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Le repliement des protéines

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Pour assurer sa fonction biologique, une protéine doit acquérir une structure tridimensionnelle adéquate grâce à un processus appelé repliement ou maturation. La majorité des protéines (environ 75%) se replient de façon spontanée en fonction de la charge des différents acides aminés dont elles sont composées. Pour se replier correctement, les autres protéines nécessitent l’assistance de protéines appelées chaperonnes. Les chaperonnes sont des ATPases qui ont la capacité d’héberger et d’offrir un refuge temporaire aux séquences hydrophobes des protéines naissantes qui pourraient être à l’origine d’agrégation inter- protéiques interférant avec le repliement. Elles favorisent ainsi le repliement correct des protéines chaperonnées, appelées protéines clientes. Les protéines adoptent ainsi une structure secondaire avec la présence de motifs structuraux particuliers tels que les hélices (α, 310, П),

les brins et feuillets β, les coudes, etc. La structure tertiaire d’une protéine est la conformation finale d’une chaine polypeptidique. Cette structure est maintenue par différents types d’interactions. Ces interactions peuvent être de type électrostatiques (liaisons ioniques, liaisons hydrogènes), des liaisons de van der Waals, des interactions avec le solvant et l'environnement (ions, lipides...), mais aussi des liaisons covalentes formées par des ponts disulfures entre les résidus cystéines. Ce dernier type de liaison nécessite l’activité d’enzymes particulières (comme par exemple les PDI, Protein Disulfide Isomerase) et d’un environnement très oxydant. Ces liaisons ne peuvent donc pas être formées dans le cytoplasme, elles ne peuvent être réalisées que dans le réticulum endoplasmique. On peut ainsi différencier deux types de protéines, les protéines qui sont synthétisées par des ribosomes libres et qui subissent le processus de maturation dans le cytosol (avec ou sans l’aide de protéines chaperonnes) et les protéines qui sont synthétisées par des ribosomes liés au RE et qui vont subir une maturation plus importante dans le RE (création de ponts disulfure, N-glycosylation...). Les protéines qui sont synthétisées par des ribosomes libres représentent 70% des protéines et seront destinées au cytoplasme ou à des organites intracellulaires tels que le noyau ou la mitochondrie. Les protéines synthétisées par les ribosomes du RE constituent les 30% restants et seront adressées aux membranes plasmiques (canaux ioniques, transporteurs...), au RE (chaperonnes, récepteurs KDEL...), au golgi, aux lysosomes (protéases, lipases...) ou secrétées (albumine, facteurs de croissances, insuline...) (Ghaemmaghami, Huh et al. 2003).

La traduction de ces protéines commence dans le cytosol et la protéine est ensuite importée de manière co-traductionnelle dans le RE grâce à la présence d’un peptide signal. Le

peptide signal est une séquence spécifique et hydrophobe de 3 à 30 acides aminés située à l’extrémité N-terminale de la protéine qui est reconnue par les SRP (Signal Recognition Particle), des complexes composés de 6 protéines, d’ARN et de GTP (Nagai, Oubridge et al. 2003, Sauer-Eriksson and Hainzl 2003). Le SRP se lie au peptide signal, au niveau du ribosome d’où emerege la protéine et à la membrane du RE, par l’intermédiaire du récepteur SRP, lui-même lié au canal de translocation PCC (pour Protein Conducting Chanel, un pore d’environ 4nm) (Gorlich, Hartmann et al. 1992, Gorlich, Prehn et al. 1992, Gorlich and Rapoport 1993). La fixation du SRP sur le ribosome suspend la poursuite de la traduction en bloquant l’accès des facteurs d’élongation eEF1 et eEF2, évitant ainsi que la protéine destinée au RE soit relarguée dans le cytosol. Une fois le SRP fixé à son récepteur, le GTP est hydrolysé, entrainant le détachement du ribosome et la reprise de la traduction (figure 14). Cette translocation co-traductionnelle des protéines dans le RE ne se fait que lorsque la chaine polypeptidique compte au moins 70 acides aminés (40 encore dans le ribosome et 30 transitant par le canal de translocation (Johnson and van Waes 1999). Le peptide signal, nécessaire pour la translocation de la protéine dans le RE ne fait pas partie de la protéine mature et doit donc être excisé de manière co- ou post-traductionnelle par le complexe protéique signal peptidase (SP), composé de 6 sous unités (Evans, Gilmore et al. 1986) et situé sur la membrane interne du RE.

Figure 14 : Reconnaissance du peptide signal et acheminement co-traductionnel vers le réticulum. Le peptide signal est reconnu par SRP, ce qui suspend la traduction. Le complexe

ainsi formé se fixe au récepteur du SRP puis la traduction reprend. La protéine en cours de synthèse est alors acheminée de manière co-traductionnelle dans le RE à travers le canal de translocation (PCC). D’après http://www.ulysse.u-bordeaux.fr

Pour éviter l’accumulation de protéines mal repliées et la formation d’agrégats, le RE dispose d’un nombre important de protéines impliquées dans le repliement des protéines, de manière à assurer une capacité de repliement supérieure à la quantité de protéines naissantes entrant dans le RE. Le repliement des protéines est assuré par des protéines chaperonnes. La fixation d’une protéine cliente à sa chaperonne empêche un mauvais repliement ou la formation d’agrégats. GRP78/BiP (Glucose-Related Protein 78/Binding Immunoglobulin Protein) est la protéine la plus abondante du RE. Cette chaperonne à une forte affinité pour des séquences de 7-8 acides aminés hydrophobes présentes sur les protéines naissantes. Son interaction avec les protéines clientes est dépendante de l’ATP dont l’hydrolyse assure un événement du cycle d’association/dissociation (Melnick, Dul et al. 1994, Gething 1999). Une fois partiellement repliées, les protéines clientes sont prises en charge par une autre chaperonne, GRP94 (Glucose-Related Protein 94), qui s’insère dans des crevasses de la protéine grâce à un doigt amphipatique. Dans le processus de maturation des protéines, l’addition cotraductionnelle d’un oligosaccharide, appelée N-glycosylation, est spécifique du RE. Cet oligosaccharide qui est composé de 14 résidus glucidiques comprenant 2

acétylglucosamines, 9 mannoses et 3 glucoses, est ajouté sur le groupement NH2 d’un résidu

asparagine par l’oligosaccharyl-transférase (OST) (Burda, Jakob et al. 1999). Ce processus de N-glycosylation est primordial puisqu’il joue un rôle dans l’adressage, la maturation et dans le contrôle qualité du repliement correct des protéines en empêchant notamment la translocation des protéines dans le cytoplasme tant que les protéines ne sont pas correctement repliées (Wormald and Dwek 1999). Les résidus glucoses sont ensuite enlevés successivement et de manière réversible par les α-glucosidases I et II. Seule la protéine monoglucosylée est reconnue par les chaperonnes calnexine ou calreticuline (Hammond, Braakman et al. 1994), qui permettent le repliement protéique et la rétention des protéines mal conformées (Williams 2006). Lorsque la protéine cliente aura atteint un certain degré de repliement, le dernier glucose est éliminé par l’α-glucosidase II (figure 15). Si la protéine n’a pas atteint son état de repliement définitif (appelé « native fold »), elle est reconnue par la glucosyltransférase UGGT (par reconnaissance de séquences hydrophobes et du N-acétylglucosamine uniquement accessible sur les protéines mal repliées), reglucosylée en position 1 et de nouveau fixée par les chaperonnes calnexine ou calréticuline (Sousa, Ferrero-Garcia et al. 1992, Taylor, Ferguson et al. 2004). Ce cycle peut se répéter plusieurs fois jusqu'à ce que la protéine soit correctement repliée ou dégradée (en cas de repliement incorrect persistant) et constitue une étape importante du contrôle qualité du repliement des protéines (Ireland, Niggemann et al. 2006).

Figure 15 : Repliement des protéines naissantes dans le RE : fixation des chaperonnes et N-glycosylation. Les protéines naissantes sont repliées dans le RE grâce a l’assistance des

protéines chaperonnes (notamment GRP78, GRP94 et calnexine). La N-glycosylation participe au repliement des protéines et constitue un système de contrôle qualité du bon repliement des protéines. D’après http://www.ulysse.u-bordeaux.fr.

Deux systèmes de dégradation des protéines coopèrent dans le RE, la voie ERAD (pour Endoplasmic-Reticulum-Associated protein Degradation) qui est majoritaire et dégrade les protéines solubles et la macro-autophagie qui permet de dégrader les agrégats de protéines non solubles (Bernales, McDonald et al. 2006). Les protéines N-glycosylées mal repliées subissent le clivage d’un mannose par l’enzyme ER α1,2 mannosidase de type I. La conformation obtenue à 8 résidus mannose ne peut être reconnue par UGGT, mais est reconnue par EDEM (pour ER Degradation Enhancing α1,2 Mannosidase like protein) qui favorise la translocation de la protéine dans le cytoplasme via le canal Sec61α. Cette protéine est alors poly-ubiquitinilée, reconnue, puis détruite par le protéasome (Jarosch, Lenk et al. 2003, McCracken and Brodsky 2005).

A la différence de l’environnement réducteur du cytoplasme, l’environnement du RE est oxydant. Cet environnement oxydatif va permettre la formation de ponts disulfures entre deux résidus cystéines qui caractérisent la majorité des protéines synthétisées dans le RE. Ce repliement oxydatif est effectué par la famille des PDI et permet la stabilisation des protéines en réduisant leur entropie configurationelle dans l’état non replié. Pour former ce pont

disulfure, les PDI oxydent les groupements SH de deux résidus cystéines. Les électrons et protons arrachés lors de cette opération sont provisoirement hébergés par les disulfides (S-S) du site catalytique de la PDI puis sont pris en charge par l’oxydoréductine ERO1-L qui transporte les protons et électrons vers son co-facteur le FAD, le convertissant en FADH2. Enfin, la réaction se termine lorsque les protons et électrons sont cédés à l’oxygène, l’accepteur final d’électrons, pour donner de l’H2O2. Ainsi, la formation de pont disulfure et

donc la maturation des protéines dans le RE est un processus générateur d’espèces réactives de l’oxygène qui contribuent à l’environnement oxydant du RE. Les protéines matures qui ne sont pas destinées à faire partie de la membrane du RE, ni à être sécrétées hors de la cellule sont ensuite dirigées vers l’appareil de Golgi.

III. Le stress du réticulum endoplasmique

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