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Paragraphe 2 : Les mécanismes de sanction des déficits publics excessifs

A- Les sanctions prévues par l’Union

Selon le Traité de l’UEMOA202, les sanctions explicites susceptibles d’être appliquées comprennent la gamme de mesures graduelles suivantes :

- la publication par le Conseil d’un communiqué, éventuellement assorti d’informations supplémentaires sur la situation de l’Etat concerné ;

- le retrait, annoncé publiquement, des mesures positives dont bénéficiait éventuellement l’Etat membre ;

- la recommandation à la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) de revoir sa politique d’intervention en faveur de l’Etat membre concerné ;

- la suspension des concours de l’Union à l’Etat membre concerné.

Malgré le caractère coercitif de ces mesures, notons que les autorités communautaires, dans l’idée de pousser les Etats membres à une gestion saine de leurs deniers publics, pouvaient être plus ambitieuses en proposant d’autres sanctions plus contraignantes, au lieu de se contenter de proclamer dans le Traité que, par voie d’acte additionnel, la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement peut compléter cette gamme de mesures par des

dispositions complémentaires jugées nécessaires au renforcement de l’efficacité de la surveillance multilatérale de l’Union.

Avec ces Tableaux ci-après, on tentera de montrer comment, depuis la mise en place du Pacte, par manque de sanctions contraignantes, certains Etats de l’Union se sont laissés souvent aller à des dérapages budgétaires non contrôlés ou peut-être mêmes voulus, malgré le rappel à l’ordre répété des autorités communautaires.

Tableau 3: Solde budgétaire de base en % du PIB nominal (norme > = 0) des années 2000 et 2008

Bénin Burkina C.Ivoire G.Bissau Mali Niger Sénégal Togo

2000 1.7 -1.1 -0.1 -16.9 - 0.8 -3.4 1.4 -2.8 2008 1.6 -1.2 1.2 -2.0 - 0.1 5.0 -0.9 -0.7

Source : Rapports semestriels d’exécution de la Surveillance Multilatérale de

juillet 2001 et juin 2009.

Déjà en 2000, seuls deux Etats avaient présenté un budget en équilibre voire excédentaire (Bénin 1,7% et Sénégal 1,4% du PIB). Pour les autres Etats membres, le déficit est compris entre 0,1 pour la Côte d’Ivoire et 16,9 pour la Guinée Bissau. Cette situation s’expliquait par le fait que, dans l’ensemble de l’Union, les dépenses de base aient augmenté de 0,4% pour représenter 16,7% du PIB.

Cette évolution est la résultante, d’une part, d’une forte augmentation du poste « Transferts et subventions » et d’une progression sensible de la masse salariale et, d’autre part, d’une baisse du poste « Autres dépenses

courantes », appuyée par la forte diminution des dépenses en capital

financées sur ressources internes qui, dans le cadre de l’arbitrage de la contrainte budgétaire, ont été des variables d’ajustement.

Huit ans plus tard, c’est-à-dire en 2008, ils sont encore trois Etats, à savoir le Bénin, la Côte d’Ivoire et le Niger, à respecter ce critère avec un excédent de 1,6%, 1,2% et 5,0% respectivement. Pour les autres par contre, le déficit est compris entre 0,1% et 2,0%.

Pour ce qui est du ratio de l’encours de la dette intérieure et extérieure rapporté au PIB nominal inférieur ou égal à 70%, la situation n’est guère meilleure comme le montre le Tableau suivant qui décrit la situation des dettes publiques des Etats membres de l’Union en 2000, 2004 et 2008.

Tableau 4: Encours de la dette publique totale rapporté au PIB nominal (norme < ou = 70) en 2000, 2004 et 2008

Bénin Burkina C.Ivoire G.Bissau Mali Niger Sénégal Togo

2000 57.5 65.6 105.2 391.4 92.3 105.2 76 133.8 2004 41.1 47.1 84.1 331.1 66.5 75.5 50.3 96.5 2008 19.1 23.2 71.5 219.3 37.5 20.1 25.8 62.4

Source : Rapports semestriels d’exécution de la Surveillance

D’abord, en 2000, le fardeau de la dette a été une des principales causes du manque de viabilité des finances publiques dans l’Union. En effet, le taux d’endettement de l’ensemble de l’Union, mesuré par l’encours de la dette publique intérieure et extérieure rapporté au PIB nominal, s’était situé à 99,4%. Seuls deux Etats (le Bénin et le Burkina Faso) ont respecté ce critère de convergence. Les dettes des autres Etats sont comprises entre 76 % pour le Sénégal à 391,4% pour la Guinée Bissau. Quant au service de la dette publique totale dans l’Union, il a représenté 38% des recettes budgétaires totales et 30,1% des dépenses totales.

L’ensemble de ces indicateurs révèle déjà, en 2000, un problème de soutenabilité203 de la dette dans l’Union. A cette période, les Etats membres

pensaient que l’initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE)204

aller les soulager du fardeau de la dette. Dans le cadre des mécanismes de traitement de fond de la dette extérieure, six pays, à savoir, le Bénin, le Burkina, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger et le Sénégal sont admis à bénéficier de l’initiative PPTE. Les bailleurs extérieurs ont admis par contre que la Côte d’Ivoire et le Togo n’avaient pas encore, à cette époque, remplis les conditions requises pour bénéficier de cette initiative, à raison notamment de leur problème d’instabilité politique.

En 2004, seuls quatre Etats membres (Bénin, Burkina, Mali et Sénégal) ont respecté ce critère de l’encours de la dette, notamment grâce aux décisions de l’année précédente du Conseil des ministres du G8, relatives au projet d’annulation de la dette multilatérale des pays bénéficiant de l’initiative PPTE, dont ces Etats font partie. La Guinée Bissau et le Togo avaient des

taux d’endettement supérieur à 100%205. Néanmoins, toujours en 2004,

malgré cette initiative PPTE, la situation de la dette était toujours

203 Il s’agit de la situation dans laquelle un Etat est capable de remplir ses obligations actuelles et futures au titre du service

de la dette, sans recourir aux financements exceptionnels.

204 Il s’agit d’une initiative d’allègement de la dette des pays en développement, sous certains critères, décidée au Sommet du

G7 de Lyon, en 1996 (cette initiative est traitée en détail au chapitre 2 de la seconde Partie).

préoccupante avec un encours de 15 334 milliards de Franc CFA, soit 69,1% du PIB de l’Union.

Les raisons de ce dérapage budgétaire, dans l’espace UEMOA, s’expliquent entre autres par le fait que la situation des finances publiques a été marquée par la persistance des tensions de trésorerie qui se sont traduites par des accumulations d’arriérés de paiement par les Etats membres.

Ainsi, le montant des arriérés de paiement accumulés la même année a été de l’ordre de 614,3 milliards de franc CFA206 dont 507,1 milliards au seul

titre des arriérés de paiement extérieurs, même si, deux ans plus tard, c’est-à- dire en 2006, la situation s’est améliorée grâce notamment aux annulations d’une partie de la dette extérieur de certains Etats membres. En effet, selon le Rapport semestriel d’exécution de la surveillance multilatérale daté de Juin 2007, « l’encours de la dette (en 2006) a sensiblement baissé avec en volume

13735,3 milliards soit 53,1% du PIB contre 67,7 en 2005 » et, comme on l’a

souligné plus haut, 69,1 en 2004.

Cependant, il faut reconnaître que cette baisse est essentiellement liée à la mise en œuvre de l’Initiatives d’allègement de la dette multilatérale (IADM)207, dont six Etats membres ont bénéficié en 2008208. Il s’agit du Bénin, du Burkina Faso, du mali, du Niger, du Sénégal et du Togo. Selon les dernières prévisions de la Commission209, l’atteinte du point d’achèvement par la Côte d’Ivoire et la Guinée Bissau leur devait leur permettre de respecter également ce critère en 2010.

Au vu du rythme de convergence observé les années précédentes, le respect, comme prévu, des critères à l’horizon de convergence à venir, selon

206 Rapport semestriel d’exécution de la Surveillance Multilatérale de décembre 2004. 207

Il s’agit d’une autre Initiative d’annulation de la dette multilatérale des pays pauvres due aux trois Institutions financière multilatérales que sont le FMI, la Banque mondiale et la BAD. Cette Initiative a été adoptée lors du sommet du G8 de

Gleneagles en juin 2005 (pour plus de détails, voir Chapitre 2 de la 2ème Partie). 208

A la fin de l’an 2008, l’encours de la dette dans l’Union a représenté 44,2% du PIB contre 99,4% à fin décembre 2000. Cette baisse est liée principalement aux allègements obtenus par les Etats qui ont atteint le point de décision de l’Initiative PPTE ces dernières années.

la Commission, exige des performances dont la réalisation est peu probable. Pour elle, il devient dès lors impérieux pour les autorités des Etats membres de prendre les dispositions idoines en vue d’assurer la consolidation du cadre macroéconomique et la convergence.

On voit ainsi la nécessité pour l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine de consacrer de nouvelles gammes de mesures pour contraindre les Gouvernants nationaux à faire preuve de prudence dans la gestion des deniers comme c’est le cas par exemple dans l’Union européenne où, depuis la mise en place du Pacte de Stabilité et de Croissance lors du Conseil européen d’Amsterdam de juin 1997, les Etats, pour faire partie de l’Union Economique et Monétaire (UEM), sont appelés à respecter les exigences de partage d’une monnaie commune, qui nécessite une certaine prudence dans la gestion des finances publiques des Etats membres.