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Quelle différence entre participation politique et réincorporation politique pour le mouvement collectif des femmes farianas ? Quel est le rôle des femmes farianas et du feminismo insurgente ? Quels sont les enjeux et défis à relever pour une réintégration post conflit qui inclut une perspective de genre ?

1. Entre participation politique et processus de réincorporation

La réincorporation politique de la guérilla signifie un retour vers la légalité, la sortie de la clandestinité et la restitution des droits citoyens, dont la participation dans le domaine politique. Mais il faut différencier la participation politique, qui est le point 2 de l Acco d e la réincorporation politique se trouvant dans le point 3 « Fin du conflit ». La différence est d o d e ocial ; « participent » celles qui sont éduquées et ont reçu une formation politique et

148 Hobeth MARTINEZ, « Insistâmes en la paz territorial », De justicia, (en ligne), mis à jour en mars 2020,

« se réincorporeront » celles issues du milieu rural qui auront réussi leur réinsertion dans la vie civile, une ie q elle ont souvent quitté dès leur plus jeune âge.

Comme écrit dans le point 2 de l Acco d Final Participation politique, la guérilla des FARC- EP est officiellement devenue un parti politique le 31 août 2017, en se nommant Force Al e na i e R ol ionnai e Comm ne, con e an l ac on me FARC. Le pa i FARC a obtenu cinq sièges au Sénat et cinq au Congrès. Deux chaises au Sénat sont occupées par des femmes du parti FARC, Victoria Sandino et Sandra Ramirez, mais au Congrès la totalité des chai e e occ p e pa de homme . No po on donc ema q e q e la pa i n e pa respectée, et que les femmes ne sont pas reconnues comme actrices politiques égales à leurs homologues masculins. Lors des élections régionales le 27 octobre 2019, le parti a présenté 301 candidat. e. s dans vingt-trois départements dont 39 % de femmes et 61 % d homme . S ces candidat. e. s, 33 % on d e -FARC, dont 63 hommes et 35 femmes. Pour pouvoir se réincorporer dans la société civile sur le long terme, la reconnaissance institutionnelle et politique en tant que citoyens et citoyennes est indispensable. Tant pour renforcer le lien social avec la population colombienne que pour renforcer la confiance des ex-combattant. e. s envers les institutions colombiennes et éviter leur reprise des armes. Ainsi, le fait que Victoria Sandino et sa collègue, certes deux ex-combattantes, siègent au Congrès, elles représentent une participation politique de de femme d j m dia i e , achan manie l a o a oi e, l ai e dan le monde poli iq e e a e dan le leade hip. Tandi q e la « réincorporation » des ex-combattantes concerne des femmes FARC, pour la plupart issue du milieu rural et pay an, q i a i e aien in e dan le milie poli iq e e fai e en end e le oi , ma ginali e dep i long emp . Comme l e pliq e Vic o ia Sandino dan ne interview, « En la participacion politica debe haber una formacion especifica de liderazgo a

las mujeres », sans formation, la très grande majorité des ex-combattantes ne pourront se

réincorporer et non plus participer au sein du nouveau parti FARC149. Se le l li e

intellectuelle pourra les représenter et participer au sein du parti, ce qui paraîtrait en contradiction avec leur leitmotiv prônant une réincorporation collective et non discriminante. Comme le rappelle un rapport des FARC de 2020, il existe aussi des défis à relever dans la participation politique des femmes : ne pas les limiter aux a a ele an de l gali de gen e, a i q e d affaibli o de di c di e le pa icipa ion la poli iq e g n ale, e de réduire leurs actions aux questions liées au genre.

149 Verdadabierta.com, « Las mujeres queremos espacios de dirección en el partido », Interview avec Victoria

Nous allons analyser le processus de réincorporation politique et décrire le rôle joué par les femmes ex-combattantes.

Q e de en le p oce de inco po a ion poli iq e de e -combattantes, pour celles qui ne sont pas habituées au monde politique, celles qui représentent la classe paysanne et rurale, celles qui ont fui les violences intrafamiliales pour entrer chez les FARC, celles qui représentent la réincorporation collective, avec tous les idéaux pour une société plus juste et égalitaire ?

La réincorporation des femmes ex-combattantes, comprends une étape de formation politique, le pe me an de conna e l en i onnemen j idiq e, le p incipe de la d moc a ie, e la mani e d e e ce la poli iq e dan le domaine in i ionnel, ocial e comm na ai e. Ce e formation aux affaires politiques vise à renforcer leur leadership, mais aussi la confiance en elle , q i le e a ile po aff on e de milie poli iq e , q i po en l a ance, de fo préjugés sur leurs capacités. La promotion du leadership de ces femmes est donc essentielle à leur réincorporation politique. En créant au niveau local, des comités de genre, associations, coop a i e q i aiden a d eloppemen de l app oche de gen e dan le domaine poli iq e, cela permettrait de mettre à la lumière les actions et compétences des ex-combattantes en politique. En réponse à ces demandes, le document CONPES 3931 a proposé un programme national visant à déployer la réincorporation sociale et économique des excombattant. e. s des FARC-EP. L e poi d ne poli iq e in g an la pe pec i e de gen e e ai ain i rendu possible par le processus de réincorporation dans la vie civile. Il est en effet établi que la réincorporation doit adopter une perspective de genre, et inclure la Résolution 1325 de 2000 et la Recommandation 30 l limina ion de o e le fo mes de discrimination contre la Femme (CEDAW en anglais). Ainsi, diverses mesures ont été adoptées dès début 2019 en concertation avec « l Agence Na ionale po la R inco po a ion » (ARN) dont une stratégie visant à améliorer et développer le concept de citoyenneté chez les femmes des communautés rurales comme chez les ex-combattantes. Cela consiste à mieux connaître leurs droits, participer dans les affaires publiques, acquérir les différents moyens de construire une paix durable, et agir au niveau local, territorial et national pour améliorer les avancées vers l gali de gen e.

En ce qui concerne la politique des quotas, comme tous les partis politiques colombiens, la loi exige un quota de 30 % de femmes minimum au sein du parti. Le point de vue sur le système de q o a de Vic o ia Sandino, me mon a i le p obl me h o iq e q e po e l incl ion

d ne pe pec i e de gen e dan l Acco d de pai . C e dan la p a iq e e la mi e en place de me e q n changemen c l el po a a oi lie , o po l in an bea co p de ce mesures stagnent encore à leur phase théorique. Dans cette réponse, Victoria Sandino expose a i bien la olon de changemen collec if en an q ac ice e je poli iq e :

Nosotras queremos una posición, nosotras no queremos que nos den unos cupos, unas cuotas que nos las den porque somos mujeres, nosotras lo que queremos es que nos reconozcan lo que hemos sido, lo que somos y lo que vamos a seguir siendo. No estamos en contra de las cuotas, nosotras creemos que las cuotas sirven para avanzar, pero no es lo único, no es lo fundamental. Pero en el partido nosotras nos lo queremos ganar distinto, nosotras hemos arriesgado la vida, pero cuando hablamos de optar cargos de dirección no nos arriesgamos tanto. No todas, pero estamos en ese proceso de formación, de discusión y de convencimiento con las compañeras con las camaradas, nosotras podemos así que vamos a estar y esa es como la apuesta, ¿no?, incluso no necesariamente puede ser paridad por qué no a unos años, dependiendo del papel que tengamos las mujeres puede ser 60% frente a un 40% hombres150. 2. Le feminismo insurgente mené par Victoria Sandino

Le concept de féminisme insurgeant « feminismo insurgente » est une forme de féminisme inspiré par les ex-combattantes FARC, qui reste dans le contexte anticapitaliste, en liant l mancipa ion de femme la l e de cla e . Ce concep o ce e iden i , a donc c en 2013 pour regrouper les femmes combattantes autour de la construction de la paix, et revendiquer leur le en an q ac ice hi o iq e e poli iq e . Une page eb a c e po ep en e e end e i ible le ac ion e l e de ce femme . A jo d h i ce e page pe me d e po e le be oin de femme e -combattantes dans la période des négociations et post-confli , an en an q e femme q ancienne comba an e. D ap ce f mini e , don la cheffe de file est Victoria Sandino, ancienne membre des FARC et présente aux négociations à la Havane, le système politique et économique colombien ne peut changer si la culture patriarcale perdure dans les institutions et anime la société civile. Elles luttent contre la domination patriarcale et la soumission des femmes aux rôles traditionnels de genre et pour n el changemen c l el e oci al. D après elles, cette philosophie permet de combiner une réinsertion dans la vie civile, tout en gardant les principes révolutionnaires idéologiques de la l e a m e, afin d am lio e la ie poli iq e e ociale colombienne. Le femme

farianas comprennent toutes les femmes qui ont combattu dans les rangs des FARC, et aussi

toutes celles qui pa agen e iden ifien a id e hic l e pa le mo emen . Comme l c i l dian e Ma ia I q ie do dan on m moi e la inco po a ion poli iq e de e - combattantes FARC, les femmes farianas ne doivent pas être perçues comme un groupe ou

une organisation, mais davantage comme une identité151. Les thèmes principaux sont la lutte

de cla e , l an icapi ali me, l an icoloniali me, la l e po l mancipa ion de femmes et la lutte anti patriarcale. Le féminisme insurgente permet donc aux ex-combattantes en période de an i ion la ie ci ile, de fai e pa ie d n g o pe o elle pe en p end e de d ci ion , avoir un rôle politique, sans discrimination ni stigmatisation. Grâce à ce concept, elles peuvent agir en tant que sujets politiques pour leur avenir et leur réintégration, en mettant en valeur les idées communautaires de la guérilla et non les armes. Comme le décrit cette ancienne combattante, elles sont prêtes pour la lutte sociale, mais dans la légalité : « Nosotras

ya hemos vivido una experiencia y tenemos mucho que aportar. Hemos vivido una etapa muy dura que es la de las armas, si fuimos capaces de empuñar un fusil e ir a la pelea, al combate, a la trinchera, cómo no vamos a ser capaz de hacer esta otra etapa que es la lucha social152». De pl , le f mini me in gen a ga d l a pec collec if p op e a g illa

ma i e , ca l objec if p incipal e la lib a ion collec i e de o le opp im (e) , an distinction de races, classes et sexes. Pour ces femmes toute lutte ne peut se faire que collectivement : « nadie se liberta solo ni sola153 ».

L app oche de gen e dan l Acco d Final a a i pe mi de end e i ibles les exclusions et les barrières sociale e in i ionnelle q e doi en aff on e le femme lo q elle e len participer en politique. Outre la sécurité et la stigmatisation qui sont des freins à leur pa icipa ion poli iq e, le manq e d d ca ion e de fo ma ion de ca i e poli iq es les emp che d e e ce le leade hip en p blic, comme l e pliq e ce e ancienne comba an e d M19 :

En el ámbito político la oralidad es un aspecto que tiene un gran peso, y los hombres tienen esa formación de hablar en público y la aceptación social como guerreros. Las mujeres desde las guerrillas fuimos invisibilizadas, además del estigma social por haber sido guerrilleras, teníamos la carga de responsabilidades domésticas y laborales, que hacían mucho más difícil la participación en política154.

151 Maria Alejandra IZQUIERDO CASTRO, « Reincorporación política de las mujeres de las FARC-EP. Estudio

de caso: farianas.», mémoire en sciences politiques, Bogotá DC, Pontificia Universidad Javeriana, 2018.

152 Ramon BLANCO, Maria MERCADANTE, « La paz también tiene rostro de mujer : las mujeres farianas y el

feminismo insurgente en el mantenimiento del sujeto colectivo postconflicto », Revista Sul-Americana de

Ciência Politica, n° 6, 2020, p.54. 153 Voir sur mujeresfarianas.org.

154 Maria Alejandra IZQUIERDO CASTRO, « Reincorporación política de las mujeres de las FARC-EP. Estudio

Le femme de l o gani a ion M je e Fa iana l en p incipalemen po l d ca ion de femmes colombiennes et contre la violence de genre : «no volveremos a los hogares con los

roles tradicionales: queremos ser motor de cambios y ejemplos de liberación155 ».

Elles veulent créer ne ol ion ociale. Le b e donc d a onomi e le e cl . e. s de manière collective, en gardant la mentalité communautaire héritée de leur passé ol ionnai e. C e en p opagean l id e d gali en e le homme e le femmes et le e pec de le d oi h main a ni ea e i o ial q n changemen c l el, mais aussi conomiq e a e p od i e. En liminan la oci pa ia cale e machi e, c e n no el o d e conomiq e q i po a na e d ap le f mini e insurgeant es. Elle ne in gen pas seulement pour les femmes, mai a i po le homme e fon ne c i iq e d ne ma c lini iolen e e adi ionnelle en Colombie, q i p opage l id e q e le femme fon partie du monde « privé » et domestique et les hommes du monde « public », comme dans le domaine politique.

Le féminisme insurgent peut donc être vu comme une transition entre la lutte révolutionnaire et la lutte politique institutionnelle, une étape de transformation, de la réincorporation vers la participation politique et vers un nouveau modèle incluant la perspective de genre.

Pour les FARC, il y a deux objectifs principaux et nécessaires au processus de réincorporation politique des femmes farianas, le premier est de promouvoir la participation et la représentation des femmes farianas dans le milieu politique, pas seulement dans la théorie, mai dan la p a iq e, comme no l a on anal p c demmen . Le de i me objec if c e de mettre en place un processus de mémoire historique qui permet de comprendre les raisons de leur engagement révolutionnaire, pour ainsi mieux comprendre les failles du système colombien e le pon e poli iq e q elle pe en appo e en an q ac ice de la pai .

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