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Remarques complémentaires sur l’article

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prevalence and incidence and characterization of users

2.6 Remarques complémentaires sur l’article

2.6.1 La distinction entre les neuroleptiques de première et deuxième génération a-t-elle une réalité ?

Si le report de l’utilisation des NL1G vers les NL2G étaient finalement attendu en considérant l’ensemble des aspects discuté dans l’article (recommandations internationales en faveur des deuxièmesgénérations, extensions de leurs indications, marketing des firmes pharmaceutiques…), les conclusions concernant certains neuroleptiques méritent d’être nuancées si l’on détaille leurs utilisations.

A la lumière d’une analyse fine, il semble que la distinction entre première génération et deuxième génération ne soit pas totalement pertinente au niveau psychopharmacologique. D’abord, si l’utilisation de la majorité des NL1G diminue globalement sur la période d’étude, cela n’est pas vrai pour tous. Pour les résultats sur l’incidence d’utilisation (Supplemental Figure 3 de l’article), on observe que parmi les huit NL1G les plus prescrits, quatre ont une incidence soit stable (lévomépromazine et chlorpromazine) soit en augmentation (cyamémazine et loxapine). De même, les variations d’incidence diffèrent entre les NL2G : la rispéridone et l’olanzapine ayant une incidence d’utilisation stable, alors que celle de l’amisulpride diminue et que celles de la quétiapine et de l’aripiprazole (deux neuroleptiques récemment commercialisés) augmentent. Concernant la clozapine, les effectifs sont trop faibles pour décrire une variation d’incidence ; cependant, en nombres absolus, une augmentation (10 à 22) est observée. En fait, nous pouvons faire ressortir quatre groupes de médicaments dont l’incidence d’utilisation est stable ou en augmentation:

- les neuroleptiques à noyau phénothiazine à chaine aliphatiques: la chlorpromazine, la lévomépromazine et la cyamémazine,

- les neuroleptiques dibenzoxazépines/dibenzodiazépines ou les « -pines » (en langage psychopharmacologique): loxapine, olanzapine, quétiapine et (clozapine),

- la rispéridone, - l’aripiprazole.

2.6.2 Des neuroleptiques à distinguer au niveau psychopharmacologique La question est de savoir pourquoi ces quatre groupes ressortent au détriment de neuroleptiques comme le sulpiride, l’halopéridol ou l’amisulpride. Si nous ne pouvons

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envisager tous les niveaux d’explication pour ces variations, certaines hypothèses méritent d’être évoquées.

D’abord, concernant la rispéridone, nous avons souligné dans l’article qu’elle était indiquée dans la prise en charge des pathologies de personne âgées comme les troubles psycho-comportementaux de la démence contrairement aux autres neuroleptiques ce qui peut expliquer son importante utilisation sur la période (prévalence importante des troubles psycho-comportementaux chez les patients déments).

L’aripiprazole, médicament relativement récent, a bénéficié d’une promotion de la part de la firme pharmaceutique au cours de la période d’étude ce qui peut expliquer son émergence. Son profil pharmacologique atypique (agoniste partiel des récepteurs D2) en fait un neuroleptique au profil d’effets indésirables différant des autres neuroleptiques (moins de parkinsonisme mais plus d’akathisie). Par ailleurs, l’extension d’indication chez l’adolescent de 13 ans et plus a permis de soutenir le niveau de prescription de ce neuroleptique. De fait, l’augmentation de l’utilisation des neuroleptiques chez l’adolescent s’explique en partie par l’arrivée sur le marché de l’aripiprazole. Cependant, cet enthousiasme d’utilisation doit être nuancé, car le profil d’effets indésirables de ce médicament n’est pas encore totalement connu. Des signaux d’effets indésirables, comme des jeux pathologiques (voir notre travail en annexe) ou des décompensations psychotiques lors de l’instauration de ce médicament existent. Ces effets indésirables doivent encourager à la prudence, surtout dans des populations vulnérables comme l’adolescent et l’adulte jeune. Par ailleurs, cette augmentation d’utilisation concerne aussi la population des femmes en âge de procréer bien qu’il manque actuellement de données cliniques sur la sécurité de ce médicament vis-à-vis d’un risque malformatif potentiel.

Les neuroleptiques à noyau phénothiazine à chaine aliphatique (chlorpromazine,

lévomépromazine, cyamémazine) et les neuroleptiques en « -pine » (loxapine, olanzapine, quétiapine, clozapine) ont tous en commun de posséder des propriétés sédatives importantes.

La cyamémazine et la loxapine sont, par exemple, des neuroleptiques utilisés par les psychiatres français pour leurs propriétés sédatives. Ces deux médicaments sont classiquement utilisés pour la gestion d’états d’agitation aiguë (psychotique), et sont souvent associés à d’autres neuroleptiques. La lévomépromazine (NOZINAN°) reste parfois utilisée pour ses propriétés sédatives dans la prise en charge de l’héboïdophrénie (forme de schizophrénie faisant partie des psychoses à expression psychopathique).

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Au niveau pharmacologique, il faut revenir à l’historique de découverte de la chlorpromazine pour comprendre cette propriété sédative. En effet, les neuroleptiques phénothiaziniques sont des dérivés des antihistaminiques H1 à noyau phénothiazine ce qui explique leurs effets sédatifs. Les antihistaminiques H1 de première génération ont, de façon générale, une sélectivité faible pour les récepteurs H1, et, par ailleurs, des propriétés latérales atropiniques et antidopaminergiques. Du fait de cette origine, on retrouve chez les médicaments de la famille des phénothiazines des propriétés antihistaminiques H1 généralement associées à des propriétés atropiniques. Ces deux propriétés participent aux effets sédatifs de ces neuroleptiques.

Les neuroleptiques en « -pine » (clozapine, quétiapine, loxapine, olanzapine) ne sont pas directement des dérivés des phénothiazines mais ils possèdent également des propriétés latérales antihistaminiques H1 et atropiniques marquées.

Finalement, (en dehors de l’aripiprazole et de la rispéridone), il semble que les neuroleptiques possédant des propriétés antihistaminiques H1 et atropiniques marquées restent relativement prescrits (incidence stable ou en augmentation). A l’inverse, pour l’halopéridol, l’incidence d’utilisation tend à diminuer en population générale. Au niveau pharmacologique, ce neuroleptique présente pourtant une activité antihistaminique H1 non négligeable qui lui confère de propriétés sédatives, mais il ne possède pas d’action atropinique marquée.

2.6.3 La propriété latérale atropinique des neuroleptiques a-t-elle un intérêt clinique ?

Au total, il semble donc que la prescription de neuroleptiques aux propriétés atropiniques marquées reste toujours d’actualité en population générale. Cette persistance de la prescription de ce type de neuroleptiques soulève plusieurs hypothèses. Notre première hypothèse (décrite dans l’article) serait que les prescripteurs ne connaissent pas bien les effets dommageables de ces médicaments, tant au niveau central (confusion…) que périphérique (rétention aigue d’urine, diminution du péristaltisme intestinal…). Deuxièmement, la prescription de ces neuroleptiques atropiniques resterait une nécessité pour la prise en charge des symptômes d’agitation associés aux tableaux psychotiques, car, globalement, ce sont également les plus sédatifs (du fait du lien entre propriétés antihistaminiques H1 et atropiniques). Cette hypothèse est peut-être la plus simple conceptuellement mais certains

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neuroleptiques comme l’halopéridol, possédant également des propriétés sédatives marquées, ne figurent pas pour autant parmi les plus utilisés. Par ailleurs, les états d’agitation se manifestent plutôt en aigu et l’intérêt, dans la prise en charge de la schizophrénie, d’une sédation chronique est discutable. La troisième hypothèse, peut-être plus provocatrice, est qu’il existerait un intérêt clinique pour un neuroleptique d’être à la fois antagoniste dopaminergique D2 et également antagoniste compétitif des récepteurs muscariniques (et antihistaminique H1) ; ceci pas seulement vis-à-vis de la composante des mouvements anormaux, mais également sur la symptomatologie de la psychose elle-même. La modulation des voies dopaminergiques, par le blocage de récepteurs muscariniques ne peut-elle pas améliorer la symptomatologie déficitaire de certains tableaux psychotiques ? La clozapine possède des propriétés atropiniques marquées, ne reste-t-elle pas, à ce jour le neuroleptique le plus efficace ?

Cette thématique sur les propriétés latérales atropiniques de neuroleptiques nécessite d’être explorée, notamment en utilisant le concept de poids atropinique.

2.6.4 Perspectives

Au niveau pharmaco-épidémiologique

Ce travail à partir de la base de donnée de l’EGB a permis de mettre en évidence une variation d’utilisation des neuroleptiques, en fonction de l’âge, le genre mais aussi du profil pharmacologique. Plusieurs questions restent cependant à explorer au niveau pharmaco- épidémiologique concernant l’utilisation des neuroleptiques.

D’abord, cette approche descriptive (drug utilisation study) demande d’être complétée par une approche analytique, notamment dans la population des enfants et des adolescents. En effet, l’augmentation de l’utilisation des neuroleptiques chez l’enfant et l’adolescent a-t- elle un impact sur l’évolution clinique de ces patients sur le long terme ? Existe-t-il d’autres déterminants (que les extensions d’indications) pouvant expliquer cette augmentation ? Le profil d’effets indésirables de ces médicaments est-t-il vraiment différent entre l’enfant et l’adulte ?

Chez la personne âgée, il semble que les politiques de prévention visant la prescription des neuroleptiques (suite aux alertes sur le risque d’infarctus cérébral sous neuroleptiques) se traduisent par une baisse d’utilisation dans cette population même si la prescription y reste

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toujours importante. Cette diminution observée va-t-elle se poursuivre malgré la diminution des messages de prévention ?

Par ailleurs, la question du poids atropinique des médicaments neuroleptiques nécessite une approche complémentaire, descriptive et analytique. Par exemple, quel est le poids atropinique moyen des prescriptions contenant au moins un neuroleptique ? Ce poids atropinique a-t-il vraiment un impact clinique sur l’évolution clinique des patients ? Pourquoi les neuroleptiques aux propriétés atropiniques marquées restent-t-ils encore largement prescrits ?

Au niveau clinique

Ce travail sur des données de remboursement des médicaments permet d’observer le comportement de prescription des neuroleptiques en France. Il peut aussi servir une réflexion sur l’approche clinque de la prescription des neuroleptiques. En effet, l’émergence de l’utilisation de certains neuroleptiques comme la quétiapine et l’aripiprazole, indiqués dans les troubles bipolaires, interroge. En effet, les neuroleptiques utilisés dans cette pathologie ont montré dans les essais cliniques une efficacité plutôt bonne dans la prise en charge des épisodes aigus de décompensation (décompensation maniaque surtout), mais un effet beaucoup plus modeste sur la prévention des rechutes. Dans ce cadre, il faut s’interroger cliniquement sur la pertinence de la prescription de ces neuroleptiques dans une prise en charge au long cours des troubles bipolaires. Faut-t-il suivre au niveau clinique le mouvement d’accroissement de la prescription de ces médicaments neuroleptiques dans cette pathologie alors qu’il existe des références mieux connues depuis longtemps comme le lithium ?

Enfin, ce travail interroge la pratique clinique de prescription des médicaments atropiniques en psychiatrie, à la fois dans les situations à risque (glaucome, iléus paralytique) mais aussi en considérant les altérations cognitives associées aux troubles psychiatriques. Une approche psychopharmacologique du poids atropinique des prescriptions peut-elle modifier l’évolution clinique des patients psychotiques ?

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3. Publication 2: Atropinic (Anticholinergic) Burden in

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