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Chapitre 2 : Présentation du site d’étude 33

2.1.1. Le Rhin et ses aménagements

La nécessité continuelle de correctifs, de réglages et de réadaptations face à certaines conséquences néfastes de l’aménagement, s’est imposée au cours du temps (Maire et Sanchez Pérez, 1994). L’aménagement sur le Rhin s’est fait en plusieurs étapes dont la première concerne le Rhin sauvage. Le fleuve avant les premiers travaux de rectification s’étalait sur plusieurs kilomètres de largeur en développant de multiples bras, enserrant des îles et presqu’îles dont la topographie changeait à chaque crue (Descombes et Humbert, 1985) (Figure 10).

Figure 10 : Evolution du cours du Rhin dans le secteur du polder d'Erstein de 1838 (à gauche) à 1872 (à droite) (Dillmann, 1995).

C’est en 1840 en suivant le projet du colonel von Tulla que le Rhin a subi sa première phase d’aménagement appelée phase de correction qui a consisté en la construction d’une digue des hautes eaux réduisant le lit majeur à une largeur de 2 km. Le lit mineur large de 200-250 m prend un tracé rectiligne, bordé de berges enrochées (Figure 10). Cette phase de travaux a entraîné le raccourcissement du chenal de 14% de son cours d’eau entre Bâle et Lauterbourg, ce qui a eu pour conséquence d’augmenter la pente et donc la vitesse

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d’écoulement et du transport de matériaux vers l’aval (Descombes et Humbert, 1985). L’accroissement de la vitesse du fleuve et le déplacement des bancs de graviers ont rendu la navigation presque impossible (Descombes et Humbert, 1985). Le port de Strasbourg fut complètement déserté. Cette situation a obligé les pays frontaliers du Rhin à trouver une solution pour augmenter la navigabilité du cours d’eau.

La solution proposée au problème de navigabilité visait à créer un chenal sinusoïdal d’une largeur de 75 à 90 m et d’une profondeur minimale de 1.70 m, en utilisant les capacités d’auto-curage du fleuve. Par la création d’épis transversaux et de seuils de fond concentrant le débit, le fleuve est contraint à inciser les hauts-fonds et à entretenir un chenal régulier (Figure 11).

Figure 11 : Plan des épis correcteurs de la régularisation du Rhin. (Document SNS dans Descombes, 1990).

Les travaux furent réalisés entre 1906 et 1924 au nord de Strasbourg et les conséquences bénéfiques pour la navigation ne se firent pas attendre. Ils se poursuivirent en amont de Strasbourg à partir de 1930 et se terminèrent en 1960 pour la partie française au nord de Strasbourg.

Parallèlement, des travaux de canalisation ont démarré en 1928 (Figure 12). Ce projet vise à assurer la protection contre les crues, à utiliser la force motrice du fleuve et à améliorer les conditions de navigation. Un canal latéral est construit parallèlement au Rhin. Des usines hydroélectriques ont été construites sur ce canal, celui-ci ne laissant au Rhin naturel qu’un

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débit réservé de 20 m3/s ; l’Allemagne s’est retrouvée privée d’accès industriel au fleuve et

l’alimentation de la nappe phréatique a été fortement réduite. La canalisation du Rhin a été réalisée selon trois types d’aménagement de l’amont vers l’aval : le premier a consisté en la construction d’un canal latéral unique d’une longueur de 52 km au sud entre Bâle et Neuf-Brisach, puis un aménagement en biefs et enfin le troisième a concerné l’aval de Strasbourg avec une implantation des chutes dans le lit mineur. Cet aménagement s’est effectué au fil de l’eau et concerne les chutes de Gambsheim (1974) et d’Iffezheim (1977) construites suite à la convention franco-allemande du 4 juillet 1969.

Figure 12 : Evolution diachronique du site du polder d’Erstein depuis 1827 (Dillmann, 1995).

Les objectifs de ces aménagements ont été globalement atteints : les populations sont protégées contre les inondations, les conditions de navigation sont satisfaisantes et les potentialités énergétiques sont exploitées. Néanmoins, ces travaux ont entraîné de nombreux impacts négatifs sur le milieu naturel. La nappe phréatique a été très touchée par la diminution des surfaces inondables : l’incision générale du Rhin et la faiblesse du débit réservé s’écoulant dans le vieux Rhin ont provoqué un abaissement du niveau piézométrique et une diminution des battements du toit de la nappe. La canalisation du fleuve a également provoqué une accélération de l’onde de crue et une élévation des pics de crue à l’aval du secteur canalisé mais aussi une disparition du phénomène de tressage et une déconnexion quasi-totale des Giessen, avec comme conséquence un assèchement des Giessen et des milieux terrestres (Commission internationale de l’hydrologie du bassin du Rhin, 1977 ; Carbiener, 1983 ; Dister, 1992 ; Schmitt, 1995). La richesse spécifique et la productivité des écosystèmes

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forestiers diminuent avec la suppression des apports fertilisants déposés lors des inondations (Carbiener et Dilmann, 1992, Trémolières et al., 1998). La forte pression anthropique dans la région du Rhin supérieur a influencé considérablement la qualité des eaux du Rhin.

Ce risque accru d’inondation à l’aval du secteur canalisé dans le Rhin, d’une part, et les impacts écologiques d’autre part, ont incité les politiques des différents états riverains du Rhin à une concertation internationale pour la protection contre les crues et la restauration du milieu alluvial rhénan. En 1982 une convention franco allemande relative à l’aménagement du Rhin entre Kehl/ Strasbourg et Neuburgweier /Lauterbourg a été signée mettant en œuvre la mise en place des polders le long du Rhin. Un projet nommé « Projet Rhin 2020 » associe les mesures de protection contre les inondations et la restauration des écosystèmes rhénans, en reconnectant au Rhin les espaces de l’ancienne plaine alluviale isolés par les digues. Ces écosystèmes sont capables de survivre à des inondations plus ou moins régulières.

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