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RENFORCER LA REFLEXION COLLECTIVE .1 Améliorer le dialogue des juges

PROMOUVOIR LE TRAVAIL EN EQUIPE

2- Promouvoir le travail en équipe

2.1.3 RENFORCER LA REFLEXION COLLECTIVE .1 Améliorer le dialogue des juges

Nous avons envisagé l’avènement d’un collectif des juges successivement au sein d’un service, puis d’un pôle de compétence, puis de la juridiction tout entière. A l’heure de la mondialisation, alors que les questions soumises au juge deviennent plus complexes et les réponses juridiques plus incertaines, la juridiction ne peut pas être l’horizon indépassable du dialogue des juges.

Dans l’annexe du rapport de l’IHEJ intitulé « la gestion des connaissances au sein de la magistrature », M. Mehdi El Harrak a développé de manière convaincante ce qui est abordé de manière plus succincte dans le corps du rapport sous la dénomination de « knowledge management ».

M. Mehdi El Harrak y expose que, pour la circulation et l’archivage des connaissances, les organisa-tions ayant un cycle de travail court et mouvant – telle la justice – trouvent beaucoup d’avantage à déve-lopper une approche basée sur le travail collaboratif, sur la localisation des experts et des «sachants».

Il porte un regard très positif sur les échanges entre les magistrats, au moyen des listes de discussion qui permettent la mise en commun de réflexions de haut niveau. Elles ont pris une ampleur telle que, d’un avis unanime, les magistrats ne peuvent plus s’en passer.

M. El Harrak considère toutefois que la circulation simultanée des connaissances et de l’information au sein de ces communautés arrive à saturation. Le nombre de messages quotidiennement échangés rend le système inintelligible, parfois inefficace. L’échange par courriels groupés ne permet aucun clas-sement, qu’il soit par importance ou par thème et les différentes questions posées sont mélangées aux réponses. L’archivage des connaissances est inexistant. L’outil informatique actuel ne permet plus un traitement serein et fluide de l’information.

Il formule diverses propositions pour améliorer ce système :

1- assurer la visibilité par chaque magistrat de l’ensemble des communautés formées par les listes de discussion, même s’il n’en fait pas partie ;

2- améliorer la circulation de l’information par une localisation plus précise : l’appel à une expertise particulière se ferait donc à travers un domaine du droit déterminé, et non plus par l’envoi d’un mail à tous les adhérents, Au sein des communautés, la subdivision en sous-communautés choisies par les magistrats rendrait les échanges d’ordre technique plus fluides et ciblés ;

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3- constituer une bibliothèque numérique, laissée à la disposition et à la discrétion des magis-trats ; La circulation des meilleures pratiques serait ainsi encouragée. Cet outil permettrait un retour d’expérience pour tirer les enseignements de la gestion des dossiers complexes et inédits.

M. El Harrak estime qu’un outil informatique unique avec les fonctionnalités décrites nécessiterait la présence d’administrateurs à plein temps, qui travailleraient en collaboration avec les administrateurs actuels des listes de discussion, dont la fonction doit impérativement être conservée.

Cette question est apparue importante au groupe de travail car le dialogue des juges, la mise en commun des savoirs et des expériences, la constitution de bases documentaires fiables, permettent une concertation qui améliore la sécurité juridique et qui relève d’une réelle démarche qualitative.

Il a été constaté que les craintes exprimées sur la pérennité des listes ne sont plus d’actualité. Leur hébergement par la nouvelle université de Metz-Nancy est accepté. L’hébergeur souhaitait avoir un interlocuteur identifié et stable. Une association Thémis Home a donc été créée pour répondre à cette préoccupation.

L’association doit recruter un informaticien en vue de créer un outil de tri qualitatif et quantitatif.

Ont donc ainsi déjà été réalisées certaines des préconisations de M. El Harrak.

Le refus de toute institutionnalisation de ces listes a toutefois conduit à ne pas suivre le schéma qu’il propose pour en assurer le développement. M. François Staechelé, magistrat et spécialiste reconnu des technologies numériques, administrateur de plusieurs listes et fondateur de l’association Thémis Home, a fait plusieurs propositions pour améliorer le système actuel :

- rendre accessible aux magistrats sur n’importe quel ordinateur (et donc à leur domicile) les bases documentaires intranet de la Cour de cassation et de l’ENM;

- mettre en place une base de téléchargement permettant de rendre accessible à tous les magis-trats l’enregistrement des sessions de formation continue de l’ENM, qui ne profitent actuelle-ment qu’à un petit nombre;

- instaurer une veille juridique ciblée par fonction;

- instaurer des liens avec l’université pour constituer en commun des veilles juridiques qui pourraient être diffusées à toutes les juridictions, notamment par le biais de comptes Twitter.

Le groupe de travail adhère à ces propositions. Il suggère de lier les deux dernières et d’envisager à cet effet la constitution d’un groupe spécialisé d’assistants de justice. Selon un partenariat à développer avec l’université, ces assistants pourront établir cette veille juridique par fonction et la rendre accessible à toutes les juridictions. Cette équipe aura une taille suffisante pour assurer une qualité de prestation constante en dépit du renouvellement de ses membres. Cette professionnalisation donnera les bases documentaires qui permettront à chacun de vérifier la conformité aux textes et à la jurisprudence des pratiques préconisées sur les listes de discussion.

2- Promouvoir le travail en équipe

PROPOSITION N° 43 : Améliorer les supports qui permettent le dialogue et l’information des juges (listes de discussion, documentation et veilles juridiques) :

a) rendre accessible aux magistrats sur un ordinateur personnel les bases documentaires intranet de la Cour de cassation et de l’ENM ;

b) enregistrer les sessions de formation continue de l’ENM pour les rendre accessibles à tous les magistrats intéressé ;

c) instaurer à l’échelon national un partenariat avec l’université pour constituer un groupe spécialisé d’assistants de justice chargés d’établir une veille juridique par fonction et de la diffuser mensuelle-ment à toutes les juridictions.

2.1.3.2 Enrichir la collégialité

La collégialité traditionnelle n’est pas une réponse suffisante au défi de la complexité. Elle associe le plus souvent des personnes ayant un même profil de formation, d’expérience et de compétence. Elle ne permet donc pas d’associer des juges ayant des spécialités différentes ou des savoirs complémentaires pour couvrir l’ensemble des difficultés suscitées par un litige déterminé.

Si des pôles interrégionaux ont été constitués pour le traitement des contentieux réputés les plus difficiles et s’ils ont permis de créer de véritables équipes de spécialistes, épaulées efficacement par des assis-tants, cela ne répond qu’imparfaitement au problème posé. Ce dispositif ne joue en effet que pour les litiges relevant des pôles interrégionaux. Il ne va pas de soi, sous réserve des réflexions du groupe de travail sur la juridiction du XXIème siècle, qu’il y ait lieu de les généraliser.

Mérite donc d’être retenue la proposition de l’IHEJ et du rapport Guinchard (proposition n° 23) de recruter des juges en service extraordinaire au sein des facultés de droit, par une opération symétrique de celle qui permet à des magistrats d’enseigner en qualité de professeurs ou de maîtres de conférence associés. Ces juges en service extraordinaire poursuivront leurs activités universitaires, mais, une fois recrutés, ils pourront compléter des formations collégiales de jugement, sans jamais y devenir majori-taires, sur décision prise par le chef de juridiction après avis de l’assemblée générale des magistrats du siège, pour répondre aux besoins d’une collégialité de jugement dans une affaire complexe.

Il semble plus difficile en revanche d’ouvrir ce recrutement à des avocats, comme le propose l’IHEJ.

Celui-ci a certes raison de considérer que les grands cabinets d’affaires, qui sont précisément ceux qui posent à nos juridictions le défi de la complexité, ont toutes les compétences requises pour apporter un précieux concours, d’autant que leur connaissance des spécificités judiciaires faciliterait leur intégration à une formation de jugement. Il est d’ailleurs traditionnel qu’un avocat puisse compléter un tribunal lorsque la composition d’une collégialité est impossible.

Mais il s’agit ici de cabinets fortement spécialisés, disposant d’une grande notoriété dans leur domaine de compétence. S’il va sans dire qu’ils ne pourraient siéger dans des affaires mettant en cause direc-tement l’un de leurs clients ou adversaires, peut-on imaginer pour autant qu’ils n’aient aucun intérêt à infléchir la jurisprudence dans un sens ou dans l’autre ? Ils ont nécessairement une clientèle spécialisée et ils ont pour mission de favoriser ses intérêts, affaire après affaire. Leur impartialité objective, nécessaire à l’exercice de la fonction de jugement, pourrait être mise en cause.

2- Promouvoir le travail en équipe

PROPOSITION N° 44 : Recruter des juges en service extraordinaire au sein des facultés

de droit et leur permettre, tout en poursuivant leurs activités universitaires, de compléter les

formations collégiales de jugement, sans y être majoritaires, pour enrichir la collégialité dans

les affaires complexes

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