiance et réticence

- Participation émotionnelle intense - Retrait social, émoussement affectif, désorganisation

- Idées, fantasmes et propos de violence - Idées suicidaires

- Symptomatologie dépressive - Dysfonctionnement frontal

Facteurs contextuels Facteurs liés aux soins

- Être victime de violence dans l’année - Divorce ou séparation dans l’année - Sans emploi dans l’année

- Défaut d’accès aux soins

- Incapacité à demander de l’aide

- Déni des troubles et faiblesse de l’insight - Longue durée de psychose non traitée - « Pseudo-alliance thérapeutique » - Rupture du suivi psychiatrique - Non-observance médicamenteuse

- Insuffisance du suivi au décours immédiat d’une hospitalisation

60

Parmi les facteurs de risques spécifiques aux patients souffrant de schizophrénie, les symptômes positifs semblent être plus particulièrement associés au risque de violence, et notamment les idées délirantes de persécution, les hallucinations, l’automatisme mental (Bo et al., 2011). Plus de la moitié des patients souffrant de schizophrénie et auteurs d’homicide présenterait une forme paranoïde de la maladie, avec une symptomatologie positive marquée par des idées délirantes et des hallucinations auditives lors du passage à l’acte violent (Nolan et al., 1999; Swanson et al., 2006). Le défaut d’insight, de théorie de l’esprit et la mauvaise observance aux traitements constituent également des facteurs de risque de passage à l’acte pour ces patients (Bo et al., 2011; Witt et al., 2013). Le risque de violence serait par ailleurs très élevé en début de maladie et au moment du premier épisode psychotique (Bo et al., 2011).

Enfin, la présence d’un trouble de personnalité associé joue un rôle majeur dans la survenue de gestes violents. Bien que se soit posée la question de la pertinence du concept de trouble de personnalité comme entité propre dans le cadre de la schizophrénie, différentes études ont mis en évidence que des personnalités pathologiques pouvaient être observées avant le début de la maladie, restaient relativement stable au cours de la maladie, et affectaient le fonctionnement de la personne (Bo et al., 2011). Les personnalités antisociale ou psychopathique seraient particulièrement associées à la schizophrénie (Bo et al., 2011), ces personnalités étant associées à des risques élevés de violence. Cela ne signifie pas que les symptômes psychotiques ne peuvent pas influencer la survenue d’un passage à l’acte, mais que pour certains patients souffrant à la fois de schizophrénie et de trouble de personnalité antisociale ou psychopathique, les traits de personnalité auraient un impact plus important sur le risque de violence que les symptômes psychotiques (Bo et al., 2011).