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Section II. Performances des pays de la CEDEAO en matière

II.1. Revue de la littérature empirique sur la convergence

Les performances économiques relativement bonnes obtenues dans la dernière décennie par les États membres de la CEDEAO, n’ont pas permis d’aplanir les difficultés qu’ils rencontrent pour le respect des critères de convergence. En effet, nombre d’auteurs – N. L. Bamba et K. Diomande (1998, 2001), A. Tanimoune et P. Plane (2005), P. L. Diop (2005), Nkodia et Sarr (2007) et M. B. O. Ndiaye (2007), J. Lama (2011), K. Nubukpo (2012), M. Jalloh (2012), R. D. Korsu, et M. B. O. Ndiaye (2013), A. Traoré (2013), A. Soumaré (2013) et C. T. Seck (2013) – ont déjà souligné l’absence ou la faiblesse de la convergence nominale et/ou structurelle dans la CEDEAO.

A. Combey et C. Mally (2010), recourant à la méthode de bêta-convergence pour apprécier la convergence réelle des pays de l’UEMOA, ont conclu à une convergence conditionnelle des pays sur la période 1997-2008. Ce résultat s’explique, selon eux, par l’effet positif du PCSCS sur le niveau de revenu global réel par tête, et sur le niveau de vie des populations de l’Union.

Cependant, des objections sérieuses – horizon temporel très court et non prise en compte de l’aspect monétaire de la pauvreté – limitent la portée de leur résultat.

Après avoir défini et discuté de la pertinence de chacun des critères, J. Lama (2011), utilisant aussi l’approche de bêta-convergence, observe sur la période 2000-2009 que les performances en matière de réalisation des critères des programmes de convergence de l’UEMOA, de la ZMAO et de la CEDEAO, sont disparates et instables dans le temps et dans l’espace.

Globalement, les niveaux de vie et les structures productives des économies de la CEDEAO ne convergent pas. En somme, il montre que les résultats obtenus depuis le début des programmes de convergence sont mitigés et insuffisants pour prétendre à un espace économique unifié.

P. L. Diop (2002), utilisant les méthodes de sigma- et bêta-convergences sur la période 1975-2001, trouve une tendance à la convergence des taux d’inflation des pays membres de l’UEMOA, excepté la Guinée-Bissau, vers le seuil de 3 % défini par le Pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité (PCSCS). Son étude révèle aussi un processus de convergence réelle des économies de l’UEMOA, à l’inverse des pays de la CEDEAO, qui sont caractérisés par des écarts de PIB par tête. L’explication de ces résultats réside dans la différence des conditions initiales des pays – certains exportant du pétrole, d’autres non. Ainsi, un choc énergétique conduit à des conséquences différentes sur la richesse de ces deux catégories de pays.

Une autre étude, réalisée par M. Ndiaye (2006), à partir de la méthode de bêta-convergence, corrobore cette tendance à la convergence des économies de l’UEMOA.

Ce dernier constate généralement une lenteur du processus de convergence économique sur la période 1980-2000. Cependant, il estime la convergence absolue du PIB par tête à 0,73 %, pour la sous-période 1980-1993, et à 1,5 % pour la sous-période 1994-2000. Le résultat de la seconde sous-période – hausse des PIB par tête – s’explique probablement par les effets positifs de la dévaluation du franc CFA et de ses mesures d’accompagnement.

Cependant, N. L. Bamba et K. Diomande (1998) montrent, en se basant sur le filtre de Kalman pour l’estimation des paramètres sigma et bêta, que la convergence nominale des pays de l’UEMOA n’a pas engendré leur convergence structurelle. Ces auteurs ont aussi repéré trois groupes de pays ayant des processus de convergence différents : le premier groupe – Bénin et Burkina Faso – tend à converger vers la première économie de l’Union (la Côte d’Ivoire), le deuxième groupe – Sénégal et Mali – tend à converger vers la moyenne de l’Union et le troisième groupe – Niger et Togo –, tend à diverger ou à converger vers ces deux références.

Évaluant la convergence conditionnelle dans l’UEMOA, M. Ndiaye (2006) remarque aussi la présence de spécificités structurelles dans le processus de convergence. Son étude révèle, par ailleurs, l’existence de deux clubs de convergence au niveau de l’UEMOA.

La Côte d’Ivoire et le Sénégal composent le premier club ; ils ont un niveau de convergence supérieur à la moyenne. Le Bénin, le Burkina, le Mali et le Niger

constituent le second club ; ils enregistrent une vitesse de convergence inférieure à la moyenne.

Les pays de la CEDEAO connaissent des situations économiques différentes. Or, une unification économique et monétaire pertinente exige une homogénéité des économies des pays membres. Dans cette perspective, les pays doivent harmoniser leurs cadres juridiques, comptables, fiscaux, réglementaires et statistiques, ainsi que leur réglementation bancaire et financière. Les travaux empiriques de Dramani (2013), sur l’interaction entre les politiques budgétaires et monétaires, corroborent les affirmations énumérées ci-dessus.

En effet, en utilisant un modèle multipays dans les zones UEMOA et CEMAC, Dramani (2013) a pu mettre en évidence la sensibilité des deux zones aux chocs macroéconomiques. Ainsi, ces résultats vont dans le sens de la mise en place d’un fédéralisme budgétaire dans les deux zones, pour contrecarrer les chocs asymétriques provenant de la différence entre les différents pays composant chaque zone.

En utilisant les modèles de convergence, L. Dramani (2007) montre que la convergence nominale a entraîné la convergence réelle dans la zone franc, bien que parfois de façon conditionnelle. Il en conclut que les critères de convergence et les institutions établies dans cette zone ont été efficaces. À l’instar d’autres auteurs, il met aussi en exergue l’existence de clubs de convergence et affirme que le processus d’intégration est beaucoup plus avancé dans l’UEMOA que dans la CEMAC. Pour lui, le processus de convergence réelle implique ainsi une

hétérogénéité selon les zones. De plus, ses résultats démontrent l’impossibilité d’avoir un sentier commun de convergence dans la zone franc. Il considère que l’aide publique au développement, le stock de capital humain, l’inflation et le taux d’investissement, constituent les variables motrices pour la promotion de la convergence dans la zone franc.

Analysant la convergence du revenu dans les pays de la CEDEAO, M. Jalloh (2012) recourt aux deux approches les plus usuelles – sigma- et bêta-convergence.

Ses résultats concernant le sigma convergence montrent une absence de convergence du revenu par tête dans les pays de la CEDEAO, sur la période 1990-2009. En revanche, les résultats de l’approche de la bêta-convergence révèlent une vitesse de bêta-convergence des revenus des pays de la CEDEAO, d’environ 17 % par an sur la même période d’étude. Toutefois, tout choc conjoncturel entraînant un déséquilibre pourrait nécessiter une longue période avant d’atteindre le niveau d’équilibre régulier. M. Jalloh (2012) montre que les pays de la ZMAO sont plus performants, avec 3,9 % de taux de croissance annuel moyen, que les pays de l’UEMOA (3,2 %) sur la période 1990-20099. Pour lui, les pays de la CEDEAO ont du chemin à faire pour parvenir à respecter les critères de convergence.

9 Ce résultat corrobore celui de J. Lama (2011), qui affirme que les pays de la ZMAO dégagent un rythme moyen de croissance économique nettement plus élevé que ceux de l’UEMOA sur la période 2000-2009.

R. D. Korsu et M. B. O. Ndiaye (2013) ont réalisé des tests de racine unitaire et de co-intégration (méthode de Johansen) pour étudier la convergence nominale – sur des données trimestrielles de 2000 à 2010 – et la convergence réelle – sur des données annuelles de 1975 à 2010. Les auteurs révèlent l’existence d’une convergence nominale pour les réserves monétaires parmi les pays de la ZMAO (avec ou sans le Cap-Vert) et de la CEDEAO. En revanche, il n’y a pas de convergence nominale pour les autres variables retenues dans l’étude, à savoir le taux d’intérêt, le taux de change, le déficit budgétaire et l’inflation. Les résultats montrent aussi que la convergence réelle est de rigueur dans les pays de la ZMAO (avec ou sans le Cap-Vert) et dans ceux de la CEDEAO. Cependant, aucun pays de la ZMAO n’est en convergence – nominale ou réelle – avec l’UEMOA, excepté le Cap-Vert, mais uniquement en termes de taux de change.

Les résultats de ces différentes études sont globalement insuffisants pour aboutir à une union économique et monétaire crédible au sein de la CEDEAO. Un fort engagement politique des pays membres demeure indispensable pour renforcer le processus de convergence économique, seul gage d’une union pertinente.

II.2. Progrès dans le respect des critères de convergence