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Reconstitution des variations saisonnières de paléotempérature en période glaciaire

3.2 - O RIGINE , EVOLUTION ET ECOLOGIE DU GENRE B ISON

3.2.1 - Phylogénie des Bovinae

Les bisons appartiennent à la classe des mammifères (Mammalia). Les travaux de phylogénie basés sur la morphologie (e.g. Shoshani & McKenna, 1998 ; Liu et al., 2001 ; Novacek, 2001) placent les bisons au sein du groupe des ongulés (Ungulata) et plus précisément de l’ordre des Artiodactyla, caractérisés notamment par un nombre paire d’orteils ainsi qu’un astragale en forme de double poulie permettant une grande flexibilité du pied. Cependant, cette classification a été perturbée par le développement de phylogénies moléculaires incluant de nombreux taxons. Des travaux récents (e.g. Murphy et al., 2001a ; 2001b ; Lin et al., 2002 ; Amrine-Madsen et al., 2003 ; Waddell & Shelley, 2003 ; Hudelot et

al., 2003 ; Nikaido et al., 2003 ; Reyes et al., 2004 ; Springer et al., 2004) placent les bisons au sein du groupe des Laurasiatheria et de l’ordre des Cetartiodactyla, ordre qui regroupe les artiodactyles des phylogénies basées sur la morphologie, les cétacés et les hippopotames. Parmi les Cetartiodactyla, les bisons sont classés au sein du sous-ordre Ruminantia qui regroupe les mammifères ruminants (antilopes, girafes, hippotragues, cervidés, caprins, bovins, ovins…), de la famille des Bovidae et de la sous-famille des Bovinae. Parmi les Bovinae, on trouve également les bovins domestique, les buffles, le zébu, le yack, le banteng, le gaur, l’antilope nilgaut ou l’éland. La définition d’espèces et de genres au sein des Bovinae pose de nombreux problèmes et est sujette à débats entre spécialistes, notamment à cause d’interfécondités entre « espèces ». Selon certains (e.g.

sous-genre du genre Bos. Le débat de l’assignation des bisons au genre Bos ou au genre

Bison continue entre les partisans d’une approche morphologique ou phénétique et les partisans d’une approche phylogénétique (Winston, 1999 ; Freeman & Herron, 2001).

Il existe à l’heure actuelle deux espèces de bisons dans le monde : le bison d’Amérique du Nord (Bison bison) et le bison d’Europe (Bison bonasus) également appelé wisent ou Īubr. L’espèce Bison bison est divisée en deux sous-espèces : (1) Bison bison bison (Linnaeus, 1758), le bison des plaines ; et (2) Bison bison athabascae (Rhoads, 1897), le bison des forêts. Dans le cas de l’espèce européenne, trois sous-espèces ont été décrites : (1) Bison

bonasus bonasus (Linnaeus, 1758), le wisent des plaines, qui subsiste actuellement dans la forêt de BiałowieĪa, à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie ; (2) Bison bonasus

hungarorum (Kretzoi, 1946), le wisent des Carpathes ; et (3) Bison bonasus caucasicus (Turkin & Satunin, 1904), le wisent du Caucase. Ces deux dernières sous-espèces sont considérées comme éteintes. Là encore, la définition des espèces et sous-espèces fait débat. Pour certains auteurs (e.g. Corbet, 1978 ; Corbet & Hill, 1991), Bison bison et Bison

bonasus pourraient appartenir à la même espèce, et en seraient donc deux sous-espèces. Cependant, la plupart des travaux conservent la classification présentée ci-dessus avec un genre Bison distinct du genre Bos, deux espèces de bisons et cinq sous-espèces (e.g. McDonald, 1981 ; Meagher, 1986 ; Van Zyll de Jong, 1986). Les études de phylogénie moléculaire, qu’elles soient basées sur l’ADN nucléaire et ribosomial (e.g. Wall et al., 1992 ; Pitra et al., 1997) ou sur l’ADN mitochondrial (e.g. Miyamoto et al., 1989 ; 1993 ; Buntjer et

al., 2002 ; Hassanin & Ropiquet, 2004 ; Agnarsson & May-Collado, 2008) montrent que si l’on distingue les genres Bos et Bison, le genre Bos forme alors un groupe paraphylétique. Ces données plaident en faveur d’une intégration du genre Bison au sein du genre Bos, avec deux nouvelles espèces : Bos bison et Bos bonasus, même si à l’heure actuelle, pour des raisons notamment historiques, le genre Bison est conservé. Dans la plupart des phylogénies des Bovinae proposées à ce jour, les deux espèces de bisons forment un groupe monophylétique avec comme espèce la plus proche, le Yak (Bos grunniens). Ce résultat émerge de phylogénies basées sur les caractères morphologiques (e.g. Coolidge, 1940 ; Groves, 1981 ; Geraads, 1992) (Fig. 3.7a-c) mais également dans celles basées sur l’analyse de l’ADN nucléaire (e.g. Wall et al., 1992 ; Pitra et al., 1997 ; Buntjer, 1997 ; Buntjer et al., 2002 ; Verkaar et al., 2004) (Fig. 3.7d)). Ces arbres phylogénétiques ont la particularité de présenter une bonne correspondance entre les distances génétiques et les distances géographiques (Lenstra & Bradley, 1999). Cependant, plusieurs études sur des séquences d’ADN mitochondrial ont montré un schéma bien différent, le bison d’Amérique du Nord étant rapproché du Yak alors que le bison d’Europe est rapproché du bétail domestique (Janecek et al., 1996 ; Verkaar et al., 2004 ; Hassanin &

FIGURE 3.7 – Phylogénie morphologique (a-c) et moléculaire (d-f) des Bovinae.

Ropiquet, 2004 ; Agnarsson & May-Collado, 2008) (Fig. 3.7e-f). Pour expliquer ces différences, Buntjer (1997) suggère une conservation d’un polymorphisme ancestral et des évènements de recombinaison qui perturberaient les reconstitutions phylogénétiques. Verkaar et al. (2004) ont analysé des séquences de gènes mitochondriaux et de gènes situés sur le chromosome Y afin d’étudier respectivement la lignée femelle et la lignée mâle.

bisons séparées au sein du genre Bos, alors que les données sur le chromosome Y font du genre Bison un groupe monophylétique avec le Yak comme espèce la plus proche (Fig. 3.7f). Ces travaux leur ont permis de distinguer quatre lignées femelles menant à différentes espèces : (1) bétail domestique (Bos taurus) et zébu (Bos taurus indicus) ; (2) wisent (Bison

bonasus) ; (3) bison d’Amérique (Bison bison) et yak (Bos grunniens) ; et (4) banteng (Bos

javanicus), gaur (Bos gaurus) et gayal (Bos frontalis). Ces lignées, dans le cas des bisons, sont en désaccord avec les données sur l’ADN nucléaire, ce qui indique une origine plus complexe des espèces de bisons, avec notamment, possibilité d’intervention de processus d’hybridation ou de « lineage sorting ». Il semble donc préférable d’utiliser la phylogénie basée sur l’ADN nucléaire qui fait des deux espèces de bisons un groupe monophylétique. De plus, d’après Ritz et al. (2000), la divergence du genre Bison au sein du genre Bos serait datée entre 1,23 Ma et 460 ka, alors que les données paléontologiques montrent un âge nettement plus ancien, ce qui suggère la persistance d’hybridations.

3.2.2 - Ecologie du bison d’Europe : Bison bonasus

Le bison d’Europe (Fig. 3.8) mesure approximativement 3 mètres de long et entre 1,8 et 2,0 mètres au garrot. Il peut peser entre 300 et 900 kilogrammes et sa durée de vie est d’environ une vingtaine d’années à l’état sauvage (e.g. Grzimek, 1975 ; KrasiĔski, 1978). Il vit actuellement dans un habitat composé de forêts et de prairies, se nourrit principalement de feuilles, de brindilles et d’écorce d’arbres, et consomme jusqu’à environ 45 litres d’eau par jour (Riccuiti, 1973). Il se distingue du bison américain par un pelage plus court au niveau du cou, de la tête et de la partie antérieure du corps, par des cornes et une queue plus longues, ainsi que par une couleur plus claire. Le wisent est un animal grégaire qui vit en général en petits groupes de 8 à 13 individus en moyenne. Ces groupes ne correspondent pas à des structures familiales, et sont donc très malléables, les échanges d’individus entre groupes étant fréquents. Il existe également des groupes de bison d’Europe composés uniquement de mâles, mais ces groupes sont en général de très petite taille. De plus, la notion de territorialité est peu marquée chez ces animaux. En effet, le wisent ne défend pas son territoire, et les aires des différents groupes se superposent largement. Lors de la période du rut, d’août à octobre, les mâles combattent en entremêlant leurs cornes, comme les taureaux, et non par des chocs frontaux comme chez le bison d’Amérique. La période de gestation dure 264 jours en moyenne et les femelles donnent naissance à un seul petit à la fois à la fin du printemps (mai-juin) (KrasiĔski & RaczyĔski, 1967). Le veau peut courir au bout de trois heures, et est sevré entre le 7ème et le 12ème mois (Gadbury et al., 2000). La croissance dure environ 6 ans.

FIGURE 3.8 – Bison bonasus et localisation des principales populations réintroduites (d’après IUCN).

Historiquement, l’aire de répartition du wisent recouvrait une grande partie de l’Europe occidentale et centrale, depuis l’Angleterre et la France jusqu’en Russie, et depuis la Suède jusqu’à la Volga et le Caucase. L’expansion des populations humaines a entrainé le déclin des populations de Bison bonasus. Il a pratiquement disparu de Gaule au VIIIème siècle, du nord de la Suède au XIème siècle et d’Angleterre au XIIème siècle. En France, les derniers individus qui subsistaient dans les Ardennes et les Alpes s’éteignirent au cours du XVème siècle. Le dernier spécimen de wisent des Carpathes a été tué en 1790. Les populations de wisent ont décliné continuellement jusqu’à la Première Guerre Mondiale, pendant laquelle les troupes allemandes ont pratiquement totalement exterminé les derniers spécimens de la forêt de BiałowieĪa en Pologne. Le dernier bison d’Europe sauvage a été abattu en Pologne en 1919, et l’espèce n’a survécu qu’en captivité jusqu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Depuis 1951, plusieurs programmes ont été lancés pour réintroduire le bison européen en Europe de l’Est, notamment dans la forêt de BiałowieĪa en Pologne, en Biélorussie, dans la réserve naturelle de Prioksko-Terrasny en Russie et dans le Caucase (Fig. 3.8). A l’heure actuelle, on estime la population à environ 3 000 individus vivant en Pologne, Lituanie, Biélorussie, Ukraine, Roumanie, Russie, Slovaquie, Lettonie, Kirghizistan et Moldavie. Des projets de réintroduction sont également à l’étude en Allemagne et aux Pays-Bas. Tous ces animaux proviennent de seulement deux lignées. Certains troupeaux descendent d’un groupe de sept Bison bonasus bonasus, alors que les autres troupeaux descendent d’un groupe de douze autres animaux dont peut-être un spécimen de Bison bonasus caucasicus. La très faible diversité génétique causée par la quasi-extinction de l’espèce nécessite une forte surveillance des troupeaux réintroduits

Union for Conservation of Nature) comme espèce « vulnérable ». De plus, une partie des animaux réintroduits ne sont pas des bisons d’Europe au sens strict. En effet, différentes tentatives d’hybridation ont été réalisées après la Seconde Guerre Mondiale. Ainsi, une partie des bisons du Caucase occidental sont en réalité des hybrides de Bison bonasus et de Bison bison (KrasiĔski, 1978 ; Pucek, 1984 ; 1986 ; 1991), alors qu’une partie des bisons de la forêt de BiałowieĪa sont des hybrides entre Bison bonasus et du bétail, ces hybrides étant également appelés ĪubroĔ (Ward et al., 1999).

3.2.3 - Ecologie du bison d’Amérique du Nord : Bison bison

Le bison d’Amérique du Nord mesure entre 2,1 et 3,5 mètres de long, pour une hauteur au garrot comprise entre 1,7 et 1,9 mètres et un poids allant de 400 kilogrammes jusqu’à une tonne (Fig. 3.9). Son pelage sur la partie antérieure du corps est plus long que chez le bison d’Europe alors que celui de la queue est plus court. De plus, ses cornes sont plus courtes et moins courbées. Son milieu de vie correspond généralement à un habitat de type prairie et les bisons nord-américains se nourrissent principalement d’herbe et de carex. L’accouplement a lieu en août et septembre, et la période de rut donne lieu à des combats entre mâles essentiellement à base de charges et de chocs frontaux. La gestation dure en moyenne 285 jours, et la femelle donne naissance à un unique petit. Le sevrage a lieu avant le 12ème mois et les jeunes bisons sont matures à partir de trois ans. Comme chez le bison d’Europe, les principales menaces pour le bison d’Amérique, si l’on exclut l’homme, sont les loups et les ours, notamment le grizzly, qui cependant s’attaquent rarement aux adultes, mais plutôt aux jeunes et aux individus âgés ou blessés.

FIGURE 3.9 – Bison bison et localisation des principales populations (d’après IUCN).

L’aire de répartition géographique de Bison bison s’étendait, avant la colonisation de l’Amérique du Nord par les Européens, du Nord du Canada (Great Slave Lake) jusqu’au Mexique en passant par la quasi-totalité du territoire des Etats-Unis (Fig. 3.9). La population de bisons avant la colonisation est estimée à environ cinquante millions de têtes. Avant le

XIXème siècle, les bisons se réunissaient en gigantesques troupeaux pouvant atteindre des milliers ou des dizaines de milliers d’individus lors de grandes migrations, sur plusieurs centaines de kilomètres de distance, en général en direction du sud, à la recherche de meilleures pâtures pour l’hiver. L’étude des pistes laissées par ces troupeaux gigantesques de bisons a permis de mettre en évidence une direction préférentielle vers le Sud, même si certaines pistes sont orientées Est-Ouest. Cependant, au cours du XIXème siècle, les bisons ont été massacrés en Amérique du Nord, notamment pour affaiblir les populations indiennes et les cantonner dans leurs réserves, ou pour les commerces des peaux et des langues, ou encore pour faciliter les cultures et l’élevage de leurs troupeaux par les fermiers en éliminant la compétition. En 1890, la population de bisons des plaines était réduite à quelques centaines d’animaux environ. Au cours du XXème siècle, des efforts privés et gouvernementaux ont permis de rétablir en partie ces populations, et aujourd’hui, on estime leur nombre à environ 250 000-350 000 individus. Cependant, la plupart de ces animaux proviennent de troupeaux élevés en captivité et réintroduits. Seul le troupeau de Yellowstone provient d’animaux ayant toujours vécu à l’état sauvage. A l’heure actuelle, les mâles vivent isolés ou alors en petits groupes comme chez Bison bonasus, et ne rejoignent les groupes de femelles que durant la période de reproduction. Les groupes de femelles atteignent en général 50-60 individus, d’après une étude de Lott (1974) sur les populations du Montana (USA).

Comme pour les populations de Bison bonasus, le génome de la plupart des groupes de Bison bison a été pollué par des croisements et des hybridations avec du bétail domestique (Polzhien et al., 1995 ; Ward et al., 1999 ; Halbert et al., 2005). A l’heure actuel, des études génétiques ont montré qu’il ne subsiste que quatre groupes d’animaux non contaminés par des croisements, dans le Yellowstone National Park (Wyoming, Montana, Idaho, USA), dans les Henry Mountains (Utah, USA), dans le Wind Cave National Park (South Dakota, USA) et sur Elk Island (Alberta, Canada), mais malheureusement, trois d’entre eux souffrent de la brucellose. Seulement 12 000 à 15 000 bisons ne présenteraient aucun gène de bétail d’après certains travaux sur l’ADN mitochondrial, mais ce type d’étude ne concernant que la lignée femelle, il est possible que ce nombre soit encore plus faible. De même, le génome de la sous-espèce Bison bison athabascae a été contaminé lors de l’introduction de nombreux individus de Bison bison bison dans l’ouest du Canada. A l’heure actuelle, seul un groupe de quelques centaines de bisons des forêts découvert en Alaska en 1957 semble relativement préservé.

3.2.4 - Position phylogénétique et paléoécologie du bison des steppes : Bison priscus

Le genre Bison comprend, en plus des deux espèces actuelles, douze espèces fossiles, aujourd’hui éteintes (Geraads, 1992 ; McKenna & Bell, 1997 ; Nowak, 1999 ; Lott, 2002) : (1) Bison priscus (Bojanus, 1827) qui a peuplé les steppes d’Europe, d’Asie et d’Amérique du Nord au cours du Pléistocène ; (2) Bison latifrons (Harlan, 1825) du Pléistocène d’Amérique du Nord ; (3) Bison [bison] antiquus (Leidy, 1852) d’Amérique du Nord, entre 22 000 et 10 000 ka ; (4) Bison [bison] occidentalis du Pléistocène d’Amérique du Nord également et qui s’éteint vers 5 000 ka ; (5) Bison menneri (Sher, 1997) du Pléistocène d’Untermassfeld en Allemagne ; (6) Bison palaeosinensis (Teilhard & Piveteau, 1930) de Chine ; (7) Bison shoetensacki (Freudenberg, 1914) d’Europe ; (8) Bison

sivalensis (Falconer, 1878) d’Inde et du Pakistan ; (9) Bison tamanensis (Vereshchagin, 1959) de Russie ; (10) Bison voigtstedtensis (Fisher, 1965) d’Europe de l’Ouest ; (11) Bison

alaskensis (Rhoads, 1897) ; (12) Bison crassicornis (Richardson, 1854) d’Amérique du Nord. Les distinctions entre les différentes espèces et leurs relations phylogénétiques entre elles et avec les autres Bovinae sont encore mal connues à l’heure actuelle, et la validité de plusieurs espèces est sujette à caution. Certains auteurs suggèrent, par exemple, de rassembler toutes les formes du Pléistocène supérieur dans l’espèce Bison priscus, les variations observées étant interprétées comme variations géographiques et chronologiques. L’origine du genre Bison semble remonter au Pliocène supérieur / Pléistocène inférieur. Les premières espèces de bisons sont Bison sivalensis de l’Inde et du Pakistan et

Bison palaeosinensis de Chine. Ces formes plus petites et plus fines que les bisons actuels se sont étendues à toute l’Eurasie (Bison tamanensis, Bison voigtstedtensis, Bison

schoetensacki). Ensuite, une forme de taille nettement plus grande est apparue : Bison

priscus, le bison des steppes. Son aire de répartition paléobiogéographique comprenait l’Eurasie, depuis l’Espagne jusqu’à la Sibérie, mais également l’Amérique du Nord. Bison

priscus qui est apparu au cours du Pléistocène, il y a environ 900 000 ans, s’est éteint au début de l’Holocène. Des formes de plus grande taille se sont développées en Amérique du Nord (Bison latifrons). Puis la taille des bisons a diminué, que ce soit en Amérique du Nord avec les formes Bison antiquus, Bison crassicornis ou Bison occidentalis puis finalement

Bison bison, ou en Europe avec Bison bonasus (Guthrie, 1990).

Les relations phylogénétiques entre les différentes espèces fossiles de bisons sont également discutées. McDonald (1981) dresse un arbre phylogénétique basé sur des caractères morphologiques dans lequel une espèce ancestrale, Bison sivalensis, donnerait naissance à deux branches distinctes, l’une menant à Bison priscus, et l’autre menant à

Bison latifrons et Bison antiquus. Bison bonasus descendrait, selon cet arbre phylogénétique, de Bison priscus alors que l’ancêtre de Bison bison serait probablement

Bison priscus, mais les relations avec Bison latifrons et Bison antiquus restent confuses (Fig. 3.10). D’autres auteurs interprètent plutôt une partie des espèces de bisons fossiles comme de la diversité géographique et chronologique autour d’une seule espèce (Flerov, 1967 ; 1977 ; Guthrie, 1970 ; 1980 ; Wilson, 1975 ; 1978). Des analyses d’ADN mitochondrial de bisons fossiles du Pléistocène de Sibérie et d’Amérique du Nord, datés entre 10 et 60 ka par datation Carbone 14, ont montré que les populations nord-américaines actuelles sont plus proches des bisons fossiles d’Amérique du Nord (Douglas, 2006).

FIGURE 3.10 – Phylogénie du genre Bison (d’après McDonald, 1981 in Douglas, 2006). En plus des connaissances sur la position phylogénétique du bison des steppes (Bison priscus), la découverte des restes de bisons congelés en Alaska et en Sibérie a révélé certains aspects de l’écologie de ces animaux disparus. La plus célèbre et la mieux étudié de ces « momies » est celle surnommée « Blue Babe », découverte en 1979 dans une mine d’or au nord de Fairbanks, dans l’Alaska (USA) (Fig. 3.11). Le surnom de l’animal provient de la couleur bleue donnée par les argiles dans lesquelles la carcasse était enfouie. L’étude de ce spécimen a notamment permis de déterminer les causes de la mort de l’animal, tué par des lions, ainsi que certaines techniques de chasse des lions du Pléistocène. De plus, ce spécimen a apporté des informations sur le bison des steppes (Guthrie, 1990). Le pelage de Bison priscus au niveau des membres et de la tête était plus court que celui de Bison bison et ressemblait davantage à celui de Bison bonasus. La queue était plus courte que celle des deux espèces actuelles. Le pelage au niveau de la tête, de la queue et des pattes antérieures était très sombre, alors que celui qui couvrait le dos était plutôt brun-ocre (« rusty brown » ; « reddish brown »). Une autre momie a été

FIGURE 3.11 – « Blue Babe », un bison des steppes momifié (Guthrie, 1990).

Cependant, cette momie provenant de Sibérie, il est possible que ces variations soient dues à des différences locales ; ou alors à un dimorphisme sexuel, la momie russe étant celle d’une femelle de 2-3 ans alors que « Blue Babe » était un mâle adulte âgé de 8 ans environ, d’après les stries de croissance de ses cornes et l’usure de ses dents. La comparaison avec les peintures des grottes préhistoriques de France et d’Espagne permet de mettre en évidence de petites différences entre les populations de bisons des steppes des deux continents (Fig. 3.12). Ces différences de pelages ne sont pas surprenantes puisque l’on en observe également à l’heure actuelle entre les différences sous-espèces et populations de bisons. Le pelage des animaux peints est similaire à celui de « Blue Babe » avec une tête, des membres, un ventre, une bosse et une queue très sombre et le reste du corps brun-rouge. La préservation de la kératine des cornes de « Blue Babe » semble indiquer qu’elles étaient de couleur sombre. Leur taille est supérieure à celles des bisons actuels, mais elles se placent parmi les valeurs basses de la gamme de variation chez Bison priscus. Les sabots, quant à eux, sont similaires en taille et en forme à ceux des bisons modernes. En l’absence de la bosse, les tentatives de reconstitution menées par Guthrie (1990) lui ont

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