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1 Introduction

1.5 Participation des cellules endothéliales aux résistances des adénocarcinomes ovariens :

1.5.5 Role de la voie Notch dans les cancers de l’ovaire

1.5.5.1 Généralités sur la voie Notch.

La signalisation Notch est une signalisation conservée au cours de l’évolution. Elle est composée par deux grandes familles de ligands, Delta et Jagged, de récepteurs Notch, un de facteurs de transcription tels que CSL (CBF1/RBP-J"/Suppressor of Hairless/LAG-1)

252

. La famille des récepteurs Notch chez les mammifères est composée de quatre récepteurs Notch 1, 2, 3 et 4 et de cinq ligands, Jagged-1, Jagged-2, Delta-like-1 (DLL1), Delta-like-3 (DLL3) et Delta-like 4 (DLL4) 252.

La signalisation Notch est initiée par une interaction entre un récepteur et son ligand. Celle-ci déclenche une série de clivages protéolytiques qui aboutit à la libération du domaine intracellulaire de Notch (NICD, Notch Intracellular Cytoplasmic Domain) dans le cytoplasme. Le NICD est nucléarisé pour s’associer à la protéine CSL et convertit celle-ci en activateur de la transcription des gènes cibles de Notch (figure 13) 252.

Figure 13: Généralités sur la voie Notch.

(gauche), Les différents récepteurs et ligands de la famille Notch. Ce schéma représente linéairement la structure des protéines, ainsi que les différents domaines rencontrés. (droite) Signalisation canonique de la voie Notch, lorsqu’un des récepteurs est engagé par son ligand.

Figures adaptées de Kopan, R. & Ilagan, M.X. The canonical Notch signaling pathway: unfolding the activation mechanism. Cell 137, 216-33 (2009).

1.5.5.2 Le gène Notch3 est amplifié dans les cancers de l’ovaire.

L’amplification de gènes est un processus commun au cours de la tumorigenèse. Les travaux de Joon T Park et al. et Kentaro Nakayama et al. démontrent qu’il existe, chez 20% des patientes atteintes d’adénocarcinomes ovariens séreux de haut grade, un amplicon sur le chromosome 19 en 19p13.12 253-255. Cet amplicon comprend 34 gènes codant pour des protéines, parmi lesquels Joon T Park et al. et Kentaro Nakayama et al. identifient le gène Notch3 254,255 (Figure 14). L’amplification du gène Notch3, chez ces patientes, correspond à une surexpression de la protéine à la membrane des cellules tumorales ovariennes. Cette amplification de la signalisation Notch3 a été récemment validée par le TCGA, leur étude démontre que dans 22% des cas, cette signalisation est altérée et le gène Notch3 est amplifié dans 11 % des cas 37.

Figure 14: Amplification du gène Notch3 dans les adénocarcinomes séreux ovariens.

A. Analyse des SNP sur SNP array. On peut distinguer plusieurs amplicons sur le

chromosome 19, incluant notamment des amplicons au niveau des gènes de la cyclines E1 et de AKT2, et un amplicon non décrit à ce jour en position chr19p13.12. L’augmentation du nombre de copie est représentée par un gradient de blanc (pas de copie) à rouge (plus de 5 copies). Chaque colonne représente un échantillon tumoral ou de tissu sain différent. B. qRTPCR validant sur 6 tumeurs l’amplicon observé en chr19p13.12 sur le SNP array. C. Comparaison du nombre de copies sur le chromosome 19 par étude des SNP et karyotype digital. Sur la gauche, un échantillon tumoral présentant un amplicon sur chr19p13.12 ; sur la droite un échantillon tumoral contrôle. L’étude des SNP corrèle avec les altérations présentes sur le karyotype digital.

D. Analyse par qRT-PCR de l’expression du transcrit Notch3, on note que son

expression est augmentée dans les adénocarcinomes de haut grade par rapport au tissu sain qui ne l’exprime pas. E. Analyse par FISH montrant que des régions géniques amplifiées corrélant avec l’accumulation du transcrit décrit en D., la tumeur de gauche est une tumeur contrôle ne présentant pas d’amplicon en chr19p13.12.

Ces données suggèrent que le gène Notch3 est sélectionné lors du processus de tumorigenèse ovarienne, et doit présenter une fonction essentielle pour sa progression. L’inactivation du gène Notch3, par des ARN interférant, dans les lignées ovariennes qui présentent l’amplification conduit à un arrêt de la prolifération puis à une induction de la mort cellulaire programmée 255.

1.5.5.3 Fonction de la signalisation Notch3 dans les cancers de l’ovaire. Le récepteur Notch3 est donc un gène amplifié dans les adénocarcinomes séreux de haut grade. Notch3 régule l’adhésion des cellules tumorales ovariennes aux cellules mésothéliales exprimant un de ses ligands Jagged1 256. L’adhérence des cellules tumorales ovariennes sur un tapis de « feeder » mesothéliaux augmente leur prolifération

256

. L’inhibition de l’expression de Jagged1 sur les cellules mésothéliales ou des cellules tumorales ovariennes est nécessaire et suffisante pour inhiber à la fois les mécanismes d’adhérence cellules-cellules et l’induction de la prolifération tumorale 256. Les travaux de Choi et al. démontrent que Jagged 1 est le ligand de Notch le plus exprimé par les cellules mesothéliales ainsi que par les cellules tumorales ovariennes 256. L’expression de Jagged 1 à la surface des cellules tumorales ovariennes est positivement régulée par Notch 3 257. Ainsi il existe dans les adénocarcinomes ovariens une boucle juxtacrine Jagged1/Notch3 régulant l’adhésion des cellules tumorales ovariennes aux cellules mésothéliales. Le but de ce travail de thèse étant d’étudier le rôle du microenvironnement dans l’émergence des résistances aux chimiothérapies, le couple Jagged1/Notch3 semble constituer un candidat sérieux dans le cadre de ce travail.

1.5.5.4 Implication du gène Notch3 dans les résistances aux thérapies. Les travaux de Sang Jung et al. et de Joon Tae Park et al. démontrent que l’expression de Notch3 par les adénocarcinomes ovariens séreux de haut grade constitue un facteur prédictif de la réponse à la chimiothérapie à base de sels de platines, ainsi qu’un facteur pronostique de la rechute 258,259. Sang Jung et al. sur une série de 175 tumeurs étudient l’expression du transcrit de Notch3 par qPCR ainsi que celle de la protéine par immuno- histochimie (IHC) 258. Ils confirment tout d’abord que Notch3 est un gène sélectionné par la tumorigenèse ovarienne. Ainsi, son expression est en moyenne dix-sept fois plus importante que dans le tissu sain ou la tumeur bénigne 258. Que ce soit dans la série de Sang Jung et al. ou de Joon Tae Park et al. l’expression de Notch3 corrèle positivement

avec les stades avancés des adénocarcinomes ovariens, l’envahissement des ganglions lombo-aortiques, et aussi avec l’envahissement péritonéal 258,259.

De façon intéressante l’expression de Notch3 chez les patientes permet de définir un groupe de patientes de mauvais pronostic, aussi bien au niveau de la survie sans récidive que de la survie globale, suggérant que le récepteur Notch3 est impliqué dans les mécanismes de chimiorésistance 258,259 (Figure15). Ces données cliniques viennent conforter certaines données obtenues in vitro où l’expression ectopique de Notch3 dans des lignées tumorales ovariennes permet d’augmenter de façon significative la concentration inhibitrice 50 (CI50) 259. De la même façon, l’inhibition de l’expression par ARN interferant de Notch3 est suffisante pour restaurer une sensibilité accrue au carboplatine 258,259.

Figure 15 : L’expression de Notch3 est de mauvais pronostic dans les adénocarcinomes ovariens séreux.

A. Courbe de Kaplan-Meier montrant une association entre l’expression de l’ARNm

Notch3 et la survie globale sur 42 patientes en rechute après leurs chimiothérapies. Les patientes ayant un fort taux de transcrit Notch3 présentent une médiane de survie globale de 22 mois comparée au 37 chez les patientes ayant une faible expression de Notch3 (p = 0.002) B. Courbe de Kaplan-Meier montrant une association entre l’expression de l’ARNm Notch3 et la survie sans progression sur 42 patientes en rechutes post-chimiothérapies. Les patientes ayant un fort taux de transcrit Notch3 présentent une médiane de survie sans progression de 3 mois comparée aux 8 mois chez les patientes ayant une faible expression de Notch3 (p = 0.002

Figures adaptées de Park, J.T. et al. Notch3 overexpression is related to the recurrence of ovarian cancer and confers resistance to carboplatin. Am J Pathol 177, 1087-94 (2010).