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Certes, le gouffre salarial entre le public et les GAFAM ne peut être comblé. Mais un salaire suffisamment élevé – permettant par exemple de se loger en région parisienne – est cependant nécessaire4.

La véritable marge de manœuvre réside dans les conditions d’embauche que la recherche publique peut proposer, en particulier la stabilité de l’emploi, seule à même de permettre une recherche sereine à long terme.

Les conditions de travail – allant des facilités de calcul aux facilités adminis-tratives en particulier pour les étrangers – seront discutées plus bas. Il faut souligner que le mille-feuille administratif est illisible pour les chercheurs étrangers que nous voulons accueillir, et totalement dissuasif pour les Français de l’étranger, qui le connaissent à travers leurs collègues et amis : des condi-tions ad hoc devront impérativement être mises en place.

Les obligations des chercheurs se résumeront à participer à l’enseignement (un ou deux modules par an), à l’animation d’un séminaire et, sur une base volontaire, à participer aux échanges avec les membres industriels affiliés. Les instituts pourront accueillir les chercheurs selon plusieurs statuts ; les modalités choisies (et les modes de recrutement) sont laissées à l’appréciation des instituts eux-mêmes (principe d’autonomie).

– les Compagnons (Fellows) seront présents à temps plein, détachés de la fonction publique ou embauchés directement, suivant les cas. Leur financement comprendra, outre un salaire conséquent, le budget environné pour une équipe de doctorants et chercheurs postdoctoraux travaillant sur leur programme de recherche. Ils seront les garants de la réputation de l’Institut, chargés de l’animation scientifique (séminaires de recherche, invitations,…), et devront s’impliquer dans une formation supérieure locale. Ils pourront sur une base volontaire animer les relations avec les affiliés industriels ;

– les Compagnons associés seront présents à temps partiel, occupant le reste du temps le poste dont ils sont titulaires ; ils bénéficieront également de financements de type chaires : complément de salaire et budget pour une petite équipe de recherche autour de leur projet ;

– les Affiliés sont des chercheurs statutaires, proches thématiquement de l’Institut. Ils seront co-optés par les Compagnons pour participer aux charges et aux bénéfices, avec une obligation minimum de participation régulière aux séminaires et discussions afférentes ;

– des chercheurs seront invités en tant que visiteurs résidents pour des périodes de 3 mois à un an, éventuellement réparties sur plusieurs années, profitant par exemple de leurs périodes d’été ou sabbatiques, de manière analogue aux chaires Blaise Pascal, ou aux chaires internationales Inria. Ils pourront bénéficier d’indemnités de logement et de séjour, et pourront également inviter leurs étudiants pendant de plus courtes périodes, voire embaucher un postdoc pour la durée de leur séjour.

Chacun de ces statuts devra être accessible à plusieurs niveaux de séniorité : les seniors assureront la réputation et le pilotage scientifique, les juniors participeront activement à l’encadrement des doctorants et des postdocs.

4. Aujourd’hui, le salaire d’un chercheur débutant, après 8 ans d’études post-bac, est de l’ordre de 1,7 SMIC.

La formation

Les chercheurs d’un institut 3IA devront contribuer significativement à l’enseignement supérieur de l’IA dans leur région d’implantation, créant ou renforçant des filières de formation supérieure de qualité attractive de par la présence de chercheurs de haut niveau au cœur de l’équipe enseignante. L’engagement d’enseignement des membres recrutés serait compris entre un et deux modules par an.

La formation continue destinée aux entreprises affiliées ainsi qu’aux chercheurs d’autres disciplines, aussi importante que la formation classique licence/master, pourra être assurée par exemple par les chercheurs postdoctoraux embauchés par l’institut 3IA. L’organisation de défis pourrait constituer un véhicule utile pour partager les données, l’expérience acquise et disséminer les bonnes pratiques en termes de « poser un problème » et valider une solution en IA. L’expérience acquise par le labex AMIES5 pourra également servir d’inspi-ration, en soulignant que la demande dépasse très significativement l’offre. Les bonnes idées abondent et sont accueillies avec enthousiasme aussi bien par les industriels que par les étudiants : la barrière est le manque de temps des encadrants compétents et motivés.

Pour répondre à cette demande, les solutions consistant à faire intervenir les étudiants de niveau master dans la formation des étudiants de licence pourront être explorées. La construction par les élèves de master de défis à usage de leurs camarades de licence (comme pratiquée par exemple à l’Université Paris-Saclay) constitue un exemple d’innovation pédagogique et pratique remarquable, dans un domaine comme l’IA où l’importance des défis n’est plus à démontrer.

Quatre points essentiels devront être pris en compte au niveau de la formation en IA : ils sont relatifs à la diversité des étudiants d’une part, et aux impacts de l’IA sur la société d’autre part (voir la partie éthique de ce rapport). Certains apprennent en prouvant et d’autres en faisant. Il est nécessaire d’offrir aux étudiants tournés vers la théorie une formation décloisonnée entre mathématiques et informatique. Parallèlement, il est nécessaire d’offrir des modules intenses en expérimentation, dotés des moyens de calcul appropriés. En troisième lieu, les dangers d’une mise en œuvre aveugle de l’IA appellent la définition dans les instituts de cursus interdisciplinaires (Maths / Info / SHS) à même de poser les questions liées à l’éthique des IAs que nous saurons mettre en place demain – et dans tous les cursus IA, de modules obligatoires destinés à sensibiliser les étudiants à ces questions. Le réseau des instituts 3IA pourra ici jouer un rôle d’aide à la diffusion. Enfin, il est nécessaire que les étudiants puissent bénéficier d’une formation à l’entrepreneuriat, profitant directement de la présence de startups partenaires de l’institut – et réciproquement, par exemple, dans le cadre d’enseignements par projets.

5. Le labex Agence pour les Mathématiques en Interaction avec l’Entreprise et la Société propose des Projets Exploratoires Premier Soutien (PEPS) pour le défrichage d’idées immatures ; une foire de l’emploi ; etc.

Les entreprises

Le besoin des entreprises de pouvoir attirer, retenir des ingénieurs bien formés et de disposer d’un circuit court d’interaction avec la recherche de pointe, est attesté à tous niveaux. Le besoin d’expertise, notamment en ce qui concerne le choix des solutions technologiques, est également avéré, et le manque de cette expertise est clairement dommageable pour les solutions de la French Tech.

Les instituts 3IAs répondront à ces besoins, irrigueront le tissu industriel en tenant compte de sa diversité et constitueront un tremplin pour la valorisation et le transfert des résultats de recherche conjointe avec l’industrie. Le mode d’action retenu6 est de faire se côtoyer au quotidien toute la chaîne allant de la recherche fondamentale au transfert industriel, des chercheurs aux ingénieurs R&D et aux entrepreneurs du privé, lors d’événements à la fois formels et informels.

La plupart des entreprises lancées dans de la recherche en IA pour leurs propres besoins d’innovation n’ont pas les moyens d’investir dans des chercheurs en recherche fondamentale (à la différence des GAFAM et grands groupes français ou européens, dans leurs filières métier). Leur participation à l’un de ces instituts leur permettra de maintenir une veille technologique très pointue pour ce domaine en très rapide évolution qu’est l’IA ; de bénéficier des conseils des chercheurs et de l’ensemble de l’écosystème, dont les moyens de calcul, pour des projets communs avec les chercheurs ; de concrétiser très rapidement, et avec un minimum de travail administratif, les projets les plus prometteurs en POC (Proof of Concept) ; voire de lancer des projets plus ambitieux en collaboration avec des chercheurs, jusqu’à des laboratoires communs ou le lancement de startups communes.

L’interaction directe entre recherche publique et entre-prises innovantes, startups, PME ou grands groupes « institutionnels » souffre présentement de lourdeurs administratives, même en cas d’accord entre tous les partenaires techniques. Des accords-cadres feront partie des réponses à l’appel d’offres lancé pour la création des instituts 3IA. Ils pourront également s’intégrer dans les facilités administratives offertes par la coordination nationale des instituts 3IA. L’objectif est d’obtenir des circuits de décision et les formalités associées (allant des Memorandum of Understanding aux accords sur la propriété intellectuelle) très réduites (par exemple, à l’échelle de la semaine).

Les entreprises auront la possibilité de s’associer aux dossiers présentés par les établissements, de manière graduelle selon leur degré de maturité et leur surface financière, sans pour autant être des membres permanents (statut de membre « affilié »). Cela leur permettra d’accéder aux séminaires de recherche et à des étudiants bien formés, ainsi que de disposer de ressources de conseil de la part des membres de l’institut 3IA, sur une base volontaire de gré à gré ; le support administratif institut 3IA pourrait comprendre un

6. Cet axe procédera en collaboration étroite avec l’initiative EngageIA du réseau des IRTs, qui propose à ses partenaires privés des premières approches d’évaluation de ce que peut leur apporter l’IA.

Le besoin des entreprises de pouvoir