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CHAPITRE I: INTRODUCTION

1.4 Islet amyloid polypeptide

1.4.7 Cytotoxicité de l’IAPP

1.4.7.1 Espèces cytotoxiques de l’IAPP

Les dépôts amyloïdes pancréatiques sont retrouvés chez 95 % des personnes atteintes du DTII (Rocken et al., 1992). La présence de ces dépôts corrèle avec une perte en masse des cellules β-pancréatiques, suggérant que les espèces fibrillaires sont impliquées dans la mort cellulaire (Jurgens et al., 2011; Kahn et al., 1999). Il a été montré que les assemblages fibrillaires ont la capacité d’induire un bourgeonnement de la membrane plasmique, une condensation de la chromatine et la fragmentation de l’ADN, indiquant des processus apoptotiques (Lorenzo et al., 1994). De plus, il a été montré que les fibres amyloïdes induisent une perturbation des voies cellulaires en réponse au stress oxydatif et de l’homéostasie lipidique (Janciauskiene et Ahrén, 2000). Finalement, les dépôts amyloïdes situés entre les cellules β-pancréatiques et les cellules endothéliales capillaires pourraient perturber la circulation des nutriments, tel le glucose, menant à des interférences avec l’exocytose de l’insuline des vésicules de sécrétion (Clark et Nilsson, 2004). Cependant, la majorité des études récentes indiquent que les intermédiaires oligomériques seraient les espèces les plus cytotoxiques (Glabe,

2008; Haataja et al., 2008; Kayed et al., 2003; Kirkitadze et al., 2002). En 1996, des souris transgéniques exprimant l’IAPP humain présentaient une perte rapide de masse cellulaire au niveau des îlots pancréatiques et ce, en absence de dépôts extracellulaires amyloïdes (Janson et al., 1996). Sur des cellules isolées d’îlots pancréatiques en culture, il a été montré que les fibres amyloïdes n’induisaient pas l’apoptose, contrairement au traitement à l’IAPP fraichement dilué (Janson et al., 1999). Au cours de cette même étude, les auteurs ont montré par microscopie électronique des cellules viables décorées de fibres amyloïdes. En revanche, en présence de peptides fraichement solubilisés et appliqués sur les cellules, il y avait présence d’agrégats amorphes de petite taille qui perturbent la membrane plasmique et pénètrent dans la cellule. Il a été identifié chez des personnes atteintes de diabète de type II, la présence d’anticorps spécifiquement dirigés contre les espèces oligomériques de l’IAPP qui ont la capacité de neutraliser la cytotoxicité de ces espèces (Bram et al., 2014). Une étude récente a montré que les espèces monomériques et fibrillaires exerçaient une faible cytotoxicité tandis que les espèces intermédiaires oligomériques induisaient une forte cytotoxicité sur des cellules β-pancréatiques en culture (Figure 1.12) (Abedini et al., 2016). Finalement, et tel est le cas pour les protéines amyloidogéniques associées à des pathologies, la question de savoir si la cytotoxicité est associée à une conformation oligomérique précise (Kayed et al., 2003; Shankar et al., 2008) et/ou au processus d’auto-assemblage reste à élucider (Jan et al., 2011).

Figure 1.12. Espèces toxiques de l’IAPP. A) Viabilité cellulaire des cellules de rat β- pancréatiques après traitement avec l’IAPP humain (rouge) et de rat (vert) pré-incubé pour différentes périodes allant de 0 h (monomère) à 60 h (fibrillaire). B) Cinétique d’auto-assemblage de l’IAPP humain (rouge) ou de rat (vert) mesurée par la fluorescence de la ThT. Adapté de (Abedini et al., 2016).

1.4.7.2 Mécanismes de cytotoxicité de l’IAPP

Parmi les mécanismes de cytotoxicité induits par les espèces pré-fibrillaires, la perturbation membranaire est le mécanisme le plus accepté par la communauté scientifique (Abedini et Schmidt, 2013; Caillon et al., 2016; Engel, 2009). À ce jour, deux principales hypothèses permettent d’expliquer la perturbation membranaire induite par l’IAPP (Figure 1.13). La première hypothèse propose que l’IAPP sous sa forme monomérique, ou oligomérique, interagit avec la membrane plasmique et s’insère dans la bicouche lipidique. Dans cet environnement lipidique, la formation de fibres induit une perturbation membranaire en changeant la courbure de la membrane, ainsi qu’en recrutant des lipides. Ce mécanisme de perturbation est dit détergent étant donné que la formation de fibres amyloïdes induit la formation de « vésicules », comprenant des agrégats protéiques et des lipides (Domanov et Kinnunen, 2008; Engel

et al., 2008; Lee et al., 2012; Martel et al., 2017). La deuxième hypothèse suggère que

les espèces oligomériques forment des pores membranaires pouvant conduire à une mort cellulaire. Dans un premier temps, il a été montré sur des bicouches lipidiques planaires, que l’IAPP pouvait former des canaux cation-sélectif menant à une perturbation de la membrane (Mirzabekov et al., 1996). Plusieurs mécanismes de formation des pores ont été proposés. En outre, la formation de ces pores serait induite par des oligomères pré-formés riches en feuillet-β qui s’insèrent dans la membrane (Kayed et al., 2009; Kayed et al., 2004). Des études par microscopie à force atomique suggèrent que des assemblages de 5 sous-unités s’intègrent dans la bicouche lipidique menant à la formation de pores (Quist et al., 2005). Une autre voie a également été proposée et implique que l’IAPP, sous forme monomérique non-structurée, se lie aux lipides et subit un réarrangement conformationnel en oligomère riche en hélice-α, menant à une perturbation membranaire via la formation de canaux (Knight et al., 2006). La formation des pores et/ou la perturbation membranaire induite par l’IAPP peut mener à une perte du contenu cellulaire et de l’osmolarité (Birol et al., 2018; Last

et Miranker, 2013), ainsi qu’à de nombreux mécanismes en aval menant à la mort cellulaire (Abedini et Schmidt, 2013; Asthana et al., 2018).

Figure 1.13. Représentation schématique de la perméabilisation membranaire induite par l’IAPP. La première hypothèse (a) propose que le peptide monomérique ou les petits oligomères interagissent avec la membrane et s’insèrent dans la bicouche lipidique. Par la suite, la formation de fibres modifie la courbure membranaire et recrute des lipides menant à la perméabilisation de la membrane plasmique. La deuxième hypothèse (b) suggère que les oligomères interagissent avec la membrane et forment des pores. Adapté de (Caillon et al., 2016).

Par exemple, lors de traitements de cellules β-pancréatiques à des concentrations élevées en IAPP, la voie pro-apoptotique JNK est activée (Subramanian et al., 2012). D’autre part, le récepteur FAS qui est connu comme un récepteur de mort cellulaire, peut interagir avec les oligomères d’IAPP, ce qui conduit à l’activation des voies pro- apoptotiques via les caspases 8 et 3 (Law et al., 2010; Park et al., 2012; Zhang et al., 2008). À cet effet, il a été observé que l’inhibition de la caspase 3 conduit à une inhibition de la toxicité cellulaire induite par l’IAPP (Law et al., 2010). De plus, il a également été montré que l’IAPP peut activer l’inflammasome, menant à la production des cytokines pro-inflammatoires interleukine 1α et 1β, pouvant mener à la mort des cellules β (Masters et al., 2010; Westwell-Roper et al., 2011).

Le stress du réticulum endoplasmique (RE) constitue également une voie pouvant entraîner la mort cellulaire induite par l’IAPP (Eizirik et al., 2008; Fonseca et al., 2009). Sous conditions physiologiques normales, les protéines destinées à la sécrétion transitent du RE au trans-golgi puis dans les vésicules de sécrétion, où elles sont stockées avant leur sécrétion. Dans le cas du DTII, il y a une forte pression sur le système du RE dû à la co-expression importante d’insuline et d’IAPP (Westermark et

al., 2011). L’augmentation de la demande en IAPP et en insuline entraîne une surcharge

de l’organite, pouvant conduire à une incapacité à contribuer au bon repliement des protéines. En réponse à ce stress, il y a un déclenchement de la réponse aux protéines mal-repliées (UPR) qui permet d’augmenter l’expression de protéines chaperonnes du RE, et ainsi contribuer au bon repliement des protéines. Cependant, si le stress persiste et devient trop important, cela peut résulter au déclenchement de l’apoptose. Toutefois, le rôle du stress du RE dans la modulation de la toxicité de l’IAPP in vivo demeure controversé. En effet, chez des souris transgéniques surexprimant l’IAPP humain, il a été montré que le stress du RE joue un rôle important sur la toxicité induite à l’encontre des cellules-β (Gurlo et al., 2010). De plus, sur des cellules en culture, le traitement avec de l’IAPP exogène sous forme monomérique induit un important stress du RE (Casas et al., 2007). À l’opposé, il a été montré à l’aide d’îlots pancréatiques en culture exprimant l’IAPP à des concentrations supraphysiologiques, que le peptide n’induit pas l’activation du stress du RE (Hull et al., 2009).

L’autophagie peut également être une voie modulant la cytotoxicité de l’IAPP. En effet, Masini et al. ont détecté une accumulation de vacuoles autophagiques et d’autophagosomes dans les îlots pancréatiques isolés de patients atteints du DTII (Masini et al., 2009). De plus, ils ont observé que le nombre de cellules β-pancréatiques était diminué et que l’activité lysosomale y était réduite. En 2014, Shigihara et al. observent une augmentation de la toxicité de l’IAPP chez des souris transgéniques exprimant l’IAPP humain et knock-down pour l’autophagy-related genes 7 (Atg7), inhibant l’autophagie (Shigihara et al., 2014). En revanche, une étude réalisée sur des

cellules en culture montre que l’activation de l’autophagie par la rifampicine, protège contre la mort cellulaire apoptotique induite par l’IAPP (Rivera et al., 2011). Les auteurs ont également montré que l’inhibition de la digestion autophagique lysosomale par des inhibiteurs de protéases, promeut la cytotoxicité induite de l’IAPP.

1.4.8 Rôle des glycosaminoglycanes dans l’auto-assemblage et la cytotoxicité de

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