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La relation entre la morphométrie des facettes triangulaires et les signaux

CHAPITRE I. Contraindre la vitesse de glissement long terme des failles

I.4. Les outils permettant l’étude de la dynamique du relief

I.4.3. La quantification des vitesses d’érosion et des vitesses tectoniques par l’analyse

I.4.3.3. La relation entre la morphométrie des facettes triangulaires et les signaux

Les facettes triangulaires, et en particulier leur morphométrie (hauteur et pente), ont été utilisées depuis peu pour tenter de contraindre les signaux tectonique et/ou érosion (e.g.,

DePolo et Anderson, 2000 ; Petit et al., 2009a, 2009b ; Tucker et al., 2011).

DePolo et Anderson (2000) ont recherché une relation entre la hauteur des facettes

triangulaires et la vitesse de glissement des failles normales. Pour cela, ils ont réalisé une étude statistique en utilisant les reliefs associés à un grand nombre (45) de failles normales du Basin and Range. Ils ont mis en évidence une relation logarithmique entre la vitesse verticale du glissement sur la faille et la hauteur des facettes triangulaires (figure I.22a). Ils utilisent ensuite cette relation pour contraindre les vitesses long terme mal connues des failles normales du Basin and Range en mesurant la hauteur des facettes triangulaires correspondantes. Ils déterminent une gamme de vitesse de 0,001 à 2 mm/a, ce qui est raisonnable pour les failles normales. Ils ajoutent que les failles normales à faible vitesse (< 0,1 mm/a) ne présentent pas de facettes triangulaires, ou alors elles sont trop dégradées (figure I.22b).

Petit et al. (2009a) développent des modélisations numériques visant à reproduire la

dynamique du relief associé aux failles normales actives (cf également partie I.3.1 et figure I.14). Les auteurs reproduisent bien le paysage caractéristique lié au jeu tectonique d’une

faille normale pour des conditions climatiques données. Ils mesurent alors la morphométrie (hauteur et pente) des facettes triangulaires lorsque le modèle est à l’état stationnaire pour différentes conditions climatiques. Les résultats montrent des relations linéaires entre la pente des facettes et la vitesse de glissement de la faille d’une part, et entre la hauteur des facettes et la vitesse de glissement de la faille d’autre part. Ceci montre que si les paramètres climatiques sont connus même grossièrement, il est possible de déterminer la vitesse long terme de glissement sur les failles normales à travers l’analyse morphométrique des facettes (e.g.,

Ganas et al., 2005a). Les auteurs utilisent enfin une modélisation de la topographie pour la

faille de Wasatch dont la vitesse de glissement est bien contrainte, ce qui leur permet de déterminer les paramètres climatiques (taux de précipitations, coefficient de diffusion) ayant produit ce relief.

Petit et al. (2009b) mesurent la morphométrie (hauteur, pente) des facettes

triangulaires observées le long de 20 segments de faille normale du rift Baïkal. La hauteur et la pente des facettes varient fortement (200-900 m et 22-38°, respectivement) dans cette zone où le climat ne devrait varier que très peu d’un segment de faille à un autre. Les auteurs attribuent donc cette variation aux différentes vitesses de glissement des segments de faille normale. Ils utilisent ensuite les modélisations numériques de Petit et al. (2009a) pour déduire une relation entre la hauteur des facettes et la vitesse de rejet de la faille ainsi qu’une relation entre la hauteur et la pente des facettes. Les deux relations sont linéaires (figure I.22c) et la relation entre pente moyenne et hauteur moyenne des facettes mesurées dans l’étude de terrain ressemble fortement à celle qui découle des modèles numériques (pente de régression linéaire identique ; figure I.22c), sauf qu’un seuil de pente est atteint à environ 35°. Ils utilisent alors les modèles numériques pour contraindre la vitesse de glissement verticale des segments de faille à partir de la hauteur des facettes triangulaires mesurée sur les MNT. Les résultats donnent des vitesses de glissement verticales variant de 0,2 à 1,2 mm/a, ce qui est proche des valeurs de vitesses de glissement estimées sur les failles normales du Basin and Range (e.g., DePolo et Anderson, 2000).

Pour finir, Tucker et al. (2011) ont proposé un modèle géométrique simple permettant de relier la vitesse de glissement long terme des failles normales au taux d’érosion sur la surface des facettes triangulaires dans le cas d’un profil de pente linéaire (figure I.22d ; cf

également partie I.4.4.2). Ce modèle implique que la surface des facettes triangulaires soit plane et pas convexe et que la différence angulaire entre pendage de la faille et pente de la facette traduise la compétition entre tectonique et érosion. Pour modéliser la forme convexe des facettes triangulaires, les auteurs proposent un modèle numérique où le taux d’érosion varie en fonction du temps (en fonction des paramètres climatiques) et où la surface des facettes suit le modèle conceptuel de retrait de pente.

Figure I.22. (A) Statistique des failles normales classifiées en type 1, 2 ou 3 en fonction du taux de

glissement sur la faille dans le Basin and Range (d’après DePolo et Anderson, 2000). Les failles à vitesse faible (< 0,1 mm/a) ne présentent pas de facettes triangulaires actives. (B) Relation logarithmique entre le taux de glissement sur la faille et la hauteur maximale des facettes triangulaires pour le set de failles normales de type 1 montré en (A) (d’après DePolo et Anderson, 2000). (C) (a) Relation entre la hauteur moyenne des facettes triangulaires mesurée dans le rift Baïkal et le taux de glissement sur la faille déduit des modélisations numériques de Petit et al. (2009a). (b) Relation entre la hauteur moyenne et la pente moyenne des facettes à partir des modèles numériques de Petit et al.

(2009a). (c) Relation entre la hauteur moyenne et la pente moyenne des facettes observées dans le

rift Baïkal. La relation est quasi identique à celle déduite des modélisations numériques (d’après Petit

et al., 2009b). (D) Relation géométrique entre le taux d’érosion  [L.T-1

] perpendiculaire à l’escarpement (base des facettes triangulaires) et le taux de glissement [L.T-1

] sur la faille normale (d’après Tucker et al., 2011). Cette relation est valable pour la partie de l’escarpement où la pente est linéaire.