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Le rapport aux études

L'obtention du bac lui permet d'aller plus loin, Jaz explique son choix : « Après le bac c'était un peu compliqué ils m'ont dit "voilà, essaye, tente, voilà si tu n'arrives pas, tu pourras t'orienter à autre chose" donc voilà je ne regrette, en tout cas je ne regrette pas, je ne regrette pas en tout cas, mis à part juste la classe. » Toutefois, Jaz sait que son orientation est osée par rapport à son baccalauréat, bien qu'il ne cite aucun baccalauréat comme étant à risque pour des études universitaires. « Même un enfant de bac pro peut, est capable, même moi je me sentais capable, mais sauf qu'il manquait du travail, c'est tout. » Il travaille moins de deux heures par semaine ses cours. Il parle du « rythme difficile », de ses limites, « je n'étais pas adapté » ou « je me sentais limite », il se définit comme « mi bosseur ». Jaz relève d'ailleurs les réflexions de certains étudiants : « Qu'est-ce que t'es venu faire ici ? C’est complètement décalé de ce que toi tu fais toi. » A contrario des enseignants qui « disaient non ce n'est pas évident mais il faut quand même s'y donner ». Interrogé en octobre, Jaz a des chances incertaines selon lui, la réussite étant avant tout affaire de motivation : « Quand on est motivé on sait bien que, voilà, on a la volonté, la motivation, donc forcément qu'on peut réussir quelque chose. » Sauf que lors de l'entretien en juin, Jaz souligne ses difficultés d'accès à Internet, sans ordinateur, l'impossibilité d'imprimer les cours, « un système compliqué à comprendre » : « Au début de l'année c'était un peu compliqué pour moi de comprendre, c'est quoi ce système, qu'est-ce qui se passe, tout se passe dans l'internet voilà, tout internet euh... Voilà je me disais ouf, moi je ne suis même pas noyé mais là je suis au fond de l'océan limite... Certains cours c'est sur internet, quand on n'a qu'un téléphone donc c'est un peu compliqué. Des fois on a envie d'imprimer quelque chose... ». Il exprime aussi la pression ressentie dans le travail et les examens : « On arrive face à l'examen, on est un peu stressé parce que là, je ne le cache pas, j'ai rien fait, j'ai rien fait du tout, j'ai rendu même deux trois examens vides. Et je ne suis pas fier de moi. » Il a eu au 1er semestre entre 4 et 5 de moyenne.

Ayant grandi et vécu en Afrique, il se perçoit en décalage de « la génération 2.0 [...] génération 5G » qu'il côtoie, et parle du côté négatif de la mentalité française dans la classe, de la mentalité lycéenne : « Je suis comme un étranger dans la classe [...] je

viens d'un pays où c'est dur ». Jaz se représentait l'université « côté études, les gens qui s'aident [...] STAPS c'est un travail collectif », il s’est senti décalé mais a trouvé deux ou trois personnes pour s’entraider et « réviser ».

Dès le début, il est agréablement surpris par cette formation mais précise que « certains cours j'ai du mal à comprendre » : « [Comme] bioméca, je ne comprenais rien, informatique, science [...] STAPS ne demande pas vraiment de niveau physique, il n'est pas vraiment très exigeant mais tout ce qui est théorique est très essentiel par rapport à, à être qualifié pour, dans le futur proche ou dans le futur. Parce que STAPS demande beaucoup, beaucoup d'énergie morale et beaucoup d'énergie ». Il referait ces études même si, cette année, il est moyennement satisfait de son orientation : « Avant tout j'aime le sport, car je voudrais bien faire cela mon métier. Cependant malgré une mauvaise ambiance dans le groupe cela ne m'empêche pas de me focaliser sur mes études en STAPS. »

Au moment de l'entretien il ne souhaite pas se réinscrire en licence : « Voilà je ne regrette pas, si c'était à refaire mais, le problème est juste qu'ici, le problème, ce qui me bloque en fait c'est euh, de mettre des bouchées doubles. » Jaz hésite à redoubler : « Avant j'étais optimiste mais aujourd'hui je suis devenu réaliste [...] c'est-à-dire que STAPS n'a pas marché, je ne vais pas encore m'enfoncer, si je remonte et je sais que voilà, redoubler, c'est dire dès le début il faut attaquer ». En début d’année, Jaz a pour objectif de valider le DEUST pour « être préparateur ou entraîner les enfants dans un club », projet élaboré depuis la terminale qui reste le même en juin : « Préparateur physique et que je me donne à fond, je me donne l'année prochaine, mais sûr et certain si je reviens ici c'est vraiment pour travailler. » En fait, Jaz paraît perdu, il exprime son souhait et son devoir de réussite, mais aussi ses doutes tout au long de son parcours scolaire en France (doutes sur l’obtention du bac et sur la suite de cette année) : « Simplement, j'ai envie de réussir [...] c'est sûr et certain je continue les études » ou « j'ai le devoir de réussir... dans plein de choses [...] Ça pourrait être par exemple quand j'ai passé le bac, je ne croyais pas que je réussirai dans la peinture mais aujourd'hui je sais peindre, voilà je suis qualifié, donc voilà je suis qualifié pour, et si je passe en service, si je passe, tant mieux. Mais je sais que... si par exemple en DEUST, par exemple, j'avais des idées pour aller en DEUST [...] c'est quand même sûr et certain je continue les études... » Il hésite entre STAPS, un BTS dans les services et un emploi, il souhaite changer, après ses expériences professionnelles comme « peintre décorateur » durant les vacances d'été ces deux dernières années, puis à « l'usine de poulets » comme intérimaire, il pense s’inscrire à Manpower « dans une usine comme monteur, montage de moteur...».

Quant à son projet personnel, Jaz se définit ainsi : « Peintre-décorateur, aussi je suis musicien aussi, j'écris tout, la variété, le rap, pour certaines personnes, designer, je designe aussi pour certains, les habits, les t-shirts… ». Il n'a pas envie de faire un travail qui se répète : « Mais après je, je serai obligé tôt ou tard. Je serai obligé, j'en suis conscient. Je serai obligé mais pour l'instant je me dis je suis encore jeune, il faut vraiment que je touche à tout, faut vraiment que j'essaie là où ça, ça marche ». Jaz se situe dans un parcours où il s’agit d’essayer d’aller le plus loin, le plus haut en suivant les différentes étapes de la sélection scolaire (collège, LP, université), où l'importance de la réussite, l’intégration et le manque de choix reviennent dans son discours, « pas le choix il faut le faire »... Mais il garde toujours l'espoir ou l'illusion : « Si le STAPS marche, si par exemple je reste et que je me donne à fond, avec cette expérience que j'ai acquis, j'acquiers, je vais acquérir ici, donc je, je vais ramener là-bas [dans son pays africain d’origine]... »

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