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Par rapport aux choix de société

Dans le document FACULTE DE MEDECINE DE TOURS (Page 97-101)

C.2 Propositions des médecins généralistes pour une amélioration de la prise en charge de la

C.2.4 Par rapport aux choix de société

Enfin, pour finir, l’amélioration de la prise en charge de la fin de vie à domicile, dépendra selon les médecins généralistes des choix de la société actuelle.

La vision de l’état d’esprit de la société actuelle par les médecins généralistes n’est pas très positive. Ils décrivent une société consommatrice, individualiste et superficielle.

Q8 maintenant les gens ils claquent des doigts, ils veulent tout, tout de suite.

O20 moi j'ai l'impression qu'on vit dans une société égoïste, consumériste, et... on est plus basés sur l'avoir que l'être[…]sur la possession, sur le pouvoir, sur des choses comme ça, qui nous éloigne un peu de la vérité.

Les médecins espèrent donc retrouver de l’humanité dans cette société.

O17 qu'est ce qui nous élève ? C'est l'humain, c'est le collectif aussi. Quand un projet est collectif, il est plus fort.[…]l'esprit de moral, l'esprit d'éthique, l'esprit d'humanité... être humain jusqu'au bout quoi, ça me paraît avoir du sens.[…]Voilà l'humanité et la collectivité, je crois que c'est des choses qui dépassent largement notre petit intérêt, notre petite chose mesquine, corporatiste ou quoi que ce soit je crois que, voilà, moi, j'attend de la société qu'elle nous montre la voie.[…] Il faut rester humain, il faut rester humain pour les gens et puis pour soi même. […] l'humain d'abord, il faut mettre de l'humain partout.

De plus, les médecins généralistes attendent de la société une étude approfondie sur l’éthique de la fin de vie.

O16 C'est la société qui nous fait réfléchir à ça, effectivement c'est vrai hein. C'est quoi une société qui, comment une société désire accompagner ses membres quoi hein?

Quelques médecins généralistes se disent en parfait accord avec la loi Léonetti, et même en total désaccord avec le principe d’euthanasie.

N21 moi je suis Léonetti, ce qu'il dit, me va très bien.

O21 on a pas parlé d'euthanasie, mais moi je suis pas du tout près à faire mourir quelqu'un, je, je pourrais pas, tu vois je, c'est quelque chose préparer une aiguille pour abréger la vie de quelqu'un, ça je ne saurais pas faire.

Ils insistent sur l’intérêt des soins palliatifs et la nécessité de les défendre.

N15 une cousine suisse qui avait signé un protocole de fin de vie, par rapport au suicide assisté[…] elle a fini sa vie en soins palliatifs dans un hôpital suisse et elle a jamais redemandé, comme quoi les soins palliatifs c'est à développer

Ils déplorent que cette loi soit mal connue du grand public et revendiquent l’utilité de

promouvoir les soins palliatifs.

N16 Droit à dormir avant de mourir. Je pense que ce droit à dormir avant de de mourir, il faut que le malade puisse, d'abord il faut qu'il sache ce que c'est, il faut que les médecins le sachent, tout le monde parle d'euthanasie, ils savent même pas que ça existe.

Ils estiment même que le débat sur l’euthanasie reflète en réalité une méconnaissance réelle des possibilités qu’offre cette loi.

N24 revendiquer l'euthanasie qui à mon avis est un faux problème ou une fausse solution. A12 tout le monde sait que pour calmer la douleur, y a pas de problèmes. J'ai jamais été confronté à des douleurs impossibles à calmer. Non, non non, non c'est, on peut le dire aux gens, on arrive à faire des fins de vie sereines, voilà.

De plus, ce débat évoque des situations peu courantes.

D18 Là où ça devient compliqué c'est quand tu décides qu'il faut finir les choses, ça peut arriver, ça peut arriver, très sincèrement, c'est très très rare quand même, il faut être honnête, contrairement à ce qu'on nous bassine à longueur de journée hein, c'est assez rare.

Ils sont même pour certains choqués d’observer qu’une forte proportion du corps médical ne connaisse pas cette loi, ou se positionne positivement en faveur de la légalisation de l’euthanasie.

N20 (lit son document) « Enquête auprès des médecins sur la fin de vie. 605 médecins... (tourne les pages) la loi Léonetti, le questionnement, […]la loi Léonetti, très bien connue 11%, assez bien connue 36%, assez mal, très mal » Bon déjà ça c'est impressionnant.

N22 déjà que les médecins prônent pour une grande part l'euthanasie ou le suicide assisté.

Certains attendent donc une réflexion éthique profonde et réfléchie.

O16 en tant que médecin, on a une vision du monde mais on a pas toute la vision du monde, moi je trouve qu'on a besoin d'anthropologue, de sociologues, d'avocats, de juristes, des ethiciens, pour structurer les choses, pour nous aider à réfléchir.

Par rapport à ces choix de société, il incombe donc et surtout aux pouvoirs publics de prendre certaines décisions. En effet, il est de la responsabilité des pouvoirs publics de donner un cadre clair à la pratique des soins palliatifs en légiférant, et de donner l’exemple sur les valeurs que la société doit défendre.

O16 on a besoin d'un cadre légal, d'un cadre moral, d'un cadre éthique, de toutes ces choses là, je pense que c'est très important.

O17 j'attend de la société qu'elle nous montre la voie, qu'elle nous montre l'exemple, que les tutelles nous montrent l'exemple, que les politiques nous montrent l'exemple, c'est difficile, on a besoin de ça.

Certains médecins généralistes attendent donc une réactivité des pouvoirs publics dans le sens du développement des soins palliatifs et la promotion de la loi Léonetti.

N22 déjà que les médecins prônent pour une grande part l'euthanasie ou le suicide assisté, je trouve que ça montre à quel point il est urgent de légiférer mais dans ce sens là.

Ils réclament cependant une amélioration de la loi en dénonçant certaines lacunes qui la concerne, en particulier la prise en charge par les médecins généralistes souvent isolés qui n’est pas prise en compte, la loi s’adressant principalement aux médecins hospitaliers.

N21 il se place pas assez dans le cas de figure du médecin de campagne.

Cela pose donc problème en ce qui concerne les décisions collégiales à prendre.

N24 les décisions collégiales ça m'effraie, le temps que tout le monde soit d'accord, le malade il a le temps de mourir et l'agonie peut être très difficile, donc... je pense qu'il faut, je pense qu'il faut que le, il faut donner au médecin généraliste la possibilité d'évaluer en fonction de […]de ses compétences et son désir d'accompagner en fin de vie, je pense qu'il faut lui donner les moyens d'assumer totalement et pas forcément avec l'HAD parce que tout le monde ne pourra pas être en HAD.

De même, ils rappellent la nécessité de légiférer sur les thérapeutiques dans le cadre des protocoles de sédation pour qu’elles soient accessibles aux médecins généralistes en maintenant un contrôle dessus.

N22 il faut qu'il y ait la possibilité de recourir à la même sédation. Mais en l'encadrant, en formant, ça va mettre du temps.

Ils proposent à l’avenir de prévoir une consultation par les médecins généralistes pour discuter

des directives anticipées.

N16 c'est à partir de ce moment là, que ce sera facile, de, d'organiser une consultation sur la directive anticipée même avant qu'il soit malade, quand le malade avance dans la vie...

D’autre part les médecins généralistes réclament plus de moyens financiers pour la prise en charge de la fin de vie à domicile.

A17 il pourrait donner plus d'aides pour la fin de vie. […]Tout ça c'est pris sur le service de soins à domicile qui se retrouve en déficit, c'est pas normal bon Dieu.

Enfin ils rappellent la nécessité de promouvoir une égalité de soins sur le territoire.

O16 Je pense qu'il faut que la société fasse, puisse... donner une certaine forme d'égalité devant l'accès aux soins quoi hein.

4 DISCUSSION

4.1 FORCES ET FAIBLESSES MÉTHODOLOGIQUES

La méthode qualitative a été retenue pour cette étude. Elle a permis, au travers des expériences vécues de médecins généralistes du Cher, confrontés à la prise en charge de la fin de vie à domicile, d’explorer leurs rôles et leurs attentes.

La force de cette méthode qualitative est de permettre d’étudier ces phénomènes complexes et non quantifiables. La principale limite de cette méthode résulte du fait que les résultats ne peuvent être extrapolés à la population générale puisque l’échantillon ne se veut pas représentatif mais néanmoins diversifié.

Cette étude présente en outre des biais qu’il faut mentionner.

Il existe des biais internes liés aux caractéristiques de la chercheuse et du participant. La chercheuse et le participant étant tous deux médecins généralistes, une connivence a pu s’instaurer durant l’entretien, pouvant influencer les échanges, et cela d’autant plus si le participant était une connaissance personnelle de la chercheuse. Ainsi, certaines notions n’ont peut être pas été verbalisées au cours de l’entretien du fait de propos implicites. D’autres variables comme les différences en matière d’âge, d’expérience professionnelle ont pu entraîner d’éventuelles erreurs d’interprétation lors des échanges entre les deux parties.

Par ailleurs, il existe des biais externes liés à l’environnement dans lesquels les entretiens ont eu lieu. Certains entretiens ont été momentanément interrompus par une tierce personne. Malgré la faible durée d’interruption, le dialogue entre la chercheuse et le participant s’est vu modifié.

De plus, on peut citer le biais d’investigation lié à la chercheuse, qui par sa manière de mener son entretien a pu influencer les réponses du participant. En particulier, l’expérience accumulée au fur et à mesure des entretiens a pu l’amener à orienter le discours.

On peut pour finir évoquer un biais de recrutement. Sur la base du volontariat, on peut supposer que les médecins ayant accepté de participer se sentaient plus concernés par la question de l’étude.

Toutefois, afin de rendre cette étude qualitative pertinente et faire ressortir le maximum de nouvelles idées, la grille d’entretien s’est voulue la plus exploratoire possible en veillant à limiter au maximum l’utilisation de questions fermées [38]. Ce procédé permet d’obtenir une quantité très importante de données parmi lesquelles une sélection est nécessaire. Cette grille d’entretien a été alors réajustée au fur et à mesure des entretiens en fonction du recueil des données et de leur analyse. C’est pourquoi les derniers entretiens ont été menés d’une façon beaucoup moins directive du fait de l’appropriation plus forte du sujet par la chercheuse. En effet, une fois les premières questions émises, seules quelques questions de relance ont suffi à faire ressortir l’intégralité du sujet.

La validité interne de l’étude a été recherchée par la reformulation du discours des participants au cours des entretiens. Le recrutement de participants les plus diversifiés possible et l’atteinte de la saturation des données a permis d’obtenir une validation externe.

Enfin, l’échantillonnage multi-sites a permis de comparer des résultats obtenus dans des contextes différents.

4.2 ANALYSE DES RÉSULTATS

Évoquer la prise en charge de la fin de vie à domicile a fait naître chez les médecins généralistes interrogés une réflexion passionnante et approfondie. La multiplicité des thèmes qui émergent de ces entretiens met en évidence la complexité de la problématique. Permettre à un malade de finir sa vie à domicile est un projet magnifique mais ambitieux. Il s’agit d’une sorte de défi que doivent relever ensemble et à tous niveaux, la société, le système de soins, les médecins généralistes, les patients et leurs familles. Certains médecins généralistes exprimaient d’ailleurs « c'est l'utopie, mais il faut être un petit peu utopiste » ou d’autres « c'est une sorte d'idéal qu'il faudrait atteindre ». En effet, la mise en œuvre de ce projet dans les meilleures conditions n’est pas sans difficultés.

Alors qu’il est question de mieux comprendre le rôle des médecins généralistes dans la prise en charge de la fin de vie à domicile, on découvre des interrogations de la part de ces médecins au sujet de la réalité de leur rôle et de ses enjeux.

A RÔLE DES MÉDECINS GÉNÉRALISTES

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