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A. Le mythe du marin naufragé dans la littérature

2. Robinson Crusoé

Le héros de roman qui représente le mieux le cas du marin confronté à la solitude est bien sûr Robinson Crusoé. On notera d’entrée de jeu que les différents Robinson de la littérature classique échappent tous à la mort. Ils semblent avoir trouvé dans les entrailles de l’île sur laquelle ils vivent un contenant psychique leur permettant de supporter l’absence de l’autre.

a) Selkirk, l’ancêtre de Robinson Crusoé

Le personnage historique qui a servi de modèle à Robinson Crusoé est Alexandre Selkirk56. Il est né en 1680 à Nether Largo, dans l’est de l’Écosse. C’est le septième et dernier fils d’une famille de tanneurs presbytériens. Son père espérait de lui qu’il reprenne l’activité familiale, mais il choisit de quitter sa famille à l’âge de quinze ans, en 1695, pour échapper à des poursuites judiciaires, au grand soulagement de sa mère, qui voulait se débarrasser de lui. Le jeune adolescent est accusé de conduite inconvenante dans une église. Ne supportant pas qu’on le juge et qu’on le méprise, il prend la fuite et s’engage comme marin, au lieu de se présenter devant le conseil de discipline des anciens de la paroisse. A son retour, en

56 D. Souhami : Les folles aventures du vrai Robinson Crusoé, Paris, Autrement, 2006.

novembre 1701, un remue-ménage dans la maison de son père suscite une plainte de la part de ses voisins. Selkirk est devenu très violent ; il a assommé son frère Andrew à coups de gourdin, frappé son père qui voulait l’empêcher d’aller chercher un pistolet pour le tuer, défié en combat singulier un autre de ses frères, et battu à coups de poing sa mère qui tentait de s’interposer. Avec son père, sa mère, son frère Andrew, son frère aîné John et Margaret Bell, la femme de ce dernier, il est convoqué de nouveau devant le conseil de discipline des anciens. Il fuit encore Nether Largo. Il a vingt-trois ans. Il veut retourner en mer, retrouver ses dangers et ses satisfactions. Pour cela, il rejoint une expédition corsaire anglaise à destination de l’océan Pacifique, qui doit quitter Kinsale le 11 septembre 1703. Cette expédition est formée de deux navires : le Saint-Georges, qui a comme capitaine William Dampier, un être colérique, tyrannique, menant ses hommes d’une main de fer, et le Cinque-Ports, sur lequel embarque Selkirk comme maître d’équipage, sous les ordres du capitaine Pickering. Mais ce dernier décède, et Dampier confirme la nomination de Thomas Stradling comme capitaine remplaçant.

Le Cinque-Ports atteint l’archipel de Juan Fernandez, au large de Valparaiso, le 4 février 1704. De l’équipage de quatre-vingt-dix personnes, seuls restent quarante-deux hommes, affamés et malades. Ils séjournent quatre semaines sur l’île, qui est un lieu assez déprimant et peu hospitalier. Dans sa hâte de partir,

l’équipage du Cinque-Ports abandonne du matériel, ainsi que huit hommes qui chassaient des chèvres dans la montagne. Alors qu’ils font route vers la côte du Pérou, une mutinerie gagne les marins. Ils nourrissent un ressentiment accru contre Dampier, en qui ils n’ont plus confiance. Stradling se sent lui aussi trahi, et s’en prend à lui. Il lui dit qu’il ne continuera pas le voyage de conserve avec lui. Il préfère poursuivre seul sur le Cinque-Ports, bien que ce dernier ne puisse s’en tirer sans la protection du Saint-Georges. Il se querelle aussi avec Selkirk.

Au mois de septembre 1704, le Cinque-Ports est remorqué à la rame jusqu’à la grande baie de Juan Fernandez, pour approvisionner le bateau en eau et en bois, avant de repartir vers l’Angleterre. Les relations entre Selkirk et Stradling deviennent franchement hostiles. Le bateau ayant subi de gros dommages dans les batailles, Selkirk veut le réparer avant de franchir le cap Horn. Il recommande à Stradling de ne pas reprendre la mer, mais au début du mois d’octobre, ce dernier donne l’ordre de lever l’ancre. Face au refus obstiné du capitaine d’écouter ses conseils, Selkirk, sous le coup de la colère, refuse de poursuivre la route et exige qu’on le laisse sur l’île Mas-a-Tierra, à quelques quatre cents milles des côtes chiliennes. Stradling, trop heureux de se débarrasser d’un marin mêlé à toutes les tentatives de mutinerie depuis le départ, accepte. Selkirk n’a pas d’ami à bord, et personne ne choisit de rester avec lui. Même si ses conseils étaient avisés, car le bateau

coulera par la suite, noyant la majeure partie de l’équipage, il ne souhaitait pas en réalité que la dispute prenne une telle tournure, et qu’il soit abandonné sur cette île. Une fois sur la plage, il demande à Stradling de lui pardonner, de le laisser regagner le bateau. Il promet qu’il sera plus discipliné, mais le capitaine lui répond d’aller en enfer, pour que cela serve de leçon aux autres hommes. Selkirk tente de remonter à bord du navire, mais il est repoussé. Lorsqu’il voit le vaisseau disparaître, tout espoir l’abandonne. La mer, qui avait suscité tant de rêves de liberté et de fortune, l’oppresse soudain. Sans ses compagnons, l’île lui paraît n’être qu’une prison, et lui, un marin sans navire, un homme sans voix, sans parole…

Selkirk est à présent un homme seul. Il en vient progressivement à haïr cette île. Il n’a qu’une envie, la quitter, car elle signifie pour lui la mort de toute ambition, et le met à l’épreuve jusqu’aux limites du supportable. Peu à peu, il devient triste et apathique. Il passe son temps à errer seul sur le rivage, à boire du rhum, à mâcher du tabac, et à observer la mer. L’alcool lui procure l’oubli. Au début, il ne mange que lorsque la faim le tenaille, ne va se coucher que lorsqu’il n’en peut plus de guetter. Il boit quand il a soif, urine là où il se tient. Il s’amaigrit et s’affaiblit. Il perd la notion du temps qui s’écoule.

Selkirk souhaite mourir, pour être délivré de son sort. L’idée qui hante son esprit et qui le rend parfois mélancolique est qu’après sa mort, puisqu’il n’y aura personne pour enterrer ses restes ou pour

nourrir les chats, son corps sera dévoré par ces mêmes animaux. Il se console en se disant que, si aucun navire ne vient, son arme posée sur sa tempe lui permettra de mettre fin à ses jours. Il songe à se noyer, à nager vers l’horizon jusqu’à épuisement. Il est certain que l’île finira par le tuer, réglera son sort. Mais il survit.

Pour dissiper l’ennui, il choisit de s’activer : il construit une hutte, forge des outils, fabrique des ustensiles, tanne des peaux… Il a en sa possession une bible, et prend l’habitude de faire ses prières à heures fixes et à des endroits précis, à voix haute, pour ne pas perdre la faculté de parole, et pour s’insuffler davantage d’énergie.

Il s’agit surtout pour lui de ne pas oublier un vocabulaire qu’il n’a pas l’occasion d’utiliser. Ses lamentations finissent par l’apaiser un peu.

Une nouvelle expédition, formée en 1708, le secourt le 1er janvier 1710. Elle est composée de deux frégates : le Duke, qui a pour capitaine Woodes Rogers, et la Dutchess, qui a pour capitaine Stephen Courtney. Edward Cooke est son second et William Dampier son pilote.

Lorsque Selkirk aperçoit ces navires, il lui semble que rien ne s’est passé depuis son abandon. Il est demeuré ignoré du monde, comme une ombre. Lorsque l’équipage de Rogers aborde l’île, il découvre un personnage hirsute, sauvage, qui a perdu l’usage de la parole. Apprenant qu’il y a Stradling sur le Duke, Selkirk refuse d’embarquer, avant de se raviser. Sur les conseils de Dampier, on le

nomme assistant du second sur le Duke. Puis il est nommé maître du Batchelor, un navire capturé, et reprend les raids le long des côtes chiliennes et péruviennes. C’est ainsi que commence le long périple du retour. L’expédition rentre à Londres en octobre 1711.

Aussitôt débarqués, Rogers et Cooke, qui ont tenu un journal pendant le voyage, s’empressent de rédiger un récit relatant les aventures de Selkirk. Rogers sollicite l’aide de Richard Steele, qui interroge personnellement l’ancien naufragé. C’est le récit de Cooke qui paraît en premier. Un an plus tard, Steele, qui est en manque d’argent, édite dans son journal L’Englishman ses conversations avec Selkirk. Daniel Defoe, qui fréquente le milieu où gravite ce dernier, met la main sur son histoire. Il publie anonymement, le 25 avril 1719, un roman intitulé Robinson Crusoé, qui est considéré aujourd’hui comme le premier roman de langue anglaise. Celui-ci sera traduit en français en 1920.

Revenons maintenant à l’histoire de Selkirk. De retour en Angleterre, il doit se battre pour obtenir sa part du butin. Une fois son argent empoché, il est riche, mais l’inactivité et la boisson lui attirent des ennuis. Le 23 septembre 1713, la paroisse de Saint Stephens à Bristol l’accuse de voies de faits légères : il a passé à tabac un marin. Tout comme lors de ses premiers accrochages avec la loi, il ne présente pas aux audiences et disparaît dans l’obscurité de Londres pendant plusieurs mois, avant de revenir à Nether Largo. Sur place, c’est le retour de l’enfant prodigue. Il rencontre

une femme naïve et docile qui supporte ses ivresses, ses changements d’humeur, et ses accès de violence. Il se met en ménage, et achète une petite propriété. Mais il est plus étranger que jamais à la vie de famille. Il ne supporte pas le confinement et la promiscuité qu’elle impose, les conversations futiles, les repas pris à table… Il ne prend aucune part au train-train quotidien. Il est taciturne, et fond parfois en larmes. Il se bâtit une sorte de caverne sur le terrain de sa maison où, pendant la journée, observant la mer, il retrouve une certaine quiétude. La mer et la force des marées sont pour lui bien plus concrètes qu’une femme, et l’appel de son île retentit en lui. Il s’achète un bateau, quitte Largo en hâte, et n’y reviendra jamais.

Ressentant encore l’appel de la mer, il s’enrôle dans la Marine pour naviguer à bord du HMS Enterprise comme second.

C’est un navire marchand qui fait la navette entre les ports de la Manche, et qui n’effectue pas de mission lointaine.

Puis il s’engage à Plymouth sur le HMS Weymouth, un navire de guerre en partance pour la Guinée, où il est sensé assurer la protection des navires marchands contre les pirates. En attendant l’armement du vaisseau, il fréquente un pub, où il fait la connaissance de la tenancière, qu’il épouse le 12 décembre 1720.

Elle ne présente pas plus d’intérêt pour lui que sa précédente compagne. L’expédition est un fiasco et, en 1721, à l’âge de

quarante et un ans, Selkirk périt sur ce bâtiment, au large des côtes ouest de l’Afrique.

Nous voyons dans ce récit comment un marin tel que Selkirk, abandonné sur une île déserte, devient un être banni de la civilisation, sans parole, un homme muet qui sombre dans la dépression. En proie à la mélancolie, il ne mange plus, ne dort plus, ne montre plus ni envie, ni désir. Il se réfugie dans l’alcool, et se bat contre des idées suicidaires. Après son retour en Angleterre, la dépression ne le quitte pas. Il est dans l’incapacité d’investir une nouvelle relation amoureuse. Cet être bagarreur, querelleur, sans morale, impulsif, rebelle à toute autorité, n’a pas résisté à l’épreuve de la solitude, qui l’a marqué au fer vif jusqu’à la fin de ses jours.

b) Le Robinson de Daniel Defoe

Daniel Defoe s’est inspiré de la vie d’Alexandre Selkirk pour créer Robinson Crusoé57. L’histoire commence en Angleterre, en 1651. Le héros de Defoe quitte York pour naviguer, contre la volonté de ses parents, qui voulaient qu’il devienne avocat.

Robinson s’interroge sur la motivation interne qui le pousse à prendre la mer. Selon lui, ce sont plutôt les hommes orgueilleux, souhaitant se démarquer des autres par leur courage, leur bravoure, leurs actions hors du commun, qui recherchent l’aventure. Il se dit

57 D. Defoe : Robinson Crusoé, Paris, Gallimard, 2001.

motivé par une pulsion irrésistible, qui l’engage aux voyages lointains. Son esprit s’est rempli alors qu’il était encore très jeune de pensées vagabondes, et son seul désir est d’aller en mer. Il semble qu’il s’agisse pour lui d’une fatalité. Robinson a toujours été tellement préoccupé par cette volonté irrésistible de courir le monde qu’il n’a jamais eu d’autre idée en tête, dépensant toute son énergie pour atteindre ce but.

D’un autre côté, le fait qu’il entretienne une relation conflictuelle avec ses parents le pousse à fuir la maison familiale, pour laquelle il éprouve une répugnance invincible. Son père cherche à lui imposer un autre avenir que celui qu’il a choisi, ne consentant pas à ce qu’il devienne marin. Robinson prend le parti de se rebeller contre l’autorité paternelle. Lorsqu’il fait part à son père de son envie de partir, ce dernier lui répond qu’il peut le faire, s’il veut absolument « se perdre ». À noter la dimension prémonitoire que peut revêtir cette phrase, si l’on donne au verbe

« se perdre » sa signification première. Ainsi, si le désir de voyage de Robinson peut être attribué à un attrait particulièrement développé pour l’aventure, l’envie de s’éloigner peut aussi être comprise comme une fuite d’un milieu familial étouffant.

À plusieurs reprises, Robinson est tenté par l’idée de céder aux exigences de ses parents, mais n’arrive pas à s’y soumettre. Il essaie de ne plus penser aux voyages, et tente de s’établir chez lui selon le souhait de son père. Hélas, au bout de quelques jours,

toutes ses intentions s’évanouissent. Il est confronté à un combat intérieur, ne sachant s’il doit retourner chez lui ou partir en mer. Son mauvais destin l’entraîne malgré lui, et, malgré ce que lui dicte sa raison, il s’en va.

Defoe introduit ici la notion de fatalité dans la destinée d’un individu. Robinson reconnaît que le voyage qu’il envisage est la chose la plus absurde qu’un homme dans sa situation puisse faire.

Cependant, il est né pour être son propre destructeur, et il lui est impossible de résister à cette offre, comme il lui a été impossible de maîtriser ses premières idées vagabondes, en dépit des conseils avisés de son père. Ce désir irrépressible de détruire ou d’abandonner ce que l’on a déjà, comme pour mettre le sort à défi, peut être envisagé sous l’angle de la pulsion de mort.

Robinson décide donc de prendre la mer. Le navire sur lequel il a choisi d’embarquer est arraisonné par des pirates. Il ne doit son salut qu’à un bateau portugais passant au large qui va le mener jusqu’au Brésil, où il devient le propriétaire d’une plantation.

En 1659, alors qu’il n’a que vingt-huit ans, il décide de tout quitter à nouveau, et se joint à une expédition maritime qui part à la recherche d’esclaves africains. Suite à une tempête, Robinson fait naufrage sur une île déserte. Tous ses compagnons sont morts. Dès le départ, il se sent prisonnier de cette île, dont il n’a pas la possibilité de s’enfuir. Sa situation lui apparaît sous un jour affreux.

Il a de fortes raisons de croire qu’il va terminer sa vie dans ce lieu

de désolation, et ces réflexions le rendent profondément triste. Il pleure en abondance, ne voit plus au-devant de lui que la mort. Il est affaibli et se sent abattu, accablé, abandonné. Le cœur navré de sa misérable condition, il rebaptise son île « Désespoir ».

Robinson pense que la cause de sa mélancolie est principalement la solitude :

Je suis jeté sur une île horrible et désolée, sans aucun espoir de délivrance. Je suis écarté et séparé, en quelque sorte, du monde entier pour être misérable. Je suis retranché du nombre des hommes ; je suis un solitaire, un banni de la société humaine58.

La vie silencieuse à laquelle il est condamné lui pèse. Seul, entouré par le vaste océan, il vit retiré de l’humanité. Il n’a personne à qui parler, ou qui puisse le consoler. Il ne peut compter sur aucune aide, ni assistance, ni conseil, ni réconfort.

Après avoir réussi à récupérer des armes et des outils dans l’épave du navire, il se bâtit une habitation sur l’île, et réapprend à vivre dans un autre environnement. Il y établit son « chez-soi ». Il construit de nombreuses formes circulaires sur l’île (sa maison, son sanctuaire, son enclos…), comme autant de contenants psychiques de substitution59. Dans le même temps, il tente de se divertir du

58 D. Defoe : Robinson Crusoé, p. 142.

59 M. Gliserman : « Robinson Crusoé : the vicissitudes of greed- cannibalism and capitalism », American Imago, 1990, 47, p. 197-231.

mieux possible, et n’épargne pas sa peine pour accomplir ce qui semble nécessaire à son bien-être.

Les animaux de Robinson (un perroquet, un chien et deux chats) lui tiennent compagnie. Il les appelle sa « petite famille ». Le fait de se sentir dans un univers connu, familier, constitue pour lui un facteur de diminution de son angoisse. Chaque fois qu’il laisse son habitation, en particulier lorsqu’il s’absente plusieurs jours, il n’a qu’une hâte : celle de rentrer. Une fois de retour chez lui, il ne sait pas comment exprimer sa satisfaction de retrouver sa demeure et de coucher de nouveau dans son hamac. Il réalise qu’il s’est forgé un environnement relativement confortable, et se résout à ne plus s’en éloigner pour un temps conséquent, tant que son sort le retiendra sur l’île.

Robinson parvient à se convaincre que son destin n’est pas le pire qui puisse exister, et se tourne vers la religion. En compagnie de Dieu, il ne se sent plus seul. Il institue une sorte de thérapie au cours de laquelle il s’auto-persuade que son sort est enviable et qu’il est plus heureux que s’il vivait en société. Il se remémore les instants de désespoir passés, quand son angoisse était telle que son cœur défaillait dans sa poitrine à la seule pensée d’être sur cette île, et qu’il avait l’impression d’être un prisonnier sans rançon. Ces souvenirs, à chaque fois qu’ils l’assaillent, le font pleurer comme un enfant. Quand ils le surprennent pendant son travail, il s’assoit et reste les yeux fichés en terre, à soupirer durant une heure ou deux.

Ce qui manque le plus à Robinson est, au bout du compte, la compagnie des hommes. Seul au monde, il se languit de ne pouvoir parler à l’un de ses semblables, et regrette amèrement qu’aucun être n’ait pu être sauvé du navire, que personne n’ait pu en réchapper, afin qu’il puisse avoir un compagnon, un autre homme, pour parler et pour vivre avec lui. La présence d’un seul individu lui aurait suffi pour ne plus se sentir seul ; il aurait eu ainsi quelqu’un à qui parler.

Ce qui manque le plus à Robinson est, au bout du compte, la compagnie des hommes. Seul au monde, il se languit de ne pouvoir parler à l’un de ses semblables, et regrette amèrement qu’aucun être n’ait pu être sauvé du navire, que personne n’ait pu en réchapper, afin qu’il puisse avoir un compagnon, un autre homme, pour parler et pour vivre avec lui. La présence d’un seul individu lui aurait suffi pour ne plus se sentir seul ; il aurait eu ainsi quelqu’un à qui parler.