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Le Code de Transparence dans la Gestion des Finances Publiques au

Section 2 : Les textes communautaires harmonisant les législations financières des Etats

B- Le Code de Transparence dans la Gestion des Finances Publiques au

Publiques au sein de l’UEMOA

On entend ici par transparence dans la gestion des Finances publiques, selon le Code, l’information claire du Public sur la structure et les fonctions des administrations publiques, les visées de la politique de Finances publiques, les comptes du secteur public et les projections budgétaires. Quatre articles seulement en constituent l’ossature, que détaille une longue annexe, laquelle s’emploie à définir les principes d’une gestion saine et transparente des Finances publiques.

Pour mieux cerner la portée éventuelle de ce Code de Transparence, il serait plus judicieux de se focaliser un instant sur les principales raisons qui

177 Après l’adoption du Pacte en 1999, ces trois Etats ont vécu dans une instabilité politique chronique marquée par un

contexte socio politique difficile et permanent et des coups d’Etat fréquents.

ont commandé sa mise en œuvre, mais aussi les grandes idées forces qui le sous – tendent.

Après avoir constaté que le Pacte de Convergence, de Stabilité, de Croissance et de Solidarité entre les Etats membres, à lui tout seul, ne pouvait pas constituer de cadre juridique suffisamment fort pour inciter les Etats membres à plus s’imprégner des nouvelles techniques de gestion des Finances publiques, les autorités communautaires ont voulu, pour compléter ce dispositif, mettre en place un cadre beaucoup plus large et touchant à toutes les chaînes de la gestion publique, c’est-à-dire de la préparation au contrôle du budget, en passant par son exécution.

C’est ce qui a expliqué la mise en place, le 29 juin 2000 à Dakar, de la

première directive portant adoption du Code de Transparence179 dans la

Gestion des Finances Publiques. Il faut d’ailleurs relever que la qualité de l’information budgétaire est une préoccupation générale que l’on constate partout, en dehors même de la zone UEMOA, comme en témoigne l’adoption par le FMI en 1998 d’un Code de bonnes pratiques en matière de

transparence des finances publiques180 comportant de très nombreuses

prescriptions détaillées sur les modalités de préparation, d’adoption et d’exécution des budgets publics.

Après avoir constaté les limites de ce Code, les autorités communautaires, l’ont, neuf ans plus tard, abrogé et remplacé par un nouveau Code de transparence plus en phase avec une gestion moderne des finances publiques181.

Dans le cadre de l’UEMOA, le Code avait aussi pour finalité d’obliger les autorités nationales à mieux se familiariser avec les nouveaux outils de gestion publique, et parallèlement de ne plus trouver d’excuses pour justifier

179 Directive n°02/2000/CM/UEMOA. 180 Code précité.

181 Directive n°01/2009/CM/UEMOA portant Code de transparence dans la gestion des finances publiques au sein de

leurs errements dans la gestion des deniers publics, comme c’était le cas dans un passé très récent.

Il était même expressément affirmé dans l’annexe de la première directive, que l’état des lieux de la gestion des Finances publiques dans les Etats membres avait permis de mettre en exergue les lacunes et les faiblesses des administrations financières, qui se présentent comme suit :

- caractère incomplet et imparfaite adoption du cadre juridique des finances publiques ;

- inexistence de textes d’application des codes financiers et fiscaux, et non application adéquate de l’existant ;

- non reddition des comptes de l’Etat et absence de lois de règlement ;

- non internalisation des textes portant harmonisation des cadres juridiques, comptables et statistiques dans l’Union ;

- non exploitation des rapports d’inspection de vérification ;

- faiblesse des contrôles juridictionnels et parlementaires.

Au-delà du caractère pédagogique, il était intéressant de remarquer que l’ancien Code procédait d’un diagnostic sans complaisance de la situation qui prévalait dans les Etats membres de l’Union en matière de gestion financière, ce qui en soi n’était pas toujours évident. C’est un lieu commun de constater qu’un peu partout dans l’espace communautaire, la nécessité se faisait sentir de mettre de l’ordre dans la gestion des deniers publics, ce qui se traduisait par le rappel d’un certain nombre de normes budgétaires tout à fait élémentaire pour un Etat un temps soit peu moderne.

Après ce sévère diagnostic, les autorités communautaires comprennent donc que ces pratiques et omissions, sources de déstabilisation économique et d’inefficience des administrations, incitent à des changements qualitatifs dont les bases ont été jetées à travers l’affirmation des grands principes dans la recherche de la transparence en vue de consolider les acquis réalisés par les Etats membres en matières d’assainissement budgétaire et de bonne gestion financière.

C’est ainsi que, dans son ensemble, le Code de transparence adopté en 2000 portait autour du cadre juridique de la transparence, de la performance de l’administration financière, de la moralisation et du contrôle des finances publiques et enfin de l’intégrité de l’information budgétaire. Ceci est d’autant plus important que dans une Union économique et monétaire, les difficultés d’ordre budgétaire dans un Etat peuvent avoir des répercussions directes sur les autres Etats membres. Remarquons que l’importance de cet enjeu est telle que les préoccupations y relatives avaient déjà fait l’objet d’une mention dans la Déclaration des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’UEMOA, en date du 8 décembre 1999 à Lomé, intitulée « Relever ensemble,

dans la solidarité, les défis du troisième millénaire ».

La mise en place de ce dispositif visait à préciser les principes et les bonnes pratiques devant conduire à l’amélioration de la transparence dans la gestion des deniers publics. Ainsi, l’obligation était donnée aux autorités nationales, dans la conduite des affaires publiques de faire état de :

- la définition du rôle et des attributions des administrations pour mieux apprécier les responsabilités et la performance en leur sein ;

- la transparence dans les procédures d’élaboration, d’exécution et de suivi du budget, à travers la mise en place d’un cadre juridique approprié et l’installation effective de tous les organes de contrôle ;

- la formation des personnels, leur motivation et la gestion de l’administration selon les règles de neutralité et d’objectivité ;

- la circulation, la diffusion et la publication d’informations complètes et fiables sur toutes les activités financières de l’Etat et des autres organismes publics.

Il faut enfin souligner que, par ce Code, on entendait renforcer la responsabilité et la crédibilité des autorités nationales face aux principaux bailleurs de fonds des Etats membres de l’UEMOA ; tout en incitant les populations à adhérer en toute objectivité aux choix des politiques économiques et financières des gouvernements. C’est ce qui explique qu’il était surtout question de généraliser la création de Cours des Comptes autonomes dans tous les Etats membres ; de la reddition des comptes de gestion et de leur transmission à la juridiction financière ; du vote périodique des lois de règlement ; et enfin de l’adoption d’une loi sur les partis politiques et une autre sur la répression de l’enrichissement illicite.

Comme le souligne le Professeur Salif YONABA182, les auteurs de la directive ont dû pleinement prendre conscience de la portée limitée des contrôles qui s’effectuent sur la gestion des finances de l’Etat. Le contrôle administratif, loin de produire les effets bénéfiques attendus d’un véritable contrôle préventif, en empêchant la survenance des malversations, s’est bien souvent révélé inefficace. La forte politisation de certains organes administratifs (comme c’est le cas du corps de l’Inspection Générale d’Etat) a contribué à hypothéquer considérablement leurs pouvoirs dans leurs relations avec les structures qu’ils sont chargés de contrôler. Cela est surtout vrai des organes de « contrôle d’Etat » que l’on voit dans l’ensemble des pays, mais dont l’utilité apparaît plus que sujette à caution. Ainsi, comme le souligne toujours fort justement le même YONABA, par exemple, « Les Inspections

des organes dont les Etats se dotent pour se donner bonne conscience, tout en sachant pertinemment qu’ils sont dénués de toute utilité en matière de contrôle ».

Néanmoins, malgré les efforts constatés dans la mise en place du Code de transparence dans la gestion des finances publiques, force est de remarquer qu’il reste encore des progrès à faire. Par exemple, comme le soulignait la Commission, dans son rapport annuel sur le fonctionnement annuel de l’Union de 2006, sur huit Etats membres, seuls trois ont crée et installé des Cours des Comptes Autonomes, même si deux autres les ont créées mais ne les ont pas encore installées183.

C’est conscient de toutes ces faiblesses du Code que les instances communautaires, dans le cadre de la grande réforme des instruments budgétaires et comptables au sein de l’Union, ont décidé de l’abroger et de le remplacer par la nouvelle directive n°01/2009/CM/UEMOA portant Code de transparence dans la gestion des finances publiques au sein de l’UEMOA. Elles ont pris ainsi des dispositions nécessaires pour conformer la préparation et l’adoption des textes se rapportant directement ou indirectement à la gestion des finances publiques aux principes et règles définis par ledit Code.

Dorénavant, le Code de transparence s’appliquent notamment à la préparation et à l’adoption des directives portant lois de finances, règlement général sur la Comptabilité publique, Plan comptable de l’Etat, Nomenclature budgétaire de l’Etat, Tableau des opérations financières de l’Etat et Plan comptable et Nomenclature budgétaire des Collectivités locales184.

L’obligation est aujourd’hui donnée aux autorités nationales, dans la conduite des affaires publiques, de faire état, comme le prévoit l’annexe du Code :

182 YONABA S., « La difficile intégration des règles budgétaires et comptables des Etats membres de l’UEMOA », RFFP

n°79, Septembre 2002, p.231.

- de la légalité et de la publicité des opérations financières ;

- des attributions et des responsabilités des institutions ;

- du cadre économique ;

- de l’élaboration et de la présentation des budgets publics ;

- de la mise en œuvre des recettes et des dépenses ;

- de l’information du public ;

- de l’intégrité des acteurs.

Les nouveautés les plus marquantes portent ici sur certaines situations inédites se rapportant à certains principes. Par exemple, dans les trois mois suivant chaque alternance politique, la situation globale des finances publiques, et en particulier la situation du budget de l’Etat et de son endettement, doivent faire l’objet d’un rapport préparé par le Gouvernement et

audité par un organe public indépendant et publié185. De même, les

détenteurs de toute autorité publique, élus ou hauts fonctionnaires, doivent faire une déclaration de leur patrimoine en début et en fin de mandat ou de fonction186. Autre exemple, le Gouvernement établit et publie, au moins une fois tous les cinq ans, un rapport sur les perspectives d’évolution des finances publiques à long terme permettant notamment d’apprécier leur soutenabilité187. On entend par soutenabilté ici, la situation dans laquelle un pays est en mesure de remplir ses obligations actuelles et futures au titre du service de la dette, sans recourir aux financements exceptionnels

184 Article 2 de la directive n°01/2009 portant Code de transparence. 185 Titre 2 de l’Annexe du Code de transparence.

(accumulation d’arriérés et/ou rééchelonnement) et sans compromettre la stabilité de son économie.

Outres ces questions de principes généraux, les nouveautés, dans le Code de transparence de 2009, portent également sur l’élaboration, l’exécution et le contrôle des finances publiques. Ainsi, le Code consacre le principe de sincérité188 budgétaire, en prévoyant que les budgets annuels doivent être réalistes et sincères tant dans leurs prévisions de dépenses que de recettes. Ce principe se définit comme l’obligation de présenter des comptes ou un budget reflétant une image sincère et fidèle de la situation et des perspectives économiques et patrimoniales nationales au regard des informations dont dispose le Gouvernement au moment de leur élaboration. Ainsi, le principe de sincérité interdit de sous-estimer les charges ou de surestimer les ressources présentées dans la loi de finances et fait obligation

de ne pas dissimuler les éléments financiers ou patrimoniaux189. On

remarquera au passage que ce principe de sincérité sera repris dans la nouvelle directive n°06/2009/CM/UEMOA portant lois de finances au sein de l’UEMOA190.

Le Code consacre aussi la spécialisation des crédits budgétaires en

missions191. De même, il proclame l’annualisation du vote des lois de

règlement et la compétence, pour la première fois, de la Cour des comptes de l’exercice du contrôle sur la gestion des ordonnateurs192. Comme le principe de sincérité, ces deux nouveautés seront également reprises par les directives n°06/2009 et n°07/2009 portant respectivement lois de finances et règlement général sur la comptabilité publique au sein de l’UEMOA.

187 Titre 3 de l’Annexe du Code de transparence. 188 Titre 4 de l’Annexe du Code de transparence.

189 Deux corollaires s’attachent à ce principe : l’inclusion effective de l’ensemble des ressources et des charges (en ce sens, le

principe de sincérité rejoint les obligations découlant du principe d’universalité) au sein du budget ou des comptes de l’Etat ainsi que la cohérence des informations fournies.

190 Articles 30 et 72 de la directive.

191 Dans le Titre 4 de l’Annexe du Code de transparence, il est dit qu’ « A l’appui des documents budgétaires, une description

des principales mesures de dépenses et de recettes est fournie sur la base des objectifs des missions des administrations publiques, en précisant leur contribution aux objectifs de politique économique et leur cohérence avec chacune des grandes politiques publiques conduites par le Gouvernement ».

L’étude de la mise en place d’un environnement juridique approprié pour une meilleure gestion des deniers publics au sein de l’UEMOA montre bien que les autorités communautaires ont pris conscience que, pour éviter les échecs rencontrés par les autres organisations sous-régionales qui étaient

en cours dans la même zone géographique193, l’Union doit édicter des

dispositifs clairs et contraignants afin de dissuader toute tentation de fuite en avant de la part d’un Etat membre. C’est seulement de la sorte qu’on pourra inciter les Gouvernements nationaux à moderniser leurs politiques budgétaires, notamment par l’émergence d’une nouvelle culture de gestion budgétaire.