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CHAPITRE I: INTRODUCTION

1.5 Sécrétine

1.5.1 Activités biologiques de la sécrétine

En 1902, les biochimistes Bayliss et Sterling ont apporté la première preuve expérimentale d’une stimulation induite par des sécrétions pancréatiques via un mécanisme hormonal (Bayliss et Starling, 1902). En effet, ils ont identifié une substance provenant de la muqueuse du petit intestin ayant la capacité d’induire les sécrétions pancréatiques, qu’ils nommèrent sécrétine. Ce n’est qu’en 1961 que la sécrétine sera purifiée, à partir de la muqueuse intestinale porcine (Jorpes et Mutt, 1961). La structure primaire de la sécrétine est hautement conservée chez les vertébrés, suggérant un rôle physiologique important (tableau 1.7). Chez l'humain, il a été rapporté que la sécrétine est exprimée dans de nombreux organes, comprenant l'estomac, le duodénum, le jéjunum, l’iléon, la valvule iléo-caecale, le côlon, la rate, les testicules, les ovaires, les poumons et diverses parties du cerveau (Chey et Chang, 2014). La sécrétine est initialement exprimée en préprohormone de 121 acides aminés comprenant un peptide signal en N-terminal, un espaceur, le peptide mature et une séquence C-terminale de 72 résidus (Figure 1.14) (Afroze et al., 2013). Le peptide mature de 27 acides aminés contient une identité de séquence et de conformation avec les membres de la famille sécrétine/glucagon/GHRH (voir tableau 1.1). Le récepteur de la sécrétine est exprimé de façon endogène dans le cerveau, le pancréas, l’estomac, les reins et le foie (Afroze et al., 2013). La sécrétine exerce de nombreuses activités biologiques, telles que la régulation de la sécrétion d’ions bicarbonate dans le duodénum à partir des épithéliums tapissant les canaux pancréatiques et biliaires, la modulation de l'homéostasie de l'eau et de la sécrétion d'acide gastrique (Afroze et al., 2013). Au niveau de sa structure secondaire, ce peptide est principalement désordonné

en milieu aqueux et subit une conversion conformationnelle en présence de 40% TFE ou de diméthylsulfoxyde (DMSO), vers la formation de structure(s) hélicoïdale(s) (Figure 1.15) (Hofmann et al., 1989).

Figure 1.14. Structure primaire de la préprosécrétine. Les acides aminés indiqués en vert correspondent à la séquence signal, en noir à l’espaceur, en rouge à la sécrétine mature et en bleu à l’extension C-terminale.

Tableau 1.7. Phylogénie de la sécrétine

Espèces Structure primaire

1 10 20 27 IS (%)

Humain HSDGTFTSE LSRLREGARL QRLLQGLV 100

Chien HSDGTFTSE LSRLRESARL QRLLQGLV 96.4

Cochon, vache, chèvre HSDGTFTSE LSRLRDSARL QRLLQGLV 92.9

Rat HSDGTFTSE LSRLRDSARL QRLLQGLV 89.3

Souris HSDGMFTSE LSRLRDSARL QRLLQGLV 89.3

Cochon d’inde HSDGTFTSE KSRLRDSARL QRLLQGLV 89.3

Lapin HSDGTLTSE LSRLRDLARL QRLLQGLL 85.7

Poulet HSDGLFTSE YSKMRGNAQV QKFLQNLM 57.1 Les acides aminés indiqués en rouge diffèrent de ceux retrouvés chez l’humain. IS: identité de séquence. Adapté de (Chey et Chang, 2014).

Figure 1.15. Représentation en ruban de la structure hélicoïdale de la sécrétine. Structure obtenue grâce au logiciel i-tasser (Roy et al., 2010; Zhang, 2008), adapté de (Afroze et al., 2013).

MAPRPLLLLL10 LLLGGSAARP20 APPRARRHSD30 GTFTSELSRL40

REGARLQRLL50 QGLVGKRSEQ60 DAENSMAWTR70 LSAGLLCPSG80

SNMPILQAWM90 PLDGTWSPWL100 PPGPMVSEPA110 GAAAEGTLRP120 R

N-ter

1.5.2 Modèle de la catalyse membranaire

Étant donné la difficulté d’obtenir précisément la conformation des ligands RCPG de la classe B lorsque les peptides sont complexés à leur récepteur respectif, les structures ont souvent été élucidés en employant des membranes modèles mimant la bicouche lipidique de la membrane plasmique. La justification d’une telle approche tient au fait que lorsqu’un ligand lie son récepteur membranaire, il a également interagit avec la bicouche lipidique environnante (Langelaan et Rainey, 2010). En conséquence, un peptide qui interagit avec un environnement mimant la membrane plasmique aura une probabilité d’acquérir une conformation proche de sa conformation bioactive (Langelaan et Rainey, 2010). De façon intéressante, Inooka et al. ont validé ce concept en étudiant le PACAP27, qui présente une hélice-α dans la région C-terminale suite à sa liaison au domaine N-terminal isolé du récepteur PAC1 et également en présence de milieu mimant la membrane plasmique (Inooka et al., 2001). Des corrélations fonctionnelles peuvent également être déduites. Par exemple, en présence de micelles, la calcitonine présente une conformation hélicoïdale et perd cette structure lorsque le résidu F16 est délété, ce qui induit une perte de la fonction biologique (Findlay et al., 1983; Motta et al., 1998). D’autre part, il a été suggéré qu’un peptide aurait, en considérant la surface occupée par un récepteur à la surface cellulaire, plus de probabilité d’interagir avec la membrane avant d’interagir avec le récepteur. Cette hypothèse est connue sous le nom de la catalyse membranaire (Sargent et Schwyzer, 1986) et comprend 4 éléments (Figure 1.16). Premièrement, au vu de l’espace occupé par un récepteur, un ligand peptidique se liera probablement au feuillet externe de la membrane plasmique plutôt qu’à son récepteur en premier. Deuxièmement, la concentration locale de peptide se retrouve amplifiée permettant ainsi d’augmenter le taux de liaison au récepteur. Troisièmement, lors de l’adsorption, la diffusion du ligand devient bidimensionnelle au lieu de tridimensionnelle, augmentant ainsi les taux de liaison peptide-récepteur. Quatrièmement, l’environnement membranaire lipidique déclenche une conversion conformationnelle du ligand en une structure qui sera

reconnue par le récepteur. De ce fait, l’environnement adjacent à la membrane plasmique permet de diminuer la barrière énergétique de cette conversion conformationnelle vers la structure bioactive. Cependant, il est à noter que l’hypothèse de la catalyse membranaire simplifie la complexité de la membrane plasmique des cellules eucaryotes et ne prend pas en considération son hétérogénéité. En effet, la surface d’une cellule eucaryote est décorée d’une grande diversité de macromolécules, telles que des (glyco)protéines et des PGs (Theocharis et al., 2016). Les PGs sont formés par un corps protéique transmembranaire lié avec des chaînes de GAGs qui sont chargées négativement et forment un réseau tridimensionnel à la surface des cellules (Handel et al., 2005; Theocharis et al., 2016). Ainsi, les peptides chargés positivement, et tel est le cas pour les ligands RCPG de la classe B, pourraient interagir électrostatiquement avec les GAGs et ce, préalablement à leur liaison à leur récepteur, de façon similaire à de nombreuses cytokines.

Figure 1.16. Hypothèse de la catalyse membranaire. L’étape 1 indique l’interaction du ligand peptidique avec la bicouche lipidique suivit par un changement conformationnel au niveau de l’étape 2. À l’étape 3, la diffusion du peptide sur un plan bidimensionnel permet l’interaction avec le récepteur. Finalement, le ligand peptidique adopte une conformation bioactive permettant d’activer le récepteur.

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