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Rôle dans la relation de soin

Dans le document Empathie et odontologie (Page 73-76)

7.9 Quel est l’intérêt de l’empathie ?

7.9.4 Rôle dans la relation de soin

L’intérêt scientifique actuel pour l’empathie incite les cliniciens à s’interroger sur la place qu’ils lui accordent dans leur pratique quotidienne. Ceux-ci, surtout lorsqu’ils ne sont pas psychologues, auraient tendance à reléguer l’empathie au second plan, lui préférant des techniques qui répondent à la rigueur grandissante de la validité scientifique des moyens d’investigation et de soins.

Pourtant l'empathie a tout autant sa place dans la relation de soin car il ne faut pas oublier que cette dernière est avant tout une rencontre entre deux individus [127].

Carl Rogers – nous l’avons évoqué – a fait de l’empathie la clé de la relation thérapeutique. C’est d’après lui parce que l’empathie, ou plus précisément l’écoute et la compréhension empathique, permet à l’autre de se sentir accepté, accueilli tel qu’il est, qu’il peut lui-même s’accepter, devenir une personne et ainsi évoluer et guérir. Par personne, Rogers entend – dit très synthétiquement – l’être dans son authenticité et son unité.

En effet, en comprenant de l’« intérieur » ce que vit l’autre, ce qu’il éprouve, comment il « voit » et comment il « sent », l’écoute empathique lui permet ainsi sans jugement, sans interprétation, de reconnaître et de s’accepter lui-même tel qu’il est réellement.

Or, c’est précisément parce qu’un individu peut s’accepter comme il est, qu’il peut évoluer et guérir, car il est alors moins fragile et prend moins le risque de se dissoudre s’il se remet en cause, s’il montre ses failles, s’il accepte de changer, bref s’il cesse de vouloir être quelqu’un d’autre que lui- même [38].

Dans la relation praticien-patient au cours de la consultation en odontologie, l’empathie doit permettre au praticien :

- D’aboutir à une compréhension de ce que le patient exprime (plan cognitif). En d’autres termes, il faut reconnaître le sens de ce que le patient éprouve.

- De saisir l’expression des sentiments et des émotions du patient en se mettant à sa place sans laisser apparaître ses sentiments et ses émotions propres (plan affectif). Il faut être proche émotionnellement de ce que son patient ressent [56].

7.9.4.1 L’empathie, ce qu’elle est pour le praticien

- Essentielle à la prise en compte des besoins du patient : de part une écoute et une compréhension empathique ainsi qu’une meilleure communication patient-praticien. - Aidant à la mise en place des meilleures stratégies thérapeutiques : en expliquant

notamment au patient l’intérêt pour lui et sa santé d’établir un lien durable avec un cabinet dentaire.

- Elargissant la capacité diagnostique du praticien : Une émotion que l’on comprend, c’est une émotion que l’on peut gérer, et avec l’expérience, utiliser. Le travail du soignant sera plus efficace : il créera une relation de confiance et aura un diagnostic plus précis [118]. - Améliorant considérablement le confort de sa pratique : Gage de meilleurs résultats

thérapeutiques : à données équivalentes, pourquoi certains médecins et thérapeutes, en dehors bien entendu des compétences mises en œuvre, obtiennent-ils de meilleurs résultats quant à la motivation de leur patient ?

- Elle est le gage d’un plus grand respect du patient envers le professionnel de santé : Le sentiment d’être respecté en tant que médecin-dentiste et d’exercer une activité prestigieuse sont des conditions importantes pour le bien-être émotionnel dans cette profession (Gerbert et coll. 1994; Shugars et coll. 1991) [66].

Compte tenu de l’ensemble de ces considérations sur l’empathie, on peut en déduire qu’elle est un outil majeur à notre disposition dans la conduite de l’acte médical [3].

7.9.4.2 L’empathie, ce qu’elle est pour le patient : elle lui permet [128]

- d’être reconnu et considérer en tant que personne : être dans l’empathie, c’est de facto ne pas ignorer ou ne pas nier l’autre ; c’est le reconnaître dans son existence, dans sa vie même [129]

- de se sentir compris : notamment par l’utilisation d’un vocabulaire adapté

- de lui donner la possibilité de s’ouvrir, de confier ses soucis, ses sentiments, d’exprimer des émotions plus profondes : par exemple « c'est vrai que derrière cette colère il y a en fait toutes mes peurs » [130], L’attitude d’écoute empathique permet au patient de comprendre l’intérêt que le praticien lui porte, et le désir sincère qu’il a de l’aider [131].

- d’augmenter le degré d’estime de soi de la personne

- De renforcer la relation de confiance soignant-soigné : si le praticien reconnait le patient comme une personne dans son entièreté et non comme un ensemble de dent à soigner, cela signifie qu’il est suffisamment ouvert au patient et qu’il sait lui-même oublier ses intérêts, qu’il le prend vraiment en compte, et qu’il ne cherche pas seulement à faire son devoir, à se débarrasser du problème. Il est alors digne de confiance, et il met le patient à ce moment précis en position de se confier à lui. C’est pourquoi l’empathie crée la confiance. La confiance est caractérisée par des attentes positives, des espoirs, c’est le fruit de

l’expérience, du partage des valeurs universelles et de bonnes compétences dans le domaine de la communication. La confiance dépend donc de nos émotions ainsi que de nos

perceptions (Rogers 2002, Yamalik 2005b). Dans le milieu médical, la confiance est un signe de respect de l’autonomie du patient (Yamalik 2005b). La confiance entre le médecin- dentiste et le patient est en quelque sorte l’alpha et l’oméga d’une bonne relation patient- praticien. Elle augmente la qualité des soins, la compliance, la satisfaction du patient, entraîne une motivation efficace du patient et permet d’éviter nombre de conflits. Pour le médecin-dentiste également, une relation de confiance est avantageuse, car elle lui procure une bonne réputation, les patients lui restent fidèles et il éprouve de plus hautes

satisfactions dans l’exercice de sa profession (Yamalik 2005a, Yamalik 2005b). Les patients ont confiance en leur médecin-dentiste s’ils sont d’avis qu’il est compétent en raison de sa formation, qu’il s’engage pour leur bien-être, pour leur santé buccodentaire, de même que pour leurs droits et leur dignité (Yamalik 2005b).

- D’augmenter l’adhésion thérapeutique du patient : si le patient se sent considérer, écouter, il sera d’avantage motivé et aura envie d’avantage adhérer au projet de soin. En définitive, la façon dont le patient perçoit le médecin-dentiste influence le consentement à un traitement (Corah et coll. 1985; Corah et coll. 1988; Gale et coll. 1984). Même si le médecin-dentiste n’est généralement dépendant d’aucun autre spécialiste, le patient ne doit pas être oublié. Il préfère participer activement au traitement, collecter des informations, exprimer ses

réserves et ses préférences relatives au traitement (Mataki 2000) [66].

- D’augmenter la satisfaction du patient et du soignant : Comme le patient ne peut pas bien évaluer les aspects techniques du traitement, la perception émotionnelle joue à cet égard un

rôle déterminant. Il réagit de manière émotionnelle à l’intervention médicale, car ses connaissances spécifiques en la matière sont restreintes. Comme il se situe en outre dans une relation de dépendance par rapport à son médecin-dentiste, il est livré à son expertise, à ses compétences techniques et à son évaluation médicale. Compte tenu de ces éléments, sa réponse émotionnelle se traduit par de l’incertitude et de l’anxiété par rapport au traitement (Mataki 2000). Il n’est donc pas étonnant que le degré de satisfaction du patient soit

fortement corrélé avec la perception de la qualité de la relation médecin-dentiste/patient (Mataki 2000, Speedling & Rose 1985) [66].

En fait, la satisfaction est ce que le patient perçoit de ce que nous donnons, en fonction de ce qu’il attend : pour un service donné, les patients n’ont pas la même perception !

Même si le plan de traitement conseillé est pertinent, s’il n’est pas accompagné d’une explication montrant son adéquation avec la demande initiale, le patient ne sera pas totalement convaincu, et donc pas totalement satisfait; d’où la nécessité de bien connaître son patient et de communiquer avec lui [93].

Dans le document Empathie et odontologie (Page 73-76)