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Peut-on rendre cette information plus facilement accessible au patient et améliorer sa mémorisation ?

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VII. Peut-on rendre cette information plus facilement accessible au patient et améliorer sa mémorisation ?

L’information orale reste la base de la transmission du savoir. Elle est primordiale car elle peut être adaptée au cas de chaque personne. Elle s’inscrit dans un climat relationnel alliant écoute et prise en compte des attentes du patient.

Mais, elle est souvent incomplète, et de toute façon difficile à retenir, quels que soient les efforts fait par les chirurgiens.

Il se dégage de la littérature que l’information est mieux comprise et mieux retenue si elle est également donnée avec un support. Ceux qui ont eu une fiche d’information ou une vidéo se souviennent mieux des détails que les autres [Galletari et al. [18]]. Cependant, la rédaction de cette information est difficile.

Sur 79 fiches d’information analysées, 6 offraient une difficulté de lecture les plaçant au niveau d’un article du British Medical Journal ! Dans un autre travail, sur 50 fiches, 48 étaient considérées comme plus difficiles à lire que l’éditorial d’un hebdomadaire grand public [Arthur [32]]. Les programmes informatiques «personnalisables» en fonction du cas du patient semblent également efficaces.

Les patients ayant eu accès à une information personnalisée sont plus satisfaits que ceux qui lisent des fiches non personnalisées, ré-utilisent l’ordinateur une fois sur trois, sont mieux informés, et cela coûte en pratique 2 fois moins cher, les patients pouvant imprimer leurs fiches [Jones et al. [33]]. L’utilisation des supports vidéo ou multimédias peut être utilisable dans certains centres, mais la diffusion de leur utilisation est quasi impossible. Si on ajoute à cela l’obstacle de la langue (le berbère) l’analphabétisme, la barrière socio-économique avec les patients illettrés qui ne peuvent pas utiliser les supports écrits ou les patients qui pensent que c’est au médecin de prendre la décision finale, on se trouve dans les conditions réelles de l’exercice de la chirurgie.

La Loi du 4 mars 2002 en France impose aux médecins une obligation d’information à l’égard de leurs patients et ils doivent être en mesure d’apporter la preuve qu’ils ont bien informé le malade.

Depuis 8 ans (en pratique, depuis l’arrêt Hédreul du 25 février 1997), nous assistons à l’apparition de publications démontrant que l’information totale donnée à un patient est mal comprise, et partiellement assimilée.

C’est au médecin, déontologiquement et légalement, de s’appliquer à rendre compréhensible les informations données. Il faut cependant être conscient, notre enquête le suggère, que même avec la meilleure volonté du monde, les patients retiennent peu de choses, pour des raisons variables.

Pour consentir, il faut que le patient comprenne. Cela impose que l’information soit adaptée à la personne et la réalisation de fiches validées par les professionnels pour des patients types hypothétiques, n’est éthiquement pas suffisante, même si elles ont un caractère pratique indéniable.

Ce n’est qu’à partir du moment où l’information aurait été donnée et comprise que l’on pourra obtenir le consentement aux soins du patient. Ce consentement éclairé, traduction de l’anglais «Informed consent» est indispensable mais c’est aussi le maillon faible, celui sur lequel les avocats nord-américains se précipitent, ce qui explique qu’entre 1989 et 1994, plus de trois milles articles sur l’« Informed consent » aient été publiés [Dumontier [34]].

La compréhension par le patient est un des critères les moins recherchés dans le consentement éclairé aux États-Unis. En fait, le consentement est un concept juridiquement simple et binaire, mais médicalement complexe et nuancé.

L’information du patient est une question de nature sociale, psychologique et culturelle et, pas seulement de technique médicale. Quand on analyse les

causes des plaintes contre les médecins, ce n’est pas tant l’information qui fait défaut qu’une certaine qualité de communication dans un contexte qui n’est pas toujours propice à un échange idéal, tant les contraintes y sont déterminantes. Le comment-dire est sans doute plus important que le tout dire.

Notre étude tend à démontrer que les patients sont satisfaits de l’information donnée, parce qu’ils sont satisfaits de l’accueil, de l’écoute et de l’effort fait par les chirurgiens pour expliquer.

Le respect de leur dignité est un élément déterminant dans l’acceptation, volontaire, active, par le patient de l’option thérapeutique proposée et non imposée par le chirurgien. C’est plus la qualité de la relation que l’énumération de complications incompréhensibles pour le patient qui va permettre au patient de donner sa confiance.

Il faut faire l’effort d’informer, non pas tant pour apprendre la chirurgie au patient, que pour montrer qu’on le respecte. Cette attitude est nécessaire pour obtenir sa participation active au traitement et partager avec lui la responsabilité de la prise de décision finale [Hervé et Wolf [35]]. Une signature en bas d’une page de feuille de consentement arrachée au patient à la fin de la consultation ne peut pas avoir une valeur éthique [Hervé [36]].

Avant de consentir à un acte chirurgical, il faudrait que le patient rencontre à plusieurs reprises le même chirurgien qui délivrerait à chaque consultation une information orale totale et loyale, si nécessaire accompagnée d’une fiche d’information écrite.

Il devrait s’astreindre à chaque consultation à évaluer la compréhension de l’information donnée, de manière détaillée et laisser le temps pour que cette

information soit assimilée par le patient entre chaque séance de consultation. Et c’est seulement à partir du moment où le patient aurait assimilé toutes les données de l’information, que le consentement éclairé pourrait avoir une valeur.

Si on prend l’exemple d’un milieu hospitalier où chaque praticien consulte en moyenne une, maximum deux fois par semaine et, avec à chaque consultation, un cahier de rendez-vous qui comporte entre 30 à 40 patients, cela pourrait prendre plusieurs mois. Faire attendre autant un patient qui souffre n’est probablement pas une attitude beaucoup plus éthique !

Ricœur a décrit l’éthique comme « une visée de la vie bonne, avec et pour les autres, dans des institutions justes ». [37]

Si nous voulons continuer notre métier « avec et pour les autres », nous devons nous astreindre à trouver des solutions pour que notre monologue pendant la consultation puisse se transformer en un dialogue avec nos patients. [Voelker [38]].

Pour que « l’institution reste juste », c’est encore à nous qu’incombe la tâche de trouver des propositions pour rendre plus équitable la relation médecin-malade, dans l’intérêt de nos patients et d’éviter que cette tâche soit faite par les juristes, les juges, les avocats, l’État, les associations de patients…et les associations de victimes ! [Weisstub[39]].

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