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T ABLEAU 2 : P RINCIPALES ETIOLOGIES DU RCIU (G OLD 2010) 

IV- RCIU : modèles animau

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Parmi les premiers modèles animaux utilisé pour le RCIU, on trouve celui décrit chez le rat par Wigglesworth en 1964 qui a réalisé une ligature unilatérale de l’artère utérine (Wigglesworth 1964) ; en 1969, l’équipe de Younoszai a proposé l’inhalation de fumée de cigarette toujours chez le rat par (Younoszai, Peloso et al. 1969) ; enfin un modèle d’insuffisance placentaire a été développé chez le singe Rhésus en 1971 (Hill, Myers et al. 1971). Depuis, plus de 3000 publications utilisant différents modèles animaux ont été réali- sées. Les principales espèces étudiées sont par ordre de fréquence : le rat, la souris, le mouton puis le porc.

2) Modèles Nutritionnels

Depuis plus de 30 ans, des manipulations des régimes alimentaires ont été réalisées durant la gestation pour induire un retard de croissance (McMillen and Robinson 2005). Ce type de manipulation peut mimer ce qui se passe dans les pays en voie de développement. Différentes stratégies ont été utilisées : restriction nutritionnelle globale, restriction calorique, restriction protidique isocalorique, régime hypercalorique enrichi en graisses (high-fat), régime pauvre en fer. Ces modèles sont basés sur l’observation que l’apport de nutriments pendant la gros- sesse est le facteur environnemental déterminant pour l’avenir de la grossesse. L’exemple le plus décrit chez l’Homme est celui de la Grande famine survenue aux Pays Bas en 1944, grâce auquel David Barker a pu établir le lien entre RCIU et syndrome métabolique (Barker, Eriksson et al. 2002).

a) Restriction nutritionnelle globale

Au 10ème jour de gestation, les rates gestantes sont nourries ad libitum pour les con- trôles ou avec 50% de la quantité ingérée par les témoins pour les rates mises en restriction (Desai, Gayle et al. 2005). Les conséquences à long terme de ce modèle de RCIU sont l’induction d’une obésité à l’âge adulte, d’un diabète et d’une hypertension (Novak, Desai et al. 2006).

b) Restriction calorique

Plusieurs études ont exploré les effets d’une restriction calorique sévère (70%), modé- ré (50%) et légère (30%) dans différentes espèces. L’intervention la plus fréquente est une réduction de l’apport calorique de 50%. Chez les rongeurs, une restriction calorique de E15 à E21 ou de E7 à E21 durant la gestation n’affecte pas la durée de la gestation, la taille de la portée ou le taux de mortalité mais diminue significativement le poids de naissance des ani- maux (Vuguin 2007). A l’inverse, la restriction calorique entre E7 et E14 n’entraine pas de

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modification du poids (Garofano, Czernichow et al. 1998). Une restriction calorique « pro- gramme » à l’âge adulte hypertension, altération de la vasodilatation endothéliale, diminution de la masse des cellules β pancréatiques, du nombre d’îlots pancréatique et du contenu en insuline et une diminution de la réponse à l’insuline (Vuguin 2007, McMillen, 2005 #167).

c) Restriction protidique

Resnick est le premier à avoir décrit ce modèle et a étudié ses conséquences sur le poids et sur le développement cérébral (Resnick and Morgane 1983). Les rats issus de mères nourries avec un régime hypoprotidique à 6% de caséine ont un retard de croissance pondé- ral global et cérébral alors que les ratons issus de mères nourries avec un régime hypoproti- dique à 8% sont eutrophes et le poids de leur cerveau est comparable à celui des témoins. Les effets métaboliques de ce modèle de retard de croissance ont été initialement décrits par Snoeck et al. chez des rats qui ont été nourris avec un régime hypoprotidique (8% versus 20%) mais isocalorique (Snoeck, Remacle et al. 1990). La restriction protidique diminue la fécondité ainsi que le développement précoce de l’embryon et sa différenciation chez la sou- ris (Munoz and Bongiorni-Malave 1979) et altère le transfert placentaire d’acides aminés chez le cochon d’Inde (Young and Widdowson 1975). A mi-gestation, la glycémie, l’insuline, la prolactine et le taux de progestérone sont significativement plus bas chez les rates en régime hypoprotidique (Fernandez-Twinn, Ozanne et al. 2003).

Les ratons vont ultérieurement développer une hypertension, un développement pancréa- tique anormal avec une diminution de la prolifération des cellules β-pancréatiques principa- lement au niveau de la tête et une diminution de la vascularisation des ilôts de Langherans, entraînant une réponse altérée à l’insuline au test de charge en sucre et une résistance hépa- tique à l’insuline (McMillen and Robinson 2005).

Une des particularités de ce modèle de retard de croissance est que la composition du régime en elle-même est importante sur le « programming » de la descendance. Les deux ré- gimes les plus couramment utilisés sont le régime « Southampton » et le régime « Hope Farm». Le régime Southampton programme une hypertension (Langley and Jackson 1994) alors que le régime « Hope Farm » programme une résistance à l’insuline (Ozanne, Smith et al. 1996). La différence entre les deux régimes se situe au niveau de la balance des acides-aminés spécifiques, des graisses et des hydrates de carbone. Le régime « Southamp- ton » contient de l’huile de soja, de la méthionine et des hydrates de carbone (McMillen and Robinson 2005). Le régime « Hope Farm » contient de l’huile de maïs et trois fois plus d’acides gras ω3 polysaturés de type acide α linoléique que le régime Southampton.

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d) Déficit en fer

L’association entre anémie pendant la grossesse et petit poids de naissance a mené à étudier la relation entre le statut ferrique maternel et le développement dans la descendance de pathologies à l’âge adulte (Scholl and Hediger 1994). Les animaux sont nourris avec un régime pauvre en fer (7,5mg/kg d’aliment) ou un régime contrôle (50mg/kg d’aliment) 4 semaines avant l’accouplement et pendant différents stades de gestation. Le déficit en fer n’a pas d’effet sur le poids maternel ou la taille de la portée mais le poids de naissance diminue avec la sévérité du déficit (Gambling, Andersen et al. 2004).

e) « Over-feeding » chez des brebis gestantes

L’ « over-feeding » de brebis gestantes pour faciliter une croissance maternelle rapide durant la gestation est associé avec un risque de prématurité et de déficit de croissance pla- centaire et fœtale. Le modèle expérimental consiste à donner à des brebis adolescentes ges- tantes deux fois plus de calories que nécessaire. Ceci résulte à terme en une insuffisance pla- centaire avec hypoglycémie, hypoinsulinémie et diminution de la croissance fœtale (Redmer, Luther et al. 2009).

3) Modèles vasculaires chirurgicaux et médicamenteux

Des interventions chirurgicales ont été mises au point pour générer des modèles de restric- tion de croissance affectant le placenta et le fœtus.

a) Ligature bilatérale de l’artère utérine

Ce modèle a été utilisé avec succès chez le rat depuis une trentaine d’années (Ogata, Bussey et al. 1986). Il s’agit d’une ligature bilatérale de l’artère utérine, les animaux con- trôles étant issus de femelles ayant subi une anesthésie avec une laparotomie. Les fœtus ayant survécu ont un RCIU, sont hypoxiques, hypoglycémiques et ont une diminution signi- ficative de la concentration d’acides aminés type leucine, isoleucine et valine et de l’insulinémie (Ogata, Bussey et al. 1986). Ces animaux développent une résistance à l’insuline et un déficit précoce de sécrétion des cellules β-pancréatiques (Vuguin, Raab et al. 2004).

b) Ligature unilatérale de l’artère utérine

Ce modèle a été utilisé chez le rat et le cobaye. Chez le cobaye, le poids des fœtus dimi- nue de 40% mais le poids du cerveau est épargné et le ratio pondéral cerveau/foie est aug- menté (Ernst, Salafia et al. 1993). Les conséquences métaboliques de ce modèle ont été peu

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ou pas étudiées. Chez le rat, ce modèle provoque un retard de croissance avec des troubles de la myélinisation (Olivier, Baud et al. 2005).

c) Embolisation ombilico-placentaire

Ce modèle est principalement décrit chez le mouton avec des durées d’embolisation très variables à partir du 109ème jour de gestation, la durée normale de gestation étant de 140 jours. L’embolisation est produite par l’injection quotidienne de microbilles de 15 à 30 µm de diamètre. La conséquence à court terme pour le fœtus sur le plan métabolique est une hy- poxie, une augmentation des taux de cortisol et de norépinéphrine et un retard de croissance. C’est le principal modèle utilisé pour décrire les conséquences du RCIU sur le poumon que ce soit pour le surfactant ou pour le devenir à court ou à long terme de la croissance . A long terme, sur le plan métabolique, la principale conséquence est une hypotension artérielle qui dure jusqu’à l’âge de huit semaines chez les animaux RCIU qu’ils soient nés à terme ou prématurés (Cock, Albuquerque et al. 2001).

d) Embolisation de l’artère ombilicale

Ce modèle de restriction de croissance a été utilisé chez le mouton. Ce modèle induit une mise en travail prématuré, une hypoxie/hypercapnie et une hypercortisolémie chez les fœtus (Supramaniam, Jenkin et al. 2006).

e) Caronculectomie

La caronculectomie consiste en l’ablation de caroncules qui déterminent au final la

taille du placenta. Ce modèle chirurgical est réalisé avant toute gestation chez la brebis, créant un placenta de petite taille plus qu’une altération de la capacité de transfert ou du mi- lieu hormonal (Orgeig, Crittenden et al. 2005).

f) Restriction de croissance par administration d’un inhibiteur de la NO synthase : le L-NAME

L’inhibition de la NO synthase provoque une diminution de la production du mo- noxyde d’azote, puissant agent vasodilatateur. Durant la gestation, l’administration d’un in- hibiteur de la NO synthase provoque une diminution de la perfusion fœtale et placentaire (Neerhof, Synowiec et al. 2011). L’administration de L-NAME provoque également une augmentation du taux maternel circulant d’endothéline, vasoconstricteur puissant (Neerhof, Synowiec et al. 2011). Cependant, l’effet du L-NAME sur la croissance fœtale est réversible à l’arrêt du traitement (Neerhof, Synowiec et al. 2011). De même, la perfusion de L-NAME

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à des rates gestantes ne provoque aucune conséquence métabolique à long terme sur la des- cendance (Butruille, Mayeur et al. 2013).

4) Autres modèles

a) Hypoxie gestationnelle

Les rates gestantes sont placées en hypoxie avec une concentration en oxygène com- prise entre 9,5 et 14%. On observe une diminution de la taille de la portée et un RCIU chez le fœtus. Une réponse spécifique d’organe a pu être observée (Huang, Vo et al. 2004). La réponse dépend également de la durée de l’hypoxie. Cependant, des gènes reliés à l’homéostasie calcique et aux protéines du cytosquelette sont constamment up-régulés alors que les gènes reliés aux protéines G, à la croissance, au transport ionique sont toujours down-régulés (Huang, Vo et al. 2004).

b) Stress maternel

L’exposition des femelles gestantes à un stress physique comme une diminution de leur espace plusieurs fois par jour (Lesage, Del-Favero et al. 2004), une hyperthermie (Thorn, Brown et al.) ou l’exposition à un environnement acoustique bruyant à la fin de la première semaine de gestation chez la souris (Haque, Izumi et al. 2004) induit un RCIU. A long terme, le stress physique induit une intolérance glucidique (Lesage, Del-Favero et al. 2004). Les conséquences à long terme du RCIU induit par hyperthermie maternelle n’ont pas été étudiées à ce jour.

c) Restriction de croissance par injection de glucocorticoïdes

Chez l’animal, l’effet sur le poids de naissance augmente avec le nombre d’injections de glucocorticoïdes ou si les glucocorticoïdes sont donnés en fin de gestation (Nyirenda, Lindsay et al. 1998, Pratt, Magness et al. 1999). L’injection de glucocorticoïdes programme dans la descendance une intolérance au glucose (Nyirenda, Lindsay et al. 1998) mais pas d’hypertension artérielle à l’âge adulte (McDonald, Franko et al. 2003).

Chapitre 4 : RCIU, maturation et développement pulmonaire

Dans les espèces avec une gestation relativement longue, comme c’est le cas chez l’Homme, le développement de l’architecture pulmonaire survient durant la vie fœtale et post- natale précoce et peut être influencée par de nombreux facteurs physiques, métaboliques en- docriniens et inflammatoires in utero. Tout stimulus ou agression survenant durant la vie fœ-

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tale ou post-natale précoce peut altérer de façon permanente la structure ou la physiologie du système respiratoire avec des conséquences possibles à long terme. L’hypothèse d’une ori- gine fœtale du développement de la Santé et des Maladies (DOHaD) est la suivante : un envi- ronnement intra-utérin inadapté qui a comme conséquence un RCIU prédispose les individus au développement d’une broncho-pneumopathie chronique obstructive à l’âge adulte (Barker, Chest 1999). En outre, de nombreuses études épidémiologiques ont montré au cours de la dernière décennie, l’association entre un RCIU et une augmentation de la fréquence de la DBP. Une méta-analyse incluant 154 323 enfants mais seulement 516 RCIU a montré une augmentation du risque de complications respiratoires, toute complications confondues (re- cours à une intubation ou présence de signes de détresse respiratoire ou encore radiologiques) en période néonatale en cas de RCIU (Damodaram, Story et al. 2011).

I- Conséquences à court terme : surfactant et mala-

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