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Le discours messianique sébastianiste doit sa genèse et son inspiration à deux grands instigateurs. Le premier est celui que nous appellerions son précurseur, Gonçalo Anes, dit Bandarra et ses Trovas, formulées bien avant la naissance du roi désiré ; le second, c’est le jésuite, père Antonio Vieira qui donnera, un siècle plus tard, une nouvelle interprétation aux « strophes rimées » du Savetier de Trancoso, dans sa vision sur « l’histoire du futur », que nous analyserons ultérieurement. Il développera aussi sa croyance sébastianiste et l’avènement du « Quint-empire » dans certains de ses écrits et de ses sermons. Les racines idéologiques du sébastianisme ont longuement parcouru le temps et l’espace avant de se cristalliser et de se développer dans le Portugal baroque, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, lorsque nous avons abordé la question du roman breton, le messianisme judéo-chrétien et le joachimisme. En suivant cette trajectoire sur le messianisme portugais à partir du « prophète » Bandarra, nous rappellerons le point d’ancrage des deux traditions eschatologiques, le messianisme et le millénarisme. D’ailleurs, Bandarra appelle ce sauveur inconnu « le caché », O encoberto, et auquel le père Vieira, à son tour, donnera une nouvelle version et adaptation. Le but du père jésuite est de montrer que la Restauration de 1640 semble apporter la confirmation des prophéties de Bandarra124. Enfin, la brève étude sur sa pensée prophétique permettra la migration vers le Nouveau Monde où, les textes, les pensées, la croyance sébastianiste seront assimilés à leur tour par les colons, les autochtones et les esclaves. La symbolique de la figure de la Terre promise, du Messie et de la Prophétie accomplie se mêle pour évoquer désormais la destinée de la croyance sébastianiste au-delà de la métropole de l’empire portugais.

Bandarra possède une connaissance très profonde de la Bible et entretient de bonnes relations avec la communauté juive, dont certains de ses membres, le considèrent comme un Rabbi, rabbin. Quant au père Vieira, c’est un homme d’Église qui a une formation théologique très solide, selon les nouveaux modèles d’instruction proposés par le Ratio

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L’essai de Sampaio Bruno (1857-1915), intitulé O Encoberto, publié au Portugal en 1904, aborde le thème du sébastianisme lié à celui du roi caché et de la Grande Monarchie, à partir de la pensée du père Anônio Vieira et des Trovas de Bandarra.

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studiorum125 de la Compagnie de Jésus et les exigences du concile de Trente. Pour la tradition judéo-chrétienne, la Bible est le Livre par excellence qui témoigne de la relation de l’homme avec Dieu, ainsi que de son épiphanie. Pour le monothéisme judéo-chrétien, la Bible mais aussi le monde sont des lieux même de l’apokalupsis, la Révélation. La Bible raconte, témoigne de la prouesse de Dieu au milieu du Peuple choisi. Quant au monde, il est le locus sanctus, le lieu saint, ouvrage de la main divine, donc, lieu de perfection. Or, selon l’historien des religions, Mircea Eliade (1907-1986), de façon générale, dans le monde, il y a des espaces qui sont en dehors du sacré et qui appartiennent au chaos. Par ailleurs, c’est le sacré qui établit le « centre du Monde », le vrai monde, fruit de la volonté divine, espace de perfection et de fondation du temps. Le système de pensée de Bandarra et du père Vieira conjugue ces deux modes d’existence, le sacré et le profane, les deux caractères temporels, le sacré, kairos, et historique, chronos. En d’autres termes, leur système de pensée se réfère au pouvoir spirituel et temporel de la monarchie portugaise. Le mythe naît donc de la jonction de ces éléments, mais pour qu’il se développe, il a besoin de conditions favorables qui sont liées aux conjonctures historiques et sociales126.

Le Portugal du XVIe siècle où a vécu Bandarra, réunit des facteurs politiques et socioculturels pour concevoir et nourrir un mythe. Le héros du mythe, qui pour Bandarra est l’encoberto, le roi caché, deviendra au Portugal, le sauveur promis. « Pour les uns, il serait le fils de la maison de David, annoncé à Israël, pour les autres, le roi désiré. Dans ce sens, Bandarra a été un vrai prophète, non pas parce que ses prévisions s’accomplissaient, mais par l’influence intense qu’il a exercé sur le peuple127 ». Le héros du mythe, ce prince désiré, comme nous l’avons déjà vu, considéré comme le roi dom Sebastião, donne naissance au sébastianisme qui est une « croyance messianique au retour d’un monarque, qui viendra restaurer l’indépendance et la grandeur de Portugal128 », comme le souligne Lucette Valensi. Dans la pensée et les écrits du père Antonio Vieira, ce sentiment sébastianiste fournit un cadre à la résistance contre l’occupation étrangère et plus généralement, contre la dureté du

125 Le Ratio atque Institutio studiorum societatis Iesu, ou plus exactement le Ratio Studiorum, en français, plan des études, est une charte qui définit les fondements du système éducatif des pères jésuites, parue en 1598. Ce document est l’œuvre d’un groupe de pédagogues jésuites réunis au collège jésuite de Rome, fondé en 1551, par Ignace de Loyola, quelques années après la création de la Compagnie de Jésus.

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Mircea Eliade, Le sacré et le profane, Paris, éditions Gallimard, 1964, p. 26.

127 « Pouco a pouco se foram incrustando na consciência nacional as idéias aparentes nas Trovas, e afinal soou a hora em que todo o Portugal esperava o salvador prometido, para uns o filho da casa de David, anunciado a Israel, para outros o rei desejado. E neste sentido foi o Bandarra verdadeiramente profeta, não porque acertasse nos prognósticos, mas pela acção intensa que no seu povo exerceu. »

J. Lúcio de Azevedo, A evolução do sebastianismo, Lisboa, Livraria Clássica editora, 1947, p. 29.

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temps : « né de la douleur, nourri d’espérance, il (le sébastianisme) est à l’histoire ce qu’est la saudade à la poésie, un trait inséparable de l’âme portugaise129 ».

A– Bandarra et João de Castro, le précurseur et le défenseur de la croyance sébastianiste

Une des caractéristiques du sébastianisme est la réappropriation du mythe du roi caché, dont l’origine se trouve dans la saga du roi désiré, et dans la conjoncture de l’histoire lusitaine. Il est le fruit de la société baroque, encadrée par la Réforme catholique, et les motivations particulières de certains protagonistes, dont la vie et les activités sont bien ancrées dans le contexte local. D’ailleurs, ce contexte, au sens large, est marqué par la culture orale, où les strophes de Bandarra, écrites entre 1530 et 1540, vont connaître un grand succès parmi les juifs, les nouveaux-chrétiens130 et le petit peuple131. Tout ce monde entretient des rapports étroits avec les arts divinatoires, malgré la pression de l’Inquisition. Les Trovas de Bandarra, comme tous les discours prophétiques au XVIe siècle, et même ceux après la Restauration, recèlent un pouvoir de grande persuasion sur toutes les couches sociales. Ces prophéties sont des croyances messianiques et millénaristes issues de l’héritage médiéval et vont aussi aider à l’affermissement de la nouvelle dynastie des Bragance, tout au long du XVIIe siècle.

Les Strophes de Bandarra deviennent au XVIIe siècle, selon une relecture des faits, les prophéties ou la « Bible » des sébastianistes lettrés. De même, ces strophes annoncent et endossent le retour du roi caché, mais cette fois-ci, au Portugal. C’est la croyance au retour du roi caché qui pousse plusieurs faux Sebastião à se manifester au Portugal, et au-delà de ses frontières, entre 1584 et 1603. Il s’agirait du « roi de Penamacor », du « roi d’Ericeira »,

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« Ninguém acredita já que dom Sebastião venha a ressuscitar ; mas poder-se-á dizer que desapareceu de todo o sebastianismo? Nascido da dor, nutrindo-se da esperança, ele é na história o que é na poesia a saudade, uma feição inseparável da alma portuguesa. »

J. Lúcio de Azevedo, op. cit., p. 8.

130 En 1495, le roi dom Manuel du Portugal rend la liberté aux juifs réduits en esclavage, mais son mariage avec la fille des Rois catholiques est conditionné par leur expulsion. Le contrat de mariage est signé le 30 novembre 1496, et le 5 décembre de la même année, un décret royal bannit les juifs qui ont dix mois pour quitter le royaume. Cependant, le roi se rend compte que le décret va à l’encontre des intérêts de la Couronne et organise une campagne de conversion forcée de tous les juifs du royaume. Le roi dom Manuel du Portugal invoque le bien du royaume et le salut des juifs. Tous, peu importe leur âge, rang ou condition, sont soumis au baptême. Ils seront appelés nouveaux chrétiens (cristãos novos), en opposition aux chrétiens de souche ou vieux chrétiens.

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du « pasteleiro de Madrigal », et enfin, du « roi de Venise132». Dans ce même ordre d’idées, des femmes visionnaires font leur apparition, mais elles sont aussitôt condamnées par l’Inquisition. Luzia de Jesus et Joana da Cruz affirment converser avec le roi dom Sebastião en rêve, et Maria de Macedo, lui rendre visite trois fois par semaine dans son île cachée. Tous ces événements sont à la convergence de la rencontre entre la culture érudite écrite - développée par l’imprimerie typographique133-, et la culture populaire de tradition orale, preuve aussi des échanges incessants entre la cour et le peuple.134

La vague des faux rois qui prétendent être le vrai roi dom Sebastião reflète le refus des Portugais, ou du moins de certains d’entre eux, d’accepter la disparition de leur roi et la volonté de ne pas se soumettre à la domination philippine. Ce refus d’allégeance à l’Espagne135 nourrit le sentiment patriotique qui s’exprimera librement aussitôt après la Restauration de 1640, par le moyen d’une littérature à des fins politiques immédiates, tels que l’apaisement du royaume. Il s’agit d’une série de faux documents fabriqués par des religieux hostiles à l’union des deux Couronnes. Au Portugal, un faux testament d’Alfonso Henrique circule, écrit par le frère Bernardo de Brito. L’œuvre El principe encubierto (1640), écrit par Luis Marinho de Azevedo, tente de prouver que le duc de Bragança est le roi caché. En 1655, le frère Manuel Homem, publie à Nantes, Résurrection du Portugal et mort fatale de Castille. Enfin, en 1643, apparaît Restauração de Portugal prodigiosa, du père jésuite João de Vasconcelos, sous le pseudonyme de Grégorio de Matos, dont les écrits sont marqués par un messianisme lié à la Restauration de 1640136. Ce sont des accents sébastianistes insufflés

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Les années 1584 et 1585, voient apparaître deux faux Sebastião, le roi de Penamacor, dont le nom est inconnu, et qui sera condamné aux galères et l’imposteur d’Ericeira, Mateus Alvares, qui sera pendu le 14 juin 1585. L’Espagne en voit apparaître un troisième, Gabriel de Espinosa, le « Pasteleiro de Madrigal », petite ville au sud de Valladolid. Un quatrième va alimenter la chronique européenne, il s’agit de Sebastião de Venise, un calabrais, Marco Tulio Catizon, qui surgit en 1598. Il revendique son identité royale et prétend avoir erré en Afrique après la bataille de Ksar el-Kébir.

Pour plus de détails, voir le chap. V, « A volta do encoberto : entre farsas e encantamentos », Jacqueline Hermann, op. cit., p. 249-303.

133 L’Allemand Johannes Gensfelisch, plus connu sous le nom de Gutenberg (1400-1468), est l’inventeur de l’imprimerie typographique moderne en Europe, considérée comme un événement majeur de la Renaissance.

134 Jacqueline Hermann, op. cit., p. 21-22.

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Du point de vue historique, le refus d’allégeance de la part du Portugal à l’Espagne est expliqué en ces termes par Yves Léonard :

[Le Portugal est] « un des États où le sentiment national semble encore manifester beaucoup de réticence à sacrifier partie de son indépendance au profit d’organismes supranationaux. Ce dernier caractère qui, dans le cadre clos et isolé de la péninsule Ibérique, s’est toujours traduit par un refus obstiné de toute fusion, voire de toute fédération, avec l’Espagne, permet peut-être de saisir la portée d’une question paradoxalement restée sans réponse. Depuis plus de sept siècles, le Portugal se pose à lui-même, de façon plus ou moins consciente, le problème de son origine et de son originalité. Tout l’oppose à l’Espagne, le fait est là. »

Albert-Alain Bourdon, Histoire du Portugal, avec un épilogue d’Yves Léonard sur le Portugal aujourd’hui, éditions Chandeigne, Paris, 2010, p. 7-8.

136 Ana Maria Binet, « Sébastianisme et Cinquième empire : rejet d’un mythe eschatologique dans la littérature portugaise », revue Eidôlon, n° 58, 2001, p. 83-99.

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par le clergé, liés à une certaine attente du roi disparu et qui seront utilisés pour mobiliser les troupes et inciter les esprits à l’insubordination137. Enfin, avec l’avènement de la Restauration s’opère une transformation dans le rapport entre souverain et sujet. En d’autres termes, le sentiment d’attachement du peuple vers son seigneur glisse vers un sentiment patriotique plus élargi pour le royaume et son défenseur.

Pour Jacqueline Hermann, dans son étude, No reino do desejado, la sacralité de la personne du roi est étroitement liée à celle du royaume, grâce à la bienveillance divine.

« La sacralité du monarque et de son corps était la certitude du caractère

transcendantal qui entoure tout le royaume. Refuser de perdre ce référentiel assume, dans le processus d’élaboration de la croyance sebastica, une forme singulière d’expression. Ainsi, avant d’être une pure volonté des oracles, la prophétie joue au Portugal le rôle d’un justificatif dans l’histoire construite autour des origines divines du royaume. La résistance à la domination castillane à travers un discours prophétique peut être comprise non pas comme une fugue de la réalité à travers le mythe, lecture qui lui confère un sens d’irrationalité, mais comme le retour glorieux à l’histoire même construite pendant la phase faste de l’expansion138 ».

Le discours sébastianiste s’attache donc à effacer la défaite de la bataille de Ksar el-Kébir et à annoncer toutes les victoires futures. Il continue à nier l’effacement du royaume portugais par la promesse d’un empire universel, car la destinée du roi dom Sebastião est liée désormais à l’établissement du « Quint-empire ». L’histoire du Portugal s’inscrit dans le contexte d’une Europe chrétienne qui voit l’apparition des états absolutistes, le développement du mercantilisme grâce aux grandes découvertes, dont l’expression religieuse s’inscrit dans la Réforme protestante et la Contre-réforme catholique avec les pères de la compagnie de Jésus, ses plus grands innovateurs et défenseurs. Cette Europe chrétienne vit un moment de transition, de renversement des valeurs et des concepts. Ce passage vers les Temps Modernes, marqué par l’inquiétude baroque permet au sentiment

137 Jean Subirats, op. cit., p. 74.

138 « A sacralidade do monarca e de seu corpo era a certeza do caráter transcendental que englobava todo o reino. A recusa da perda desse referencial assimiu, no processo de elaboração da crença sebástica, uma forma singular de expressão. Assim, antes de ser pura vontade dos oráculos, a profecia teve em Portugal uma justificação na história construída em torno das origens divinas do reino. A resistência à dominação castelhana através de um discurso profético talvez possa ser tomada não como fuga da realidade através do mito, leitura que só lhe confere um sentido de irracionalidade, mas como retorno à própria história gloriosa construída durante a fase áurea da expansão. »

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sébastianiste de s’insérer dans les nouvelles valeurs sociopolitiques tout en se réappropriant le mythe du roi caché. Enfin, la croyance sébastianiste augmente, se fortifie et prend de l’ampleur en raison des événements et de la prédication.

Les Trovas de Bandarra seront nouvellement interprétées et aussi attisées par les sermons véhéments des religieux. Parmi eux, il faut citer deux jésuites, qui entretiennent un état de résistance patriotique qui, vu la conjoncture politico-sociale, se cristallise en puissante force politique. Jean Subirats, dans une conférence faite à l’université de Strasbourg en mai 1961, affirme ceci : « Pour que les prophéties de Bandarra connaissent une telle fortune, il faut un refus collectif de la conjoncture historique et de ses répercussions sociales, aboutissant à un grand décollement du réel139 ». Désormais, le mouvement sébastianiste n’a pas seulement comme adeptes le petit peuple ou les gens issus de judaïsme, juifs et nouveaux chrétiens, mais une nouvelle classe, celle d’une noblesse nostalgique. C’est dans cette perspective que les Trovas de Bandarra connaissent de nouvelles versions et adaptations, de telle façon que la Restauration de 1640 semblera apporter la confirmation de ses prophéties.

Les prophéties qui nourrissent le sébastianisme, puisent aussi leur origine dans le joachimisme qui annonce un monde uni dans la foi du Christ. L’homme de lettres et diplomate João de Castro restera connu comme un des grands défenseurs du sébastianisme. C’est lui qui donnera une nouvelle interprétation aux Trovas de Bandarra, il rallumera les espoirs du peuple portugais en la croyance du retour du roi sauveur, tant « désiré ». Il va même prévoir l’heure et le jour de l’arrivée du roi caché. Il montre par là son mécontentement devant ce qui lui semble le châtiment que représente la vie dans un royaume gouverné par un héritier de la maison de Habsbourg. Désormais, dans la personne de João Castro, les deux versants du sébastianisme, mythe et histoire, se réconcilient dans l’attente du « désiré ». « Il est cet Empereur promis, dont on parle tellement dans les Ecritures, prophétisé depuis tant d’années […] l’aimé de Dieu, toujours le bienvenu et si désiré, notre roi dom Sebastião140 ».

139 Jean Soubirats, op. cit., p. 64.

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« Ele é aquele Imperador prometido, o tão falado nas Escrituras, o profetizado de tantos anos […] o tão mimoso de Deus, o sempre benvindo rei nosso tão desejado dom Sebastião encoberto. »

« Discvrso da uida do sempre bem vindo e apparecido rey dom Sebastiam » de João de Castro, apud Jacqueline Hermann, op. cit., p. 203.

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João de Castro a laissé 22 manuscrits, mais seulement deux ont été imprimés. Le premier, édité à Paris en 1602, fait apparaître pour la première fois la figure du roi caché, Discvrso da uida do sempre bem vindo e apparecido Rey dom Sebastiam. En 1603, il publie, Paraphrase et concordançia de algumas Prophecias de Bandarra, çapateiro de Trancoso. Dans cet ouvrage sont reproduites pour la première fois les Trovas de Bandarra. João de Castro interprète les prophéties de Bandarra et surtout, il les relie au roi caché, l’encoberto, dans la personne du roi dom Sebastião du Portugal. João de Castro personnifie dans la personne du roi disparu, le roi caché, donnant ainsi un nouvel élan à la croyance sébastianiste. Désormais, le roi caché tant attendu existe et il reviendra, car il est le roi dom Sebastião. Ce dernier roi de la maison d’Avis incarne dorénavant le héros guerrier, le croisé vaincu, le chevalier errant, le pèlerin indigent141. João de Castro réunit ainsi toutes les composantes nécessaires pour alimenter l’imagination et l’imagerie populaire dont les racines symboliques de l’appartenance à ce qui deviendra la nation portugaise, se trouvent préfigurées depuis la bataille d’Ourique et les temps glorieux de la monarchie des grands rois de la dynastie de Bourgogne et d’Avis142.

Les caractéristiques du sébastianisme de João de Castro demeurent après la Restauration pour s’établir définitivement, car l’interprétation des Trovas de Bandarra leur donne un nouvel essor prophétique et le Messie annoncé par le Savetier de Trancoso est désormais incarné par le roi désiré, dom Sebastião. L’œuvre de João de Castro, Paraphrase, prend de l’ampleur étant donné que les Strophes de Bandarra sont pour la première fois,

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