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OSSUAIRE DE SEDLEC

z 5 âr nad sazavou

Lors de notre second séjour à Zcfar nous avons pu compléter notre campagne de relevés. Nous sommes maintenant en mesure de présenter de façon plus précise la première intervention de Santini dans cette ancienne abbaye cistercienne: la rénovation de l'église Ste Marie et St Nicolas. On trouvera également le relevé de cette "Fons Mariae", le petit bâtiment qui abrite la source miracu­ leuse qui fut le signe indiquant l'élection du lieu propre à la fondation en 1251 d'un nouveau couvent par les Cisterciens de Nepomuk en Bohême occidentale. Ce dernier couvent devait plus tard disparaître et lorsque commença de s'élaborer la légende de St Jean Népomucène, la "montagne verte" qui abritait le premier couvent de Nêpomuk fut "déplacée" à Zd’ar. C'est son sommet, aux environs du couvent de l'église Ste Marie qui reçut l'église de pèlerinage consacrée à St Jean Népomucène. La "Fons Mariae" est la raison symbolique de l'implantation cistercienne, mais elle est aussi la raison formelle du projet de Santini.

En effet, la petite rotonde qui recèle le puits proprement dit, voit son

périmètre scandé de dix contreforts très saillants. Ce schème décimal est celui qui informe le plan du cloître autour de l'église. Sur la colline, comme dans la cour du couvent, un bâtiment à dix pans en ensère, en protège u-n autre. Le bâtiment de 1720 proclame ainsi sa déférence à l'égard de celui de 1251 qui le fonde dans la tradition.

Nous présentons également une autre interprétation du schéma géométrique du cimetière inférieur (Dolni Hrbitov). Nous avons en effet appris que la quatrième chapelle fut rajoutée en 1755, substituant au schéma triangulaire

du plan de 1709 de Santini, le plan à quatre temps que nous connaissons aujourd'hui. Cette "expérience" de lecture surprise par la prise en compte d'éventuelles

modifications des plans originaux est pour nous l'occasion de préciser que notre analyse se fonde principalement sur l'état actuel du bâtiment, tel que nous pouvons le percevoir aujourd'hui. Notre approche n'est pas fondamentalement historique, mais phénoménologique. Le principal document dans notre enquête reste le bâtiment lui-même. Aucune reconstitution d'un état virginal, d'avant le service du bâtiment, ne pourra submerger le charme de la présence actuelle, quelqu'impure qu'elle soit sous l'effet de l'incivile histoire des hommes.

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ZVOLE

A Zvol e, dans les environs de îcfâr, l'abbé Vejmluva fit construire par

Santini, de 1713 à 1717, une église paroissiale dont la grandeur architecturale étonne dans un si modeste village. Mais il voulait "bâtir" un véritable

territoire autour de son abbaye, aussi lui fallait-il marquer la campagne de monuments célébrant la puissance et la richesse renouvelées des Cisterciens. L'église St Wenceslas de Zvole est donc aux côtés de la Visitation Obyctov de St Pierre et St Paul de Bobrova, de l'auberge d'Ostrov nad Oslavou, l'un des points forts du quadrillage de cette partie de la Moravie occidentale autour du monastère de Zdar.

Cette église est organisée selon un plan en coix grecque dont la branche orientale est allongée pour abriter le presbytère et prolongée à l'extérieur par une sorte de façade arrière encadrée de deux puissants campaniles. De telle sorte que sa silhouette nous induit en erreur sur son orientation

véritable, les deux tours ne signalant pas l'entrée, comme à Zeliv par exemple, mais le chevet de l'église. Manière spectaculaire de subvertir le schéma

centralisé de l'espace intérieur. Autre cachotterie, si l'on peut dire, la dissimulation de l'imposante coupole intérieure, invisible à l'extérieur sous le système des toits, juste percée à la croisée par une massive lanterne cylindrique enchâssée dans un cube curviligne seulement marqué par ses quatre arêtes et supportant les quatre lobes fort rebondis d'une couronne royale symbolisant la consécration de l'église au roi Saint Wenceslav 1er.

Comme toujours chez Santini, les murs sont très compacts, d'une modénature très lisse à l'homogénéité seulement empreinte aux angles rentrants ou

saillants du périmètre par un jeu de pilastres accolés supportant une large bande horizontale de faible relief, chaine de tout le bâtiment constituée d'une innombrable superposition de couches dans lesquelles il est impossible de retrouver l'articulation de l'entablement classique. La branche occidentale de la croix grecque qui fait office de façade principale, est surmontée d'un simple fronton curviligne détaché de la structure du toit qu'il masque, fragile couronnement de cette masse imposante.

Aussi l'intérieur nous réserve-t-il la complète surprise de la grande coupole. Le sentiment de surprise n'est produit que par le moyen de la structure spatiale

car l'enveloppe interne présente le même minimalisme que l'extérieur dans le traitement de la modénature. Un revêtement uniformément blanc, juste animé des fines ombres du mince relief des pilastres et des arcatures. Mais cette coupole hémisphérique, directement posée sur les pendentifs sans tambour ni même de corniche circulaire, qui pèse sur nous, d'une nudité intacte,

renforcée de la lanterne qui maintenant apparaît énorme, et dont même la lumière généreusement introduite par quatre fenêtres circulaires, semble écrasante. Mais écrasés nous l'avions été dès l'entrée, par le passage forcé sous la très basse tribune qui remplit tout l'espace du bras occidental de la croix. A son attache au mur, elle est pourtant percée de deux ouvertures qui permettent à deux fenêtres de traverser son épaisseur,par ce dispositif si caractéristique, de l'architecture de Santini.

Mais à Zvole, dans l'effet spatial, rien de commun avec ce qui se passe à Zeliv ou à Zbraslav. Ici c'est à peine si la lumière a pu traverser la masse tout juste entamée. Le puit de lumière ne peut contredire la présence du mur, au contraire il en souligne l'épaisseur.

Rarement comme à Zvole, peut-on être le témoin de la fusion du décor et de la structure spatiale. L'architecture y communique sans le secours d'aucun autre code que celui de sa forme pure. Le parfait état du bâtiment renforce bien- sûr cette possibilité de "la communication d'avant la communication" qui occupait si fort Merleau-Ponty. Si les paroles d'avant les mots sont ici si efficaces, c'est que l'on prend soin d'elles. Et ce gardien, au moins de la parole architecturale, c'est le curé de Zvole, Miroslav Zouhar! Il faut avoir été reçu dans sa cuisine, en compagnie des charpentiers qui refaisaient dans le froid et la neige une partie du toit sous la direction du très vieux "maître" Sipek, avoir mangé les saucisses fumées et la purée de choux préparées par son admirable gouvernante, pour comprendre ce que c'est qu'aimer l'architecture!

OBYCTOV

A Obyctov, sur le territoire de 2cfâr, l'église de l'Assomption de la Vierge fut construite en 1734, sur un plan qu'avait donné Santini avant sa mort. Ce plan a la forme d'une tortue, symbole de constance et de fidélité. Un rectangle massif se voit adjoindre dans les angles incurvés, quatre petits édicules et un cinquième plus important, dans l'axe principal qui abrite l'autel. La voûte tendue est relativement basse, ce qui confère à cet espace dont toutes les parois sont revêtues d'un enduit blanc, une ambiance de salle de réception plutôt que d'église. L'échelle humaine, terrestre, de cette architecture est confirmée par la présence d'une tribune au périmètre curvi­ ligne qui court sur les trois côtés qui encadrent la face qui s'ouvre sur le sanctuaire. En un dispositif familier à Santini une première couverture s'ébauche sous la voûte véritable. Les quatre petits édicules, abondamment éclairés par deux fenêtres, s'ouvrent sur l'espace principal au moyen de portes très serrées. Elles fonctionnent donc comme des boîtes à lumière au niveau du sol à la source lumineuse dissimulée. L'entrée dans l'église se fait par un autre petit édicule accolé au rez-de-chaussée de la façade. On trouve donc dans ce bâtiment la plupart des principes de la composition architecturale de Santini. Mais ce qui avait emprunté ailleurs le langage gothique ou le langage baroque est ici employé sans le secours d'aucun code. Architecture dépouillée qui ne s'anime que des effets de lumière. Architecture pratique, fonctionnelle dont la modestie fait écho à la toute proche auberge d'Ostrov.

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