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Relations rationnelles (et quelques restrictions)

Dans le document Graphes infinis de présentation finie (Page 45-48)

1.4 Familles de relations binaires

1.4.2 Relations rationnelles (et quelques restrictions)

Relations préfixe-reconnaissables

Les relations reconnaissables sont plutôt faibles, et ne permettent aucune

forme de synchronisation entre un mot et son image. Par exemple, la relation

iden-tité n’est pas reconnaissable. Une légère extension de ces relations permettant de

spécifier des relations plus intéressantes est de considérer les clôtures rationnelles

(à droite ou à gauche) de relations reconnaissables [Cho82]. Une relationR

est la

clôture rationnelle à droite d’une relation reconnaissable R=S

i∈[1,n]

(U

i

×V

i

) si

elle consiste en un ensemble fini de relations {(uw,vw)|(u,v)∈U

i

×V

i

,w ∈W

i

},

où chaque U

i

,V

i

et W

i

est un langage régulier (ou rationnel). On qualifie parfois

ces relations de préfixe-reconnaissables [Cau96, CC03]. L’ensemble des relations

préfixe-reconnaissables forme une algèbre de Boole, et il est fermé par composition

et fermeture transitive de la composition.

Un cas particulier de fermeture rationnelle est la fermeture par le langage

Σ

, que nous appellerons simplement clôture à droite ou à gauche de relations

reconnaissables. Cette classe à des propriétés moins intéressantes que celle des

relations préfixe-reconnaissables puisqu’elle n’est close ni par complémentaire ni

par intersection.

Exemple 1.24. La relation identité sur l’alphabetΣ est la fermeture parΣ

de

la relation reconnaissable {ε} × {ε}.

La relation {(a

n

,b

n

) | n ≥ 0} de {a}

vers {b}

associant les mots de même

longueur n’est ni reconnaissable ni préfixe-reconnaissable.

La relation {(a

n

b

k

,a

n

c

l

)| k,l,n≥0} est la clôture à gauche par a

de la relation

reconnaissable b

×c

.

1.4.2 Relations rationnelles (et quelques restrictions)

Nous avons vu au début de ce paragraphe la définition de la loi de composition

interne du monoïde produit. Les opérations d’union et d’étoile sur les parties de

Σ

×Σ

sont définies de la façon habituelle. Grâce à ces opérations, on peut donc

former des expressions rationnelles sur ce monoïde représentant des ensembles

Familles de relations binaires 35

rationnels de paires de mots, que nous appellerons relations ou transductions

rationnelles.

En tant que parties rationnelles d’un monoïde, les relations rationnelles

peu-vent aussi être caractérisées à l’aide d’automates sur Σ

×Σ

appelés

transduc-teurs. On se restreint en général pour plus de simplicité à des transducteurs dont

les étiquettes sont dans l’ensemble générateur(Σ∪{ε})×(Σ∪{ε}). Une transition

étiquetée par (a,b) entre les états de contrôle p et q d’un transducteur est notée

p−→

a/b

q.

Exemple 1.25. La relation {(a

n

,v) | n ≥ 0,v ∈ b

(ab

)

n

} est une transduction

rationnelle, qui peut être représentée par l’expression rationnelle

((ε,b)

(a,a))

(ε,b)

={(a,a),(ε,b)}

.

Elle est aussi la relation acceptée par un transducteur à un état possédant deux

boucles étiquetées respectivement par a/a etε/b.

Nous ne distinguerons pas un transducteur de la relation qu’il accepte, et

écrirons simplement(w,w

)∈T quand la paire(w,w

)est acceptée par un certain

transducteur T. Le domaine Dom(T) et le co-domaine (ou image) Im(T) de T

sont les ensembles {w | (w,w

) ∈ T} et {w

| (w,w

) ∈ T}. Un transducteur

reconnaissant une relation qui est une fonction est qualifié de fonctionnel. Un

transducteur est non-ambigu s’il possède au plus un calcul acceptant sur toute

paire (u,v).

1.4.2.1 Relations lettre-à-lettre et relations synchronisées

Des classes intéressantes de relations rationnelles peuvent être obtenues en

for-çant une forme de synchronisation entre la façon dont un transducteur consomme

son entrée et produit sa sortie. En particulier, les relations rationnelles sur les

paires de mots de la même longueur, appelées relations lettre-à-lettre ou

alpha-bétiques, coïncident avec les parties rationnelles du monoïde libre (Σ×Σ)

, et

sont donc reconnues par les automates finis à étiquettes dans Σ×Σ (plus

éven-tuellement (ε,ε)) appelés transducteurs lettre-à-lettre ou synchrones.

Exemple 1.26. La relation {(a

n

,b

n

) | n ≥ 0} est une transduction

lettre-à-lettre. Elle est acceptée par le transducteur à un état possédant une unique boucle

étiquetée par a/b.

Une forme plus lâche de synchronisation introduite dans [EM65] autorise

l’usage d’un symbole spécial

à ajouter (uniquement) à la fin du mot le plus

court d’une paire de mots afin que la paire en question puisse être accepté par un

transducteur synchrone. Ces relations sont en général appelées automatiques ou

définissables par automates. Plus formellement, une relation R est automatique

si la relation{(u

i

,v

j

)|(u,v)∈R,i = max(0,|v| − |u|),j = max(0,|u| − |v|)} est

une transduction lettre-à-lettre.

Cette classe de relations a également été étudiée dans [FS93] sous le nom

de relations synchronisées. Une relation est synchronisée à gauche si elle peut

s’écrire comme une union finie de produitsR.S, oùR est une transduction

lettre-à-lettre et S est de la forme (L,ε)ou(ε,L), avec Lun langage régulier sur Σ. De

façon équivalente, les relations synchronisées sont celles qui sont acceptées par

les transducteurs dans lesquels pour tout chemin q

0

x0/y0

−→ q

1

. . . q

n−1

xn/yn

−→ q

n

, il

existe k ∈ [0,n] tel que pour tout i ∈ [0,k− 1], x

i

,y

i

∈ Σ et soit x

k

= . . . =

x

n

= ε soit y

k

= . . . = y

n

= ε. De tels transducteurs sont dits synchronisés à

gauche. Les relations et les transducteurs synchronisés à droite sont définis de

façon similaire. Bien sûr, les transductions synchronisées incluent strictement les

clôtures rationnelles de relations reconnaissables, mais sont strictement incluses

dans les transductions rationnelles générales (par exemple, la relation de l’exemple

1.25 n’est acceptée par aucun transducteur synchronisé).

Exemple 1.27. La relationR ={(a

2k

,b

m>2k

),(a

2k+1

,b

m≤2k

)|k ≥0}est

synchro-nisée à gauche. Elle est acceptée par le transducteur suivant :

q

0

q

1

q

2

q

3

a/b

a/b

a/ε

ε/b

ε/b

a/ε

Remarque 1.28. Si on applique la procédure de déterminisation standard à un

transducteur synchrone, on obtient un transducteur synchrone non-ambigu

équi-valent (c’est à dire possédant au plus un chemin acceptant par paire de mots).

Ce résultat reste vrai pour les transducteurs synchronisés.

1.4.2.2 Relations séquentielles

Si l’on considère les transducteurs comme des automates lisant un mot en

entrée (la première composante de la paire de mots lue) et produisant un mot en

sortie (la seconde composante), la notion standard de déterminisme des automates

n’a pas beaucoup d’intérêt dans ce cas, parce qu’elle s’appuie à la fois sur l’entrée

et sur la sortie. Par exemple, un transducteur possédant les transitions q

0

a/b

−→q

1

et q

0

−→

a/c

q

2

pourrait être déterministe, ce qui ne correspond pas à l’intuition.

Une notion plus adaptée est celle de séquentialité, qui fait uniquement référence

à la façon dont un transducteur consomme son entrée.

Un transducteur T d’ensemble d’états Q estséquentiel si pour tous q,q

∈Q,

si q −→

x/y

q

et q

x

−→

/y

q

′′

alors soit x = x

, y = y

et q

= q

′′

, soit x 6= ε, x

6=ε et

x 6=x

. En d’autres termes, un transducteur est séquentiel si l’automate obtenu

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en effaçant la seconde composante de chacune de ses transitions est déterministe.

Remarquez qu’un transducteur séquentiel est nécessairement fonctionnel.

1.4.2.3 Propriétés des relations et transducteurs rationnels

Il existe un rapport étroit entre les langages réguliers (rationnels) et les

rela-tions rationnelles. En particulier, en effaçant la première (resp. la seconde)

com-posante de chaque transition d’un transducteur on obtient un automate fini

re-connaissant le domaine (resp. l’image) de la relation associée. Donc le domaine et

l’image d’une relation rationnelle sont des langages réguliers. D’autre part, une

construction simple permet de restreindre le domaine ou l’image d’une

transduc-tion à un ensemble régulier, et cette constructransduc-tion préserve la séquentialité ou la

synchronie du transducteur.

Lemme 1.29. Les relations rationnelles ont un domaine et une image réguliers,

et sont fermées par restriction à un domaine régulier ou une image régulière. De

plus, si R est un langage régulier sur Σ, pour tout transducteur séquentiel (resp.

synchrone) T sur Σ, le transducteur obtenu en restreignant T au domaine ou à

l’image R est séquentiel (resp. synchrone).

Une conséquence très intéressante de ces résultats est également que l’image

d’un langage régulier par une transduction rationnelle est aussi régulière : en

effet, partant d’un tel langage L, si l’on restreint le domaine d’un transducteur

T à L, il est facile de construire l’automate fini acceptant l’image de ce nouveau

transducteur. Le langage de cet automate est précisément T(L). On dit que les

relations rationnelles préservent la régularité. Comme les relations rationnelles

sont closes par inverse, l’image inverse d’un langage régulier par une transduction

rationnelle est elle aussi bien sûr régulière.

Les transductions rationnelles sont closes par composition et par union, mais

ni par complément, ni par intersection. À l’opposée, les relations synchronisées

forment une algèbre de Boole. Elles sont en fait la plus grande famille connue de

relations rationnelles possédant cette propriété. Notons aussi qu’aucune famille de

relations au moins aussi générales que les transductions lettre-à-lettre n’est fermée

par composition itérée, puisque ces relations peuvent très facilement représenter

des transitions de machines de Turing déterministes.

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