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Richesse spécifique et diversité

Chapitre 7. Distribution des Carabides à l'échelle locale

II.7.4. Richesse spécifique et diversité

II.7.4.1. Standardisation des abondances

Avant de commencer l'analyse, il est important de standardiser les abondances observées dans chaque station en fonction du nombre de pièges et de la durée du piégeage. En ce qui concerne le nombre de pièges, deux choix sont possibles. Soit, on tient compte du nombre de pièges placés, soit on estime le nombre de pièges réellement actifs. En effet, il est très probable que, dans la plupart des stations, l'absence de capture dans un piège durant un relevé traduise un problème technique. Pour standardiser les données, les nombres d'individus capturés dans une station lors d'un relevé sont divisés d'abord par la durée totale du piégeage durant une année, ensuite, soit par le nombre de pièges placés, soit par le nombre de pièges actifs (voir le Tableau II.2). On obtient ainsi le nombre de Carabides capturés par jour et par piège. Ce chiffre est ensuite multiplié arbitrairement par 300, représentant la durée moyenne d'un cycle annuel de piégeage, et par le nombre

moyen de pièges placés ou de pièges actifs. Afin d'obtenir des chiffres entiers, toutes les abondances standardisées inférieures à un individu sont ramenées à l'unité, les autres sont simplement arrondies à l'entier le plus proche.

Standardisation par pièges placés pièges actifs

∑ abondances / piège / jour 15.737 19.843

Nombre de pièges par cycle 9.241 6.322

∑ des abondances pondérées 41 152 35 459

∑ des abondances arrondies 42 971 38 809

Tableau II.2. Comparaison des résultats des standardisations selon le nombre de pièges placés ou selon le nombre de pièges actifs. On transforme d'abord toutes les données d'abondance en abondance par piège par jour. Le chiffre obtenu est multiplié par le nombre moyen de pièges par station et par une durée moyenne de piégeage arbitraire fixée à 300 jours. Les données sont ensuite arrondies pour obtenir des nombres entiers.

Globalement, les valeurs standardisées par le nombre de pièges placés ou de pièges actifs sont très proches. La corrélation entre ces valeurs pour chaque espèce au cours d'un cycle annuel de capture dans chaque station est très largement significative (Figure II.30). Cependant, des différences existent pour les faibles abondances ou pour quelques cas particuliers, lorsqu'un ou deux pièges sont restés actifs, notamment durant l'hiver 1986- 1987. Les abondances des Carabides capturés durant cette période sont artificiellement multipliées. On pourrait éviter de standardiser les données hivernales, mais ces pondérations nous entraîneraient dans une série de choix arbitraires et de manipulations qui risquent d'altérer trop les données. On a donc choisi de ne pas tenir compte du nombre de pièges actifs et de garder pour la suite de l'analyse les données standardisées par nombre de pièges placés.

II.7.4.2. Relations entre abondance et diversité

Le graphique de la Figure II.31 présente la relation entre le nombre d'individus et le nombre d'espèces observées dans les 145 cycles annuels. Il existe une relation certaine entre le nombre d'individus et le nombre d'espèces (rPEARSON > 0.70 pour les

comparaisons par piège, par cycle annuel de capture ou par station). L'encart de la Figure II.31 révèle toutefois que cette relation n'est pas linéaire et qu'elle est surtout entraînée par les habitats très riches en espèces et en individus comme les prairies alluviales et certaines landes sablonneuses et minérales. Bien que les cuvettes de palses, les bas-marais, les tourbières hautes, les landes tourbeuses et les pelouses calcicoles sont caractérisées par

des nombres d'individus similaires, elles se différencient par le nombre d'espèces. Pour une abondance donnée, les assemblages des pelouses calcicoles se singularisent par une plus grande diversité spécifique. A l'inverse, les assemblages des pelouses calaminaires semblent être moins riches en espèces qu'en individus.

Les stations les plus riches en individus sont les prairies alluviales, la pelouse calaminaire de Seilles (station 9), les landes minérales de Hurtebise près de Saint-Hubert (station 43) et de Robendell dans le camp militaire d'Elsenborn (station 79), des landes sablonneuses (stations 14, 19, 81, 82, 83) et des bords d'étangs (stations 46a et 69c). On remarquera la différence entre les landes sablonneuses de Campine (stations 14 et 19) et les landes sablonneuses de Lorraine belge (station 81 à 83). Les premières se caractérisent par plus d'individus, les secondes sont d'une plus grande richesse spécifique.

La richesse des prairies alluviales s'explique par la très grande productivité qui caractérise ce type d'habitat. Les inondations hivernales apportent chaque année des alluvions qui permettent le développement d'une végétation luxuriante et d'une micro- faune abondante. Par contre, les landes minérales et les landes sablonneuses sont des habitats où la productivité est beaucoup plus faible que dans les prairies alluviales. Leur diversité botanique est très faible, d'abord parce que de larges surfaces sont dégagées de toute végétation et qu'ensuite les plages de végétation sont dominées par Calluna vulgaris. C'est un des biotopes où la faune des invertébrés doit être étudiée pour établir la valeur biologique d'un site ou lors d'études d'incidence dans le cadre notamment de l'établissement de plans de gestion (voir par exemple BUTTERFIELD & COULSON, 1983; WEBB & HOPKINS, 1984; USHER & GARDNER, 1988; GARDNER & USHER, 1989; WEBB, 1985).

II.7.4.3. Relations entre les indices de diversité

Dans l'introduction concernant la structure des assemblages d'espèces, plusieurs indices de diversité ont été présentés. Avant d'analyser les résultats de leur application à l'ensemble des données, il est intéressant d'examiner leurs inter-relations.

Nbr ind. S a D H' 1/D Exp(H') Nbr ind. 1.000 0.752 -0.178 -0.189 0.358 0.225 0.358 Nbr. espèces 1.000 -0.459 -0.510 0.765 0.595 0.787 a 1.000 0.967 -0.871 -0.849 -0.758 D 1.000 -0.910 -0.812 -0.762 H' 1.000 0.895 0.939 1/D 1.000 0.937

Tableau II.3. Relations exprimées par le coefficient de corrélation rPEARSON entre différents indices de

diversité calculés sur les abondances des espèces par cycle annuel de capture (n = 145 cycles). S correspond au nombre d'espèces, a à l'indice de BERGER-PARKER, D à l'indice de SIMPSON et H' à

l'indice de SHANNON-WIENER.

Quelle que soit l'échelle à laquelle ils sont calculés (piège, cycle annuel, station), les coefficients de corrélation mesurant leur relation restent similaires. Le Tableau II.3 synthétise les coefficients calculés sur les cycles annuels de capture. Bien qu'elles soient significatives, les relations entre le nombre d'individus et les indices de diversité sont faibles. Par contre, le nombre d'espèces est bien corrélé aux indices H' et Exp(H'), relevant de la théorie de l'information. Il existe aussi une très bonne corrélation entre l'indice de BERGER-PARKER et les quatre autres indices de diversité. La simple abondance relative de l'espèce la mieux représentée explique plus de la moitié de la variance des autres indices. La Figure II.32 montre que cette relation est toutefois loin d'être linéaire avec les indices mesurant l'équi-répartition 1/D et Exp(H'). Elle l'est presque avec l'indice D de SIMPSON. Les deux indices 1/D et Exp(H') sont largement corrélés, mais le second est en général plus grand que le premier.

La Figure II.33 représente la relation entre le nombre d'espèces et le nombre d'espèces équiabondantes défini par l'exponentielle de l'indice de SHANNON-WIENER. Il est clair qu'il existe une relation nette entre les deux indices; toutefois dès que le nombre d'espèces devient plus élevé, une plus grande variation des valeurs de l'exponentielle est observée. Cette variation traduit des situations de dominance très différentes, comme celles qui sont représentées dans l'encart de la Figure II.33. Les assemblages de deux stations caractérisées par un nombre similaire d'espèces mais des valeurs de diversité fort différentes montrent des distributions d'abondance peu comparables. Dans la station 19, une espèce domine l'échantillon; dans la station 46a, plusieurs espèces se partagent la dominance.

L'exponentielle de l'indice de SHANNON-WIENER, bien que largement corrélée au nombre d'espèces, est un descripteur des assemblages qui peut apporter une information qui la complète. Dans le cas présent, près de 40 % de la variance de cet indice n'est pas expliquée par le nombre d'espèces.

II.7.4.4. Comparaison régionale et entre habitats

Pour les régions, la comparaison des moyennes des différents indices donne des résultats très cohérents. C'est la Lorraine belge qui est la région caractérisée par la plus grande diversité, quel que soit l'indice utilisé. Elle s'oppose à la Haute-Ardenne et à la

Campine dans tous les cas, sauf pour le nombre d'espèces. Toutefois, ces observations sont très relatives car la richesse régionale dépend essentiellement du nombre d'habitats différents échantillonnés dans une région.

La comparaison des moyennes par habitat se justifie mieux. Trois habitats se partagent les valeurs d'indices les plus basses (S, 1/D, Exp(H')) ou les plus hautes (a de BERGER-PARKER) selon le sens dans lequel est mesurée la diversité. Il s'agit des cuvettes de palses, des landes tourbeuses et des tourbières hautes (Tableau II.4).

Habitats Nbr ind. S a 1/D Exp(H')

Prairies alluviales 1 1 2 2 3 Bords d'étangs 4 3 1 1 1 Landes sablonneuses 2 2 6 3 2 Pelouses calcicoles 7 5 4 4 4 Pelouses calaminaires 3 6 5 5 6 Landes minérales 5 4 8 7 5 Bas-marais 10 9 3 6 7 Tourbières hautes 6 7 7 8 8 Landes tourbeuses 8 8 9 9 9 Cuvettes de palses 9 10 10 10 10

Tableau II.4. Rangs des moyennes des différents indices calculés par cycle annuel de capture pour les différents habitats. Une valeur de 1 signifie, soit la valeur la plus élevée pour les nombres d'individus et d'espèces et pour les indices 1/D et Exp(H'), soit la valeur la plus basse pour l'indice a de BERGER- PARKER. Seules quatre permutations sont observées si les moyennes sont calculées par station.

Trois autres types d'habitats se détachent à l'autre extrême : les prairies alluviales, les bords d'étangs et les landes sablonneuses. Il faut toutefois tenir compte de l'hétérogénéité des stations désignées comme bords d'étangs qui comprennent autant de milieux secs que d'habitats situés au bord même de l'eau, avec et sans végétation. Les quatre habitats restants (les pelouses calcicoles et calaminaires, les landes minérales et les bas-marais) sont situées entre les extrêmes. Certains indices révèlent des traits particuliers aux habitats. Par exemple, comme on l'a déjà mentionné lors de l'analyse de la relation entre les abondances et la diversité spécifique, les assemblages d'espèces de pelouses calcicoles se caractérisent par un grand nombre d'espèces par rapport au nombre d'individus, au contraire des pelouses calaminaires. Bien que la répartition des espèces y soit équilibrée, les bas-marais sont parmi les habitats les plus pauvres en individus et en espèces. L'indice a de BERGER-PARKER révèle aussi que si les landes sablonneuses sont parmi les habitats les

plus diversifiés, elles sont généralement fort dominées par une espèce. C'est aussi le cas, dans une moindre mesure, des landes minérales.