• Aucun résultat trouvé

Nous avons décidé de limiter notre champ d'étude à l'analyse de sept œuvres. Ce choix obéit aux exigences d'une recherche analytique souhaitant proposer une lecture interprétative et systématique d’un corpus restreint plutôt qu’un vain inventaire de ces éléments constitutifs. En circonscrivant de manière précise notre sujet, nous avons pour objectif un décryptage minutieux des textes, il faudra opérer une véritable dissection de chaque ouvrage composant notre corpus, afin d'être en mesure d'atteindre sa structure profonde, polysémique et ambivalente – en partie inconsciente à l’auteur –, toujours masquée par une façade narrative convenable, un écran où viennent s’abîmer les lecteurs pressés. Il ne s'agira pas de réaliser une psychocritique telle qu'elle est définie par Charles Mauron puisque nous allons nous intéresser uniquement aux œuvres, à leurs significations effectives dans la clôture même du texte et aussi – c’est là notre différence avec Bellemin-Noël – dans son intertexte mytho-logique.

Avant de débuter l'interprétation des œuvres, et compte tenu de notre méthodologie analytique, il nous semble nécessaire de proposer un résumé circonspect de chacun des ouvrages étudiés dans l'ordre chronologique de leur parution. On admet qu’un résumé n’est jamais neutre, mais constitue la première étape de l’appréhension d’une œuvre.

- Frankenstein or The Modern Prometheus [1818] de Mary Shelley

Walton, un jeune homme devenu navigateur afin de découvrir des régions inexplorées, écrit à sa sœur au cours de sa longue expédition pour tenter de découvrir un passage par le Pôle. Lors de ce périple, il se trouve témoin d'événements étranges. Dans un premier temps et alors que son bateau est bloqué par la glace dans un endroit désertique, il aperçoit une forme humaine d'une stature gigantesque à bord d'un traîneau. Puis, le lendemain matin, il recueille l'occupant d'un traîneau à la dérive, cet homme très affaibli est Victor Frankenstein. Walton s'efforce de prendre soin de ce dernier pour qu'il recouvre la santé.

Après quelques jours, son état s'améliore et Walton peut s'entretenir avec lui, tandis qu'il lui confie son projet, le visage de Victor s'assombrit. Frankenstein retrouve en son sauveur la même folie qui l'a jadis animé et pour lui éviter de commettre les mêmes erreurs, il va lui raconter sa propre histoire. Walton se montre admiratif de cet homme, il lui reconnaît de nombreuses qualités et voit en lui l'ami qu'il a toujours désiré.

Victor Frankenstein débute donc le récit de sa vie en rendant compte de la rencontre de ses parents : Alphonse et Caroline. Son père a pris pour épouse, une femme beaucoup plus jeune que lui, la fille d'un ami mort ruiné ; ensemble ils se sont installés en Italie, et c'est à Naples que leur premier fils Victor naît. Le couple a l'habitude de se rendre dans les maisons les plus pauvres pour faire la charité, c'est durant l'une de ses visites que Victor et sa mère rencontrent une petite orpheline prénommée Elizabeth. Au retour d'Alphonse, le couple adopte la petite fille, elle est désignée comme un "joli cadeau" offert au fils Frankenstein.

Après quelques années, la famille retourne à Genève, le jeune garçon s'y lie d'amitié avec Henry Clerval.

A l'âge de treize ans, Victor découvre par hasard dans une auberge un livre de Cornélius Agrippa, ce dernier aura un impact décisif sur sa vie. Son père quant à lui n'accorde pas beaucoup d'attention aux nouvelles lectures de son fils, il tente de l'en détourner mollement mais la curiosité de Victor est trop forte et très vite il se procure d'autres ouvrages d'alchimistes. Il se met ainsi en quête de l'élixir de vie afin d'immuniser l'Homme de toute forme de maladie. A quinze ans, Victor connaît une nouvelle révélation en voyant un chêne

être foudroyé, il se tourne alors vers l'étude des mathématiques et porte son intérêt aux théories sur le galvanisme et l'électricité.

Peu de temps avant son départ pour l'université d'Ingolstadt, Victor doit affronter la mort de sa mère. Cette dernière succombe à la fièvre scarlatine qu'elle a contractée en soignant Elizabeth. A son arrivée à Ingolstadt, la rencontre avec son professeur d'histoire naturelle ne se passe pas bien, M. Kempe ne cache pas son mépris pour les lectures alchimiques de Victor. En revanche, le premier cours du professeur Waldman fait figure de révélation et devient source d'une motivation sans limites pour pénétrer les mystères de la création.

Pendant deux ans, le jeune homme se passionne pour ses études et travaille sans relâche notamment sur la structure du corps humain. Afin de percer le secret de la vie, il n'hésite pas à se confronter à la mort, en effet, ses travaux l'obligent à se rendre dans les charniers et les tombeaux pour en arracher la matière première de ses expériences. Une fois le processus de génération découvert, Victor fabrique le corps à qui il insufflera la vie, afin de faciliter et d'accélérer sa conception il le crée d'une taille gigantesque. Durant la fabrication de son œuvre, Victor s'imagine devenir le créateur d'une nouvelle race et être à l'origine de l'immortalité. Pendant plusieurs mois, il se consacre exclusivement à ses travaux avec une ardeur passionnée, il renonce à toute vie sociale et ne quitte plus son laboratoire. Il met ainsi sa santé en danger, puisqu’au fil du temps il se met à souffrir d'accès de fièvre et de nervosité extrême.

Finalement, une nuit de novembre, l'animation de la créature a lieu, et c'est lorsque le projet touche à sa fin que Victor se rend compte de son erreur. Malgré sa tentative pour le rendre beau, face à son œuvre, le créateur ne ressent que du dégoût et de l’horreur. Incapable de rester à ses côtés, Victor se retire dans sa chambre où épuisé il finit par sombrer dans un sommeil perturbé par des cauchemars. Il rêve ainsi qu'il retrouve Elizabeth, mais alors qu'il l'embrasse la jeune femme se métamorphose, elle prend la forme du cadavre de sa mère, enveloppé dans un linceul dont les plis grouillent de vers. A son réveil, il surprend le monstre soulevant le rideau du lit pour l'observer. Ce dernier essaie de lui parler mais il ne sort de sa mâchoire ouverte que des sons inarticulés. Alors que la créature tente de le retenir, Victor s'enfuit par les escaliers.

Le lendemain, alors que le savant erre dans les rues, il se retrouve face à Clerval, cette visite inattendue le comble de joie. De retour à son appartement et à son immense soulagement, Victor constate le départ du monstre, cependant sa santé se détériore. Pendant plusieurs mois, Victor souffre de fièvre nerveuse et doit garder le lit. Puis une fois rétabli, le

jeune homme ne reprend pas ses études scientifiques, il étudie avec son ami les langues orientales.

Durant le mois de mai, Victor reçoit une lettre de son père lui annonçant le décès de son plus jeune frère, William. Lors d'une promenade en famille, l'enfant a disparu et il a été retrouvé étranglé le lendemain matin, il semble que le mobile du meurtre soit le vol d'une miniature, représentant sa mère, qu'Elizabeth avait accepté de lui prêter. Alphonse conjure Victor de rentrer au plus vite pour qu'il puisse les consoler et soulager sa cousine de son sentiment de culpabilité. A son arrivée en pleine nuit aux environs de Genève, Victor décide de se rendre sur le lieu du meurtre de William. Pendant le trajet un orage éclate et alors qu'il admire le spectacle de la nature déchaînée, il aperçoit le monstre le temps d'un éclair, aussitôt il est convaincu de sa culpabilité.

Victor est accueilli par son frère Ernest qui lui révèle l'identité du coupable : il s'agit de Justine Moritz, une domestique très attachée à la famille Frankenstein. La culpabilité de cette dernière a pu être établie grâce à la découverte de la miniature dans ses affaires.

Elizabeth est convaincue de son innocence, cependant la justice la condamne à mort. Durant son procès, Victor est rongé par le remords mais il n'intervient pas, il est persuadé que la vérité est impossible à croire. Désespéré après la mort de son frère et celle de Justine, Victor s'efforce de trouver un peu de réconfort en partant en expédition en montagne. A peu près deux mois après la fin du procès, Victor se rend à la vallée de Chamonix, et alors qu'il entame son ascension pour rejoindre Montenvers, le monstre vient à sa rencontre. La première réaction du jeune homme est violente, il se jette sur sa créature, elle le repousse sans difficulté. Cependant, en proie à la curiosité et à la pitié, Victor accepte finalement d'écouter son histoire.

Les premiers instants de la vie du monstre sont confus, il prend du temps pour distinguer ses différents sens. Pendant longtemps il souffre de la faim, de la soif et du froid, il a pour unique source de plaisir le spectacle de la lune et le chant des oiseaux. A chacune de ses rencontres avec les humains, il provoque invariablement l'effroi et se fait attaquer. Il parvient à trouver un refuge dans une cabane accolée à une maison où vit la famille de Lacey.

Grâce à une fente dans une des cloisons, le monstre peut ainsi observer ses voisins tout en restant caché à l'intérieur de sa hutte. Il se prend rapidement d'affection pour le vieil homme aveugle, sa fille et son fils. Le monstre est ému par leur tristesse, il tente alors de les aider en leur coupant du bois. Au contact des de Lacey, la créature découvre le langage mais il prend aussi pleinement conscience de sa propre laideur. Pour cette raison, il se résout à ne pas se faire connaître de ses voisins avant d'avoir appris leur langue et être ainsi en mesure de

communiquer avec eux. Le monstre souhaite pouvoir atténuer l'horreur de son apparence grâce à sa parole, il espère être capable de leur inspirer de l'affection car son unique espoir de bonheur réside dans le fait de se faire accepter par la famille. Au printemps, une étrangère rejoint les de Lacey pour le plus grand bonheur de Félix. L'arrivée de Safie va permettre au monstre de bénéficier de cours pour apprendre la langue de ceux qu'il aime appeler ses protecteurs. De même, par l'intermédiaire des leçons dispensées par Félix à la jeune arabe, la créature apprend à écrire dans Les Ruines de Volney. En à peu près deux mois, le monstre parvient à comprendre ses voisins, il est donc mieux informé sur leur situation. Les de Lacey ont perdu leur fortune et ont été condamnés à l'exil après que Félix a aidé à s'évader le père de Safie, un riche marchand turc condamné injustement. Ce dernier, une fois en sécurité n'a pas tenu ses engagements, il a tenté de fuir avec sa fille alors qu'il l'avait promise en mariage à Félix. Finalement, Safie a pu profiter d'une absence de son père pour partir à la recherche de Félix.

Pendant une nuit d'août, le monstre trouve une valise contenant des livres qui vont parfaire son éducation : Le Paradis perdu, un volume des Vies des hommes célèbres, et Les Souffrances de Werther. De plus, la créature, ayant appris à lire, est désormais capable de prendre connaissance des écrits de Victor qui se trouvaient dans le manteau et qu’il a emporté avant de s'enfuir. La description de l'horreur ressentie par Victor durant sa fabrication, provoque l'écœurement du monstre qui se met alors à maudire son créateur.

Les de Lacey représentent pour lui son seul espoir d'être heureux, pendant un an il se prépare à leur rencontre. Dans un premier temps, le monstre décide de se faire connaître que du père aveugle, il veut gagner sa sympathie pour qu'il intercède en sa faveur auprès de sa famille. Malheureusement, il n'a pas le temps de mettre son plan à exécution, le retour de Félix, Agatha et Safie interrompt sa discussion avec le vieil homme. Après avoir été roué de coups par le fils de Lacey, le monstre parvient à s'enfuir dans les bois, là il peut donner libre cours à sa colère. Le lendemain, il découvre que les de Lacey ont déménagé, cet abandon provoque chez le monstre une rage violente qui engendre la destruction de la maison et le saccage du jardin. Puis, il se lance à la recherche de Victor, son créateur dont le devoir est selon lui de lui apporter de l’aide.

A la frontière suisse, un nouvel événement renforce sa haine de l'humanité, alors qu'il sauve une jeune femme de la noyade, un homme lui tire dessus et le blesse à l'épaule. Deux mois plus tard, il parvient aux environs de Genève, tandis qu'il se cache dans les champs il aperçoit un enfant, dont il s’empare dans le but d’en faire son compagnon. En raison de son jeune âge, le monstre croit qu'il n'aura pas de préjugés contre son apparence et qu'avec le

temps il pourra s'habituer à sa laideur. William se débat et le menace de représailles de la part de son père : Alphonse Frankenstein, en apprenant le lien de parenté qui unit l'enfant à son créateur, le monstre décide de faire de lui sa première victime. Avant de partir il s'empare de la miniature, il trouve ensuite refuge dans une grange, où se trouve une jeune femme endormie, Justine Moritz. Pour se venger de l'humanité qui l'abhorre, et parce qu'il est condamné à la solitude, le monstre décide de piéger cette innocente en cachant dans un pli de sa robe le portrait qu'il a dérobé à William.

Après avoir raconté son histoire à Victor, la créature lui demande de lui accorder une compagne. Frankenstein se montre tout d’abord inflexible, mais peu à peu les arguments du monstre parviennent à le convaincre, finalement il accepte de créer un monstre femelle à l'unique condition que dès la fin de l'opération, le couple devra s'exiler à l'écart de toute société humaine. Malgré sa promesse, Victor repousse longtemps le début de son entreprise, mais pour se libérer du monstre et pouvoir se marier sereinement avec Elizabeth il se résout à commencer sa seconde œuvre. Victor entame un voyage, durant lequel il veut remplir la promesse faite à sa créature. Clerval et Victor se rendent donc en Angleterre, une fois arrivés en Ecosse les deux hommes se séparent ; Victor, qui n'a confié à personne son lourd secret, préfère s'isoler pour entreprendre la fabrication du monstre femelle. Installé dans une des îles les plus éloignées des Orkneys, Victor s'attelle à sa tâche dans la crainte perpétuelle de voir apparaître le monstre.

Alors qu'il est sur le point d'achever son œuvre, Victor décide finalement de rompre sa promesse parce qu'il est convaincu que le couple monstrueux représenterait une trop grande menace pour l'humanité. Sur le seuil de la cabane, le monstre assiste ainsi à la destruction de sa compagne par son créateur. Désespéré et assoiffé de vengeance, il menace Frankenstein :

« Je serai avec toi le soir de tes noces ! ». Avant de partir, Victor nettoie et récupère ses instruments, il fait aussi disparaître en mer les restes du monstre femelle, à son réveil le lendemain son bateau est à la dérive. Il finit par atteindre un petit port irlandais, et c'est là qu'il est accusé du meurtre de son ami Clerval, retrouvé mort la veille sur la plage. Victor, sous le choc, est victime d'une violente fièvre qui le plonge dans un délire hallucinatoire, ainsi durant près de deux mois sa vie est en danger. Grâce au magistrat Kirwin, Victor peut bénéficier de soins médicaux et de la présence de son père. Après être parvenu à recouvrer sa santé et avoir été innocenté, il peut ainsi repartir pour Genève et épouser Elizabeth.

Une fois le mariage célébré, le jeune couple se rend dans une auberge pour sa nuit de noces, c'est là que la créature met sa menace à exécution. Alors que Victor examine les recoins de la maison en vue de débusquer le monstre, ce dernier assassine Elizabeth dans la

chambre nuptiale. Le jeune marié découvre alors le corps sans vie de son épouse jeté en travers du lit conjugal, puis il voit le monstre l'observer par la fenêtre avant de s'enfuir.

Terrassé par le chagrin Alphonse Frankenstein meurt quelques jours plus tard, Victor quant à lui perd la conscience de la réalité. Au terme d’un enfermement de plusieurs mois, le jeune homme se lance à la poursuite de sa créature. La traque mène le créateur et son monstre jusqu'au Pôle Nord, ce dernier favorise la progression de son poursuivant en lui laissant de la nourriture ou encore des messages pour attiser sa haine et lui indiquer la route à suivre. Alors qu'il n'y avait plus que quelques mètres les séparant, la mer de glace se fend entre eux et éloigne ainsi une nouvelle fois les deux ennemis. Après avoir dérivé plusieurs heures, Victor a été recueilli par Walton et son équipage.

A la fin de son histoire, Victor demande à Walton de poursuivre son œuvre, de tuer le monstre. Le navigateur fait part de ses impressions à sa sœur, il est convaincu de la véracité des faits qui viennent de lui être racontés. Malgré les tentatives de Walton pour redonner goût à la vie à Victor, ce dernier s'y refuse, son unique objectif est de détruire son œuvre, et son seul réconfort réside dans ses hallucinations qui lui permettent de retrouver les siens.

Après avoir été piégé par la glace, l'équipage prend peur et est résolu à convaincre leur capitaine de rebrousser chemin dès que cela sera possible et ce en dépit des exhortations de Victor à poursuivre leur voyage. Walton est donc contraint de renoncer à son expédition.

Alors que le bateau s'apprête à retourner en Angleterre, Victor meurt. Quelques heures plus tard, Walton surprend aux côtés du cadavre, le monstre, qui est venu se repentir devant son créateur. Face aux reproches du navigateur, la créature affirme être rongée par le remords et n'avoir été que la victime de l'injustice des hommes. Il prétend se haïr lui-même plus que personne ne pourrait le faire. Puis il annonce à Walton son intention de se suicider, il veut se diriger vers l'extrémité la plus septentrionale du globe pour y dresser son bûcher funéraire.

Une fois réduit en cendres, il trouvera la paix, et il emportera avec lui le secret de sa création, évitant ainsi qu'elle puisse être réitérée. Après ces derniers mots, la créature s'enfuit par la fenêtre avant de disparaître sur son radeau de glace.

- The Strange Case of Dr Jekyll and Mr Hyde [1886] de Robert Louis Stevenson

Le notaire M. Utterson a l'habitude de faire une promenade dominicale avec un parent éloigné, M. Enfield, lors de l'une de ces sorties ce dernier s'arrête devant une porte, qui lui rappelle une étrange affaire à laquelle il a assisté. Une nuit d'hiver, à trois heures du matin,

Le notaire M. Utterson a l'habitude de faire une promenade dominicale avec un parent éloigné, M. Enfield, lors de l'une de ces sorties ce dernier s'arrête devant une porte, qui lui rappelle une étrange affaire à laquelle il a assisté. Une nuit d'hiver, à trois heures du matin,

Documents relatifs