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C ONSTRUCTION D ’ UN JEU DE DONNÉES

4.3.3 Scénarios multi-robots

Dans cette section, nous présentons les principes que nous avons suivis afin de concevoir les acquisitions multi-robots, puis nous détaillons les scénarios acquis à Sotteville et à Meudon.

Principes directeurs et modes d’acquisition

Comme mentionné dans le chapitre 3, le SLAM multi-robots offre de nouvelles opportu-nités pour accroître la précision des estimations des cartes et des trajectoires. Cependant, il confronte également les robots à de nouvelles contraintes. Il s’agit de contraintes réseau,

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 0 5 10 15 20 25 30 35

(a) Plan Sotteville-lès-Rouen

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 0 5 10 15 20 25 30 35 40 (b) Plan Meudon

Figure 4.6 – Plan des aires d’acquisitions à Sotteville-lès-Rouen et à Meudon

de contraintes calculatoires et des contraintes dérivées de la fusion des données de plu-sieurs robot. La finalité d’un jeu de données multi-robots est d’évaluer les performances d’un algorithme de SLAM quant à saisir ces opportunités et à surmonter ces contraintes. C’est pourquoi il doit idéalement scénariser ces contraintes et ces opportunités. Nous avons vu que la littérature manque cependant de jeux de données multi-robots, et qu’à notre connaissance, UTIAS (Leung et al. 2011) est le seul jeu de données expressément conçu pour tester des algorithmes de SLAM multi-robots. Néanmoins, ce dernier couvre une faible surface et se prête davantage à du SLAM 2D basé LiDAR qu’à du SLAM 3D basé vision. Comme nous l’avons mentionné, les jeux de données multi-session tels qu’Eu-RoC (Burri et al. 2016) offrent une alternative intéressante, mais l’autonomie de leurs trajectoires, conçues indépendamment les unes des autres, en restreint l’intérêt dans une optique collaborative simultanée.

Nous exposons ici les principes directeurs que nous avons suivis afin de concevoir des scénarios multi-robots. Nous avons prêté attention à deux propriétés essentielles pour chaque chaque scénario : i) l’accumulation des incertitudes le long des trajectoires in-dividuelles, et ii) la propagation des informations entre les trajectoires. Vis-à-vis de la première propriété, il s’agit de laisser une marge d’amélioration significative quant à la précision d’estimation des cartes et des trajectoires d’une partie au moins des robots. Dans un cadre visuel, cette incertitude dépend de trois facteurs. Le premier est la cinématique des trajectoires. En effet, des mouvements brusques et aggressifs, voire simplement les mouvements de rotations, compliquent le suivi des points d’intérêts et risquent d’entâcher

les images d’un flou de mouvement. Le second critère tient à la nature des scènes obser-vées : l’odométrie visuelle est d’autant plus fiable qu’elle s’appuie sur une grande quantité d’amers visuels bien contraints (nombre d’observateurs et parallaxe d’observation suf-fisants). Enfin, le dernier facteur influençant l’accumulation des incertitudes le long de trajectoires est la distribution des fermetures de boucles. Naturellement, plus les boucles fermées sont grandes, plus elles contraignent de larges portions de la trajectoire, et plus la dérive odométrique s’en trouve amoindrie. La seconde propriété essentielle d’un scénario multi-robots est sa propension à la propagation des informations entre les trajectoires des robots. Celle-ci dépend de deux facteurs que sont la distribution des correspondances inter-robot ainsi que de leurs observations directes. Leur intérêt est double. Elles per-mettent d’une part d’estimer les transformations entre leur référentiels d’odométrie, et d’autre part de fermer des boucles dites inter-robot dès qu’elles induisent des cycles de contraintes impliquant les segments de trajectoires appartenant à plusieurs robots dis-tincts. Notons qu’une fermeture de boucle inter-robot apporte une information dissymé-trique. En effet, les contraintes odométriques induites par une trajectoire sur l’autre ne sont pas équivalentes. Le principe général que nous avons suivi a consisté à envisager ces propriétés de façon globale afin de maximiser la complémentarité ou la disparité des informations entre les robots. Concrètement, nous avons privilégié des trajectoires amples et sinueuses promptes à accumuler une incertitude à laquelle la distribution des corres-pondances inter-robot doit permettre de remédier. Nous avons en particulier construit des scénarios dans lesquels des trajectoires complémentaires et d’incertitudes comparables in-duisent des contraintes fortes l’une sur l’autre, et des cas disparates où une trajectoire fiable induit de fortes contraintes sur une trajectoire plus incertaine. Les deux jeux de don-nées sont hétérogènes car ils font collaborer des robots terrestres et aériens. Dans le cas visio-inertiel, les séquences terrestres induisent des difficultés supplémentaires puisque les excitations inertielles sont plus faibles, le rapport signal sur bruit est plus faible d’autant plus que la cinématique des trajectoires terrestre est plus aggressive avec des mouvements par à-coups, et le champ de vue des robots est réduit par rapport à celui des drones et donc visuellement moins riche.

Jeu de données acquis à Sotteville-lès-Rouen

Le jeu de données de Sotteville consiste en deux scénarios dont les vérités terrain sont représentées par la Figure 4.7. Le scénario 1 met en jeu trois trajectoires terrestres balayant toute la surface de l’entrepôt. En particulier, on note que les trajectoires des

robots A et B ne se croisent jamais. Ceci implique qu’il n’existe aucune correspondance entre ces robots, qu’elle soit directe ou indirecte. C’est le robot C qui assure le relais entre ces deux robots. De même, leurs trajectoires n’ont pas la même propension aux fermetures de boucles. Le robot A fait deux fois le tour de sa zone et cumule donc un grand nombre de fermetures de boucles très informatives. Au contraire, le robot B ne ferme pas de boucle qui implique la première portion de sa trajectoire ; celle-ci se termine en revanche par une boucle qui ne contraint que la dernière portion de sa trajectoire. Enfin, le robot C est celui dont la trajectoire est la plus ample et alterne entre les zones explorées par les robots A et B. Il peut potentiellement compter sur un grand nombre de correspondances avec le robot A, ainsi qu’avec le robot B mais dans une moindre mesure. En revanche, les fermetures de boucles inter-robot qui découlent de ces correspondances sont potentiellement très informatives car les boucles fermées incluent de longues portions des trajectoires des robots. C’est par exemple le cas pour la boucle entre les robots B et C dérivée des correspondances au début et à la fin de la trajectoire de B.

(a)Trajectoires du scénario 1 (b) Trajectoires du scénario 2

Figure 4.7 – Trajectoires de vérité-terrain des robots A (rouge), B (vert), C (bleu) et du drone (orange) dans chaque scénarios.

Le second scénario met en jeu deux robots terrestre et un drone. Les deux robots terrestres parcourent chacun une boucle autour d’un îlot central, mais dans des sens opposés. Au-dessus, le drone effectue également plusieurs boucles autour de l’îlot et alterne les observations directes avec les deux robots terrestres qui eux ne se croisent qu’une seule fois au milieu de leur boucle. L’intérêt de ce scénario est d’utiliser le drone comme relais d’information entre les deux robots terrestres afin d’aligner leur référentiel d’odométrie et d’en dériver des fermetures de boucles inter-robot. Même s’ils passent aux mêmes

endroits, les deux robots détecteront cependant peu de correspondances indirectes car ils parcourent leur boucle en sens opposés, si bien que leurs observations ne coïncident pas, ou très occasionnellement.

Jeu de données acquis à Meudon

Le jeu de données acquis à Meudon comprend cinq scénarios dont les trajectoires sont représentées sur les Figures 4.8. Le premier scénario (c.f. Figure 4.8a) est un scénario d’exploration. C’est le seul dans lequel les robots couvrent la totalité du hangar. Ceux-ci commencent au même endroit à une extrémité de la zone Nord et la traversent pour rejoindre la zone Sud. La zone Nord, dépourvue d’obstacles sur la majorité de sa sur-face, impose aux robots de s’appuyer sur des amers lointains à faible parallaxe. Cette traversée s’avère plus difficile pour les robots B et C qui la traversent en son milieu, et ne peuvent alors se reposer que sur des points caractéristiques extraits sur le sol proche et fréquemment renouvelés. De plus, les conditions d’éclairage, couplées à la réflexivité du sol, peuvent compliquer le suivi, notamment pour le robot C. Tout au long de leur trajectoire, les robots se rencontrent régulièrement et peuvent ainsi fermer des boucles de grande ampleur et ainsi amoindrir la dérive accumulée lors de la première phase. Notons cependant qu’aucun robot ne ferme de boucle le long de sa trajectoire, hormis d’éventuelles boucles locales. Ils ne peuvent donc s’appuyer que sur des correspondances inter-robot, et notamment les correspondances indirectes entre les trajectoires. Enfin, les robots ter-minent au même endroit en s’observant les uns les autres, ce qui permet de fermer de grandes boucles inter-robot incluant l’ensemble de leur trajectoire.

Le scénario 2, représenté sur la Figure 4.8b n’implique également que les robots ter-restres. Ceux-ci admettent cependant des points de départ distincts et leurs trajectoires se cantonnent à la zone Sud, comme ce sera le cas pour les scénarios suivants. Mis à part ces différences, ce scénario repose sur les mêmes principes que le premier scénario : de longues trajectoires amples dépourvues de fermetures de boucles intra-robots, mais donnant lieu à de multiples correspondances directes et indirectes entre les robots de façon à en dériver de larges fermetures de boucles contraignant de longues portions de leurs trajectoires. Les robots terminent à leur point de départ initial, sans pour autant fermer de boucle à cette occasion.

Contrairement aux deux premiers scénarios, les trois suivants incluent également le drone. Dans ces premiers scénarios, il n’existait pas une disparité flagrante d’information

(a)Trajectoires du scénario 1

(b)Trajectoires du scénario 2 (c)Trajectoires du scénario 3

(d)Trajectoires du scénario 4 (e)Trajectoires du scénario 5

Figure 4.8 – Trajectoires vérité-terrain des robots A (rouge), B (vert), C (bleu) et du drone (orange) dans chaque scénarios.

entre les robots : leurs trajectoires étaient semblables et les correspondances directes et indirectes entre les robots étaient distribuées relativement équitablement entre elles. Les scénarios 3 et 4, respectivement décrits par les Figures 4.8c et 4.8d, explorent au contraire le cas d’une disparité d’information entre les robots. Dans le scénario 3, les robots A et C explorent des zones distinctes et ne se rencontrent jamais, à l’instar du premier scénario de Sotteville. Le robot B ainsi que le drone assurent le relais entre les deux robots en alternant les correspondances directes et indirectes avec l’un et l’autre. La trajectoire du robot C présente jouit de davantage de fermetures de boucles intra-robot que celle du robot A. L’idée de ce scénario est donc d’évaluer s’il est possible de propager l’information de la trajectoire du robot C à celle du robot A par l’intermédiaire de celles du drone et du robot B. Le scénario 4 est conçu de façon similaire. Dans ce cas, ce sont les trajectoires du drone et du robot A – là encore complètement dissociées l’une de l’autre – qui admettent une forte densité de correspondances intra-robot. Le robot A explore cependant une zone restreinte. Les robots B et C explorent eux l’ensemble de la zone Sud. Ils traversent régulièrement la zone du robot A et multiplient les correspondances directes et indirectes avec lui. De plus, les deux robots se rencontrent ocassionnellement en dehors de la zone du robot A, B et C peuvent également bénéficier des correspondances avec le drone afin d’en déduire de nouvelles contraintes inter-robots entre leurs trajectoires.

Dans le dernier scénario (c.f. Figure 4.8e), les robots terrestres n’admettent plus aucune observation directe l’un de l’autre. Ils doivent alors exploiter les seules correspondances indirectes afin de fermer des boucles inter-robot, d’autant plus que leurs trajectoires ne contiennent pas de boucles.

4.4 Traitement des jeux de données